- Robert Johnson
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Robert L. Johnson Naissance 8 mai 1911
Hazlehurst, MississippiDécès 16 août 1938 (à 27 ans)
Greenwood, MississippiActivité principale Musicien Genre musical Blues Instruments Guitare Labels Vocalion Robert Leroy Johnson, né le 8 mai 1911 à Hazlehurst, Mississippi, et mort le 16 août 1938 à Greenwood, Mississippi, était un guitariste et chanteur de blues américain. Bien que n'ayant commencé à enregistrer que trois ans avant sa mort, Robert Johnson est devenu une légende et une grande source d'inspiration pour des artistes tels que Jimi Hendrix, Jimmy Page, Bob Dylan, Brian Jones, Keith Richards ou encore Eric Clapton (Cream). En 2003, le magazine Rolling Stone l'a classé cinquième meilleur guitariste de tous les temps.
Sommaire
Biographie
Son enfance
Robert L. Johnson est né dans le delta du Mississippi, dans le village de Hazlehurst, de Julia Dodds et de Noah Johnson. Sa date de naissance n'est pas connue avec précision, les traces qu'il a laissées suggèrent des dates allant de 1909 à 1912. Bien que courte, sa carrière de bluesman aura été prolifique.
Alors qu'il était encore nourrisson, sa mère et sa sœur Bessie quittent son père et vivent sur la route, travaillant d'un champ à un autre pendant plusieurs saisons avant de s'établir à Memphis chez un certain Charles Spencer. Spencer vit alors avec sa femme et sa maîtresse et les enfants de chacune d'entre elles. Bien qu'aucune tension n'ait été relatée entre les deux femmes, la mère de Robert quitte la maison des Spencer sans ses enfants. Robert vit à Memphis chez Charles Spencer jusqu'en 1918 date à laquelle le caractère obstiné de Robert convainc son hôte que la présence de sa mère pour l'élever s'avère nécessaire.
Robert, qui a pris le nom de Spencer, part donc pour Robinsonville, une communauté cotonnière du nord du Mississippi à 20 miles au sud de Memphis. Il y passe la fin de son enfance en compagnie de sa mère et de son nouveau beau-père, Willie « Dusty » Willis, qui a épousé sa mère en octobre 1916. C'est à cette époque que Robert s'intéresse à la musique. Après un premier essai de la guimbarde, il l'abandonne rapidement au profit de l'harmonica qui devient son instrument principal. C'est également pendant son adolescence qu'il apprend l'existence de son véritable père et commence à se faire appeler Johnson (il continue cependant à utiliser le nom de Spencer jusqu'au milieu des années 1920 notamment à l'école qu'il quitte rapidement à cause de problèmes de vue).
Ses débuts
À la fin des années 1920, il se met à la guitare et se confectionne un support pour son harmonica afin d'utiliser les deux instruments simultanément. La chanson de Leroy Carr, How Long-How Long Blues, semble être une de ses favorites à cette époque pour s'exercer à la musique. Dans ses débuts de musicien à Robinsonville, Robert reçoit l'aide de Willie Brown et de l'inévitable Charley Patton notamment.
Bien que Robert se passionne pour la musique, il ne se considère que comme un paysan lorsqu'il épouse, en février 1929, Virginia Travis à Penton dans le Mississippi. Ils s'installent alors dans une maison en compagnie de la sœur aînée de Robert, Bessie, et de son mari sur la plantation de Kline à l'est de Robinsonville.
Virginia tombe enceinte durant l'été 1929 mais elle meurt, à 16 ans, avec son enfant lors de l'accouchement en avril 1930.
Le pacte avec le diable
C'est en 1931 qu'il rencontre Son House pour la première fois. Ce dernier, l'écoutant jouer, le ridiculise (« tu ne sais pas jouer de la guitare, tu fais fuir les gens ») et lui conseille d'abandonner la guitare pour se concentrer sur l'harmonica. Peu de temps après cet affront, il quitte Robinsonville pour sa ville natale Hazlehurst dans laquelle il espère retrouver la trace de son véritable père.
