Ellas McDaniel

Ellas McDaniel

Bo Diddley

Bo Diddley
Bo Diddley Prag 2005 02.jpg
Bo Diddley à Prague en 2005.

Nom Ellas Otha Bates McDaniel
Naissance 30 décembre 1928
Drapeau des États-Unis McComb, Mississippi, États-Unis
Décès 2 juin 2008
Drapeau des États-Unis Archer, Floride
Profession(s) Musicien
Genre(s) Rock 'n' roll
Blues
Funk
Urban
Instrument(s) Guitare
Années actives 1951 - 2008
Site Web tripod.com/~Originator_2/index.html

Ellas Otha Bates McDaniel plus connu sous le nom de Bo Diddley[1], né à McComb (Mississippi) le 30 décembre 1928 et mort le 2 juin 2008 à Archer en Floride, était un bluesman, guitariste, chanteur et compositeur américain. Il est reconnu comme l'inventeur du diddley beat, forme évoluée et transposée sur la guitare du jungle beat, qui caractérise l'éclosion achevée du Rock en 1955 et de tout ce qui s'en suit.

Sommaire

Biographie

Son pseudonyme lui vient du nom donné à un instrument rudimentaire, constitué d'un morceau de fil de fer accroché à un mur sur lequel on faisait glisser un goulot de bouteille selon la technique du bottleneck, et qui remplaçait la guitare chez les apprentis musiciens noirs des débuts du blues. Cet instrument, le diddle ou diddley bow est avec le jug (bouteille servant de basse dans laquelle on soufflait) à la base de l'invention des musiques afro-américaines[2].

Bo Diddley est né dans une famille pauvre du Mississippi alors que sa mère n'avait que 16 ans. Son père mourant peu après sa naissance, il est adopté par une cousine de sa mère qui le lui confie : Gussie McDaniel, seulement âgée de 15 ans mais formant un foyer. Il prendra le nom de McDaniel mais continuera à y accrocher celui de Bates. Des incertitudes existent aussi quant au premier prénom qui lui fut donné, celui de Ellas ou de Otha. Il aura cependant comme nom d'usage : Ellas McDaniel.

La famille McDaniel déménage en 1934 à Chicago dans la banlieue sud réputée comme un quartier difficile. Il y étudie, s'orientant finalement vers la lutherie, y pratique de petits métiers et apprend à se défendre.

Les années 40

Musicalement, Bo débuta comme violoniste et passa à la guitare sous l'influence notable de Louis Jordan ou encore de John Lee Hooker et Muddy Waters, quand se faisaient ressentir les premiers soubresauts de ce qui n'était encore que le Rhythm and Blues et pas encore le rock'n'roll dont Diddley, avec Chuck Berry, Elvis Presley, Bill Haley, Little Richard et Fats Domino, sera l'un des pionniers.

Marié à 18 ans, il arrête en même temps la boxe à la suite d'un cuisant match de défaite. Depuis l'année 1943, Bo Diddley, sous ce surnom, se produisait avec ses groupes dans les coins de rue (où pour un jeune il gagnait de belles sommes d'argent), puis les marchés (où il passe de plus en plus à la guitare) et finalement en club en 1951.

L'origine de son surnom est incertaine elle aussi. Sa mère aurait été fan d'un musicien local portant ce surnom et l'un de ses camarades de boxe témoigne que ce surnom était utilisé par un membre plus ancien dont il pensait qu'il s'était inspiré.

Il fut accompagné à partir de 1950 et jusqu'en 1964 par Jerome Green, son joueur de maracas capable de soutenir leurs astucieux contre temps.

Il raconte qu'en débutant la guitare quand il était adolescent et en participant avec fascination aux musiques rythmées des églises (baptiste, puis pentecôtiste où il y trouve des rythmes encore plus singuliers), il aura tendance à en jouer comme si c'était une batterie marquant les mesures, le tout avec des techniques propres au violon. Il développe dès lors son style rythmique. L'une des guitares qu'il a conçue est d'ailleurs faite pour jouer en même temps en percussion sur les parties ajoutées. Il accordait aussi sa guitares en quinte à la manière des violons. Il sera par la suite l'un des premières guitariste de Rock a utiliser l'accord ouvert.

Les années 50

Carrière

En 1952, il acquière un ampli de guitare d'où il va sortir son premier vrai son saturé allié à une réverbération (réverbe) généreuse. Il bidouillera lui-même l'un des tous premiers effets trémolo/vibrato (vibe, parfois appelé effet texan) avec un réveil et quelques pièces de mécanique et il crée alors son premier son spécifique (Diddley sound) qu'il va toujours plus explorer et élargir.

L'activité musicale étant trop saisonnière pour en vivre, il concède de produire une maquette comportant 2 titres : Uncle Joe et I'm a man (pour la face B). Rapidement repéré, il signe en 1954 un contrat de sortie pour un disque avec la Chess Records et Uncle Joe devient Bo Diddley.

Avec son premier single double face comportant Bo Diddley (A) et I'm a Man (B) sorti en 1955, il invente ou révèle au grand public un rythme qui sera abondamment repris dans le monde du blues et du rock. On le nomme jungle beat ou diddley beat. Le disque atteint la seconde place des charts Rhythm'n Blues aux États-Unis.

Si le diddley beat de la chanson Bo Diddley est considéré comme original et singulier, le riff de I'm a Man est souvent considéré comme inspiré d'une chanson de Muddy Waters, She Moves Me (1951), qui lui donnera une réponse en sympathie avec Mannish Boy en 1955 juste après la sortie du single de Diddley pour lui signifier qu'il est entré dans la cour des grands. En fait, Manish Boy est une reprise quasiment conforme, dans la mélodie et le texte, de I'm a Man. Cependant, à propos de l'originalité de la rythmique, Muddy Waters s'était lui-même inspiré d'un riff déjà en vogue et que seul Bo Diddley permit de vulgariser en le personnalisant fortement sur I'm a Man. On note aussi que dans l'original She Moves Me de Waters, le riff à 3 notes n'est pas marqué et reste très blues et non pas rock, ce qui fait techniquement de Diddley le réel tenant de ce riff. C'est paradoxalement et à cause de sa meilleur maitrise d'alors, la version de Waters qui sera employée dans le monde médiatique, notamment dans les légendaires publicités des jeans Levi's comme celle de 1989.

