- Hanoucca
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Hanoucca Un enfant devant une hanoukkia brillant de tous ses feux à Zot Hanoucca.Nom officiel Hag HaHanoukka (חג החנוכה « Fête de l'Édification ») Autre nom Fête des Lumières Observé par le judaïsme rabbinique Type rabbinique Signification Fête joyeuse commémorant la victoire militaire et spirituelle des Juifs de Judée sur les armées séleucides et l'hellénisation. Commence le 25 kislev Finit le 2 ou 3 tevet Date 2010 coucher de soleil, 1er décembre - coucher de soleil, 9 décembre Observances Allumer la hanoukkia, jouer avec des draydels (sevivon), manger des latkes de pomme de terre) ou des soufganiyot. Hanoucca (hébreu חג החנוכה Hag HaHanoukka, « Fête de l'Édification ») est une fête juive d'institution rabbinique, commémorant la réinauguration de l'autel des offrandes dans le second Temple de Jérusalem, lors de son retour au culte judaïque, trois ans après son interdiction par Antiochus IV des Séleucides.
Elle marque une importante victoire militaire des Maccabées et symbolise la résistance spirituelle du judaïsme à l'assimilation grecque.
Selon la tradition rabbinique, au cours de cette consécration se produit le miracle de la fiole d'huile, permettant aux prêtres du Temple de faire brûler pendant huit jours une quantité d'huile à peine suffisante pour une journée.
Elle est célébrée à partir du 25 kislev (qui correspond, selon les années, aux mois de novembre ou décembre dans le calendrier grégorien) et dure huit jours, jusqu'au 2 ou 3 tevet (en fonction de la longueur de kislev, mois de 29 ou 30 jours).
Les pratiques et coutumes qui s'y rattachent sont liées au miracle de la fiole d'huile, en particulier l'allumage du chandelier de Hanoucca pendant les huit jours de la fête et la consommation de friandises à base d'huile d'olive (latkes, soufganiyot, etc.). On y joue aussi avec des toupies à quatre faces.
Sommaire
Hanoucca dans les sources juives
Livres de la période biblique
La réinauguration du Temple, célébrée à Hanoucca, se place dans le contexte de la révolte des Maccabées. Un récit en a été compilé dans le premier Livre des Maccabées par un auteur proche des évènements (et selon certains historiens modernes, orienté idéologiquement)[1]. Ce livre n'a pas été inclus dans la Bible hébraïque mais il l'est dans la Septante.
Selon ce récit, à la suite de nombreuses persécutions menées par le pouvoir séleucide contre l'étude de la Torah[2] et les Juifs qui souhaitent observer leur Loi, un prêtre juif, Mattathias l'Hasmonéen, fils de Yohanan, prend la tête d'une insurrection. Il désigne son fils Juda Maccabée comme successeur.
Après trois ans de lutte,
« le vingt-cinquième jour du [...] mois de kislev de la cent quarante-huitième année, [...] ils firent la dédicace de l'autel pendant huit jours, et ils offrirent des holocaustes avec joie, et un sacrifice d'action de grâce et de louange. [...] Alors Juda, avec ses frères et toute l'assemblée d'Israël, ordonna que le jour de la dédicace de l'autel serait célébré en son temps, d'année en année, pendant huit jours, à partir du vingt-cinquième jour du mois de kislev, avec joie et allégresse."[3]. »
Cette victoire ne constitue qu'un épisode de la révolte. Elle se poursuit vingt ans avant que les Juifs ne retrouvent une indépendance de fait[1].
Livres de la période tannaïtique
On apprend de la Mishna que le rite de Hanoucca est connu et que son importance est reconnue à l'époque de sa rédaction :
- du fait de Hanoucca, des émissaires sont dépêchés de Jérusalem aux communautés de la Diaspora pour leur annoncer la néoménie de Kislev[4] ;
- on lit une section biblique particulière au cours de la fête[5];
- on ne peut y décréter de jeûne public[6] ;
- si un chameau chargé de lin passe dans le domaine public et que son chargement provoque un incendie dans une boutique au contact d'une lampe placée à l'extérieur, le propriétaire du magasin est responsable des dommages causés sauf, dit Rabbi Yehouda, s'il s'agit d'une lampe de Hanoucca[7].
