Famille Javal

Famille Javal

La famille Javal est une famille originaire d'Alsace, qui a connu une ascension sociale certaine dès le début du XIXe siècle[1].

Le nom de la famille était originairement Jacob et a été changé en Javal par décret du 20 juillet 1808.

Sommaire

Histoire

En 1784, à la veille de la Révolution française, on recensait en Alsace 3 910 familles juives totalisant 19 624 individus[2]. Beaucoup d'entre elles s'y étaient implantées après les Traités de Westphalie de 1648 qui avaient rattaché l'Alsace au Royaume de France. Néanmoins, une législation discriminatoire, remontant au XIIIe siècle, leur interdisait de posséder des biens immobiliers, d'exercer des professions artisanales ou agricoles et de s'installer dans les villes ou villages de leur choix[3]. Ces discriminations furent abolies par le décret de l'Assemblée constituante du 28 septembre 1791 qui fit des Juifs des citoyens français à part entière. Les Javal furent l'une des premières familles juives d'Alsace à profiter de ces possibilités nouvelles.

La famille était originaire de Seppois-le-Bas. En 1808, les deux frères Javal, tous deux prénommés Jacques et dits respectivement « l'aîné » et « le jeune », obtinrent l'autorisation de créer une entreprise de tissage à Mulhouse en faisant valoir qu'ils donneraient ainsi du travail à leurs coreligionnaires et les aideraient à s'émanciper[4]. Dix ans plus tard, en 1819, les deux frères s'installaient à Paris et créaient à Saint-Denis une vaste manufacture d'impression et d'apprêtage d'indiennes qui emploierait jusqu'à 500 ouvriers. Ils créèrent une filature de coton dans les Vosges, puis une entreprise d'importation et d'exportation de balles de coton, intégrant ainsi complètement la filière de production des toiles imprimées. A côté de cette activité industrielle, ils développèrent une activité de maison de banque avec des bureaux à Lyon, Mulhouse, en Suisse et en Angleterre[5].

Jacques Javal l'Aîné se retira des affaires dès 1822 à la suite du décès de son épouse, Claire Schöngrun, bénéficiant des revenus d'une somme de 400 000 francs qu'il avait laissée en commandite dans les affaires que son frère continua à gérer et à développer avec le fils de Jacques l'Aîné, Joseph, qui épousa la fille de Jacques le Jeune et de Lucie Blumenthal, Julie. Dans la société créée le 1er novembre 1822 au moment du retrait de Jacques l'Aîné, la banque, de manière significative, est mentionnée avant les affaires industrielles. Progressivement, Jacques le Jeune et son neveu Joseph prirent des participations dans diverses affaires. Avec le banquier Jacques Laffitte, ils participèrent ainsi à la fondation des Messageries Royales. La société Javal se lança aussi dans des opérations immobilières à Paris, d'abord dans le quartier du boulevard Poissonnière, puis dans la Plaine Montsouris où ils créèrent des carrières de pierre qui servirent à édifier des hôtels particuliers dans le quartier de la Chaussée d'Antin.

En 1826, Jacques Javal le Jeune était entré au Conseil des manufactures et, en 1828, il fut fait chevalier de la Légion d'honneur, au titre de son activité industrielle, sur proposition du comte Chabrol de Volvic, préfet de la Seine. Il se fit construire un hôtel particulier au bas de la rue Taitbout tandis que son gendre et associé, Joseph, s'installait rue Chauchat. Lorsque Jacques le Jeune se retira des affaires en 1835, sa fortune dépassait 3 millions de francs.

Jacques le Jeune commanditait alors son fils Léopold (1804-1872), alors âgé de 31 ans, pour une somme de 900 000 à investir dans de nouvelles affaires. Léopold investit dans des mines en Provence, dans des compagnies de canalisation, créa un bazar à l'enseigne « A la ménagère », préfiguration des grands magasins, un établissement de bains publics sur la Seine au pied de la Samaritaine, un quartier d'habitation pour ouvriers à Montrouge. En dix ans, il multiplia par trois le capital des sociétés familiales, qu'il porta de un à trois millions de francs, et accumula une fortune personnelle de 2 millions. Il prit le contrôle de l'établissement financier qu'il rebaptisa « Léopold Javal et Cie » et en prit la direction. A travers cette banque, il investit dans le développement des chemins de fer, dans les lignes Mulhouse-Thann et Strasbourg-Bâle, en association avec la maison Koechlin.