Elvis Presley, performant depuis moins d'un an seulement, se montre fan de Bo Diddley et ce dernier attribue le développement des contorsions suggestives et caractéristiques du King, à l'inspiration ou l'audace qu'il a acquise en regardant Bo Diddley sur scène, telle sa prestation au Carnegie Hall de New York cette même année.

Le 20 novembre 1955, il passe au Ed Sullivan Show qu'il rend furieux. Annoncé comme un musicien de Folk et censé jouer sagement un morceau devenu classique de la musique country, Sixteen Tons de Tennessee Ernie Ford, comme il était convenu, il interprétera sans avertir Bo Diddley. Le très respecté Ed Sullivan lui dira qu'il est "l'un des premiers hommes de couleur à l'avoir jamais trahi (doublé)". Face à cette expression ressentie comme raciste et autoritaire (castratrice), Bo Diddley avouera s'être retenu de lui casser la figure. Suite à cet évènement, il sera empêché de pratiquer plusieurs autres shows et Ed Sullivan lui dira que sa carrière serait finie avant 6 mois. Cependant, Bo Diddley venait de lancer son premier tube sur les ondes et en kiosque tout en ayant tenu tête au système médiatique alors soumis à la ségrégation et au conservatisme. Malgré son approximation qu'il aurait été le premier noir à passer dans le Ed Sullivan Show, il devint un exemple qui prendra beaucoup de sens dans les années 60.

En 1956 il fait la connaissance de celle qui deviendra en 1957 Lady Bo, Peggy Jones, la toute première guitariste de Rock, toujours active et dont il affirme qu'elle est la seule à connaitre les voies de l'origine. Parmi les femmes qui l'ont accompagné se trouve aussi celle qu'il a surnommée la Duchesse (1962-1966), Norma-Jean Wofford. Elle permit la transition durant l'envol en solo de Lady Bo avec son propre groupe et Bo avait fait passer la Duchesse pour une demie-sœur uniquement pour alimenter la curiosité de ceux qui osaient demander où avait pu passer Lady Bo. Il avait appris la guitare à la Duchesse et elle était entourée de deux autres choristes : Gloria Morgan et Lily "Bee Bee" Jamieson, dont le trio en compagnie de Diddley est connu sous le nom de Bo-ettes. Elle quitta à son tour le groupe pour fonder sa famille, puis il y eut notamment Cornelia Redmond surnommée Cookie ainsi que Debby Hastings.

Il écrit en 1957 sous le pseudonyme de sa femme d'alors, Ethel Mae Smith, le titre Love is Strange pour le duo Mickey et Sylvia (Mickey Baker et Sylvia Robinson) qui en font l'un des plus grands classiques du Rhythm and Blues. Il sera repris par Buddy Holly, les Everly Brothers, Sonny and Cher, Paul Mac Cartney, Everything But the Girl, etc., ainsi que dans le film Dirty Dancing.

Influences

L'année 1957, Jerry Allison, le batteur de Buddy Holly rejoint la technique de ce rythme jungle lui permettant alors de jouer Peggy Sue et donc de suivre la guitare de Buddy sur une dynamique qui n'est déjà plus celle du premier rock'n roll ou du rockabilly, quoique déjà novateur avec That Will Be The Day, mais bien du rock tel qu'il va se structurer plusieurs années plus tard seulement au milieu des années 60. Oh Boy!, toujours de Buddy Holly la même année, marquera le passage définitif et précoce du rock dans le rock'n'roll et comporte un phrasé type de diddley beat marqué à la voix au milieu de la chanson comme une pierre d'angle apparente de sa structure. Bo Diddley en parle dans sa chanson des années 80 : Bo Diddley Put the Rock in Rock'n Roll. Buddy Holly, l'enfant doux et chéri du rock'n'roll fit plusieurs reprises de Bo Diddley (Bo Diddley, Love is Strange), s'en est inspiré sur plusieurs de ses compositions en y créant ses touches personnelles (Not Fade Away, Words of Love, Well Alwright, Oh Boy) et s'apprêtait à reprendre Mona avant de mourir en tout début d'année 59. Les enregistrements de 1957 qu'il reste de sa version en première préparation montrent le travail que l'acquisition d'un tel rythme demande même pour quelqu'un comme Buddy Holly, tout autant que la fascination qu'il provoque.

Suivant le phénomène des pierres angulaires mises à nu, les chansons Love is Strange (Bo Diddley), Words of Love (Buddy Holly) et More Than Words (Extreme), ne forment qu'une chaine (technique de guitare et/ou air) et Extreme révèle à son tour la pierre d'angle qu'il utilise chez Buddy Holly (comme ce dernier l'avait fait dans Oh Boy vis à vis de Bo Diddley) en reprenant son air au milieu de la chanson et en y plaçant dessus leur titre pour parole ("more than words").

A la mort de Buddy Holly, le rock'n'roll connait un recul jusqu'en 1962 accentué par un retour de l'esprit réactionnaire et de la compartimentation ségrégationniste dans le monde des médias. Elvis Presley lui-même est cantonné à ne plus chanter que des ballades et au mieux du rockabilly. Bo Diddley couve durant ce temps là son retour explosif devant les médias et les shows qui lui ont été restreints et prépare même l'esprit Soul parallèlement à Ray Charles avec des morceaux comme the Great Grandfather (1959), qu'il joue au violon, ou Working Man (1960) qui aboutiront à des tubes comme Ooh Baby (1966).

Les années 60

Carrière

Il influencera plusieurs groupes des sixties : The Rolling Stones, The Yardbirds, The Strangeloves, The Pretty Things, The Animals, Led Zeppelin, The Shadows of Knight, The Kinks, The 13th Floor Elevators, The Kingsmen, The Who, The Them et la scène rock'n'roll en général (selon l'expression des Animals dans leur reprise en 1964 de The Story of Bo Diddley qu'ils réarrangent et développent, mais qui comprend quelques petites erreurs de date et d'interprétation, témoins de l'effervescente légende qu'était devenu Bo Diddley).

Les Moody Blues eux-mêmes lui consacreront des prestations live en son honneur remplies d'admiration et d'énergie. Parmi ses fans et pairs ayant fait des reprises sans jamais payer de droit durant des concerts, sous couvert de bienveillance honorifique tel des medleys, on compte aussi Janis Joplin et Jimmy Hendrix.

