Dynastie carolingienne

Dynastie carolingienne

Carolingiens

Histoire de France
Adhémar de Monteil à Antioche.jpeg

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Chronologie de la France
Arbre généalogique de Carolingiens

Les Carolingiens, que l'on appelait couramment Carlovingiens jusqu'à la fin du XIXe siècle, forment une dynastie de rois francs qui régnèrent sur l'Europe occidentale de 750 jusqu'au Xe siècle, et dont la généalogie remonte à saint Arnoul (v. 582640 ?), évêque de Metz.

Ils doivent leur nom au plus illustre des leurs, Charlemagne[1],[2],[3].

Sommaire

Origines de la famille carolingienne

On fixe communément comme origine à la lignée carolingienne le mariage, vers 630, d'Ansegisel fils d'Arnoul de Metz et de Begge d'Andenne fille de Pépin de Landen qui scelle l'alliance entre la famille des Arnulfiens et celle des Pippinides. Ceux-ci ont un fils, Pépin de Herstal, lui-même père de Charles Martel et grand père de Pépin le Bref lequel deviendra le premier roi de la dynastie carolingienne le 28 juillet 754.

Les Pippinides détiennent pendant plusieurs générations, la charge de maire du palais sous le règne des souverains mérovingiens d'Austrasie. Au fur et à mesure de la désagrégation du pouvoir de la dynastie mérovingienne, durant la période dite des « rois fainéants », les maires du palais pippinides accroissent leur pouvoir : déjà Pépin de Herstal, puis Charles Martel dirigeaient de façon quasi autonome la politique du royaume, tels des suzerains, mais sans le titre ; ainsi, ils nommaient les ducs et les comtes, négociaient les accords avec les pays voisins, dirigeaient l'armée, étendaient le territoire du royaume (notamment en Frise) et allaient même jusqu'à choisir le roi mérovingien.

La zone d'influence des Pippinides sera le territoire favori des Carolingiens : région de Liège (Herstal et Jupille), Aix-la-Chapelle et Cologne.

Le règne de Pépin le Bref, premier roi carolingien

En 741, Charles Martel, maire du palais auprès des rois mérovingiens qui avait sauvé le royaume des francs, meurt. Il laisse deux fils : Carloman et Pépin. Se qualifiant de dux et princeps Francorum, duc et prince des Francs, ils vont assumer la fonction de maire du palais.

En 747, Carloman décide de se retirer du jeu politique, cédant sa place à son frère, en rejoignant un monastère de Lombardie. Quatre années plus tard, Pépin, cherche à obtenir l'appui de l'Église (du pape) et de l'aristocratie. Il posera ensuite une habile question au pape Zacharie : les rois n'exercent plus le pouvoir dans notre royaume, est-ce un bien ou un mal ? Ce dernier lui répondra qu'il vaut mieux appeler roi celui qui exerce le pouvoir véritablement afin que l'ordre ne soit pas troublé.

C'est donc Pépin le Bref qui met fin à la dynastie mérovingienne par un coup d'État en 751 : las de devoir dépendre de rois inutiles et encombrants, Pépin fait enfermer son suzerain Childéric III, et se fait proclamer à sa place à la tête du royaume. La fin de la royauté mérovingienne est marquée, selon la tradition franque des « rois chevelus », par la tonsure qui est imposée à Childéric III. Pépin devient ainsi le premier roi carolingien des Francs, d'abord selon les traditions de son peuple et ensuite, pour l'Église catholique.

Charlemagne et l'empire carolingien

Article détaillé : empire carolingien.
Une pièce avec pour effigie Charlemagne et autour l'inscription KAROLVS IMP AVG (Karolus imperator augustus)

Charlemagne, fils de Pépin le Bref, est sans aucun doute le souverain qui marque le plus l'époque carolingienne, par la longévité de son règne, mais aussi grâce à son charisme, à ses conquêtes militaires (il parvient à étendre le royaume des Francs à toute la Gaule hormis la Bretagne, à la majeure partie de la Germanie, de l'Italie et de l'Espagne) et à ses réformes (dans les domaines de l'éducation, de l'économie et avec un début de restauration de l'État, etc...)

Charlemagne découpe son empire en pagi ou comtés ; dans les zones moins « pacifiées », il crée des duchés (à caractère militaire) et fait garder les zones-frontières (ou « marches ») par des hommes de confiance, qui deviendront plus tard les marquis ou margraves.

Le comté est la plus importante de ces circonscriptions : à sa tête, Charlemagne place un fonctionnaire royal, généralement choisi parmi les puissantes familles de propriétaires terriens francs ; ce fonctionnaire exerce le pouvoir militaire et judiciaire (la potestas) en principe par délégation et il lève les taxes pour le compte de son souverain. Il est assisté dans sa tâche par des vicomtes et des viguiers. Il est aussi en principe révocable par l'empereur.