Toutefois, après 1850, il limita l'activité de la maison de banque à la représentation à Paris des maisons étrangères Merton et Cohen de Londres et Cahen de Bruxelles et ouvrit le capital, où il ne détenait plus que 500 000 francs à sa mort en 1872. Il laissait alors à sa veuve et à ses enfants une fortune de 7,5 millions de francs en valeurs. Le seul établissement de bains de la Samaritaine rapportait 12% nets annuels d'un capital de près d'un million. En même temps qu’il s’éloignait de la banque, Léopold Javal avait mené une carrière politique comme conseiller général en Gironde à partir de 1851, avec le soutien du régime impérial, puis comme représentant du département de l’Yonne au Corps législatif à partir de 1857, où il se présenta d’abord comme républicain contre le candidat bonapartiste, et fut constamment réélu en 1863, cette fois-ci avec le soutien au moins tacite du régime impérial[6], puis en 1869 et 1871. Membre du Consistoire de Paris en 1841, il avait été élu au Consistoire central israélite de France en 1853 et devint vice-président de l’Alliance israélite universelle en 1868[7]. En 1862, il avait été fait officier de la Légion d’honneur. Il habitait, à la fin de sa vie, un hôtel particulier de vingt pièces rue d’Anjou, aux murs décorés de toiles de François Boucher, Claude Joseph Vernet, Canaletto, Andrea del Sarto, Bruegel et Rubens.

« Les Javal, écrit Pierre Birnbaum, ont [...] connu une exceptionnelle réussite économique les intégrant davantage encore dans [le] petit milieu des Juifs de Cour. Depuis le tournant du [XIXe] siècle ils participent à nombre d’aventures économiques, du textile jusqu’aux chemins de fer, et ont noué avec les milieux d’affaires des liens étroits [...] au cœur d’un réseau industriel ouvert sur l’étranger, ils se lancent, dès la Monarchie de Juillet, dans des opérations financières d’envergure, amassant ainsi une fortune considérable qui les place aux premiers rangs de l’élite socio-économique. »[7]

Ernest Javal

Ernest Javal est un haut fonctionnaire français né le 25 septembre 1843 et mort le 1er septembre 1897.

Fils de Léopold Javal, Ernest Javal, après des études d’ingénieur, entra dans la fonction publique : sous-préfet de Boussac et Aubusson (1877), de Lunéville (1880), de Doucie et Guéret (1881), préfet de la Creuse (1881), secrétaire général du Territoire de Belfort (1882), inspecteur des services administratifs au ministère de l’intérieur (1883), directeur de l’Institut national des sourds-muets (1885).

Il avait épousé Marie Seligmann, fille d’Adolphe Seligmann, président du tribunal de grande instance de Nice, et nièce d'un des associés de la Banque Seligmann et Cie.