Cependant, à la différence des autres fêtes, y compris celle de Pourim, également instituée par les rabbins, aucun traité mishnaïque ne se consacre à Hanoucca en particulier.
Certains expliquent l'omission par des motifs historico-politiques : méfiance des Pharisiens vis-à-vis des autorités romaines, particulièrement après la révolte de Bar Kokhba[8] ou répugnance de l'auteur de la Mishna, Juda Hanassi, à glorifier les haut-faits d'une dynastie qui avait usurpé à ses yeux la place de la maison de David[9].
D'autres suggèrent que les règles de la fête étaient parfaitement connues à l'époque de la Mishna[10] ou étaient déjà détaillées dans d'autres livres[11].
Hanoucca et les faits qui s'y rattachent sont en effet abondamment évoqués dans d'autres œuvres contemporaines de l'élaboration ou de la composition de la Mishna. Les plus connues de celles-ci sont :- la Meguilat Taanit qui consigne les jours fastes commémorant les victoires maccabéennes,
- la Meguilat Antiochos qui sera pour de nombreux Juifs la source de référence sur les faits[12],
- le second Livre des Macchabées, compilation d'une histoire en cinq volumes de la révolte des Maccabées attribuée au Juif hellénisé Jason de Cyrène[13].
Ces sources sont, en général, moins fiables historiquement car elles font une part assez large au merveilleux et au martyrologe : on y exalte les Juifs mis à mort pour avoir refusé de transgresser, dont les plus célèbres sont Hanna et ses sept fils[14]. D'autre part, les Maccabées ne sont plus de simples agents de la volonté divine qui parviennent à la victoire par leur génie militaire : Dieu lui-même leur assure la victoire, selon leurs mérites.
Par ailleurs, Dieu produit des miracles qui éclairent et réchauffent le cœur des hommes :- selon II Maccabées, un feu miraculeux se serait élevé au temps de Néhémie, lorsqu'il aurait réalisé son offrande à la date précise du 25 kislev ; Juda aurait choisi cette date en mémoire de ce miracle, célébrant la fête huit jours du fait de de la fête de Souccot, qui n'avait pu se tenir selon le rite biblique lorsque le Temple était profané[15] (selon I Maccabées, la purification devait avoir lieu en ce jour car c'est un 25 kislev que les gens d'Antiochos avaient profané le Temple[16]).
- selon la Meguilat Taanit, les Maccabées parvenus dans le Temple n'y auraient trouvé qu'une petite flasque d'huile consacrée, à peine suffisante pour alimenter la Menora pendant un jour ; cette flasque aurait miraculeusement duré huit jours, le temps d'en fabriquer une autre[17]. C'est sur ce miracle de la fiole d'huile que fait fond le judaïsme rabbinique, plus que sur la victoire militaire.
Parallèlement, Flavius Josèphe, qui dit descendre de Jonathan Maccabée[18], fait découvrir l'histoire de la « Fête des Lumières » au monde romain[19], en suivant largement le premier Livre des Maccabées.
Une référence à la fête dans les Évangiles suggère sa popularité un siècle plus tôt, au temps de Jésus de Nazareth[20]. Elle y est appelée « Fête de la Dédicace » bien que les termes de « renouvellement » ou d’« encénie » soient plus appropriés[21].
Hanoucca dans le Talmud
Le Talmud comprend de nombreux récits (aggadot) sur la fête de Hanoucca, ses protagonistes et leurs descendants.
Certaines traditions du Talmud ressemblent à celles de II Macchabées, d'autres s'en distinguent, par le rejet de l'hellénisation et de l'hellénisme (contrairement aux Juifs hellénisés et aux descendants des Hasmonéens eux-mêmes).