Dans les années 60, il produit beaucoup de morceaux dont certains sont accompagnés de paroles parlées à l'instar de son hit Say Man (1958), sur un mode cependant différent de celui de John Lee Hooker, qui sont les pales prémisses du Rap et du Slam mais en tout cas un signe de liberté musicale et de recherche de mode d'expression qui deviendront chères à Frank Zappa à la fin des années 60. Sur certaines chansons primordiales comme Who do you love (1956) et I'm a man (1955) il adopte et développe cependant le style chanté de Hooker.

Il passe haut la main la fameuse épreuve du train relative aux bluesmen qui est d'imiter le train avec la guitare (cf. ex. le film Crossroads, les chemins de la gloire - Steve Vai, Ralph Macchio - 1986), avec le morceau Please Mister Engineer (1961) où il réaffirme le son saturé et son importance, ainsi que sa toute simplicité (toujours très relative avec Bo Diddley). Il n'utilise pas le diddley beat à proprement parler sur cette chanson. Bo Diddley pense par ailleurs qu'avec son diddley beat il a trouvé « le son d'un train de marchandises » (voir article Figaro en notes et références). Il n'y a aussi qu'un pas à croire que le diddley beat serait la 30ème chanson perdue de Robert Johnson, relatée dans ce même film, selon la légende du pacte à la croisée des chemins (Robert Johnson, Cross Road Blues, 1936). Le Diable enlèverait les âmes contractantes à l'age de 27 ans (Jimi Hendrix, Brian Jones, Janis Joplin, Jim Morrison, Robert Johnson...) mais ne put rien contre Bo Diddley qui à 27 ans (1955) lutte a contrario contre toute signature contraignante et toute soumission au système : à la Bête, qui le renvoie et cherche à l'écarter (Ed Sullivan). Pour illustration de ce lien logique légendaire, Eric Clapton reprendra le morceau Cross Road Blues (aka Crossaroads) de Johnson, certainement de manière intuitive et spontanée, avec son groupe Cream en 1968 puis durant sa carrière solo, en retrouvant de plus en plus le diddley beat primordial qui animait leur version. Robert Johnson et Bo Diddley semblent liés par la légende du Blues, l'un ayant flirté avec l'image du Diable, l'autre n'ayant jamais cru en lui, mais ils auraient pourtant rassemblé à tous les deux le registre entier du Rock ou qui le permet.

Les Rolling Stones débutent leur carrière en tournant avec Bo Diddley en 1964. Ils lui voueront une admiration toujours renouvelée et feront plusieurs reprises en s'en inspirant régulièrement. Ils l'inviteront par la suite dans plusieurs de leurs concerts pour jouer avec eux.

Avec le morceau Bodiddley-itis enregistré la décennie suivante (1972), il compte démontrer aux mauvaises langues - intriguées par la qualité peaufinée que prennent ses albums à la fin des années 60 - qu'il maitrise en effet toujours la scène et qu'il faut même se passer des studios pour n'avoir qu'à jouer et performer. Il y exécute de remarquables sauts et contorsions (la guitare entre les jambes) toujours avec son célèbre jeu de jambes, et avait fortement influencé Pete Townshend des Who (dont beaucoup de morceaux sont des diddley beats comme Magic Bus de 1968). Pete Townshend étant finalement devenu le maitre médiatique de la hard-attitude et des sauts avec guitare (bien au delà des Led Zeppelin), Bo Diddley renchérira sur le même morceau live (Bo Diddley at his Best) en imitant jusqu'au saut spécifique de Pete.

Influences

Les Pretty Things, qui avaient pris leur nom ainsi que leur vigoureuse énergie d'une chanson de Bo Diddley (Pretty Thing), sont parmi les premiers avec les Kingsmen à pratiquer le Rock Garage puis l'Extrem R'N'B selon la dénomination des Who, aux origines du Hard Rock et du Punk. Le Rock Garage est un courant alternatif ouvert par les Trashmen en 1963, eux-aussi très inspirés par Bo Diddley, issu de la seconde vague de Surf Music (1962) (cf. notamment leur reprise Bird Diddley Beat de 1964 ainsi que leur très célèbre Surfin' Bird de 1963 basé sur le diddley beat vocalisé en Doo-wop et retournant parfois à une mesure à temps simple liant le diddley beat au jungle beat). En 1963, l'influence de Bo Diddley sur la Surf Music de seconde génération, utilisant le diddley beat (se confondant au jungle beat) et dont font aussi parti les Beach Boys avec des morceaux comme Surfin' USA (1963), était telle qu'il enregistre en s'appropriant l'air du temps, un concert intimiste sur une plage, précurseur pour une génération d'adolescents acquérant sa toute nouvelle autonomie dans les loisirs et sobrement intitulé Bo Diddley's Beach Party. Dès lors Bo Diddley ne cessera de nourrir la musique qu'il inspire dans plusieurs genres.

La Pop anglaise n'échappe pas à l'influence de Bo Diddley et elle va découvrir très tôt à travers des groupes comme les Kinks (littéralement : style décoiffé et débraillé) le proto-Punk amenant directement au style Rock qui ne s'épanouira que durant les années 80. Leur morceau You Really Got Me (1964) est un équilibre parfait entre les 2 chansons du premier single de Bo Diddley : Bo Diddley et I'm a Man (1955), et générera bien d'autres titres comme Should I Stay or Should I Go (1981) des Clash. Ces morceaux ne se classent pas dans le Punk qui est lui bien plus minimaliste et qui rejette certaines forment de contre-temps. Ce schéma fait finalement qu'on peut s'éloigner ou se rapprocher du diddley beat, mais qu'il s'impose en permanence comme repaire ou objet de positionnement.

