Benjamin Constant de Rebecque

Benjamin Constant de Rebecque

Benjamin Constant

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Benjamin Constant
Portrait de Benjamin Constant (1767-1830)
Portrait de Benjamin Constant (1767-1830)

Activité(s) romancier, essayiste
Naissance 25 octobre 1767
Lausanne
Décès 8 décembre 1830
Paris
Mouvement(s) libéralisme, romantisme
Œuvres principales

Benjamin Constant de Rebecque, né à Lausanne le 25 octobre 1767, décédé à Paris le 8 décembre 1830, inhumé au cimetière du Père-Lachaise (division 29), est un homme politique et écrivain franco-suisse.

Sommaire

Biographie

Benjamin Constant naît le 25 octobre 1767 à Lausanne, fils de Louis-Arnold-Juste Constant de Rebecque (colonel dans un régiment suisse au service de la Hollande, à Huningue en septembre 1772) et d’Henriette-Pauline de Chandieu (morte en couches le 10 novembre suivant), dans une famille descendant de réfugiés huguenots du début du XVIIe siècle. Suivant son père constamment en voyage, il achèvera ses études à l'université de Nuremberg en Bavière (1782), puis en Écosse à l'université d'Édimbourg (1783). Il passe la plus grande partie de sa vie en France, en Suisse et en Grande-Bretagne. En 1787, il rencontre à Paris Mme de Charrière, avec laquelle il entame une liaison et une longue correspondance. Son père l'attache en mars 1788 comme chambellan à la cour de Brunswick, où il épouse le 8 mai 1789 Johanne Wilhelmine Luise, dite Minna, baronne de Cramm (1758-1825), dame d'honneur de la duchesse de Brunswick, Augusta de Hanovre, et devient conseiller de légation.

Le 11 janvier 1793, il rencontre Charlotte de Hardenberg (1769-1845), fille d'un conseiller de légation et nièce de Hardenberg, mariée depuis 1787 à Wilhelm Albrecht Christian, baron de Mahrenholz (1752-1808), avec laquelle il se lie d'amitié. Charlotte divorce, tandis que les Constant se séparent fin mars 1793, avant d'engager en juin 1794 une procédure de divorce, lequel est prononcé le 18 novembre 1795[1],[2],[3]. Après le départ de Constant en août 1794, Charlotte se remarie à Brunswick le 14 juin 1798 avec le vicomte Alexandre Maximilien du Tertre (1774-1851), un émigré français.

Il entretient de 1794 à 1810 une liaison fameuse avec Germaine de Staël, et la richesse de leurs échanges intellectuels au sein du Groupe de Coppet en fait l'un des couples les plus en vue de leur époque. Il échange une longue correspondance avec sa cousine Rosalie pour qui il a beaucoup d'affection. Il est très actif dans la vie publique durant la deuxième moitié de la Révolution française puis sous la Restauration française.

Vie politique

Quittant la Suisse, Benjamin Constant arrive à Paris avec Mme de Staël le 25 mai 1795 et fait ses débuts politiques. Il publie les « Lettres à un député de la Convention » dans les Nouvelles politiques, nationales et étrangères de Suard (24-26 juin 1795). Le 15 octobre 1795, le Comité de salut public exilant Mme de Staël, il la suit dans son retour en Suisse.

Mi-avril 1796, il publie sa première brochure politique importante : De la force du gouvernement actuel et de la nécessité de s’y rallier, insérée dans Le Moniteur. Fin mai-début juin 1797, il publie Des effets de la Terreur à la suite de la seconde édition de De la force du gouvernement actuel et de la nécessité de s’y rallier. Après la coup d'État du 18 fructidor an V, il sollicite auprès de Paul Barras, dans une lettre datée du 27 mars 1798, d'être agréé par le gouvernement comme candidat officiel, mais sans succès. Devenu orateur au Cercle constitutionnel de la rue de Lille, qui réunit les républicains modérés, il s'oppose au club de Clichy.