Le Talmud attribue ainsi l'un des revers militaires majeurs des Hasmonéens à un vieux Juif hellénisé qui les aurait persuadés d'apporter des porcs en offrande et d'étudier la sagesse grecque[22].Les divers aspects pratiques de Hanoucca sont couverts dans le second chapitre du traité Chabbat[23], à l'occasion d'une discussion sur les luminaires autres que celui de chabbat.
La seule prescription de Hanoucca est, selon une baraïta (enseignement oral non retenu par la Mishna) d'allumer un luminaire chez soi, du fait du miracle de la fiole d'huile.
Cependant, il existe diverses façons de procéder :
- certains allument une lumière chaque soir par foyer (ner ish oubeïto)
- il est plus beau d'allumer une lumière chaque soir par membre du foyer
- le summum de la beauté (mehadrin min hamehadrin) est de varier le nombre de lumières chaque soir, mais là aussi, il y a deux opinions :
- l’école de Shammaï, se fondant sur les offrandes de Souccot où le nombre de bêtes diminue journellement, propose de commencer avec huit lumières pour terminer avec une,
- l’école de Hillel est d’avis d'allumer par ordre croissant, car il faut s'élever en sainteté. Cette opinion a été adoptée par la Loi juive[24].
Après une longue discussion sur le statut de ces lumières, les Sages concluent qu'elles sont sacrées et ne peuvent servir à des usages profanes, comme l'éclairage de la maison. Pour cette raison, il faut veiller à ce qu'elles ne soient pas confondues avec les luminaires du foyer (ce qui a peu de chances de se produire de nos jours, avec l'éclairage électrique, lorsqu'il est fonctionnel).
Une autre règle concernant l'allumage est de placer le chandelier de Hanoucca devant la porte d'entrée ou, si l'on n'habite pas au rez-de-chaussée, à une fenêtre donnant sur la rue, pour autant que cela ne comporte pas de risque. Selon Rachi, cela suscite l'interrogation des passants et en leur en fournissant la raison, on contribue à « publier le miracle » (pirsoumei nissa) de la fiole d'huile[25].
Le martyrologe de Hanoucca est l'occasion pour le Talmud de se pencher sur les options de yehareg vèal yaavor (mourir plutôt qu'enfreindre) et de pikkouah nefesh (enfreindre plutôt que mourir) ainsi que sur leurs limitations[26].
Hanoucca dans la littérature ultérieure
Hanoucca continue à faire, au cours des siècles, l'objet de nombreuses histoires et homélies. Diverses justifications sont trouvées à la fête et à son sens, parmi lesquelles :
- la fin de la lutte le 25 kislev ; cette interprétation décompose le mot חנוכה Hanoucca en חנו כ"ה Hanou et kaf"hè, « ils [les Maccabées] se sont reposés le 25 » (kaf"hè a une valeur de 25 dans le système alphanumérique hébreu)[27]
- la complétion des travaux du Tabernacle dans le désert au temps de Moïse[28].
Hanoucca devient, sous la plume des exégètes l'abréviation de Het nerot Vehalakha Kebeit Hillel (« huit lumières et la Loi suit l'opinion de l'école de Hillel ») ; de même, Makabi (Maccabée) serait le notarikon de Mi Kamokha Baelim YHWH (« qui est comme Toi parmi les puissances, YHWH[29] ! »)[30].
Dans la mouvance de cette littérature sur Hanoucca se situe le quatrième livre des Macchabées, un sermon où les Maccabées servent d'illustration au thème de la conciliation entre pouvoir et raison.
Une autre tradition post-talmudique fait de Judith, héroïne éponyme du Livre du même nom, la fille de Yohanan le Grand-Prêtre, et par conséquent la sœur de Mattathias[31].
