Achilléon

Achilléon

Achilleion

L'Achilleion
Bundesarchiv Bild 102-13309, Korfu, Schloss Achilleion.jpg
LAchilleion en 1932.
Informations géographiques
Coordonnées 39° 20′ 04″ Nord
       19° 32′ 29″ Est
/ 39.3345, 19.5415
Pays Grèce Grèce
Localité Gastouri (Corfou)
Informations générales
Date d'ouverture 1962
Collections Objets ayant appartenu à l'impératrice Élisabeth d'Autriche et au Kaiser Guillaume II d'Allemagne
Nombre d'œuvres Inconnu
Superficie 200 000 m2
Informations visiteurs
Visiteurs / an Inconnu
Adresse Αχιλλειοι 49084, Grèce
Site officiel http://www.corfu-casino.gr/default_en.html
LAchille blessé d'Ernst Herter est l'emblème de lAchilleion.

LAchilleion ou Achilléon (en grec moderne : Αχίλλειο ou Αχίλλειον) est un palais néoclassique de style pompéien situé en périphérie du village de Gastouri, dans le dème dAchilleio, sur lîle grecque de Corfou.

Construit en 1889-1891 en lhonneur du héros homérique Achille par limpératrice Élisabeth dAutriche-Hongrie (plus connue sous le nom de « Sissi »), il est racheté par le Kaiser Guillaume II dAllemagne en 1907 puis occupé par les troupes françaises et serbes, qui en font un hôpital militaire pendant la Première Guerre mondiale.

Après la signature du traité de Versailles, lAchilleion est nationalisé par lÉtat grec en guise de réparations de guerre. Occupé par les troupes de l'Axe pendant la Deuxième Guerre mondiale, il est rendu à la Grèce à la Libération puis transformé en casino et en musée en 1962. Aujourd'hui, même si la résidence accueille sporadiquement des sommets européens (comme lors de la signature du traité de Corfou en 1994), cest surtout un musée dédié à ses deux plus célèbres propriétaires.

Sommaire

Situation géographique

Vue sur l'île de Pontikonissi.

Le palais de l'Achilleion se trouve sur la côte orientale de Corfou, dans le dème d'Achilleio, auquel il a d'ailleurs donné son nom.

Situé en périphérie du village de Gastouri, au fond de la baie de Benitses, il se trouve à une dizaine de kilomètres au sud-ouest de Corfou ville[1]. Placé au sommet d'une colline, à 145 mètres d'altitude, il domine la Mer Adriatique et offre une vue panoramique sur l'îlot de Pontikonissi[2],[3] et sur la ville de Corfou[4].

Le palais et ses jardins

Lentrée du palais

Le domaine de lAchilleion souvre sur un portail monumental dont la grille métallique est rehaussée dune inscription dorée qui rappelle le nom grec du palais (Αχίλλειον)[5]. De part et dautre de cette inscription se trouvent des chevaux ailés tandis que des méandres et dautres figures géométriques composent la grille.

Une fois le portail traversé, un chemin conduit le visiteur vers le bâtiment principal du palais. À lentrée de celui-ci, une statue dÉlisabeth dAutriche de taille réelle[5] rappelle que la villa était autrefois la propriété de limpératrice et que cest elle qui en a imaginé la conception[N 1].

Le bâtiment et ses collections

La façade principale de l’'Achilleion. Deux centaures et quatre muses y ornent les terrasses.

LAchilleion est une vaste demeure néoclassique de style pompéien[6] en marbre blanc[2] construite par larchitecte italien Raffaele Caritto en 1889-1891[7]. Sétendant sur environ 200 000 m2, le palais comprend 128 pièces[8] réparties sur un rez-de-chaussée et deux étages. Du temps de Sissi, le rez-de-chaussée était réservé à limpératrice tandis que les étages devaient accueillir lempereur François-Joseph et larchiduchesse Marie-Valérie[9]. Aujourdhui, seul le rez-de-chaussée se visite même si le premier étage du palais nabrite plus de casino.