À Hazlehurst, Robert tombe entre les mains du bluesman Ike Zinnerman qui devient son mentor. Par ailleurs, étant beau garçon, il ne met pas beaucoup de temps à rencontrer une nouvelle femme, Calletta Callie Craft, de dix ans son aînée, qu'il épouse en secret en mai 1931. Callie idolâtre Robert et s'occupe de toute son intendance, cuisinant et travaillant pour lui. Ceci laisse beaucoup de temps à Robert pour travailler la musique auprès de Ike. Le samedi soir, il se rend dans les tavernes, parfois accompagné de Callie, pour jouer toute la nuit. Il commence alors à obtenir un certain respect en tant que musicien et se fait un nom sous les initiales de « R.L. » (pour « Robert Lonnie », du nom d'un musicien plus célèbre également appelé Johnson).
Robert revient finalement à Robinsonville deux ans après l'avoir quitté. Son House est abasourdi par les progrès réalisés par le guitariste avouant même qu'il est maintenant dépassé. C'est à cause de ces progrès stupéfiants que la légende du pacte avec le diable va naître à une époque où le vaudou est encore très vivace dans la communauté noire du Mississippi.
Robert Johnson va profiter de cette occasion pour mettre en place la légende. Un jour, il réunit quelques amis au coin d'un bois et leur raconte ce qui va devenir sa légende : un soir très sombre alors qu'il se promenait dans les alentours de Clarksdale dans le Mississippi, il se perdit à un carrefour (crossroads en anglais). Alors qu'il commençait à s'endormir une brise fraîche le réveilla. Il vit au-dessus de lui une ombre immense avec un long chapeau. Effrayé, ne pouvant dévisager cette apparition Johnson resta comme paralysé. Sans un mot l'apparition se pencha, prit sa guitare, l'accorda, joua quelques notes divines avant de lui rendre l'instrument et de disparaître dans le vent noir du Sud.
En réalité, cette légende provient d'un autre bluesman, Tommy Johnson, qui prétendait avoir vendu son âme au diable, un soir, à un carrefour, pour obtenir sa virtuosité à la guitare. Robert Johnson aurait donc repris cette histoire à son compte, à moins que - Tommy et lui portant le même nom (Johnson) - elle ne lui ait été attribuée à tort. Cette légende et le personnage de Tommy Johnson apparaissent dans le film des frères Coen, O'Brother. Le scénariste de la série Supernatural s'est longuement inspiré de cette légende ; le carrefour en question est le sujet central de l'un des épisodes de la série où il est question d'un jeune musicien noir cherchant à devenir le meilleur bluesmen de sa génération. À plusieurs reprises, au long des épisodes, divers personnages de la série se rendront à cet endroit afin de rencontrer une employée de l'Enfer pour passer un pacte.
Sa carrière de bluesman
Robinsonville étant principalement une ville de paysans, Robert se rend compte qu'il ne souhaite pas travailler dans les champs et décide donc de partir pour mener sa vie de musicien. Ceci l'amène à voyager dans tout le delta du Mississippi et il finit par s'établir (bien que n'arrêtant jamais de voyager) à Helena chez Estella Coleman, l'une de ses maîtresses. Robert prend d'ailleurs sous son aile le fils d'Estella qui porte le même prénom que lui, Robert Lockwood Jr., et l'aide à améliorer son jeu.
Helena est une ville très riche musicalement et Robert côtoie des artistes tels que Sonny Boy Williamson II, Robert Nighthawk, Elmore James, Howlin' Wolf ou encore Johnny Shines avec qui il s'associe un moment. Johnny Shines dira sur cette période :
« Nous étions sur la route des jours et des jours, sans argent et parfois sans nourriture, cherchant un endroit décent pour passer la nuit. On jouait dans des rues poussiéreuses et des bars crasseux, et tandis que j'étais à bout de souffle et me voyais vivre comme un chien, il y avait Robert tout propre comme s'il sortait d'une église le dimanche ! »
Vers le milieu des années 1930, Robert Johnson est musicien professionnel depuis plusieurs années, il jouit d'une certaine célébrité dans la région et souhaite enregistrer des disques comme ses références Willie Brown, Son House et Charley Patton. Robert auditionne alors pour H. C. Speir à son magasin de musique. Speir détient un accord avec American Record Company mais pour diverses raisons il prend seulement son nom et son adresse et les transmet à Ernie Oertle d'American Record Company. Après une nouvelle audition, Oertle décide de l'enregistrer à San Antonio.
La première session d'enregistrement de Robert est réalisée en novembre 1936 par Don Law. Il enregistre ainsi Terraplane Blues une de ses chansons les plus connues qui devient rapidement un succès pour le label Vocalion Records. Il est rappelé au Texas en juin, mais bien que Don Law apporte le meilleur matériel en sa possession, rien n'égale le succès de Terraplane.