Rites et coutumes de Hanoucca
Statut de Hanoucca
Hanoucca est célébrée pendant huit jours, en terre d'Israël comme en Diaspora[32]. Comme Pourim, il s'agit d'une fête de reconnaissance au cours de laquelle les marques publiques de deuil, dont le jeûne et les éloges funèbres, sont interdites[33]. Cependant, ces jours n'ont, contrairement au chabbat et aux fêtes bibliques, aucun caractère saint et ne sont pas chômés[34] (bien qu’ils fussent considérés comme une période de congé scolaire dans certaines communautés d’Europe orientale[35]). Comme ils ne relèvent d'aucun rituel ordonné dans la Bible, leur liturgie a varié dans le temps et ne comporte pas d'office de prière supplémentaire (moussaf)[36].
Les femmes ont l'habitude de restreindre leurs activités le temps que brûlent les lumières de Hanoucca, du fait de la participation supposée de Judith à la lutte contre les Hellènes et des exactions menées par ceux-ci contre la gent féminine[31].
L'allumage des bougies de Hanoucca
Article détaillé : Hanoukkia.L'allumage de lumières au soir des huit jours de la fête est son seul rite caractéristique. Il commémore le miracle de la fiole d'huile et contribue à sa « publication »[37].
Il se fait dans un chandelier spécial appelé Hanikke Leuchter ou Hanikke Menora en yiddish et hanoukkia en hébreu.
La forme de ce chandelier évoque souvent celle de la menora du Temple mais elle comporte huit branches, outre une branche particulière, appelée shamash ou shammes (« serviteur »). C'est avec le shamash qu'on allume les autres lumières du chandelier de Hanoucca[38].Bien que toute huile et toute mèche conviennent, il est préférable d'utiliser de l'huile d'olive et des mèches de laine, en souvenir du Temple de Jérusalem[39].
L'allumage des bougies suit l'opinion de l'école de Hillel[40]. Il faut allumer de préférence à proximité du domaine public, à une hauteur entre trois et vingt palmes, sur une rangée[41]. Ces lumières doivent brûler au moins une demi-heure après la tombée de la nuit[42].
L'allumage donne lieu à des bénédictions particulières[43]. Il faut le réaliser à titre privé ; l'allumage à la synagogue (ou, récemment, dans des lieux publics) ne se fait en effet que pour la publication du miracle[44].
Liturgie de Hanoucca
La première addition à la liturgie ordinaire en vue de signaler Hanoucca a été la récitation à la synagogue du Psaume 30, composé pour l'« inauguration de la Maison » (Hanoukat Habayit)[46].
Y ont été ajoutés le Hallel et une bénédiction spécifique intitulée Al Hanissim.
La coutume de lire la Meguilat Antiochos a disparu après le Moyen Âge (sauf dans le rite judéo-yéménite)[12]. En revanche, une section de la Torah particulière est lue publiquement chaque jour.
Al HaNissim
La bénédiction Al Hanissim s'intercale dans la bénédiction de hoda'a (« reconnaissance [de la majesté divine] ») de la ’Amida (la prière principale des offices du matin, de l'après-midi et du soir) et lors du Birkat Hamazon (bénédiction après les repas).
Elle tire son nom de ses premiers mots, al hanissim (« [Nous Te remercions] pour les miracles ») et est suivie d'un bref récit de la victoire de Mattathias et de ses fils[47]. Le miracle de la fiole d'huile n'y est pas mentionné.
Hallel
Article détaillé : Hallel.Afin de « rendre grâce et louange à Ton grand Nom » dans l'allégresse, on remplace la lecture austère du Tahanoun (« supplication ») par celle du Hallel (« louange ») en raison du miracle qui s'est tenu (mishoum nissa) en terre d'Israël[48]. Il est déclamé dans son entièreté (du Psaume 113 au Psaume 118) les huit jours de la fête de Hanoucca, après la Amida du matin.
De même, certains passages bibliques et liturgiques évoquant le deuil ou la sévérité ne sont pas lus[49].
Lecture de la Torah
Une lecture publique est faite à Hanoucca du passage des Nessi'im (« princes »), relatif à l'inauguration du Tabernacle dans le désert (Nombres 7:1-8:4 ; certains lisent à partir de Nombres 6:22).