Sur la façade principale, des colonnes de facture dorique soutiennent une terrasse encadrée de centaures en marbre. En haut du premier étage, une autre terrasse abrite quatre muses de bronze brandissant des flambeaux. Un Hermès ailé tenant dans les mains une déclaration orne par ailleurs le côté gauche de cette façade[9].

Lentrée du palais donne sur un vaste vestibule dont le plafond est orné dune fresque du peintre italien Callopi (ou Gallopi), Les Quatre saisons et les heures[N 2], se mêlent angelots et allégories. Dans la partie droite de ce hall, on peut voir une copie d'un portrait de limpératrice Élisabeth âgée de 21 ans par Winterhalter[9] et, dans la partie gauche, une cheminée en marbre gris ornée de statuettes[10].

Le Triomphe dAchille de Franz Matsch. Sur cette fresque, Achille, debout sur un char, tire la dépouille dHector devant les portes de Troie.

En face de lentrée, un escalier monumental, fait de marbre et de bronze, est entouré des statues de Zeus (à droite) et d'Héra (à gauche)[9]. Cet escalier, inspiré de celui de lOpéra Garnier[6], conduit à une vaste fresque. Peint par Franz Matsch, Le Triomphe dAchille[N 3] représente la victoire du héros grec sur le prince troyen Hector[10] et rappelle au visiteur quil se trouve dans un palais dédié au personnage homérique.

À droite de lescalier, on peut observer la chapelle catholique de Sissi, dont le chœur est orné dune œuvre représentant le jugement du Christ par Ponce Pilate[10]. Au-dessous, un autre tableau représente une Vierge à l'Enfant par Franz Matsch. Plusieurs statues et dautres tableaux dinspiration religieuse complètent la décoration de la chapelle[9].

Bureau de Sissi à l'Achilleion.

À proximité de la chapelle, se trouvent deux salons qui conservent de nombreux souvenirs de limpératrice Élisabeth et du Kaiser Guillaume. Dans la pièce consacrée à lépouse de François-Joseph, se trouvent différents bibelots et autres menus objets ayant appartenu à la souveraine tandis que, dans celle dédiée à Guillaume II, une maquette du yacht Hohenzollern et différents tableaux rappellent le goût du Kaiser pour la mer et la navigation[10],[6].

À gauche de lescalier du vestibule, se trouve la salle à manger-fumoir de Sissi, dont les murs bleus sont semés dangelots en stuc[6]. Cette pièce abrite aujourdhui les bureaux du musée[9]. Dans le prolongement, deux autres salles contiennent des meubles ayant appartenu à Sissi et au Kaiser. On peut notamment y observer le lit de fer à roulettes de la souveraine ou encore son bureau. Lune de ces pièces conserve également une œuvre du peintre bavarois Ludwig Thiersch représentant la rencontre dUlysse et de la princesse phéacienne Nausicaa[9].

Terrasses, jardins et statues

Le Musicien aux cymbales devant le Péristyle des Muses et la Galerie des Philosophes. La fontaine située à doite du Musicien est bordée de fleurs multicolores.

À droite de la façade du bâtiment principal, lEscalier des dieux, orné des statues de différentes divinités (comme Apollon, Aphrodite, Artemis ou Hermès), conduit aux jardins en terrasses de l'Achilleion[5],[4] qui descendent jusqu'à la mer[11]. , une abondante végétation, composée notamment de myrtes, de citronniers, doliviers et de lauriers roses, offre un cadre ombragé au visiteur[12].

En haut de lescalier, accolé au palais, se trouve le Péristyle des muses, aux colonnes de style ionique. Celui-ci abrite les statues des neuf filles de Zeus et de Mnémosyne[9] ainsi que celles des Trois Grâces antiques[5]. D'une porte-fenêtre du Péristyle des muses, on aperçoit le haut du grand escalier du bâtiment principal et la fresque du Triomphe d'Achille auquel il mène[5]. Le long du mur du péristyle se trouve également la Galerie des philosophes, un groupe de treize bustes représentant des philosophes, des poètes et des orateurs de l'Antiquité[5].