En parallèle et pour contrebalancer le pouvoir de l'aristocratie, Charlemagne s'appuie sur l'Église, qu'il réorganise en privilégiant l'autorité des évêques métropolitains (les archevêques) ; en ce qui concerne le monachisme, il dote les principales abbayes de terres à mettre en valeur et il en place les abbés sous son autorité directe.

Une autre mesure va dans le même sens : à des hommes de confiance laïcs, qui sont ses envoyés, il adjoint en général un clerc à travers une nouvelle institution : les missi dominici (littéralement, les « envoyés du maître »). Ces envoyés sont chargés de régler les conflits entre les Grands et de relayer les ordres du roi auprès des détenteurs de charges, mais aussi de recueillir le serment de fidélité de ses sujets (ce qu'ils font à deux reprises durant le règne de Charlemagne). On ignore la portée réelle de leur action, mais celle-ci semble indiquer que, déjà à cette période, le roi a du mal à faire respecter son pouvoir.

Sous l'influence des nombreux chrétiens lettrés de son entourage, le roi est aussi législateur : s'il faisait déjà appliquer la loi à travers le ban germanique, il renoue avec la conception romaine du droit et renouvelle l'importance des actes écrits dans le royaume. Après les assemblées qui réunissent les Grands du royaume (les « plaids »), des ordonnances, découpées en chapitres (d'où leur nom de capitulaires) sont émises par la chancellerie du Palais : elles sont une source précieuse pour l'étude de la période.

À un autre niveau, plus idéologique que politique, c'est aussi aux lettrés chrétiens que l'on doit la naissance d'une nouvelle idée de l'État. Celle-ci se veut au départ une restauration de l'Empire romain, pourtant elle repose sur des fondements très différents en légitimant la royauté : profondément chrétienne, elle fait du roi des Francs un nouveau David. L'idée de l'unité du royaume semble un temps l'emporter avec la renaissance de l'Empire d'occident, à la noël 800.

Du point de vue culturel, l'époque de Charlemagne, de son fils Louis le Pieux et de ses petits-fils est connue sous le nom de « Renaissance carolingienne ». L'enseignement classique — en particulier celui du latin — est remis à l'honneur, après avoir été dénaturé et délaissé à la fin du règne des Mérovingiens. Cependant, la langue latine est désormais quasi exclusivement la langue du clergé, les milieux militaires lui préférant le francique : cette évolution inéluctable va faire du latin une langue morte et donner naissance aux ancêtres des langues nationales que sont le français et l'allemand : le roman et le tudesque.

Les troubles sous Louis le Pieux

Troisième fils de Charlemagne, Louis le Pieux devait à l'origine n'hériter que d'une partie du royaume de son père, correspondant à la région s'étendant du plateau de Langres et des Alpes jusqu'à l'Aquitaine, tandis que son frère Pépin devait recevoir la Bavière et l'Italie, leur frère aîné Charles obtenant le reste de l'empire.

Mais Charles et Pépin moururent avant Charlemagne, et, dès 813, Louis fut associé par son père à la direction de l'empire.

A la mort de Charlemagne, le 28 janvier 814, Louis devint donc seul roi des Francs et empereur d'Occident. Il fut sacré le 5 octobre 816 à Reims par le pape Étienne IV.

Les premières années du règne de Louis le Pieux se font dans la droite lignée de celui de Charlemagne, notamment en termes de réforme religieuse. Louis le Pieux réunit le concile d'Inden, près d'Aix-la-Chapelle (816-17), pour faire appliquer la réforme religieuse au clergé séculier et régulier de l'empire.

En juillet 817, en promulguant l'Ordinatio imperii, Louis règle aussi le problème de son héritage en divisant l'empire entre ses trois fils : l'aîné, Lothaire, reçoit la majorité des terres, le titre impérial et le contrôle de ses deux frères puînés, Pépin et Louis, qui reçoivent respectivement l'Aquitaine et la Bavière, un partage donc comparable à celui que Charlemagne avait prévu en 806 entre ses propres fils. Mais les premiers troubles politiques commencent en décembre 817 avec la révolte de son neveu Bernard, fils illégitime du roi Pépin d'Italie, écarté du pouvoir par le nouveau partage. Louis condamne Bernard à mort, et par la suite, cette condamnation le suit tout au long de sa vie.

Les années suivantes sont occupées par une remise en cause du pouvoir de Louis par ses propres fils, devenus adultes, et fort impatients de régner. Au premier plan, son aîné, Lothaire, couronné co-empereur avec son père, et qui supporte mal de rester dans l'ombre de son père pendant toutes ces années. La situation est tendue à la cour d'Aix-la-Chapelle.