Arbre généalogique

Cerf Javal (1751-1819)
x (1) : Hindel Juda Blum
│
├──> Jacques Javal l'Aîné
│    x Claire Schöngrun (morte en 1822)
│    │
│    └──> Joseph Javal ( -1844)
│         x Julie Javal
│
├──> Jacques Javal le Jeune ( -1858)
│    x Lucie Blumenthal
│    │
│    ├──> Julie Javal
│    │    x Joseph Javal ( -1844)
│    │       
│    └──> Léopold Javal (1804-1872), banquier, agronome, député républicain de l'Yonne
│         x (22 juillet 1838) Augusta de Laemel (1817-1893)
│         │
│         ├──> Louis Émile Javal (1839-1907), ophtalmologiste, député de l'Yonne
│         │    x (30 juillet 1867) : Maria-Anna Ellissen (1847-1933)
│         │    │
│         │    ├──> Alice Javal (1869-1943)
│         │    │    x (23 mai 1882) Lazare Weiller (1858-1928), industriel, sénateur du Bas-Rhin
│         │    │    │
│         │    │    ├──> Jean-Pierre Weiller (1890- ?)
│         │    │    │
│         │    │    ├──> Marie-Thérèse Weiller (1890- ?)
│         │    │    │
│         │    │    ├──> Georges-André Weiller (1892- ?)
│         │    │    │
│         │    │    └──> Paul-Louis Weiller (1893-1993), industriel et financier
│         │    │
│         │    ├──> Jeanne Félicie Javal (1871- ?)
│         │    │    x Paul Louis Weiss (1867-1945), ingénieur
│         │    │    │
│         │    │    ├──> Louise Weiss (1893-1983), journaliste et écrivain
│         │    │    │
│         │    │    ├──> Emile Jean Jacques Weiss (1894-1987), inspecteur des finances
│         │    │    │
│         │    │    ├──> André Eugène Paul Weiss (1899-1950), préfet
│         │    │    │
│         │    │    ├──> Francis Weiss
│         │    │    │
│         │    │    └──> Marie Jenny Emilie Weiss (1903-1987), pédiatre et psychanalyste
│         │    │           x Alexandre Roudinesco
│         │    │           │  
│         │    │           └──> Élisabeth Roudinesco (1944-), historienne et psychanalyste
│         │    │
│         │    ├──> Jean Javal (1871-1915), ingénieur, député de l'Yonne
│         │    │    x Lily Lévy (1882-1958), écrivain
│         │    │
│         │    ├──> Louis Adolphe Javal (1873-1944), professeur de médecine
│         │    │    │
│         │    │    ├──> 
│         │    │    │    
│         │    │    ├──> 
│         │    │    │
│         │    │    └──> Léopold Javal
│         │    │
│         │    └──> Mathilde Julie Javal (1876-1944)
│         │         
│         │  
│         ├──> Pauline Javal (1842- ?)
│         │    x Jean Théodore de Salemfelds, officier dans l'armée d'Autriche-Hongrie
│         │ 
│         ├──> Ernest Javal (1843-1897), préfet de la Creuse
│         │    x Marie Seligmann
│         │   
│         ├──> Eugène Javal (1846-1847)
│         │
│         ├──> Alfred Javal (1848-1921), ingénieur et industriel
│         │ 
│         └──> Sophie Javal (1853-1947)
│              x (1878) : Paul Wallerstein (mort en 1903), ingénieur
│          
│
├──> 2 autres fils
│
│
│
x (2) : Keyle Felix

Notes et références

  1. « Les Javal étaient une famille juive d'importants industriels, négociants et banquiers solidement implantés, depuis plusieurs générations [en 1889] à Paris et en Europe » (Jacques Mousseau, Le Siècle de Paul-Louis Weiller. 1893-1993, Paris, Stock, 1998, p. 49). « Les Javal [...] avaient depuis près d'un siècle réussi le saut dans la société industrieuse du XIXe siècle. » (J. Mousseau, Op. cit., p. 85) « Les Javal avaient profité de la politique d'assimilation appliquée par Napoléon III pendant tout le Second Empire. [...] Parmi la minorité qui a évolué vers les sommets de la société française et s'est intégrée à son élite, figurent les Javal. Cette famille a engendré au long du XIXe siècle des banquiers, des industriels, des professeurs de médecine, des hauts fonctionnaires, des députés et des artistes. Elle a su profiter pleinement de la politique d'ouverture prônée et impose par Napoléon III car elle avait jeté de solides bases économiques dès le début du siècle. » (J. Mousseau, Op. cit., pp. 92-93)
  2. F. Raphael et R. Weyl, Regards nouveaux sur les Juifs d'Alsace, Librairie Istra, Éditions des Dernières Nouvelles d'Alsace, 1980, cité par J. Mousseau, Op. cit., p. 84
  3. J. Mousseau, ibidem
  4. J. Mousseau, Op. cit., p. 93
  5. Les détails sur le développement des affaires de la famille Javal sont tirés de : Emmanuel Chadeau, L'Economie du risque, Paris, Éditions Olivier Orban, 1988, pp. 236-266. Cet auteur a étudié spécifiquement la réussite économique de la famille Javal.
  6. Pierre Birnbaum, Les Fous de la République. Histoire politique des Juifs d'Etat de Gambetta à Vichy, Paris, Le Seuil, coll. Points, 1994, pp. 289-290
  7. a et b Pierre Birnbaum, Op. cit., p. 288

Bibliographie

  • Frédéric Viey, « La famille Javal », in : Léo Hamon (dir.), Les Républicains sous le Second Empire, Entretiens d'Auxerre, Paris, Éditions de la Maison des Sciences de l'Homme, 1993, p. 91

Liens externes


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