Le Péristyle des muses se prolonge par une vaste terrasse plantée de palmiers, de cyprès et de bougainvilliers qui porte le nom de Jardin des muses. Au centre de celle-ci, dans une fontaine, une statue représente un énorme poisson emportant, avec lui, le corps d'un homme ligoté[5]. Juste à côté, une autre statue, le Musicien aux cymbales, contraste par son air plus insouciant.

LAchille victorieux de Johannes Götz est aujourdhui situé à la place de lAchille mourant d'Ernst Herter. Cest cependant ce dernier qui reste le symbole de lAchilleion.

Face au Péristyle des muses, de lautre côté de la terrasse, on peut observer la Véranda des larmes. Ce banc de marbre, en demi-cercle adossé face à la mer, doit son nom au fait que l'impératrice Élisabeth s'y installait régulièrement pour pleurer son fils Rodolphe ou pour y attendre l'arrivée du navire apportant le courrier à Corfou[5].

Dautres statues ornent encore la terrasse. Le couple dit des « Assaillants » marque la fin du Jardin des muses puisque, entre les deux combattants, un petit escalier conduit le visiteur de la première terrasse à une seconde. Également boisée, celle-ci abrite aujourdhui lAchille mourant d'Ernst Herter, qui se trouvait, du temps de Sissi, à la place de lAchille victorieux de Johannes Götz. Malgré le déplacement quelle a subie, l'œuvre d'Herter constitue, aujourdhui encore, la pièce maîtresse des collections du musée et symbolise véritablement la villa.

Finalement, le colossal Achille victorieux, qui mesure plus de 11 mètres, domine la dernière terrasse du palais, gardant l'emplacement il a autrefois été installé sur ordre du Kaiser Guillaume II[5].

Du temps de Sissi, se trouvait également, dans le jardin, un petit temple rotonde qui abritait une statue du poète Heinrich Heine par le Danois Louis Hasselriis[11]. Mais, en 1908, la statue fut revendue par le Kaiser[13] et remplacée par une statue de limpératrice [14]. Par la suite, le temple fut détruit et la statue déplacée à lentrée du palais, on peut encore la voir aujourdhui.

Histoire

L'impératrice Élisabeth et la Grèce

Article connexe : Élisabeth de Wittelsbach.
Portrait de l'impératrice Élisabeth d'Autriche par Winterhalter (1864).

L'impératrice Élisabeth dAutriche-Hongrie se rend, pour la première fois, à Corfou, en mai 1861. À lépoque, les Îles ioniennes nappartiennent pas encore à la Grèce et la souveraine, qui voyage à bord du yacht anglais Victoria-and-Albert II, y est accueillie par le gouverneur britannique Henry Knight Storks. Immédiatement, l'impératrice est charmée par l'île, sa végétation et son climat : elle oublie alors Madère, destination exotique qui a pourtant été son premier refuge alors quelle fuyait la cour viennoise, et décide de revenir plus tard à Corfou[15].

Les années qui suivent, Sissi, de plus en plus fascinée par la civilisation hellénique, arpente la Grèce et l'Asie mineure, sans se préoccuper des tensions qui secouent les Balkans ou de la gêne que peut causer, à la famille royale grecque, la visite de la cousine du roi Othon Ier, déposé en 1863 et remplacé sur le trône hellène par un prince danois. En octobre 1885, l'impératrice visite ainsi les ruines de Troie et se recueille sur le tombeau d'Achille, son héros mythologique préféré[16].

Carte topographique de Corfou.

En octobre 1887, Élisabeth se rend une nouvelle fois en Grèce, décidée, cette fois, à y suivre les pas d'Ulysse. Elle fait alors la connaissance du baron Alexander von Warsberg, consul d'Autriche-Hongrie à Corfou. Brillant helléniste, celui-ci sert de guide à l'impératrice dans son périple à travers les îles de l'Égée. Le voyage de l'impératrice se termine finalement sur la côte de lÉpire et à Corfou, le diplomate reprend son poste[17].