Le 9 novembre 1799, au soir du 18 brumaire, qui porte au pouvoir Bonaparte, il s’installe à Paris avec Mme de Staël. Le 24 décembre, il est nommé membre du Tribunat, où avec d'autres libéraux, il s'oppose à la monarchisation du régime, s'opposant à l'établissement des tribunaux spéciaux, et participe à la rédaction définitive du Code civil. Le 5 janvier 1800, il prononce au Tribunat son premier discours, qui le fait apparaître comme le leader de l'opposition libérale, dans lequel il dénonce « le régime de servitude et de silence » qui se prépare. L'été 1801 voit son départ pour la Suisse, et, le 17 janvier 1802 il est éliminé du Tribunat.

Éloigné de Paris avec Mme de Staël sur l'ordre de Napoléon en 1803, il passe en Allemagne. À Weimar, il rencontre Friedrich von Schiller, Johann Wolfgang von Goethe, Christoph Martin Wieland et Johann Gottfried von Herder. Nommé membre de l'académie de Göttingen, il traduit en vers français le Wallenstein de Schiller (1809).

En décembre 1804, il retrouve à Paris Charlotte de Hardenberg, avec laquelle il entame une liaison en octobre 1806. Charlotte et le vicomte du Tertre divorcent en 1807 et, Mme de Staël ayant refusé de l'épouser après le décès de son mari, il se marie secrètement avec Charlotte à Besançon le 5 juin 1808[4]. Entré vers la même époque en relations avec Bernadotte, il est décoré de l'Étoile polaire.

En 1814, il fait paraître De l'esprit de conquête et d'usurpation dans leurs rapports avec la civilisation actuelle, hostile à Napoléon. Par l'entremise de Mme Récamier, il est chargé par la reine de Naples de défendre ses intérêts au Congrès de Vienne. Sous la Première Restauration, il défend l'alliance des Bourbons avec l'héritage issu de la Révolution dans Le Journal des Débats. Aussi, quand lui parvient la nouvelle du retour de l'île d'Elbe de Napoléon, il publie le 19 mars 1815 un article dans lequel il le traite « d'Attila, de Gengis Khan, plus terrible, plus odieux encore », affirmant: « Je n'irai pas, misérable déserteur, me traîner d'un pouvoir à l'autre, couvrir l'infamie par le sophisme, et bégayer des paroles profanées pour racheter une existence honteuse ». Puis il part pour Nantes avec l'idée de s'exiler aux États-Unis, avant de rentrer à Paris, où Napoléon le fait appeler le 14 avril pour lui demander un projet de constitution.

Rallié à l'Empire, il est nommé au Conseil d'État (20 avril 1815) et participe à la rédaction de l’Acte additionnel (24 avril 1815). Il formule sa théorie du régime parlementaire dans Principes de politique applicables à tous les gouvernements représentatifs (29 mai 1815).

Après la seconde abdication de Napoléon, il se réfugie à Bruxelles (1er novembre 1815), puis en Angleterre (27 janvier 1816), bien que sa condamnation à l'exil, prononcée le 19 juillet 1815, ait été révoquée par le Roi le 24 juillet suivant, et y publie Adolphe.

Benjamin Constant reprend la route de Paris le 27 septembre 1816, suite à la dissolution de la Chambre des députés des départements, le 10. Opposé aux Ultras, il fait paraître Des moyens de rallier les partis en France, collabore au Mercure, fonde La Minerve et fait des conférences à l'Athénée. Candidat à Paris aux élections d'octobre 1818, il échoue de quelques voix du fait de l'opposition du ministère. Toutefois, le 25 mars 1819, il est élu député de la Sarthe avec 667 voix sur 1 051 votants et 1 490 inscrits. Siégeant dans l'opposition libérale, il défend les principes de la Charte, s'oppose à la loi contre la liberté de la presse et les lois d'exception. En juin 1822, après une polémique dans la presse, il se bat en duel avec Forbin des Issarts. Réélu lors des élections de 25 février 1824 député du 4e arrondissement de Paris par 737 voix sur 1 355 votants 1 475 inscrits. Contestée à cause de sa nationalité suisse, son élection est finalement validée. Puis, lors des élections du 17 novembre 1827, il est réélu à la fois dans la circonscription de la Seine, où il obtient 1 035 voix sur 1 183 votants et 1 291 inscrits, et dans le 2e arrondissement électoral du Bas-Rhin (Strasbourg), avec 124 voix sur 243 votants et 268 inscrits ; il choisit la seconde. Durant ces deux législatures, il s'oppose aux lois sur le sacrilège, sur le droit d'aînesse (1826) et « de justice et d'amour » contre la presse (1827). L'un des 221 en 1830, il est réélu à Strasbourg le 23 juin 1830 par 201 voix sur 275 votants et 296 inscrits.