En 820, Louis, veuf depuis l'année précédente et incapable de supporter son état, épouse une jeune aristocrate, Judith de la famille des Welfs, surnommée Judith de Bavière, car les terres de sa famille se situent en Bavière, mais la jeune femme n'est nullement de lignée royale. Les trois fils de Louis s'opposent à ce remariage qui ne peut qu'entraîner des complications, et effectivement, en 823, naît un fils de ce second mariage, Charles, futur Charles le Chauve. Pour l'heure, les conditions de la succession ne sont pas remises en cause, mais Judith s'entoure de ses favoris à la cour, et notamment du comte Bernard de Septimanie, nommé par Louis le Pieux à la tête du comté de Barcelone, et qui reçoit également l'équivalent des fonctions de premier ministre.

En 829, suite aux exigences de Judith, Louis accepte de revoir le partage de l'empire afin de pourvoir son dernier fils, Charles, d'un royaume, tout comme ses demi-frères. L'assemblée des grands, réunie à Worms, accepte la création d'un nouveau royaume, dans l'est de l'empire, pour le jeune Charles. Mais dès l'année suivante, la situation se dégrade. Une révolte, menée par le fils aîné Lothaire suivi par ses deux frères Pépin et Louis, est soutenue par de nombreux comtes de l'empire. En 830, l'empereur est déposé une première fois et Lothaire prend la tête de l'empire. Mais le nouvel empereur n'est pas accepté par la population. Considéré comme un usurpateur, il est lâché en outre par ses deux frères, déçus de voir que leur frère aîné prend aussitôt tout le contrôle de l'empire sans tenir compte de leur participation. Quelques mois plus tard, l'empereur Louis est rétabli.

Cette première déchéance est suivie en 833 d'une seconde déposition beaucoup plus grave pour Louis le Pieux. Cette fois, devant tous les grands seigneurs du royaume, Lothaire contraint son père à abdiquer, et le fait enfermer au monastère Saint-Médard de Soissons. Judith et Charles sont également contraints à entrer en religion. Mais de nouveau, Louis est libéré par ses partisans, et sous peine de perdre tous ses droits à l'empire, Lothaire doit se soumettre et demander pardon à son père.

Les dernières années du règne de Louis le Pieux sont occupées par des luttes incessantes entre ses fils, des convocations sans nombre de l'armée, des serments prêtés et violés. Louis finit par se fâcher durablement avec son troisième fils Louis, roi de Bavière, qui refuse de demander pardon pour ses actes. Son deuxième fils, Pépin, roi d'Aquitaine, meurt brutalement en 838 et sa succession ouvre un nouveau conflit. Pour les grands seigneurs d'Aquitaine, l'Aquitaine revient de droit au fils aîné de Pépin, Pépin II, tandis que pour Judith, elle doit retourner à son fils, le jeune Charles. En 839, cette fois un nouvel accord qui partage seulement l'empire en deux est signé entre Lothaire et son demi-frère Charles. Louis de Bavière est spolié de tout droit à l'héritage, à l'exception de la Bavière.
En 840, Louis le Pieux, mimé par tous ces conflits, meurt dans une situation instable.

Le partage de l'empire

Après la mort de Louis Ier le Pieux, il reste trois fils vivants, Lothaire, fils aîné et héritier du titre impérial, Louis roi de Bavière, Charles roi de Francie occidentale. Lothaire choisit de ne pas respecter tous les traités signés et tente de mettre la main sur la totalité de l'empire, jugeant qu'il lui revient de droit, en tant que fils aîné. Les trois frères entrent en guerre ouverte les uns contre les autres. Le 25 juin 841, ils se rencontrent à côté d'Auxerre et se livrent une des batailles les plus meurtrières du haut Moyen Âge. Cette bataille voit la défaite de Lothaire, et l'artistocratie franque est presqu'entièrement décimée. Cependant, le nouvel empereur, malgré son armée en déroute, refuse de se rendre. Le 14 février 842, Louis et Charles concluent alors un accord connu sous le nom de serments de Strasbourg. Les deux rois jurent de se porter mutuelle assistance contre les actes de leur frère aîné et de ne pas chercher à se nuire l'un l'autre. Suite à ce serment, un nouvel accord est conclu, le traité de Verdun, en 843, qui divise le territoire d'est en ouest en trois royaumes :

Cependant, le titre impérial se vide de son importance : après le partage de Verdun, Lothaire conserve la dignité impériale, mais dans les faits celle-ci n’est plus qu’une convention qui ne correspond plus à aucun pouvoir qui soit supérieur à celui des autres rois. Plusieurs fois au cours du Xe siècle, le titre est même vacant. Il faut ensuite attendre 962 pour que le titre d’empereur renaisse en Occident : Otton le Grand, de la dynastie saxonne en Germanie, est couronné par le pape Jean XII à Rome.