L'année suivante, Sissi revient à Corfou et s'installe à la Villa Vraila (ou Villa Braila) de Gastouri. Elle y entame l'étude du grec ancien et moderne, avec un avocat que le baron von Warsberg lui a recommandé comme professeur[18]. Tout au long de sa vie, l'impératrice reçoit les cours de quatre répétiteurs successifs (parmi lesquels maître Thermojanis, Rhousso Rhoussopoulos et Constantin Christomanos[19]) et elle parvient finalement, grâce à eux, à dominer parfaitement la langue grecque.

Le palais de Sissi

Le Péristyle des Muses à l'Achilleion.

Après un nouveau séjour à Corfou en novembre 1888, Sissi prend la décision de sy faire bâtir un palais[20]. Elle rachète à son ami, le riche corfiote Petros Vrailas Armenis, la Villa Vraila et la fait remplacer par un palais dédié au héros antique Achille quelle commande à larchitecte italien Raffaele Caritto[7]. Sissi, passionnée par lœuvre dHomère[21], désire en effet rendre hommage à ce personnage tragique dont elle a déjà placé une statue dans le parc du château de Miramare en 1885[22]. Selon elle, Achille incarne, en effet, « lâme grecque et la beauté de ce paysage et de ce peuple »[23].

Ne pouvant superviser elle-même la construction du palais, limpératrice charge le baron von Warsberg den diriger les travaux[20]. Cependant, le consul est un homme âgé et il meurt en mai de lannée suivante, bien avant que lAchilleion soit totalement terminé. La souveraine demande donc à un officier de marine, le baron von Bukovicz (ou Bukovitch), de le remplacer dans cette tache[24],[23]. De fait, la mort mystérieuse de larchiduc Rodolphe, seul fils de limpératrice Élisabeth, à Mayerling, le 30 janvier 1889, rend plus pressant le besoin de la souveraine de séloigner de Vienne et de reprendre sa vie derrance[25].

L'Achille blessé, vu de face. En bas de la statue, on distingue la signature de l'artiste (E. Herter) et la date de sa création (1884).

La construction de lAchilleion prend fin en octobre 1891 et cest Sissi elle-même qui soccupe de sa décoration[26],[N 4]. Pour cela, elle achète au prince Borghèse une série de statues à lantique représentant le héros mythologique. Parmi celles-ci, l'Achille blessé (ou Achille mourant) du sculpteur allemand Ernst Herter constitue la pièce centrale de lensemble[27]. Limpératrice fait, par ailleurs, venir de Vienne différents meubles et objets, dont un de ses portraits par Franz Xaver Winterhalter[28]. La vaisselle est placée sous le signe du dauphin et lon retrouve lanimal à la fois sur largenterie, la verrerie, la porcelaine et le linge de maison[26].

En mars 1891, Sissi fait découvrir sa demeure à son époux, lempereur François-Joseph, et à sa fille cadette, larchiduchesse Marie-Valérie, lors dune visite des Habsbourg en Grèce[29].

Statues des Assaillants, dans le Jardin des Muses.

Malgré son désir de sétablir à Corfou, Sissi garde le goût des voyages et elle ne réside finalement que quelques mois de lannée à lAchilleion[21]. En son absence, le palais peut être visité par les touristes de l'époque, après avoir obtenu l'autorisation du consul autrichien de Corfou[11].

Après cinq ou six ans de ce régime, l'impératrice, lassée, envisage de revendre sa résidence ionienne[30],[21]. Cependant, le palais corfiote reste, toute sa vie, lune de ses résidences favorites et la souveraine sy rend presque à chaque printemps jusquà son assassinat par lanarchiste italien Luigi Luccheni, à Genève, en 1898. L'impératrice porte d'ailleurs, en permanence, sur elle un minuscule album qui contient des photographies de son palais et de ses jardins[27].

Après la mort dÉlisabeth dAutriche, cest sa fille cadette, larchiduchesse Marie-Valérie, qui hérite de la villa. Mais la princesse refuse de sy rendre et lAchilleion est abandonné pendant plusieurs années tandis quune partie des collections quil abritait (dont une statue de l'archiduc Rodolphe[12]) est envoyée en Autriche-Hongrie. Certains souvenirs, comme le lit de fer à roulettes de Sissi, restent tout de même dans le palais, on peut encore les voir aujourdhui[21].