On lit à chaque jour de la fête les versets détaillant les présents apportés par chaque prince des douze tribus d'Israël au jour correspondant. Au huitième jour, on lit le passage Nombres 7:54-8:4, dont les premiers mots, Zot hanoukkat hamizbea'h, sont devenus le nom du dernier jour de la fête, Zot Hanoucca ; les quatre derniers versets font référence à l'allumage des branches de la menora[50].
Par ailleurs, comme Hanoucca dure huit jours, elle inclut au moins un chabbat (celui de Miketz), sinon deux.
La section Miketz (Genèse 41:1-44:17) raconte l'ascension de Joseph en Égypte.
La Haftara est tirée de Zacharie 2:14–4:7[51]. Avec l'inauguration du Second Temple, le prophète décrit une vision de la menora à sept branches, dont l'ange lui explique la signification : « Ni par la puissance ni par la force, mais bien par mon esprit! dit YHWH Tzevaot » (Zach. 4:2-4:6).
Ce message illustre la vision qu'avaient les Pharisiens de la victoire des Maccabées.Lorsque Hanoucca comprend un deuxième chabbat (comme c'était le cas en 2009), la Haftara est lue dans I Rois 7:40–50, et se rapporte à l'inauguration du Premier Temple[51], évènement biblique modèle de la fête[52].
Lors de la néoménie du mois de Tevet (selon les années au cinquième ou au sixième jour de la fête), on lit d'abord la section propre à la néoménie, puis celle de Hanoucca[51].
Si la néoménie a lieu un chabbat, on lit d'abord la section de lecture hebdomadaire puis celle propre à la néoménie et enfin celle de Hanoucca. La Haftara est lue dans Zacharie 2:14-4:7[53].
Autres coutumes de Hanoucca
Hanoucca, fête familiale au cours de laquelle tous se réunissent autour des feux du candélabre, a donné lieu à de nombreux us et coutumes qui, bien que n'ayant souvent aucun fondement « religieux », sont entrés dans la tradition. Ils semblent avoir favorisé l'observance de la fête parmi les Juifs laïcs et non-pratiquants[54],[55].
Le jeu des toupies (sevivon ou draydel)
Article détaillé : Sevivon.L'une des coutumes populaires de Hanoucca est de jouer avec des toupies à quatre faces, appelées dreydel ou verfel en yiddish et sevivon en hébreu.
Chaque face de ces toupies est frappée d'une lettre hébraïque selon l'ordre נגהש (noun-guimel-hei-chin), qui signifieraient selon une étymologie populaire Nes gadol haya cham (« un grand miracle a eu lieu là-bas » ; « là-bas » désigne la terre d'Israël).
C'est en vertu de cette étymologie que dans les sevivonim destinés à la commercialisation en Israël, le chin est remplacé par un pè, devenant Nes gadol haya po (« un grand miracle a eu lieu ici »).
La coutume de jouer du dreydel est à ce point ancrée dans la tradition de Hanoucca que plusieurs rabbins ont été tentés de lui trouver une justification antique : à l'époque des persécutions séleucides, les Juifs auraient étudié en se cachant dans des grottes et des enfants auraient fait le guet en jouant à la toupie pour ne pas attirer l'attention.
En réalité, le dreydel est la variante yiddish d'un jeu médiéval en provenance d'Angleterre, le teetotum, où les enfants misent des noisettes ou du hanikke guelt dans une cagnotte ; les quatre lettres désignent en fait les quatre types d'action possibles : Nichts (« [tu ne prends] rien »), Gantz (« [tu rafles le] tout »), Halb (« [tu prends la] moitié ») et Shtel ein (« déposes-en un »)[56].
L'argent de Hanoucca (Hanikke guelt)
La coutume de distribuer des pièces de monnaie aux enfants à Hanoucca (yiddish : Hanikke guelt ; hébreu : dmei Hanoucca) est relativement récente, remontant aux communautés juives de Pologne du XVIIe siècle. Deux siècles plus tard, l'usage s'est si bien répandu que l'on considère la période de Hanoucca comme particulièrement propice à la tsedaka[57] (dons aux nécessiteux).