Van Morrison formant le groupe Them va se montrer lui aussi très inspiré par Bo Diddley. Les premières reprises du groupe sont à la base issues de toutes les parties du Rhythm and Blues mais ses compositions comme Mystic Eyes et le célèbre Gloria (1964) se montrent finalement extrêmement proches de la dynamique et de l'intensité de Diddley (même douce) ainsi que de certaines de ses chansons basées sur deux accords possédant un ton d'intervalle (Dearest Darling, 1958 ; Please Mister Engineer, 1961) ou encore sur leur atmosphère singulière et aérienne (Mona, 1956 ; Sad Sack, 1963) et sans oublier l'utilisation récurrente du break en slide toujours avec 1 ton de moins, caractéristiques de Diddley et qu'utilise à son tour Van Morrison, et non sur un simple jungle beat d'une seul note. Avec Van Morrison, la musique psychédélique va commencer à se développer et atteindre consécutivement les Doors (1965) avec encore une fois la seule influence restreinte et intime de la musique de Bo Diddley qui venait à nouveau de se répercuter. Le film "Ne Nous Fâchons Pas" de Georges Lautner et Michel Audiard en 1965 avec Mireille Darc met en avant cette musique et la forme de danse très hypnotique qu'elle suscite en approfondissant la transe du Jerk et en y recherchant les effets stupéfiants. Cependant, ni Bo Diddley, ni Van Morrison ne seront usagés de drogue et Diddley en fera un combat, ne connaissant que trop les dérives de l'alcool et des drogues dont il était témoins très jeune dans les quartiers pauvres. Le terme « hypnotique » dans son sens psychédélique deviendra conventionnel pour parler de la musique de Bo Diddley.

Hey Jude des Beatles sort en aout 1968. Le diddley beat y est très lent, appréhendé initialement en binaire, mais il est finalement utilisé conventionnellement sur les 2 parties distinctes de la chanson célèbre pour son renversement. Elle garde son principe fondamental d'alternance ternaire et binaire sur une seule mesure, devenu alors une marque de fabrique du rock enfin détaché de sa première forme de rock'n'roll à temps simple, ainsi que sa répétition infinie élevant l'expérience émotionnelle. Les Beatles, qui avaient sublimé l'œuvre et la voie ouverte par Buddy Holly sur les pas de Bo Diddley pour la Pop musique et le Rock'n'Roll, annonce la fin de la période des Yéyés, la fin de l'insouciance (c'est un bleus plein d'émotion évoquant un réel divorce, un fait social nouveau et déchirant), avec ce morceau symbolique qui fut leur record de vente en single. Il a la particularité d'annoncer une nouvelle évolution de la musique populaire, de son esprit, affrontant la maturité, une nouvelle conception musicale à venir et qui se cherche, nous sommes en 1968, et il le fait à nouveau sur le diddley beat.

En 1968, un groupe espagnol brise à son tour le diddley beat, le rhabille spécialement (il est joué seul dans l'introduction par la guitare qui dure tout le morceau), garde sa densité, sa technique (grattement harmonique et étouffé) ainsi que son énergie fulgurante et crée un titre très singulier : Bring a Little Lovin'. Il s'agit des Los Bravos plus souvent connus pour leur titre Black is Black. La musique est orientée, maitrisée, médiatisée, insérée dans des feuilletons populaires, sous le régime de Franco afin que la jeunesse investisse les pistes de danse qui deviendront les discothèques, vêtue de manière festive et androgyne et sur des thèmes simples où la basse et la batterie sont les moteurs du pas de danse. Dix ans avant que le mot ne soit employé, le diddley beat inspire le principe même du Disco sur un titre a priori parfaitement délirant et anachronique dans son contexte bien qu'il ne cessera d'être mis en valeur culturellement et avec modernité par le régime politique durant lequel il fut créé.

Les années 70

Carrière

La décennie suivante est moins prolifique, sa créativité décline et il semble se contenter de remanier ses vieux titres. Ses schémas rythmiques compliqués et denses, hypnotiques parfois, l’ont élevé cependant au rang de maître du genre. Mais fallut-il encore qu'on l'attende dans ce registre?

En mars 2005 est commercialisée la compilation Tales From The Funk Dimension 1970-1973[3]. Elle montre une facette jusqu'alors passée inaperçue de Bo Diddley, celle d'un musicien qui a aussi touché précocement au Funk, dès 1966 avec des morceaux comme Do The Frogg qui s'inscrivaient encore dans le mouvement Soul, dans les mêmes années que la consécration de James Brown, détonateur populaire de ce genre avec Sex Machine en 1970. Les titres (Funky Fly, Pollution, Bad Side of the Moon (Elton John, 1970)...) sont extraits de ses trois premiers albums du début des années 70 et montrent une assimilation méticuleuse du style et du son et finalement une grande aisance à créer dans ce registre ou à en faire des reprises parfois mieux travaillées que les originaux.

En 1976, Bo Diddley édite un 33 tours composé de reprises personnelles (à l'exception de Not Fade Away) et de quelques compositions nouvelles, toutes envisagées en Funk. L'album est conçu pour saluer les 20 ans du Rock'n'Roll et s'intitule 20th Anniversary of Rock & Roll. Sur sa couverture de Not Fade Away (Buddy Holly) on entent une introduction particulière qui sera reprise, copiée, par Lenny Kravitz sur son titre Are You Gonna Go My Way (1993). La version de Kravitz utilise aussi les breaks sur 2 tons à l'instar de Bo Diddley dans ses schémas classiques et de manière identique à ceux de You Really Got Me des Kinks, faisant de son morceau une double copie de Bo Diddley, mais aussi un plagiat de l'air de Jean-Jacques Goldman : Quand la Musique est Bonne.

Au beau milieu des années 70 et à la suite de 5 albums Funk, Bo Diddley s'engage durant deux ans et demi dans la police de la commune de Los Lunas dans le comté de Valencia au Nouveau-Mexique où il devient shérif et député. Il accrochera à son palmarès 3 courses poursuites à bord de voitures de police affectées aux autoroutes. Il gardera de cette période le port d'écussons métalliques personnalisés qu'il portera traditionnellement à son chapeau.

Influences

C'est dans les années 70 que ses premiers émules se mettent à construire leurs œuvres. Sylvia Robinson (née Sylvia Vanderpool), pour qui Bo avait écrit le légendaire Love is Strange en formant avec Mickey Baker le duo guitare-chant Mickey & Sylvia, ouvre le label Sugar Hill Records (1979), l'une des toutes premières maisons de disque R'n'B et Rap, qui est la première à avoir une chanson Hip Hop dans les charts (N°2 du Top 40 avec Rapper's Delight en 1979). Elle lance juste auparavant, sous le label All Platinum Records (1974) et avec sa plume, les premiers tubes Dance ou Disco (le nom de ce style ne viendra que plus tard) tel que Shame, Shame, Shame (1975) interprété par Shirley Goodman (Shirley and Co) sur un pur diddley beat.