L'affaiblissement de la dynastie carolingienne

Disparition de la Francie médiane

Lothaire est le premier des trois frères à décéder, laissant l'empire à la merci des deux autres. Finalement, après maintes péripéties, son domaine est progressivement rattaché à la Francie orientale, l'Escaut marquant la frontière entre les Francies occidentale et orientale. Et le roi de Francie orientale récupère, par la même occasion, le titre d'empereur.

Invasions scandinaves

Vikings à bord d'un bateau

Les Vikings désignent de manière générale tous les peuples du nord, qui viennent de l'actuelle Scandinavie. À l'époque carolingienne, ils ont d'abord été connus sous le nom de Normands ("les hommes du Nord", à l'origine du nom de la Normandie) puis sous celui de Vikings. Ils étaient connus en Occident au moins depuis quatre siècles à l'époque de Charlemagne[réf. nécessaire], et ils étaient des marchands complètement intégrés dans les structures commerciales. Ils vendaient de l'ambre, des peaux de bêtes et des métaux, achetaient du miel, du vin et tout ce qu'ils ne pouvaient produire dans leurs contrées. Ils étaient présents, en petits groupes, dans la plupart des villes côtières de l'empire franc.

Vers 800, les Vikings, sans renoncer aux pratiques commerciales, prennent conscience d'un nouveau moyen d'enrichissement. En effet, n'étant pas chrétiens, ils n'avaient pas à respecter les abbayes, qui contenaient, avec une structure défensive minimale (une muraille et parfois quelques gardes) un trésor considérable, constitué de châsses, reliquaires, objets en métal précieux à l'usage du culte... Ces objets étaient particulièrement recherchés en cette période de faible circulation monétaire où le métal était important, non seulement pour sa valeur, mais aussi pour le prestige qui lui était associé.

De 800 à 850 environ, les Vikings continuent leurs pratiques commerciales tout en tentant des coups de force sur des établissements monastiques isolés, quand l'occasion s'en présente. Le premier établissement à en faire les frais est le monastère de Lindisfarne, sur les côtes britanniques, qui est attaqué par les Vikings en 793.

Après cette première attaque, la pression des Vikings s’accentue : ils remontent les fleuves à bord de leurs navires à fond plat, improprement nommés « drakkars », et pillent les trésors des abbayes avant de s’en retourner en Scandinavie. Pour l'heure, il ne s'agit que d'expéditions de courtes durées : les Normands pillent, emportent des biens, et repartent, le plus souvent après avoir incendié les lieux. Ces attaques ne terrifient pas moins la population, par leur vitesse, leur violence, et aussi parce qu'elles touchent les églises, qui, depuis l'instauration du christianisme, n'avaient jamais été attaquées. En 841, les Normands attaquent l’abbaye de Jumièges et la ville de Rouen ; les moines doivent s’enfuir devant les dangers de razzias, emportant avec eux les reliques de leurs saints. L'île de Noirmoutier est elle aussi à plusieurs reprises la cible des Normands, tant et si bien que les moines abandonnent leur monastère et s'installent à environ vingt-cinq km au sud de Nantes, à Déas, devenu Saint-Philbert-de-Grand-Lieu. En 843, Nantes est prise et une partie de la population est massacrée. Dans le deuxième tiers du IXe siècle, la plupart des villes situées sur les fleuves sont visitées par les Normands.

À la fin du IXe siècle, le phénomène gagne en importance. Ce sont désormais des bandes beaucoup plus organisées, qui ont décidé à l'avance de leur parcours et qui savent où se rendre. Les expéditions sont aussi plus nombreuses, parfois une centaine de barques, contre une petite dizaine, au maximum, au début du siècle. Enfin, ils ne se contentent plus de piller et de repartir. De plus en plus souvent, ils emmènent la population pour être vendue comme esclave, et s'installent en territoire conquis où ils y passent parfois l'hiver.