La résidence du Kaiser

Article connexe : Guillaume II dAllemagne.
Portrait du Kaiser Guillaume II à l'Achilleion.

Le Kaiser Guillaume II dAllemagne sintéresse très tôt à lAchilleion. Il visite pour la première fois le palais en novembre 1890, alors que celui-ci nest même pas encore terminé[31]. Comme limpératrice Élisabeth, Guillaume II est en effet fasciné par le personnage dAchille : cest cependant la force et le talent guerrier du héros qui séduisent le souverain et non sa destinée tragique, comme c'est le cas avec Sissi[27].

Après la mort de limpératrice, le Kaiser manifeste rapidement à lempereur François-Joseph Ier et à larchiduchesse Marie-Valérie sa volonté de racheter lAchilleion. Cependant le prix de la demeure empêche, dans un premier temps, le souverain de réaliser son projet et il doit donc se contenter de fréquents séjours à Corfou à bord du yacht Hohenzollern[32].

Guillaume II rachète finalement le palais en 1907[33], après deux ans de négociations[34],[N 5]. Le souverain en fait alors sa résidence méditerranéenne et il y séjourne plusieurs semaines, chaque printemps, entre 1908 et 1914[27]. Toujours accompagné dune suite importante, il est reçu, à chaque fois, par le roi Georges Ier de Grèce, qui ne laime pas mais veut ainsi lui montrer qui est le véritable souverain des lieux[35]. Lorsque l'empereur est absent, le palais peut être visité par les touristes de l'époque, après avoir acquitté un droit d'entrée de 2 drachmes[13].

Le bureau et le tabouret (en fait, une selle transformée) du Kaiser.

Lempereur imprime rapidement sa marque à la résidence. Il la restaure en faisant appel au même architecte que Sissi[36] et y adjoint un grand bâtiment destiné à accueillir sa suite[34]. Guillaume II modifie également lorganisation des statues des jardins. Il déplace lAchille blessé dErnst Herter et le remplace par limposant Achille Victorieux de Johannes Götz. Au pied de cette statue, lempereur fait inscrire en allemand la dédicace suivante : « Au plus célèbre des Grecs, le plus célèbre des Allemands »[27]. Le Kaiser fait, par ailleurs, enlever la statue d'Heinrich Heine, le poète préféré de Sissi[N 6]. À la place, il érige une statue de taille réelle de limpératrice défunte quil commande au sculpteur Herter[14],[37].

Le Kaiser profite de ses fréquents séjours à Corfou pour participer à des fouilles archéologiques autour de Garitsa. Avec Wilhelm Dörpfeld, il découvre ainsi plusieurs objets antiques qui sont aujourdhui exposés au musée archéologique de lîle[38],[34]. Les visites de Guillaume II à lAchilleion permettent également de faire de Corfou un important centre de la diplomatie européenne[7].

De la Première à la Seconde Guerre mondiale

À partir de 1916, la Triple Entente occupe lîle de Corfou et larmée serbe, défaite par les troupes austro-hongroise, y est transférée en attendant dêtre envoyée à Thessalonique. Mais le royaume de Grèce ayant déclaré sa neutralité pendant la Première Guerre mondiale, la France et ses alliés se gardent d'installer leur quartier général à lAchilleion[39]. Cependant, la villa est transformée en hôpital militaire par les Français et les Serbes. Une partie des collections est subtilisée[40] tandis que des dégradations se produisent. Larmée française fait ainsi effacer la dédicace grandiloquente quavait fait apposer le Kaiser sur le socle de lAchille victorieux de Götz[4].

Des soldats italiens occupant Corfou pendant la Seconde Guerre mondiale.