En 1974, Kraftwerk, un groupe alors expérimental issu du Rock psychédélique et de la musique classique, créant depuis peu les premiers instruments purement électroniques, utilise le diddley beat sur Autobahn et cherche à le déconstruire en travaillant longuement dessus (le mystère du contre-temps qu'ils marquent par 2 booms seulement sur de longs passages. Le morceau est introduit par un diddley beat conventionnel, celui utilisé par la vague surf et garage de la décennie précédente). Il s'agira du tout premier morceau de Techno de l'Histoire (voir par ailleurs dans la section des années 90).

Le diddley beat inspire aussi des groupes tel que AC/DC avec It's a Long Way To The Top ou High Voltage (1974) qui le manie à sa façon, ou plus spécifiquement Kiss avec New York Groove en 1978 qui est une reprise du groupe Hello de 1975, ou encore Aerosmith avec Sweet Emotion en 1975 sur un diddley beat lent mais très soutenu. Il pénètre donc à présent le Hard Rock qui vient de trouver ses formules. Les riffs, mais aussi les sauts de Bo Diddley vont être à nouveau au centre d'une discipline en expansion et qui ne sont plus les prémisses, bien que puissants, des Who.

En 1977, Devo, un groupe de post-Punk Industriel utilisant lui aussi de nombreux instruments et effets électroniques qu'ils créaient, atomise cette fois-ci le diddley beat en le poussant à l'extrême. Leur morceau Jocko Homo (1977) l'aborde sous différents angles avec de redoutables effets et des raccourcissements en boucle. La déconstruction est l'enseigne du groupe qui prophétise un monde en désévolution (devolution) afin de l'en avertir. Le message indus, scrutant les entrailles, choisi la voie de la farce mais n'en est pas une. Ceci sera saisi en 1995 par le groupe commercial Daft Punk qui découvre en Devo le matériel du futur ainsi que le célèbre rythme de Rollin' & Scratchin' (1995) fruit de la déconstruction (il ne s'agit pas de déstructuration) du diddley beat dans Jocko Homo. Chez Daft Punk le diddley beat est parfois marqué avec des morceaux comme Revolution 909 (1997).

Les années 80

Carrière

Bo Diddley commence à déserter les studios d'enregistrement et retourne à ses premiers principes : pas de studio, pas de dépendance ni de contrainte autre que jouer!

Durant les années 80, continuant à adopter les nouvelles technologies de son comme le filtron ou l'usage rythmique et mélodique des harmoniques, il produit dans des concerts de grande et petite taille qu'il multiplie, un nombre important mais difficilement estimable de morceaux sans titre ni édition audio ou vidéo, que seul des particuliers ont enregistrés et conservés (Never Before Seen Live, "Never Let Me Go", 1981). On y remarque aussi qu'il envisage ses morceaux classiques sur d'autres modes. Quelques concerts seulement, ne comportant souvent que des reprises régulières de ses standards, sortent en album.

Sur cette période il n'enregistrera qu'un album en 1983 : Ain't It Good To Be Free qu'il rééditera en 1995 sous le nom de The Mighty Bo Diddley pour en appuyer les aspects intemporels et précurseurs. Il préfigure la période Rap (qui n'a pas encore de nom spécifique et n'est pas encore extraite du rock) avec des morceaux comme I Don't Want Your Welfare, et Électro-pop et même Techno avec Stabilize Yourself mais reste plus globalement dans un style Rock et Funk.

Bo Diddley fait quelques brèves apparitions au cinéma dans des films comme Un Fauteuil pour Deux d'Eddy Murphy (1983) et Eddy and the Cruizers II (1989, où il incarne un guitariste de légende). Il crée aussi 2 chansons pour le film documentaire sur les motards de l'enfer, en rupture apparente avec sa fonction de shérif qu'il occupait quelques années plus tôt : Hells Angels Forever (1983), où il joue en live en s'adressant à eux (Do Your Thing, Nasty Man). Il n'y abandonne cependant pas sa droiture, mais réaffirme le droit à la liberté quand elle n'interfère pas fondamentalement avec les règles de l'ordre social sous quelque forme qu'elles soient.

Il est introduit membre de la prestigieuse Rock and Roll Hall of Fame en 1987 parmi les premiers artistes admis et est le treizième artiste dont le nom est enregistré.

En 1989 Bo Diddley crée finalement, en studio, l'un de ses albums les plus énigmatiques : Breakin' Through The B.S., annonçant la couleur musicale des années 90 et décomposant celle du passé. Son style est exclusivement Urban dans la première partie (Break, Électro, Rap...) et "roots" et rock (R.U. Serious) dans la seconde partie où il aborde aussi des modes du Heavy Metal (Home to McComb). Les arrangements y sont complexes jusqu'à celui de sa voix (Bo Pop Shake, Turbo Diddley 2000) ou dans un retour à des couleurs racines notamment caribéennes, clés dans l'histoire exhaustive du rock (Louie Louie) et des raves. Il y pratique l'ensemble des instruments principaux (synthétiseur, percussions, guitare, voix et producteur exécutif) et est accompagné d'autres guitares, ainsi que basse, saxophone, batterie et vocales. Sa guitare est parfois utilisée en percussion selon ses manières inédites et l'album entier est concept faisant lien entre le Rhythm and Blues (R'N'B) classique et moderne.

Influences

Son titre blues Before You Accuse Me (1957) connaît de nombreuses reprises, notamment par Eric Clapton qui le popularise dans un arrangement contemporain en 1989, ou en version instrumentale par Jean-Pierre Danel.

Le diddley beat reste régulièrement à la mode et permet à des artistes comme George Mickael avec Faith (1987) d'atteindre les premières places des ventes.