Bien que six des onze enregistrements de Johnson soient encore au catalogue de Vocalion en décembre 1938, il n'est rappelé ni le printemps, ni l'été suivant.
Sa mort
Il meurt le 16 août 1938 dans des circonstances mystérieuses. Après un concert dans un bar de Greenwood, il se sent mal et il est emmené chez un ami. Certains estiment qu'il a été empoisonné par un mari jaloux, d'autres qu'il a succombé à la syphilis, ou à une pneumonie (pathologie pour laquelle il n'existait aucun traitement à l'époque), voire à l'action combinée des trois, les versions étant aussi vraisemblables les unes que les autres compte tenu de ce que l'on sait de la vie de ce bluesman légendaire. Sonny Boy Williamson racontera que Robert Johnson aurait consommé une bouteille de whisky empoisonnée à la strychnine offerte par le tenancier d'un bar jaloux de le voir tourner autour de sa femme. Le bluesman agonisera trois jours avant de décéder. Néanmoins, cette version est contestée (tout comme de nombreux faits intervenus dans sa vie). Robert Johnson fut le premier d'une série d'artistes « maudits » morts à l'âge de 27 ans, qu'on appellera « Club des 27 ». Quatre ans plus tard, un cyclone ravageait les lieux de sa mort.
Sur son certificat de décès, sous « cause de la mort » on trouve la mention « no doctor » (« pas de docteur »)[1].
Musique
Style
Le jeu de guitare de Johnson, en plus d'être adroit et véloce, présentait une certaine originalité comme l'utilisation des cordes basses pour créer un rythme entraînant, comme par exemple sur la chanson Sweet Home Chicago. Il utilisait beaucoup les accords ouverts. Par ailleurs, sa voix était également étonnamment haute.
Les influences de Johnson sont principalement à chercher du côté de Son House mais aussi de Skip James ou Lonnie Johnson.
Johnson est fréquemment cité comme « the greatest blues singer of all time »[réf. nécessaire] (« le meilleur chanteur de blues de tous les temps ») ou même comme « le musicien le plus important du XXe siècle »[réf. nécessaire] , cependant beaucoup d'auditeurs restent déçus à la première écoute de ses morceaux. Cette réaction peut être due à une relative méconnaissance de l'émotion brute et de la forme épurée du Delta blues ou tout simplement à cause de la qualité de l'enregistrement médiocre comparée aux standards de production actuels.
Héritage
Durant sa courte carrière, il aura laissé 29 titres enregistrés, 3 photos et 3 tombes. Sa vie, sa musique et sa mort en ont fait une légende pour plusieurs générations de bluesmen et de rockers.
Il laisse à la musique des morceaux tels que Sweet Home Chicago (repris par les Blues Brothers), Travelling Riverside Blues (repris par Led Zeppelin), Love in Vain (repris par les Rolling Stones), Walking blues, Malted Milk (repris par Eric Clapton sur l'album Unplugged) ainsi que Come on in My Kitchen (repris par Allman Brothers Band, Eric Clapton sur l'album Me and Mr Johnson, Keb Mo sur l'album Keb' Mo', Bob Brozman sur l'album A Truckload of Blues) et par Joël Daydé sur l'album Spleen Blues, Crossroads (repris par Cream, Lynyrd Skynyrd), They're Red Hot (repris par les Red Hot Chili Peppers), Stop Breakin' Down Blues (repris par White Stripes) etc.
Eric Clapton lui a aussi dédié un album entier de reprises, Me and Mr. Johnson, en référence à la chanson de Johnson Me and the Devil. Todd Rundgren a fait de même avec son album Todd Rundgren's Johnson (2011).
Discographie
Les disques originaux de Robert Johnson sont parus en 78 tours.