De nos jours, la coutume du Hanikke guelt n'est pratiquée telle quelle que par les Hassidim ; la distribution de pièces en chocolat semble l'avoir largement remplacée[58].
Chants de Hanoucca
Plusieurs chants sont traditionnellement associés à Hanoucca, en particulier :
- Hanerot hallalou, qui résume les discussions talmudiques sur l'origine des lumières de Hanoucca ainsi que leur caractère sacré,
- Maoz tsour, un poème liturgique en acrostiche de six stances, composé vers le XIIIe siècle et rappelant les nombreuses fois où Dieu a sauvé Son peuple, à Hanoucca mais aussi à Pourim, à Pessa'h, lors de l'exil en Babylonie, etc.
- Dreidel, Dreidel, Dreidel, Oy Hanikke et d'autres chansons en yiddish ; chantées par les enfants (et les adultes) sur un rythme entraînant, elles évoquent divers jeux et festivités. Certaines ont été adaptées en anglais et en hébreu.
Mets de Hanoucca
Il est de coutume, afin de publier le miracle de la fiole, de consommer à Hanoucca des plats frits dans de l'huile d'olive.
Les plus connus dans le monde ashkénaze sont les beignets de pomme de terre (yiddish : latkes, hébreu : levivot « beignets ») et les soufganiyot, pâtisseries à l'huile fourrées le plus souvent à la confiture. Il s'agit en vérité de plats d'origine polonaise , les plackis et pączkis respectivement.
Les séfarades mangent des bimuelos, autre type de beignet frit à l'huile.
Certains consomment des laitages, en souvenir de Judith qui, afin d'occire le général Holopherne, lui aurait donné des plats de fromage pour qu'il ait soif, boive du vin, s'enivre et s'endorme[31].
Réinterprétations modernes
Hanoucca dans le sionisme
Alors que les rabbins avaient relégué les consonances militaro-nationalistes de Hanoucca au profit de son aspect miraculeux, le sionisme fait de la révolte des Maccabées l’un des moments-clés de son historiographie d'autant qu'elle connaît, contrairement à la révolte de Bar Kokhba et au siège de Massada, un dénouement heureux. Érigés en modèle du « Juif nouveau » et expurgés de leurs tendances hellénisantes[59], les Maccabées deviennent les éponymes des « Olympiades juives », de différents clubs sportifs, d'une mutuelle, d'une marque de bière etc. ainsi que les héros de nombreux chants et œuvres dont beaucoup deviennent populaires. Dieu en est généralement absent : Yemei haHanoukka, version hébraïque d’Oy Hanikke, ne fait plus son éloge mais celle des Maccabées ; Aaron Zeev est encore plus explicite : « pour nous, il n'y a pas eu de miracle, nous n'avons pas trouvé de fiole ». De même, le Shib'hei Maoz de Naomi Shemer, composé en 1969, ne s’adresse pas à Dieu mais aux places-fortes de Tsahal, prises d’assaut lors de la Guerre d'usure avec l’Égypte[60].
Hanoucca devient donc l’une des plus grandes fêtes nationales d’Israël, marquée par de nombreuses réjouissances et une période de congé scolaire[61]. Les sionistes religieux entérinent eux aussi cet aspect nationaliste de Hanoucca (tout en lui conservant une signification religieuse), adaptant en outre son rite (lecture du Hallel et d’Al Hanissim dans les offices de prière) à la célébration de l’indépendance d'Israël[62].
Hanoucca et les fêtes de fin d'année
Hanoucca ayant lieu « en hiver[20] », à une période proche de Noël, a souvent été considérée comme l'« Avent d'Israël[63] ».