Chef de file de l'opposition libérale de gauche (connue sous le nom des « Indépendants »), il est l'un des orateurs les plus éloquents de la Chambre des députés. Passé sans enthousiasme dans l'opposition dynastique après les ordonnances de juillet, il contribue à l'avènement de Louis-Philippe, qui le soulage de ses soucis financiers en lui faisant un don de 300 000 francs, tout en protestant que « la liberté passe avant la reconnaissance ». Le 27 août 1830, après l'abdication de Charles X, le 2 août, il est nommé président d’une section au Conseil d’État. Réélu le 21 octobre 1830 avec 208 voix sur 237 votants et 279 inscrits, il prononce son dernier discours à la Chambre le 19 novembre. Malade, il décède le 8 décembre. Des funérailles nationales lui sont organisées le 12 décembre 1830. Lors de la cérémonie, des jeunes gens veulent porter son cercueil au Panthéon, mais ils en sont empêchés. Un député ayant également sollicité cet honneur, la proposition est mise au vote, mais n'obtient pas la majorité.

L'affaire Wilfrid Regnault

En 1817, il prend fait et cause pour Wilfrid Regnault. Celui-ci, accusé d'avoir assassiné une veuve à Amfreville, un village de Normandie, est condamné à mort le 29 août 1817 par la Cour d'assises de l'Eure. Ce jacobin normand avait vécu à Paris et était soupçonné d'avoir participé aux massacres de septembre sous la Révolution.

Benjamin Constant, à la suite du jeune Odilon Barrot, avocat de Regnault, estime que la réputation de Regnault a contribué grandement à sa condamnation. Le maire d’Amfreville-la-Campagne est en effet un noble, ancien député ultra de la Chambre introuvable de 1815. Il a participé à l’enquête, et s’est par la suite avéré l’auteur d’une note, parue dans la presse, calomnieuse à l’égard de Regnault. Constant reprend tous les éléments de l’enquête et poursuit comme publiciste la démarche que les avocats de Regnault avaient initiée : il confronte les témoignages, fait dresser un plan du village d'Amfreville, répertorie les incohérences et les contradictions des témoignages et lance une campagne de presse en faveur de Regnault, analysant toutes les incohérences de l'accusation une à une, avec autant de précision, de verve et de rigueur que Voltaire dans l'affaire Calas.

Les différentes voies judiciaires n’ayant pas abouti à sauver la tête de Regnault, le dernier recours est en effet l’instance royale, au moyen de l’opinion publique. Constant obtient, à la suite de la publication de deux brochures intitulées Lettres à Odilon Barrot, et de la campagne de presse qui suit, la commutation de la peine en vingt ans d'emprisonnement (au grand dam des ultras) à défaut de la reconnaissance de son innocence et de la grâce. Regnault sortira de prison en octobre 1830, et n'aura jamais rencontré Benjamin Constant.

À travers cette affaire particulière, c'est le droit, pour chaque personne, de combattre une décision judiciaire inique que défendait Constant. Dans un article paru dans la Minerve en mars 1818, il explique : « Encore un mot sur le procès de Wilfrid-Regnault », il écrit : « C'est aujourd'hui plus que jamais que les formes doivent être respectées [...], que tout Français a le droit de s'enquérir si on les observe, si toutes les vraisemblances ont été pesées, tous les moyens de défense appréciés à leur juste valeur. » Il ajoutait que « mille motifs se réunissent pour entraîner les hommes, sans qu'ils s'en doutent, hors de la ligne, devenue étroite et glissante, de la scrupuleuse équité[5]. »

Ses idées

Les commentateurs ont longtemps tenu le libéralisme de Constant pour une simple rationalisation de l'égoïsme et de l'intérêt matériel ou comme un écran idéologique au triomphe d'un gouvernement élitiste. Ces reproches, comme ceux qui associent Constant à une girouette, datent de l'époque même de Constant, et l'historien polémiste Henri Guillemin s'en est fait l'un des plus bruyants porte-parole.