Les Vikings ravagent l'Europe mais aussi la péninsule Ibérique, alors musulmane, et l'Afrique du Nord, sans que personne ne puisse les arrêter. Comme il était impossible de contrôler l'ensemble du territoire et que leur force résidait dans la rapidité de leurs flottes et la brutalité de leurs expéditions, il était difficile de prévoir à l'avance où ils allaient attaquer. Lorsqu'ils n'attaquent pas, les Vikings exigent le versement de lourds tributs. Les querelles entre les fils de Louis le Pieux n'arrangent guère la situation. Lothaire et son frère Louis se désintéressent du problème, qui incombe presque entièrement à Charles, le dernier fils, qui a hérité de tous les territoires côtiers. Charles, qui sera surnommé le Chauve, essaie de construire des fortifications supplémentaires. Il demande aux chefs de l’aristocratie de défendre les régions menacées. Robert le Fort (ancêtre de Capétiens) est placé par le roi à la tête d’une marche occidentale ; il meurt en combattant les Vikings en 866. Le comte Eudes défend Paris contre une attaque venue de la Seine en 885. Ces grands acquièrent un prestige immense dans la lutte contre l’envahisseur scandinave, prestige qui participe à l'affaiblissement du pouvoir royal. Les succès militaires sont désormais attribués aux marquis et aux comtes. L’incapacité des Carolingiens à résoudre le problème scandinave est manifeste : en 911, par le traité de Saint-Clair-sur-Epte, le roi Charles le Simple cède la Basse-Seine au chef viking Rollon. Il s’en remet à lui pour défendre l’estuaire et le fleuve, en aval de Paris. Cette décision est à l’origine de la création du duché de Normandie. Les Carolingiens sont contraints de céder des territoires et livrer des tributs pour contrer le danger scandinave. Ils sont en outre absorbés par les querelles familiales.

Le climat d’insécurité a donc accéléré la décomposition du pouvoir carolingien.

Nouvelles menaces à l'est

À l'est se profile une nouvelle menace avec l'arrivée des Magyars sur la scène européenne.

Ce peuple des steppes occupe la Pannonie, laissée vacante après la destruction des Avars sous le règne de Charlemagne au début du IXe siècle. Il fait ses premières incursions dans les marges du territoire impérial, comme en Moravie en 894, puis dans celui-ci, comme en Italie en 899. En 907, le royaume slave de Grande Moravie disparaît sous les coups de ces nouveaux envahisseurs.

Des règnes trop courts

À partir de la fin du IXe siècle, les rois carolingiens règnent trop peu de temps pour être efficaces : Louis II Le Bègue reste roi des Francs deux ans (877-879) ; Charles III le Gros gouverne trois ans (884-887) ; Louis III est roi pendant trois ans (879-882) ; le dernier roi carolingien, Louis V « le Fainéant », est mort d'un accident de chasse au bout d'à peine un an (986-987). Aussi, les derniers rois carolingiens ne parviennent pas à imposer une politique à long terme.

La montée de l'aristocratie

Dès la fin du IXe siècle, des aristocrates (ducs et comtes…) qui ne font pas directement partie de la famille des Carolingiens accèdent au pouvoir : en 888, après la mort de Charles le Gros, l'Unrochide Bérenger Ier accède au trône d'Italie.

Au Xe siècle, les dynasties qui s'imposent partout dans l'espace carolingien ne sont plus issues de la famille carolingienne. C'est le cas, en 911, du duc Conrad de Franconie, élu roi de Germanie. En France, les Robertiens forment un lignage puissant qui est choisi pour régner en 888898 en la personne d'Eudes de France : comment expliquer cette montée en puissance de l’aristocratie et l'émiettement du pouvoir royal ?

  • Voici le cadre et les principales phases de la montée de l'aristocratie :
    • Les regna existaient déjà sous les Mérovingiens et se prolongent sous les Carolingiens. Il s'agissait de territoires dont l'unité reposait sur une forte identité ethnique et culturelle. Un regnum pouvait être confié à la garde d'un fils du roi, sans pour autant devenir indépendant : ce fut le cas à différentes époques pour l'Aquitaine, la Provence, la Bourgogne, la Saxe, la Thuringe et la Bavière.
    • Les comtes (mot ayant pour origine le latin comes signifiant compagnon du roi) : existaient à l’époque mérovingienne; le roi leur donnait des terres, des cadeaux ou une charge en récompense de leurs services; mais les comtes prennent toute leur importance sous les Carolingiens; fonctionnaires, ils sont désignés et révoqués par le roi qui les recrute dans l’aristocratie; ils garantissent l’ordre public en présidant le tribunal, lèvent les taxes et organisent les troupes dans un pagus, circonscription territoriale sous leur responsabilité. Au cours du IXe siècle, les comtes deviennent de plus en plus autonome vis-à-vis du roi.
    • Le ducs (mot ayant une étymologie latine signifiant « conducteur d’armée ») : est une sorte de comte qui cumule plusieurs pagi. Le roi Charles le Chauve constitue ces grands commandements composés de plusieurs pagi pour lutter contre les invasions scandinaves. Les Robertiens obtiennent au Xe siècle le titre de « duc des Francs » (dux francorum). Ces personnages les plus puissants seront par la suite des « princes territoriaux » comme les ducs d’Aquitaine, de Bourgogne et de Normandie.
    • Le marquis (marchio en latin) est un comte qui garde une région frontalière appelée marche et doit la défendre en cas d’attaque.
    • À la fin du IXe siècle, conséquence du capitulaire de Quierzy (877), ces charges de comte, duc et marquis deviennent héréditaires : le roi carolingien ne peut plus les destituer donc son contrôle s'efface. On assiste alors à la constitution de dynasties locales de comtes, de ducs et de vassaux du roi. La vassalité, qui était bien contrôlée sous Charlemagne et servait ses intérêts politiques, se retourne contre l’autorité de ses successeurs. L’aristocratie laïque et ecclésiastique est donc en situation de force au milieu du Moyen Âge, en France et en Germanie.
    • Les comtes sont physiquement plus proches du peuple que le Carolingien. L’autorité du roi semble lointaine aux paysans. La majorité des hommes libres du royaume vivent au contact du comte et de son délégué le viguier. Ils les entendent par exemple au cours des séances du tribunal. Leur autorité est plus immédiate que celle du roi. Un lien étroit et personnel s’instaure donc : les paysans se placent sous la protection des Grands et entrent dans leur dépendance.
    • Au Xe siècle, les signes de l'autonomie princière se multiplient : les comtes et les ducs ont accaparé les fonctions publiques et les droits jusqu'ici réservés au roi. Ils édifient des tours et des forts, puis de véritables châteaux en pierre, sans autorisation. Après l’arrêt des invasions scandinaves, le château domine un territoire qui est tombé sous le ban d’un seigneur. Ils font frapper leur propre monnaie à leur effigie et à leur nom. Ils prennent sous leur protection le clergé et contrôlent les investitures épiscopales.