Après avoir symbolisé la lutte contre l'oppression religieuse et l'oblitération de la judéité[58],[64], elle est paradoxalement devenue pour beaucoup, en particulier aux États-Unis, la version juive des fêtes de fin d'année. Outre la distribution de cadeaux aux enfants[64] (qui a également lieu en France[65],[66]), nombre de familles assimilées ou mixtes célèbrent un Noël judaïsé, avec un buisson de Hanoucca, « sapin de Noël "juif" » enguirlandé, surmonté d'une étoile de David et entouré de figures représentant les Maccabées[67]. D'autres célèbrent conjointement Noël et Hanoucca, voire des fêtes composites comme Chrismukkah.
Pour beaucoup, la concordance de ces deux fêtes jusqu'à leur date n'est en rien fortuite : Jésus pourrait être né le 25 kislev[68], à la date que les Juifs avaient choisie pour marquer la victoire de Dieu sur les divinités païennes en ridiculisant leur célébration du solstice d'hiver[69]. D’autres pensent que Hanoucca serait la version juive du solstice et que Noël en serait le pendant chrétien[36],[69],[70]. Cette idée se retrouve en partie dans la tradition juive, selon laquelle Adam aurait marqué le « retour du soleil » par une fête de huit jours[71] et pour nombre de Juifs des contrées nordiques (qui n'associent nullement Hanoucca à Noël), la fête symbolise, de nos jours encore, la victoire de la lumière sur l'obscurité hivernale[70],[72].
D'autres suggèrent une célébration certes pré-maccabéenne mais plus proche de l'esprit de la fête : miracle à l'époque de Néhémie[73] ou fête de la récolte de l'huile d'olive célébrée dès l'époque du premier Temple[74]. Certains courants progressistes profitent d'ailleurs de Hanoucca pour diffuser un message écologiste, le miracle de la fiole symbolisant pour eux la conservation de l'énergie[75],[76].
Allumages publics
En réaction à ces diverses réinterprétations (qui ne sont pas sans provoquer des controverses[64],[77],[78]), Menachem Mendel Schneerson, dirigeant du mouvement hassidique Habad, reprend à son compte l’initiative d'Abraham Beame, premier maire ouvertement juif de la ville de New York. Dix ans après que celui-ci décida, en 1977, d’allumer une hanoukkia géante dans le centre de la ville[58], le rabbin fait de l’allumage public l’une de ses mitzvah campaigns au nom du pirsoum nissa et afin de promouvoir la « survivance spirituelle de la flamme juive » par la pratique des prescriptions bibliques[79].
Ces allumages se sont depuis répandus au Canada[80], en Europe, en Israël et ailleurs[81].
Notes et références
- Maurice Sartre, « Des Maccabées très sulpiciens ! » sur Booksmag. Consulté le 1/12/2010
- haftara, une section des Prophètes, dont le thème rappelle la section que les Juifs n'avaient plus le droit de lire – E. G. Hirsch, A. Büchler, J. Jacobs & I. G. Dobsevage, HAFṬARAH, in Jewish Encyclopedia, éd. Funk & Wagnalls, New York 1901-1906 C'est, d'après une opinion communément admise, de cette époque que date la coutume de lire la
- I Maccabées 4:52-59
- Roch Hachana 1:3 M.
- Meguila 3:5-6 M.
- M. Taanit 2:10 ; cf. Moëd Katan 3:8
- M. Baba Kama 6:8
- (he) Yessod HaMishna Va'arikhata, p. 25-28 Cf. Reuven Margolies,
- (he) Kesher n°95 (octobre - novembre 2009), publié par le Rabbinical Center of Europe Shou"t HaMaharitz ; une explication similaire est attribuée au Hatam Sofer mais ce fait est contesté —
- Nissim Gaon, introduction au Maftea'h ; Hatam Sofer sur T.B. Guittin 78a — loc. cit. Cf.
- Hida, Devarim A'hadim — loc. cit.