Les années 90

Carrière

Avec des albums qu'il réenregistre donc en studio tels que This Should Not Be[4] en 1992, Bo Diddley aborde des genres éclectiques qui comprennent tant le Reggae, le Rock et le Funk, que le R'n'B contemporain naissant, ou des bases électroniques proches du New Wave et même du New Beat (forgé sur les débuts de la Techno noire et du Rap des années 80). C'est un album très incisif vis-à-vis de la guerre du Golf dans la chanson portant le titre de l'album This Should Not Be par laquelle il fait remarquer les décalages qu'il peut exister entre l'argent déployé en Irak, d'où parle un soldat de la coalition, avec la pauvreté d'une grande frange des américains dont fait parti sa famille (puis du reste du monde) qu'il estime "under attack" ("Our great nation is under attack, all hare (harebrained) may say : In this country it should not be! Bo knows. All of them may say...", dit-il en introduction alors que cette terminologie ne sera utilisée stratégiquement qu'en 2001). Il vise des dirigeants qu'il dit voués à l'argent comme il l'affirmait dans la chanson Wake Up America de 1989 en pensant aux récentes élections et à la famille Bush, déjà illustre dans le monde politique, de la CIA et des affaires et discrètement condamnée pour l'armement et la montée du nazisme (les Bush-Walker étaient 2 des "7 anges", selon la dénomination du Herald Tribune en 1942, banquiers et fournisseurs de carburant illicite issu de technologie militaire pour Hitler dès 1928) ainsi que dans le travail des déportés d'Auschwitz dans leurs propres firmes qui s'y trouvaient mais dont les archives du procès de 1942 ne deviendront publiques qu'en 2002 après 60 ans de scellé réglementaire et une série de morts accidentelles de biographes et journalistes quand les archives n'appartenaient pas encore au domaine public. Son son n'est pas sans rappeler celui de Prince ou même d'Afrika Bambaataa (son premier hit Planet Rock, 1982) et se fait résolument moderne jusqu'à l'inclusion du Hip Hop sur des titres très étonnants et travaillés comme Rock Patrol (un autre clin d'œil à sa période de shérif et où il utilise des voix d'enfants). Il utilise toujours sporadiquement ses formes de diddley beat, qui est en lui même un Breakbeat primordial et qu'il n'hésite pas à désarticuler ou envisager dans de nouvelles optiques musicales.

Il participe au film rock fantastique de série B Rockula sorti en 1990 et fait une apparition plus prestigieuse dans Blues Brothers 2000 (1998).

Durant les années 1990, Bo Diddley pratique toujours les concerts avec ses nouvelles compositions mais surtout avec ses classiques qui sont très demandés (quand on ne connait pas qu'eux), ainsi que des grands Jams rocks et fait notamment des apparitions en compagnie des Rolling Stones qui avaient débuté en tournant avec lui.

En 1995 il réédite son album Ain't it Good to Be Free (1983) sous le nom de The Mighty Bo Diddley et le fait passer pour un album moderne de fusion rock-électro comportant des accents de techno primitive des années 80 dans Stabilize Yourself, dont le renouveau populaire avait débuté depuis peu. L'album est tout autant roots'n'blues, funk et même rap (lui aussi revenu très en vogue à l'époque) et son exercice de datation, à cause de la modernité des sons, des techniques, des styles et des effets reste confondant pour le néophyte. L'exploration techno de Stabalize Yourself, avec des sons électroniques particuliers, rappelle des morceaux de Kraftwerk comme Pocket Calculator (1981) tout en restant sur les premières bases rocks et acoustiques de la techno noire débutée en 1979 à Detroit et vulgarisé par le Sharevari de A Number Of Names en 1981. Ce mélange agrémenté d'un jeu rock de Bo Diddley le rapproche finalement d'un style à peine plus tardif et représentatif des années 80, l'Electro-pop (Synthpop), initié aux origines avec des titres comme Video Killed the Radio Star (1979) des Buggles.

En 1996 Bo Diddley sort un autre album, A Man Amongst Men orienté à nouveau rock. D'autres compositions qui suivront (Bo Diddley's Rap...) et qu'il continuera à faire de manière moins fréquente ne seront jouées qu'en concert mais seront cette fois-ci enregistrées par des sources officielles (dont des radios), contrairement à ce qu'il avait fait durant les années 80.

Il reçoit en 1996 une récompense d'honneur de la Rhythm and Blues Foundation pour l'ensemble de sa carrière et en 1998 la même récompense de la Recording Academy (Grammy Awards).

Le Duel

En 1995 Bo Diddley précède Steve Vai, par le langage ésotérique de la musique industrielle, pour la troisième fois avec son proto-album Promises (crédité en 1994) correspondant au concept de Alien Love Secret (1995) de Vai, c'est à dire un album a priori inachevé et incohérent pour celui qui ne pense pas par les 3 axes du Blues : le train (parfois chat ou cheval ou encore mécanisme d'horloge mondial dans Psyché Rock pour le registre indus), le message industriel brut (sensé défier les lois de l'entropie) adressé pour le Moment (de l'Histoire musicale et humaine) et enfin le sentiment (moteur de l'âme) avec l'interrogation sur sa valeur et sa fondation véritable. Steve Vai avait déjà suivi le concept scindé de Breakin' Through the B.S. (Bo Style, 1989) dans ses albums Passion and Warfare (1990, les morceaux Erotic Nightmares, Answers et The Riddle sont fondés autour de l'évolution du diddley beat) puis Sex and Religion (1993, dont la partie rythmique et rap du morceau Sex and Religion est un diddley beat ainsi que divers passages à la guitare dans Down Deep Into The Pain), comportant à chaque fois un petit morceau d'introduction faisant preuve de la maitrise des technologies avancées (tout comme Turbo Diddley 2000), une thématique recherchant le paradoxe et l'actualité ainsi qu'une assise de la matière propre à Frank Zappa (travail complexe de sample sur les voix, la conceptualisation musicale, la part des synthétiseurs et des guitares, la déstructuration, tout ce qu'avait en fait travaillé Bo Diddley durant les années 80).

Cependant Bo Diddley n'étant pas assez virtuose pour jouer certains passages à la guitare, s'inclinant donc sur cet aspect demandant par endroit un jeu très carré, dans cet album au nom porteur de sens évoquant en lui-même les limites : "Promises", il fera appelle une nouvelle fois à Mike Boulware pour jouer les passages complexes mais de manière plus présente en gardant le style de Diddley et avec ses sons originaux (extrêmement travaillés), comme pouvait le faire Zappa avec Vai. Mais Vai n'achève l'épreuve du train en accord ouvert, harmoniques et solo simultanés qu'avec Bad Horsie (1995, inspiré d'un riff qu'il joue dans Crossroads en 1986) alors que Diddley en a fait la démonstration depuis les années 60 à 80 à de multiple reprises (Mumbelin' Guitar, 1960 ; Bo's Bonce, 1963 ; "Never let me go", 1981 très inspiré de la dynamique Zappa ; etc.) et alors que Vai jouait les musiciens virtuoses et avertis du Diable (sous le nom de Jack Butler) dans ce même film redondant, Crossroads (les chemins de la gloire), où le vieux sage (fou) dit : « Je te laisserai jamais interpréter cette chanson (la 30ème chanson perdue de Robert Johnson) si tu ne sais même pas refaire un train! ».