- Terraplane Blues / Kind Hearted Woman Blues (Vocalion 03416)
- 32-20 Blues / Last Fair Deal Gone Down (Vo 03445)
- I Believe I'll Dust My Broom / Dead Shrimp Blues (Vo 03475)
- Cross Road Blues / Ramblin' on My Mind (Vo 03519)
- They're Red Hot / Come On in My Kitchen (Vo 03563)
- Sweet Home Chicago / Walkin' Blues (Vo 03601)
- Hell Hound on My Trail / From Four Until Late (Vo 03623)
- Milkcow's Calf Blues / Malted Milk (Vo 03665)
- Stones in My Passway / I'm a Steady Rollin' Man (Vo 03723)
- Stop Breakin' Down Blues / Honeymoon Blues (Vo 04002)
- Me and the Devil Blues / Little Queen of Spades (Vo 04108)
- Love in Vain Blues / Preachin' Blues (Up Jumped The Devil) (Vo 04630)
Tous les enregistrements que l'on a pu récupérer de Robert Johnson, y-compris les inédits, sont disponibles sur le double CD :
- Robert Johnson - The Complete Recordings. Collection Roots N' Blues - CBS (1990) et Sony Music Entertainment (1996)
Chansons
Robert Johnson a enregistré en tout et pour tout 29 chansons, lors de deux sessions qui se sont déroulées respectivement en novembre 1936 et juin 1937. Certaines ont été jouées deux fois, ce qui fait un total de quarante-deux enregistrements.
- 23 novembre 1936, San Antonio
- Kind Hearted Woman Blues (deux versions)
- I Believe I'll Dust My Broom
- Sweet Home Chicago
- Rambling on My Mind (deux versions)
- When You Got a Good Friend (deux versions)
- Come on in My Kitchen (deux versions)
- Terraplane Blues
- Phonograph Blues (deux versions)
- 26 novembre 1936, San Antonio
- 32-20 Blues
- 27 novembre 1936, San Antonio
- They're Red Hot
- Dead Shrimp Blues
- Cross Road Blues (deux versions)
- Walkin' Blues
- Last Fair Deal Gone Down
- Preachin' Blues (Up Jumped The Devil)
- If I Had Possession Over Judgment Day
- 19 juin 1937, Dallas
- Stones in My Passway
- I'm a Steady Rollin' Man
- From Four Till Late
- 20 juin 1937, Dallas
- Hellhound on My Trail
- Little Queen of Spades (deux versions)
- Malted Milk
- Drunken Hearted Man (deux versions)
- Me and the Devil Blues (deux versions)
- Stop Breakin' Down Blues (deux versions)
- Traveling Riverside Blues (deux versions)
- Honeymoon Blues
- Love in Vain (deux versions)
- Milk Cow's Calf Blues (deux versions)
Une légende dit qu'il aurait écrit une 30e chanson, mais que le diable l'a gardée pour lui... Toutefois, ce morceau, Mister Downchild, qu'il n'a pas eu le temps d'enregistrer, a été repris par Sonny Boy Williamson.
Anecdotes
- Une série manga, Me and the Devil Blues, raconte sa vie de manière assez libre (dans l'histoire, il vend véritablement son âme au diable). Un autre manga, 20th Century Boy (en référence à la chanson des années 1960 du groupe britannique T-Rex, le rock étant un thème important dans la série), fait référence à la légende du diable et sa rencontre avec Robert Johnson. Cela sert d'introduction au chapitre 2 du tome 10 français.
- Crossroads, un film américain de Walter Hill (1986), évoque Robert Johnson à travers un jeune guitariste blanc qui cherche la « légendaire » 30e chanson du bluesman.
- Beaucoup ont pensé que le personnage de Tommy Johnson dans le film O'Brother de Joel et Ethan Coen se réfère à lui. Il semblerait cependant qu'il se réfère au véritable Tommy Johnson.
- Robert Johnson fut aussi utilisé comme personnage emblématique par les militants antipub du métro de Paris à l'automne 2003 qui en firent une icône de leur lutte. Ils signaient « Bien à vous, Robert Johnson »[2].
- L'épisode 8 de la saison 2 de la série Supernatural, intitulé Crossroad Blues, raconte cette légende de manière romancée.
- En 2004, Eric Clapton sort deux albums : Me and Mr. Johnson et Sessions for Robert J, constitués exclusivement de reprises du répertoire de Robert Johnson.
Notes et références
- Copie du certificat de décès, daté du 18 août 1938 [image]
- Rencontre avec un antipub aussi célèbre que mystérieux : Robert Johnson - Politis, 1er avril 2004 (voir archive)
Bibliographie
- (fr) Greil Marcus, Mystery train : Images de l'Amérique à travers le rock'n'roll, Allia, 2001 (ISBN 2-8448-5077-4) - Lire en ligne le chapitre sur Robert Johnson
Annexes
Liens externes
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