Au total, à la fin du Xe siècle, l’autorité centrale carolingienne a disparu au profit des aristocraties, en particulier des princes territoriaux ; c'est la fin de l’ordre caroligien et le triomphe des lignages aristocratiques.

L'avènement des Unrochides en Italie (875915)

L'exemple de l'avènement des Unrochides en Italie illustre à merveille la manière dont se passe la transition du pouvoir des Carolingiens vers les grands de l'aristocratie impériale, puis l'émiettement que connaît le pouvoir royal dans les mains de ces derniers.

Sous le règne du Carolingien Louis II d'Italie (850875), titulaire de la dignité impériale, le pouvoir royal peut sembler un temps renforcé en Italie. Mais ce dernier meurt sans héritier en 875. Le pouvoir est alors de fait aux mains de la dynastie des Widonides, dont le représentant détient la charge de duc de Spolète, et aux mains de la dynastie des Unrochides, dont le représentant détient la charge de marquis de Frioul.

Les membres de cette dernière famille sont des Francs : Évrard, leur ancêtre, a reçu la marche de Frioul dès la création de celle-ci en 837 par Lothaire Ier, et ils sont rattachés à la lignée carolingienne par leur mère Gisèle, fille de Louis le Pieux. En 875, les Unrochides considèrent encore le nord de la France (la région de Lille) comme l'un des centres de leur pouvoir. S'ils n'ont pas, au départ, de prétentions à briguer le pouvoir royal, ce sont la vacance de ce pouvoir en Italie et les circonstances difficiles à la fin du Xe siècle qui, en définitive, portent l'un d'entre eux (le marquis Bérenger Ier) à accéder au trône d'Italie, puis à l'empire.

Bérenger Ier, seul héritier mâle de sa famille en 874, en effet, soutient dans un premier temps les prétentions du Carolingien de Francie orientale au trône d'Italie. Les héritiers possibles sont alors Carloman, le fils de Louis le Germanique, puis son frère, Charles le Gros. À la mort du deuxième, toutefois, il n'y a plus aucun Carolingien qui soit en mesure d'asseoir son autorité en Italie.

Les rivaux traditionnels des Unrochides dans la péninsule, à savoir les Widonides de Spolète qui ont des possessions autour de Nantes, apparaissent alors comme des candidats potentiels au trône de Francie occidentale. Aussi, Bérenger accède personnellement au trône d'Italie en 887 : pour contrecarrer les ambitions des Widonides, il met ainsi fin, dans les faits, à l'idée de l'unité carolingienne.
Cependant, à ce moment l'homme ne dispose pas d'appuis dépassant le cadre régional et encore y est-il contesté, notamment par l'influence que prennent les Widonides sur la papauté (voir Pornocratie). Jusqu'à la mort de son compétiteur, le duc Lambert de Spolète, en 898, il ne contrôle pas le territoire italien. De plus, il est obligé de faire face à la menace hongroise. Lors de l'invasion du royaume d'Italie, en 899, il doit alors composer avec les cadres militaires carolingiens, c'est-à-dire réunir l'ost : les Italiens subissent une défaite sanglante.
À la suite de cet événement, la stratégie de Bérenger change : il accepte désormais de nombreux compromis avec les pouvoirs locaux : des enceintes sont érigées et échappent au contrôle royal ; l'autorité publique est conférée, sans contrepartie, à des évêques, etc. Le résultat de cette nouvelle politique est un émiettement important et irréversible de l'autorité royale dans la péninsule.
Faisant appel à des mercenaires hongrois contre les Italiens qui se rebellent contre son autorité, Bérenger accède finalement à la dignité impériale qu'il convoitait en 915, mais entre ses mains, celle-ci n'est plus que l'ombre du passé.