En 1917, le roi des Hellènes Constantin Ier, beau-frère du Kaiser Guillaume, est renversé et le gouvernement dElefthérios Venizélos déclare la guerre à lAllemagne. Avec le Traité de Versailles de 1919, le palais est nationalisé par la Grèce en guise de réparation de guerre[40]. En 1925[41], une partie des collections du palais est vendue aux enchères et dispersée tandis que le bâtiment est utilisé pour abriter différents services gouvernementaux[7].

En 1937, une partie du bâtiment est transformée pour accueillir les collections du musée de Corfou[42].

Pendant la Deuxième Guerre mondiale, les forces de lAxe occupent Corfou. Les Italiens, puis les Allemands, utilisent lAchilleion comme quartier-général et comme hôpital. Le bâtiment subit alors de nouvelles dégradations[40].

Entre casino et sommets européens

Une fois la guerre terminée, la villa est replacée sous la houlette de l'État grec, qui y installe des écoles et un jardin d'enfants[43]. Mais, en 1962, lÉtat confie, pour vingt ans, la résidence à une compagnie privée d'origine allemande[44],[43]. Celle-ci fait du premier étage de la villa le premier casino grec de l'après-guerre[44] tandis que le rez-de-chaussée du palais est transformé en musée consacré à ses deux plus illustres occupants : limpératrice Élisabeth et le Kaiser Guillaume[7]. Le baron von Richthofen, gérant de la société, fait alors en sorte de récupérer une partie des objets ayant autrefois appartenu aux collections du palais[43].

En 1988, la société qui gère lAchilleion décide de transférer progressivement le casino en-dehors du palais. En 1991, la salle de jeu fonctionne à la fois dans le palais et au Corfu Holiday Palace hotel de Kanoni. Puis, en 1992, le casino est définitivement déplacé[44].

Finalement, à partir des années 1990, lAchilleion retrouve un peu du rôle diplomatique quil possédait sous le règne de Guillaume II. En 1994, le traité de Corfou, qui consacre le quatrième élargissement de l'Union européenne, est signé dans le palais et, en 2003, une rencontre informelle des ministres de lagriculture de l'Union s'y tient[7].

LAchilleion dans la culture populaire

Roger Moore, alias James Bond, sur le tournage d'un film, en 1979.

Dans la littérature

  • Operation Akhilleus, le roman despionnage de Rachel Fleurotte et de Frank Jeannot paru aux éditions Manuscrit en 2006, a pour cadre le palais de lAchilleion[45].
  • Dans Captain from Corfu, le roman de Muriel Maddox paru chez Sunstone Press en 1999, les personnages effectuent une visite à l'Achilleion pendant leur séjour corfiote[46].
  • Dans Le Colosse de Maroussi, Henry Miller critique le palais, qu'il considère comme « le pire exemple de pacotille tape-à-l'œil qu'[il a] jamais vu »[47].

Au cinéma

En 1981, le premier étage de l'Achilleion est utilisé pour la scène du casino de l'épisode de James Bond, Rien que pour vos yeux, de John Glen[48].

Annexes

Bibliographie

Guides touristiques

  • (fr) Dominique Auzias et alii, « Sur les traces de Sissi à Corfou » dans Îles grecques, Athènes, Le Petit Futé, coll. Country guide, 2007, p. 480-481 (ISBN 2746917920)
  • (fr) David Brabis (dir.), Grèce continentale, Îles ioniennes, Michelin Éditions, 2007, p. 362 (ISBN 2067122835)
  • (fr) Eva Cantavenera et alii, Grèce, Le Guide Vert, Michelin Éditions, 2007, p. 530-531 (ISBN 2067121839)

Histoires de l'Achilleion

  • (fr) Jeremy Barton et Marc Walter, « Histoire dun lieu : lAchilleion de Corfou » dans Connaissance des Arts n° 621, novembre 2004, p. 114-119.
  • (fr) Jean des Cars et Jérôme da Cunha, « Les mirages de Corfou » dans Sur les pas de Sissi, Perrin, Paris, 1998, p. 85-89 (ISBN 2262014639)
  • (de) Constantin Christomanos, Das Achilles-Schloss auf Corfu, C. Gerold's Sohn, Vienne, 1896.
  • (fr) Jérôme Coignard et Marc Walter, Palais romantiques des dernières cours dEurope, Gallimard, 2003 (ISBN 9782070117314)