Steve Vai reprend finalement avec Alien Love Secret de 1995, les genres qu'il n'avait pas encore réussi à rejoindre de Bo Diddley, ou seulement en partie, et qui se trouvent dans Breakin' Through the B.S. (1989) et quelques morceaux antérieurs qui sont des acquis (roots binaire tel qu'il apparait aussi dans le film juste au début du duel, épreuve du train, usage des voix des enfants, développement à son paroxysme des slides sur plusieurs cordes servant de phrasé qui sont présents depuis la toute première chanson de Bo Diddley, faire parler la guitare au sein de la mélodie, développer la mélodie tout en produisant des accords ouverts...). Mais à travers l'album Promises de cette même année 1995, Diddley précède donc la réponse qu'il donne à Vai concernant son album-épreuve et il fait sortir le sien, créé en miroir grossissant, au même moment.

Si Vai reste inégalé dans sa capacité de guitariste (Zappa lui faisait jouer ce qu'il ne savait pas interpréter par lui-même), Bo Diddley lui renvoie pourtant l'exact album qu'il est en train d'écrire (celui des épreuves codées du Bluesman), l'évalue, l'agrée mais lui fait donc un imminent reproche en risquant jusqu'aux titres de ses chansons à double sens (She Wasn't Raped (She gave it up) signifiant en fait l'absence de style urban et la résignation), leur contenu (I'm Gonna Get Your Girlfriend trouvant la faille de la susceptibilité et de la faiblesse, en effet Vai pleure parfois sur la beauté de ses chansons et se montre ailleurs trop dur pour compenser) ou sa délégation de jeu pour ne garder parfois plus que le chant (originairement médiocre et monotone chez Vai, un terrible talon d'Achille) et qui aura des conséquences sur la crédibilité de Bo qui incline sa guitare devant Vai en ne la sortant pas mais dont la visée était la perfection du message de l'Originator vers un immense artiste qu'il venait d'estimer en Duel pour la passation et la préservation de l'attribut : depuis le départ sans remplacement de Devin Townsend afin que Vai chante à nouveau seul, ainsi que le ralentissement de sa fréquentation de l'époustouflant batteur Terry Bozzio, Vai ne sait plus faire de style Urban ni réellement Break et risque par ailleurs de s'égarer en suffisance (et complexification), c'est-à-dire en prévisibilité, chose que Diddley venait de lui démontrer uniquement par le chant où il rappe fraichement avec une prestance naturel de père du Rock son diddley beat et la conception de chansons connotés dans un album au concept peu évident et même peu flatteur de prime abords pour Bo Diddley lui-même.

C'est à ce moment là que Vai va explorer des mélodies exotiques totalement nouvelles, élargir les modes sereins moins naïfs et se régénérer avec des morceaux qui ont pu passer un temps pour de la science fiction mais qui vont susciter à nouveau sa création là où il n'aurait stagné que dans le rock extrême.

Influences

On note que dans l'univers Techno on considère le plus souvent le morceau Autobahn (1974) de Kraftwerk (Allemagne) comme étant le tout premier morceau de Techno. Ce morceau très singulier ne fait qu'utiliser le diddley beat sous diverses formes. Il part du surfin' diddley beat (Surf music) et le déconstruit à travers le morceau pour en garder l'essence du contre-temps (du Diddley beat originel) qui se transpose de plus en plus dans la rythmique électronique afin d'en explorer l'univers et ses possibilités les plus modernes et expérimentales.

En 1994, le groupe de techno progressive Underworld reprend le principe du morceau Antena (1975) de Kraftwerk et y dépose à nouveau le diddley beat en utilisant à la fois la fameuse vibration hypnotique du rythme et l'utilisation poussée des harmoniques créées synthétiquement. Ce morceau Rez (1994), mais aussi Cowgirl qui lui est enchaîné (où le diddley beat est utilisé sans artifice en fin du morceau cette fois-ci) formeront l'apogée à la fois de la Techno et de la Trance dans les années 1990.

Les années 2000

En 2005 et 2006, entamant une tournée mondiale pour ses 50 ans de carrière, il continue de jouer avec le groupe de Johnnie Johnson, mais il a de fréquents problèmes cardiaques notamment en 2007. Une certaine perte de vélocité et de mobilité due à l'âge le conduit dans les années 2000 à compenser en accentuant l'usage de sons qui lui sont spécifiques (filtron, chorus, u-vibe, auto wha...). Il lui arrive parfois de rapper de façon moderne ses morceaux en faisant aussi des clins d'œil à de célèbres Raps.

Lors d'un concert en Espagne au festival de Jazz de San Javier le 21 juillet 2006, une fan ne cesse de hurler avec zèle par dessus la foule : "Bo Diddley [...] is Rock'n'Roll!". Il lui répondra qu'il ne pratique pas ce genre de musique, qu'il comprend les générations plus jeunes, mais qu'elles se trompent, il joue du Bo Diddley. Il signifie ainsi aux générations de fans intrigués par les grands médias tout autant que l'information alternative, qu'il n'a pas pratiqué que la musique qu'ils lui attribuent, celle compartimentée et censurée par ces mêmes médias (qu'il a défié dès sa première apparition en 1955), et à laquelle on le réduit en négligeant terriblement l'ensemble de son œuvre, jusqu'à croire communément que sa créativité s'arrête avec les années 60. S'il reste l'un des pères, peut-être le père du Rock, c'est à dire du Rock'n'Roll en général, il demande à chacun de se rappeler de ce qu'il a réellement joué, créé et inspiré ; qu'il a finalement accompagné l'ensemble des changements d'époque depuis le Rhythm and Blues en passant par la Soul, le Funk, les styles caribéens (Calypso, le Reggae), différents états du Rock et jusqu'à l'Urban, au Breakbeat et subrepticement à la Techno qu'il n'a finalement jamais opposés ni limités.