Évolution du système monétaire

Marchands au moyen âge

Sous les rois mérovingiens l'unique monnaie existante était en or. Sa valeur était telle, qu'elle ne servait qu'aux transactions internationales et dans le commerce de gros. Les petits marchands de détail ne pouvaient l'utiliser et devaient se rabattre sur le troc. L'inconvénient de ce système leur donnait l'impossibilité de réaliser des économies, car la plupart du temps c'étaient des matières périssables ou un service qui étaient échangés.

Denier d'argent sous Charlemagne

Avec l'avènement des Carolingiens, une nouvelle monnaie fit son apparition, celle en argent. Lors de l'Édit de Pîtres, la valeur de cette nouvelle monnaie fut fixée selon la valeur suivante : une pièce d'or vaut douze pièces d'argent[4]. La révolution économique étant au rendez-vous, les petits commerçants avaient enfin une monnaie adaptée à la valeur de leur petites marchandises et à la vie quotidienne des gens du commun. Avec cette nouvelle monnaie, les commerçants pouvaient enfin économiser le fruit de leur travail et financer des projets de plus en plus coûteux. L'apparition dans les grandes villes d'une nouvelle bourgeoisie et les foires marchandes qui devenaient des marchés permanents témoignent de cette richesse. Le succès fut tel que, l'argent devenant très rapidement de plus en plus rare, la monnaie constituée par ce métal commença à prendre de la valeur et se rapprocher de celle de l'or. Afin d'éviter une crise monétaire, il fut décidé d'alléger et de réduire la taille des pièces en argent tout en leur conservant la même valeur. Face à cette nouvelle monnaie d'argent, la méfiance était telle que les fonctionnaires royaux eurent recours à de véritables méthodes de terreur afin de la faire accepter.

Déclin du système militaire mérovingien

Les Francs ont toujours été une nation guerrière, cela se vérifiera aussi bien sous le règne des Mérovingiens que des Carolingiens. Ainsi sous Charles Martel, Pépin le Bref ou Charlemagne, chaque été fut une occasion de mener une expédition militaire. Ces guerres et leur organisation étaient décidées à l'assemblée générale annuelle, qui était composée de hauts aristocrates.

En principe tous les hommes libres étaient tenus d'assister aux expéditions ce qui est un héritage direct du système militaire mérovingien. Cependant, les campagnes militaires devenaient de plus en plus difficiles à mesure que le territoire s'étendait, de plus, le soldat ne recevait pas de solde et devait apporter soi-même sa nourriture, ses vêtements et ses armes. Ainsi à l'époque carolingienne le service militaire devenait la charge la plus lourde des hommes libres à cause de son coût mais aussi car ces expéditions rapportaient de moins en moins de butins de guerre. La conséquence était un appauvrissement général des soldats qui finissaient soit par vendre tous leurs biens lorsqu'ils possédaient quelque chose, soit entrer dans les ordres ou bien devenir simples brigands ou malfaiteurs.[5]

Charlemagne tentera en vain de remédier à cette situation en allégeant certaines charges, essentiellement en direction des soldats les plus pauvres, favorisant ainsi la cavalerie. Le prix de l'armement et de l'équipement des cavaliers était très élevé. Afin d'éviter d'avoir à payer cette lourde charge mais tout de même essentielle, les Carolingiens ont commencé à distribuer des terres à leurs vassaux directs afin qu'ils s'enrichissent par eux-mêmes et accomplissent leur service militaire dans la cavalerie. Finalement ces mesures ont permis l'apparition d'une véritable armée de métier dont les soldats, riches propriétaires terriens ou issus de la noblesse, étaient mieux équipés et mieux entraînés que leurs prédécesseurs.