Depuis une trentaine d'années cependant, les travaux sur les écrits, les manuscrits et la pensée de Constant ont complètement invalidé cette vision. L’édition des Principes de politique (1806-1810), manuscrit resté inédit jusqu’en 1980, a constitué un moment important à cet égard. On s'est de même rendu compte de l'unité de l'œuvre de Constant, loin des images de girouette: tant que les principes qu’il promeut peuvent être appliqués, peu lui importe en somme le mode de gouvernement (république, Empire ou monarchie constitutionnelle), d'où cette image qui lui a longtemps collé à la peau de serviteur déloyal aux régimes qui l'emploient.

Constant se distingue de ses aînés Rousseau et Montesquieu quant à sa vision du pouvoir de l'État. Pour lui, en schématisant, peu importe l'origine ou la nature du pouvoir (monarchie, république…) du moment qu'il est déployé de façon acceptable: le peuple reste souverain, sans quoi ce serait la règne de la force, mais son pouvoir doit s'arrêter au seuil de l'individu. Le bonheur et les besoins de la société ne recouvrent pas nécessairement ceux des individus: il faut donc conjuguer le pouvoir du peuple avec la protection de ceux-là. La société ne saurait avoir tous les droits sur l’individu; il est des choses sur lesquelles la collectivité et les lois n'ont pas à s'exprimer, qu'elles n'ont pas le droit d'interdire, et que les individus ont le droit de faire: c'est ainsi que Constant donne une définition de la liberté. Il ajoute que l'homme souffrant naturellement du besoin d'agir et du plaisir à se croire nécessaire, le pouvoir occupé par un homme tend en général à s’accroître: il faut ainsi prendre des précautions contre le pouvoir lui-même (plutôt que contre l'homme qui le possède), comme d’une arme qui pourrait tomber en des mains incertaines: «c’est contre l’arme et non contre le bras qu’il faut sévir»[6]. «Toute autorité qui n'émane pas de la volonté générale est incontestablement illégitime. […] L'autorité qui émane de la volonté générale n'est pas légitime par cela seul […]. La souveraineté n'existe que d'une manière limitée et relative. Au point où commence l'indépendance de l'existence individuelle, s'arrête la juridiction de cette souveraineté. Si la société franchit cette ligne, elle se rend aussi coupable de tyrannie que le despote qui n'a pour titre que le glaive exterminateur. La légitimité de l'autorité dépend de son objet aussi bien que de sa source»[7]. Constant théorise ainsi l'expérience vécue sous la Terreur: le peuple souverain sans limite conduit à des formes aussi abominables que la plus brutale monarchie de droit divin.

La multiplication des pouvoirs pour limiter les pouvoirs entre eux peut mener, selon Constant, à une escalade indésirable et à une forme de tyrannie du nombre: plus les bénéficiaires et les lieux du pouvoir sont nombreux, plus violente risque d’être leur tyrannie ainsi démultipliée. Pour Constant, les garanties constitutionnelles et l'opinion publique constituent les plus sûrs garde-fous à un emballement du pouvoir étatique, d'où l'importance qu'il accorde dans ses écrits, particulièrement pendant la Restauration, à la liberté de la presse: «Toutes les barrières civiles, politiques, judiciaires deviennent illusoires sans liberté de la presse»[8]. Sans elle, le peuple se détacherait entre autres des affaires publiques; l'activité et l'émulation des écrits permettent aux esprits d'être stimulés, de parvenir à plus de pénétration et de justesse. Constant a une vision perfectibiliste de l’histoire.