- Louis Ginzberg, ANTIOCHUS, SCROLL OF, in Jewish Encyclopedia
- Cf. II Maccabées 2:24
- II Macc. 7:1-41 ; cf. T.B. Guittin 57b ; Lamentations Rabba 1
- II Macc. 1:20-36 & 10:6-8 ; cf. Mishna Soukka 5:2-4 où l'allumage de torches joue un rôle prééminent dans les célébrations de Souccot à l'époque du Temple & T.B. Chabbat 22a-b où diverses comparaisons sont effectuées entre les fêtes de Hanoucca et Souccot
- I. Macc. 1:59-60
- (he) V. Noam, Meguilat Taanit : édition critique, Yad Ben-Zvi, 2003, p. 267-272 D’après T.B. Chabbat 21b. Cependant, les manuscrits d’Oxford et de Parme ne le mentionnent pas –
- F. Josèphe, Vita, §1
- Antiquités judaïques, livre xii. chap. 6-7, §7 ibid.,
- Jean 10:22
- article « Encénie » dans le dictionnaire de Trévoux, 1771 cf.
- Baba Kamma 82b T.B. Sotah 49b,
- T.B. Chabbat 21b-23a
- Cf. Choulhan Aroukh 671
- Rachi sur T.B. Chabbat 21b, note sur mibahouts
- T.B. Yoma 83a-85b ; voir aussi T.B. Ketoubot 5a
- Jacob ben Asher, Tour Orah Hayyim 670
- Pessikta Rabbati 6 ; Exode Rabba 52 ; Nombres Rabba 13:4
- Exode 15:11
- Maharsha, Hiddoushei Aggadot sur Chabbat 21b
- Kitsour Choulhan Aroukh 139:3 ; cf. Choulhan Aroukh Orah Hayim 670:1-2 et gloses du Rem"a ad loc.
- Mishne Torah, Hilkhot Hanoukka 3:7
- K.C.A. 139:2
- C.A. O.H. 670:1
- Yehezqel Landau, Noda biyhouda, deuxième édition, Orah Hayim, n° 139
- Jewish Encyclopedia 1901-1906
- K.C.A. 139:7
- E. Gugenheim, Le Judaïsme dans la vie quotidienne, p. 132-133
- K.C.A. 139:4
- ibid. 139:6
- ibid. 139:7-9
- ibid. 139:10
- ibid. 139:12
- ibid. 139:12-15
- D'après E. Gugenheim, Le judaïsme au quotidien, p.136
- Massekhet Soferim 8:2 ; cf. Pessikta Rabbati 2
- C.A. O.H. 682:1
- Siddour Tefilat kol pè (rite sfard), édition Eshkol, Jérusalem, p. 300
- K.C.A. 139:22
- Mishna Meguila 3:6 & T.B. Meguila 31a ; K.C.A. 139:23
- ibid. 139:24
- Cf. II Maccabées 2:12
- ibid. 139:25
- Why do secular and non-observant Jews love chanukah?
- Hanukkah is family time !
- The Origin of the dreidel, in My Jewish Learning, consulté le 7/12/2009 D. Golinkin,
- K.C.A. 139:1
- The World's Largest Menorah ». Consulté le 21/12/2009 Dana Lernar, «
- Hanukkah:the Maccabees in the Zionist imagination » sur The Free Library. Consulté le 10 décembre 2010 E. Kavon, «
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- Menorah around the globe. Consulté le 28 novembre 2010
Source
- Cet article comprend du texte provenant de la Jewish Encyclopedia de 1901–1906, article « ḤANUKKAH » par Kaufmann Kohler, une publication tombée dans le domaine public.
Annexes
Liens externes
- Guide de Hanouccah
- Conférence de Mireille Hadas-Lebel
- un extrait des bénédictions et du maoz tsour selon la tradition juive nord africaine par le Rav Zécharia Zermati- site Torat Emet
Bibliographie
- Ernest Gugenheim, Le Judaïsme dans la vie quotidienne (tome i.), pp. 131-136, coll. Présences du judaïsme, éd. Albin Michel, Paris, 1992, ISBN 2-226-05868-0.
- Kitsour Choulhan Aroukh, abrégé du Choulhane 'Aroukh, accompagné de Yossef Da'at, vol. II, pp. 690-702, éd. Colbo, Paris, 1996/2009
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