Ouvrages à caractère biographique

  • (fr) Christian Baechler, Guillaume II d'Allemagne, Fayard, Paris, 2003 (ISBN 2213615578)
  • (fr) Marc Blancpain, Guillaume II, 1859-1941, Perrin, Paris, 1998 (ISBN 2262014663)
  • (fr) Jean des Cars, Sissi ou la fatalité, Perrin, Paris, 2003 (ISBN 226202068X)
  • (en) Lamar Cecil, Wilhelm II: Emperor and exile, 1900-1941, volume II, The University of North Carolina Press, 1996. (ISBN 0807822833)
  • (en) John Van der Kiste, Kings of the Hellenes: The Greek Kings, 1863-1974, Sutton Publishing, 1994 (ISBN 0750921471)

Informations touristiques de l'Achilleion

Panneau touristique dans les jardins de l'Achilleion.

Autres liens externes

Photos et vidéos de l'Achilleion

Sites touristiques

Autres sites consacrés à l'Achilleion

Liens internes

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Galerie photo

Notes et références

Notes

  1. C'est le Kaiser Guillaume II qui a fait ériger cette statue en hommage à l'impératrice Élisabeth vers 1908. Jeremy Barton et Marc Walter, « Histoire dun lieu : lAchilleion de Corfou » dans Connaissance des Arts n° 621, novembre 2004, p. 114 et 118.
  2. L'œuvre est aussi nommée plus simplement Les Quatre saisons.
  3. L'œuvre est aussi nommée parfois Achille vainqueur d'Hector.
  4. Limpératrice aurait dépensé 3,5 millions de dollars de lépoque pour bâtir et meubler le palais. « Heines statue to stay » dans The New York Times du 9 juin 1907.
  5. Le Kaiser aurait dépensé un peu plus dun million de dollars de lépoque pour racheter le palais. « Heines statue to stay » dans The New York Times du 9 juin 1907.
  6. Sissi, admiratrice fervente dHeinrich Heine, acquiert, en 1891, une statue du poète par Louis Hasselriis. Limpératrice pense alors offrir lœuvre à la ville de Hambourg mais cette-dernière refuse le cadeau et la souveraine décide dinstaller la statue dans les jardins de son palais corfiote. Lœuvre arrive à lAchilleion en 1892 et limpératrice la fait installer au cœur dun temple monoptère. Mais, en 1907, lempereur Guillaume II, ennemi farouche dHeine quil qualifie de « pire saligaud de tous les poètes allemands », rachète lAchilleion. Le Kaiser décide donc de se débarrasser de la statue qui est revendue à Heinrich Julius Campe, fils de lancien protecteur du poète, en 1908. Lœuvre effectue donc son retour à Hambourg elle reste jusquà la veille de la Deuxième Guerre mondiale. En 1939, la fille de Campe fait transférer la statue en France, elle est déclarée perdue afin déchapper à sa destruction programmée par les nazis. Finalement, lœuvre est offerte à la ville de Toulon en 1956 et on peut encore ladmirer aujourd'hui dans le parc du Mourillon. Voir Christian Quadflieg « Monument: Heinrich Heine » sur Denk(mal) an Heine, avril 2006.