Le 2 juin 2008, Bo Diddley meurt à l'age de 79 ans[5], d'un arrêt cardiaque dans sa maison d'Archer, en Floride. Une page du rock fut tournée le jour de sa mort et tous les plus grands artistes de rock comme les Rolling Stones déplorèrent le décès de celui qu'ils admiraient et qu'ils considèreront toujours comme l'un des plus grands guitaristes et chanteurs de rock.

Anecdote

David Lindley a écrit une chanson intitulée Pay Bo Diddley, en hommage à celui qui est devenu le symbole des musiciens spoliés de leurs droits d'auteurs.

Le Diddley Beat

Il existe une forme originelle de diddley beat que l'on entend dans la chanson Bo Diddley et qui se décline en plusieurs types que Bo Diddley utilise et développe dans ses morceaux.

Il rejoint par endroit le jungle beat primaire, qui fut souvent utilisé dans la Rumba et qui apparait dans son simple appareil avec la musique de la série Georges de la Jungle. Ce rythme n'est donc pas considéré dans ce contexte comme un diddley beat original.

Le jungle beat de base fait ceci : boom boom, ba-boom ba-boom.

Le diddley beat primordial donne quant-à lui ce type de mélopée : boom boom boom, boom-boom.

Le second boom de la première mesure du diddley beat est placé sur un quart-temps à égale distance du premier et du troisième, lui-même placé sur un contretemps. Ils sont disposés à 3 quart-temps d'intervalle et l'effet que l'on ressent (ou reproduit maladroitement) d'un "contre-temps" entre le second et le troisième ne vient pas d'une différence d'écart entre les trois notes, mais du décalage que ces espaces réguliers créaient avec le tempo. En divisant la première partie de la mesure en 3 parties égales, un rythme ternaire est introduit dans une mesure à temps binaire, engendrant son effet particulier.

Ce rythme devient : boom a-boom a-tchak, a-boom-boom quand on y mêle les premiers contretemps naturels. Il pouvait apparaitre dans la Juba dance, encore appelée Hambone, pratiquée à l'origine sans instrument et en tapant sur les parties du corps, par les esclaves du 18ème et 19ème siècle, sur les bases de rythmes africains devenus caribéens et du Delta du Mississippi.

Dans ses manières plus complexes, le diddley beat fait entrer bien d'autres séries de contretemps et décale encore les temps marqués sur des demi- et quart-temps. Ceci provoque avec le jeu des effets acoustiques d'écho, de réverbération et finalement d'amplification mécanique de la sonorité. Cela inverse parfois les remontés et descentes du médiator ou de la main sur la guitare par rapport au diddley beat simple. Il y est recherché une répercussion des ondes complémentaires et contraires afin de créer des vagues de saturation et de larsens sans même utiliser de distorsion et sans avoir à gratter fort. Des courts moments de réversibilité de l'entropie sont recherchés pour la mettre à profit, notamment par le biais d'effets et de distorsions qui les colorent, c'est-à-dire concrètement, le son vibrant, résonnant, chargé et "énergisé" qui en ressort. De légères différences de cadence s'avère aussi avoir un effet mécanique sur ces propriétés et il est préférable que la guitare serve elle-même de métronome suivant le son qu'elle fait ressortir, suivant sa résonance.

Le diddley beat peut entre autres prendre la forme de : boom a-tchak up, a-tchic-tchic boom (Hey Bo Diddley version originale) mais aussi : boom a-poom tchak, ba-dam ba-dim-a (Hey Bo Diddley en live) ou encore : boom tchak boom, ba-doom poom-tchik up-a, boom a-poom-poom tchick, ba-doom poom-tchik up (Mona).

C'est au niveau du jeu de guitare que le diddley beat est le plus dense. On le mesure souvent en 2 fois 4 temps (8 temps) pour 1 mesure (beat très élevé ou 2 fois plus dense que le tempo, facilitant l'appréhension des quart-temps) et il peut s'étaler sur 2 mesures comme dans Mona en utilisant un jeu asymétrique et décalé qui crée un Breakbeat, un rythme brisé spécifique et fondamental alternant ternaire et binaire.

Il prend ainsi la forme rythmique ordinaire en 2 fois 4 temps pour une seule mesure (correspondant à : boom boom boom, boom-boom) :

un et deux et trois et quatre et un et deux et trois et quatre et....

Le diddley beat utilisé par d'autres artistes

Artistes ayant repris le diddley beat :

Discographie

Bo Diddley en concert au Long Beach Blues Festival, septembre 1997
  • Bo Diddley (1958)
  • Go Bo Diddley (1959)
  • Have Guitar-Will Travel (1960)
  • Bo Diddley In The Spotlight (1960)
  • Bo Diddley Is A Gunslinger (1960)
  • Bo Diddley Is A Lover (1961)
  • Bo Diddley's A Twister (1962)
  • Bo Diddley (1962)
  • Bo Diddley & Company (1962)
  • Surfin' with Bo Diddley (1963)
  • Bo Diddley's Beach Party (1963)
  • Bo Diddley's 16 All-Time Greatest Hits (1964)
  • Two Great Guitars (avec Chuck Berry) (1964)
  • Hey Good Lookin' (1965)
  • 500% More Man (1965)
  • The Originator (1966)
  • Super Blues (avec Muddy Waters & Little Walter) (1967)
  • Super Super Blues Band (avec Muddy Waters & Howlin' Wolf) (1967)
  • The Black Gladiator (1970)
  • Another Dimension (1971)
  • Where It All Began (1972)
  • Got My Own Bag of Tricks (1972)
  • The London Bo Diddley Sessions (1973)
  • Big Bad Bo (1974)
  • 20th Anniversary of Rock & Roll (1976)
  • I'm A Man (1977)
  • Ain't It Good To Be Free (1983)
  • Bo Diddley - His Greatest Sides - Volume 1 (1984)
  • Bo Diddley & Co - Live (1985)
  • Hey...Bo Diddley in Concert (1986)
  • Breakin' Through The BS (1989)
  • Living Legend (1989)
  • Rare & Well Done (1991)
  • Live At The Ritz (avec Ron Wood) (1992)
  • This Should Not Be (1992)
  • Promises (1994)
  • The Mighty Bo Diddley (1995)
  • A Man Amongst Men (1996)
  • Moochas Gracias (avec Anna Moo) (2002)

Notes et références

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