Débuts de la féodalité

L'introduction de la vassalité et du « bénéfice » dans ce cas le fief, fut une des réalisations majeures des Carolingiens. Pleinement développé dans tous les États nés de la dislocation de l'Empire après l'époque carolingienne, ce système se nommera féodalité. En principe, la vassalité était fondée sur un engagement privé entre hommes libres, dont l'un, le vassal, se mettait au service d'un autre et qui en échange de la protection de ce dernier, le reconnaissait pour seigneur. La vassalité existait déjà à l'époque mérovingienne, car dans des sociétés où l'ordre public était quasiment inexistant, l'insécurité ambiante obligeait les personnes à chercher un protecteur. La véritable innovation des Carolingiens fut que le seigneur était de plus en plus amené à récompenser son vassal en lui fournissant des terres ou d'autres biens qu'on appelait « bienfait » ou « bénéfice », et qu'à partir du Xe siècle on appela « fief », complément et contrepartie désormais du vasselage. Le second avantage de cette pratique était que, le seigneur n'avait plus à entretenir directement les vassaux comme ce fut le cas auparavant. Les terres données aux vassaux provenaient des domaines royaux mais aussi et de plus plus en plus (notamment à cause des insuffisances des réserves royales), sur les biens des monastères et des églises. La féodalité carolingienne permit l'émergence d'une nouvelle noblesse qui allait fournir en premier lieu les cadres de l'armée et sa section la plus efficace, la cavalerie lourde. De plus, dans les lointaines régions ou celles nouvellement acquises, les vassaux royaux formèrent de véritables entreprises coloniales comme ce fut le cas en Aquitaine par exemple. Enfin la vassalité a permis aux rois carolingiens, comme Pépin et Charlemagne, de fidéliser et ainsi de mieux contrôler les comtes.

La renaissance carolingienne

Article détaillé : Renaissance carolingienne.

L'instruction

Charlemagne initiant l'école

Les Francs, peuple barbare comparé aux Gallos-Romains, ont peu à peu pris place en Gaule et, hormis quelques monastères qui avaient conservé les textes latins, la société franque restait en général illettrée et ignorait aussi bien les sciences religieuses que profanes. Cette situation perdura sous Charles Martel et Pépin le Bref ou son frère Carloman qui, bien que n'étant pas analphabètes, avaient d'autres priorités (notamment militaires et politiques) plus importantes que l'éducation et l'organisation d'écoles.

C'est avec Charlemagne que cette situation changea. Lui même avait reçu une éducation supérieure à ses prédécesseurs, il connaissait le latin et dans une moindre mesure le grec, il avait aussi des notions en mathématiques et en astronomie. L'Empire carolingien s'étant appauvri au niveau de l'instruction, Charlemagne dut faire appel à des enseignants venus des pays anglo-saxons ou de Lombardie.

Charlemagne qui était une personne pieuse avait le souci de la pureté des textes religieux. C'est pourquoi appela l'Anglo-Saxon Alcuin en 782 afin qu'il révise les textes religieux présents en Gaule. Aussi la "renaissance carolingienne" fut initiée dans un premier temps afin de fournir à l'Église des membres éduqués et maîtrisant les différentes disciplines religieuses. Charlemagne ordonna que dans les monastères et églises soient créés des écoles et des ateliers de copie des textes religieux. À partir de cette impulsion religieuse, l'Empire carolingien allait initier un véritable renouveau intellectuel et littéraire à travers tout le territoire de la Gaule. [6]


L'essor des arts et des lettres

Très rapidement, les Francs font revivre le passé latin de la Gaule bien éloigné de la culture barbare des premiers mérovingiens. Aix la Chapelle où Charlemagne avait établi sa cour, fut très rapidement appelée la "Rome nouvelle" par Alcuin tant les arts et la poésie y foisonnaient. De nombreux clercs et dignitaires qui y venaient, étaient tellement impressionnés qu'ils n'hésitaient pas, au retour dans leur fief, à imiter Charlemagne; ceci avait pour effet de déplacer lentement le centre de gravité de l'éducation carolingienne d'Aix la Chapelle vers le centre de la Gaule.

Malgré le fait que les héritiers de Charlemagne étaient nettement moins portés sur l'éducation, l'œuvre intellectuelle et littéraire ne disparut pas. Relayés par les monastères et les églises, cet âge d'or de l'époque carolingienne dura plusieurs siècles. Encore aujourd'hui, la plupart des livres latins présent en Gaule ne nous sont parvenus que par l'action de Charlemagne, sans laquelle tout un pan de l'histoire de France aurait été perdu.

Notes et références

  1. Édmond Robinet La France (1845), p. 50
  2. Page 37 dans Histoire du peuple suisse par le texte et par l'image de Paul-Otto Bessire (1940)
  3. Page 65 dans Les maisons royales et souveraines d'Europe de Roland Mousnier (1989)
  4. Georges Duby, Histoire de France, p. 200
  5. Histoire de France, Georges Duby page 171
  6. Histoire de France, Georges Duby page 181

Voir aussi

Articles internes

Bibliographie

  • Pierre Riché, Les Carolingiens, une famille qui fit l'Europe, Hachette, coll. « Pluriel », Paris, 1983 (réimpr. 1997), 490 p. (ISBN 2-01-278851-3) 
  • Pierre Riché, Dictionnaire des Francs vol. 2. Les Carolingiens, éd. Bartillat, 1997 (ISBN 2841001253)

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