Références

  1. « Welcome to Achilleion » sur le site officiel de l'Achilleion.
  2. a et b Jean des Cars et Jérôme da Cunha, Sur les pas de Sissi, Perrin, Paris, 1998, p. 85.
  3. Dominique Auzias et alii, « Sur les traces de Sissi à Corfou » dans Îles grecques, Athènes, Le Petit Futé, coll. Country guide, 2007, p. 480.
  4. a, b et c « Outside the palace » sur Sidari-Corfu.net.
  5. a, b, c, d, e, f, g, h et i « Achilleion » sur le site du roman Opération Akilleus.
  6. a, b, c et d David Brabis (dir.), Grèce continentale, Îles ioniennes, Michelin, 2007, p. 362.
  7. a, b, c, d, e et f Information du Ministère grec du Tourisme à lAchilleion (voir photographie).
  8. « Les poésies dune impératrice » dans M. Grimberg et alii, Recherches sur le monde germanique, Regards, approches, objets, Presses de lUniversité Paris-Sorbonne, 2003, p. 412 (ISBN 2840503034)
  9. a, b, c, d, e, f, g et h « Inside the palace » sur Sidari-Corfu.net.
  10. a, b, c et d « Tour » sur le site officiel de lAchilleion.
  11. a, b et c Baedecker's Greece, 1894, p. 10-11.
  12. a et b Jeremy Barton et Marc Walter, « Histoire dun lieu : lAchilleion de Corfou » dans Connaissance des Arts n° 621, novembre 2004, p. 118.
  13. a et b Gustave Fougères, Grèce, Guide Joanne, Hachette, 1911, p. 474.
  14. a et b « To remove Heines statue » dans The New York Times du 29 avril 1908.
  15. Jean des Cars, Sissi ou la fatalité, Perrin, Paris, 1997, p. 169.
  16. Jean des Cars, op. cit., p. 382.
  17. Jean des Cars, op. cit., p. 393-394.
  18. Jean des Cars, op. cit., p. 400-401.
  19. Jean des Cars, op. cit., p. 400, 427 et 431.
  20. a et b Jean des Cars, op. cit. , p. 402.
  21. a, b, c et d Jean des Cars et Jérôme da Cunha, op. cit., p. 89.
  22. Jean des Cars, op. cit., p. 375.
  23. a et b Jeremy Barton et Marc Walter, op. cit., p. 117.
  24. Jean des Cars, op. cit., p. 426.
  25. Jean des Cars, op. cit. , p. 415.
  26. a et b Jean des Cars, op. cit., p. 433.
  27. a, b, c, d et e Jean des Cars et Jérôme da Cunha, op. cit., p. 86.
  28. Jean des Cars et Jérôme da Cunha, op. cit., p. 88.
  29. Jean des Cars, op. cit., p. 431.
  30. Jean des Cars, op. cit., p. 436.
  31. Jean des Cars, op. cit., p. 427.
  32. Marc Blancpain, Guillaume II, 1859-1941, Perrin, Paris, 1998, p. 81.
  33. Marc Blancpain, op. cit., p. 89-90.
  34. a, b et c « Kaiser of Germany » sur le site officiel de lAchilleion et du casino de Corfou.
  35. John van der Kiste, Kings of the Hellenes, The Greek Kings, 1863-1974, Sutton Publishing, 1994, p. 66-67.
  36. « Heines statue to stay » dans The New York Times du 9 juin 1907.
  37. « Lexpulsion dHenri Heine » dans LAbeille de La Nouvelle-Orléans du 15 mai 1908.
  38. Lamar Cecil, Wilhelm II: Empereur and exile, 1900-1941, volume II, The University of North Carolina Press, 1996, p. 52 et 302.
  39. Raymond Poincaré, Neuf Années au service de la France, tome VIII, p. 25 et 31. (Lire sur Gallica).
  40. a, b et c « During the great wars » sur le site officiel de l'Achilleion.
  41. Le Figaro du 6 septembre 1925. (Lire sur Gallica).
  42. Brève dans Chronique, Revue d'histoire ecclésiastique, vol. 33, n° 4, octobre 1937, p. 954.
  43. a, b et c ACHILLEION, La résidence de l'impératrice Elisabeth (Sissi) sur Corfou, guide évasion.
  44. a, b et c « History of the Casino » sur le site officiel de lAchilleion.
  45. Rachel Fleurotte et Frank Jeannot, Operation Akhilleus, Manuscrit, 2006. (ISBN 2748170008)
  46. Muriel Maddox, Captain from Corfu, Sunstone Press, 1999, p. 58-60 (ISBN 0865342873)
  47. Henry Miller, Le Colosse de Maroussi, LGF, Livre de Poche, 1983 (ISBN 2253032026)
  48. Site officiel du film Rien que pour vos yeux.
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