Il insiste également sur la garanties des formes, en particulier judiciaires, en tant que rempart contre l'arbitraire et les abus, arguant que la seule utilité n'est pas un principe satisfaisant ni suffisant: «L'on peut trouver des motifs d’utilité pour tous les commandements et pour toutes les prohibitions. […] C’est avec cette logique que de nos jours on a fait de la France un vaste cachot»[9]. A la Chambre, le 3 mai 1819, il combattra aussi ce système qui dit qu'il vaut mieux prévenir les délits que les punir, «système toujours mis en avant par le despotisme pour enchaîner les innocents, sous le prétexte qu'ils pourraient bien devenir coupables; système qui s'étend d’un individu à tous les individus, d'une classe à toutes les classes, et ourdit un vaste filet dans lequel tous, sous le prétexte d’être garantis, se trouvent enveloppés». Constant soutient que le gouvernement doit absolument respecter les formes, c’est-à-dire ne pas céder à la violence illégitime, à l'arbitraire, à l'injustice ou à l'irrégularité, même contre ses ennemis, sous prétexte de perdre de sa légitimité, du respect qu'il doit inspirer, et de sacrifier le but qu'il veut atteindre aux moyens trop importants qu'il y emploie.


Auteur libéral, c'est de l'Angleterre plus que de la Rome antique qu'il tire son modèle pratique de la liberté dans de vastes sociétés commerçantes. Il établit en effet une distinction entre la « liberté des Anciens » et celle des « Modernes ». Il définit la première comme une liberté républicaine participative conférant à chaque citoyen le pouvoir d'influer directement sur la politique à travers des débats et des votes à l'assemblée publique. Le pendant de ce pouvoir politique est « l'asservissement de l'existence individuelle au corps collectif », la liberté individuelle étant totalement soumise aux décisions du corps politique. Pour assurer la participation à la vie politique, la citoyenneté est un lourd fardeau et une obligation morale nécessitant un investissement considérable en temps et en énergie. En général ceci ne peut se faire sans une sous-société d'esclaves chargée de l'essentiel du travail productif, permettant ainsi aux citoyens de se consacrer aux affaires publiques. En outre, la « liberté des Anciens » concerne des sociétés homogènes et de petite taille, dans lesquelles la totalité des citoyens peut sans difficulté se rassembler en un même lieu pour débattre.

La « liberté des Modernes », par opposition, est selon Benjamin Constant fondée sur les libertés civiles, l'exercice de la loi, et l'absence d'intervention excessive de l'État. La participation directe des citoyens y est limitée : c'est la conséquence nécessaire de la taille des États modernes. C'est aussi le résultat inévitable du fait d'avoir créé une société commerçante dépourvue d'esclaves dont tous les membres ou presque sont dans l'obligation de gagner leur vie par leur travail. Dans ces sociétés, les citoyens élisent des représentants, qui délibèrent en leur nom au parlement et leur épargnent ainsi la nécessité d'un engagement politique quotidien.

De plus, Constant pense que le commerce, qui vaut mieux que la guerre, est naturel aux sociétés modernes. En conséquence, il critique les appétits de conquête de Napoléon comme non libéraux et non adaptés à l'organisation des sociétés modernes, fondées sur le commerce. La liberté ancienne tendrait naturellement vers la guerre, tandis qu'un État organisé selon les principes de la liberté moderne serait en paix avec toutes les nations pacifiques.

En plus de ses travaux littéraires et politiques, Constant a travaillé durant une quarantaine d'années sur la religion et le sentiment religieux. Ses ouvrages témoignent d'une ambition de saisir un phénomène social inhérent la nature humaine qui, dans les formes qu'il prend, est soumis au concept de perfectibilité. Si les formes se figent, la rupture est inévitable: les formes que prend le sentiment religieux doivent donc s'adapter et évoluer.

Constant refuse à l'autorité politique le droit de se mêler de la religion de ses sujets, même pour la défendre. Il estime que chaque individu doit pouvoir conserver le droit de trouver où il le souhaite consolation, morale et foi: «L'autorité ne peut agir sur la conviction. Elle n'agit que sur l'intérêt»[10]. Il condamne de même la vision d'une religion vulgairement utile, au nom de la dégradation du sentiment.

Œuvres

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Essais

  • De la force du gouvernement actuel de la France et de la nécessité de s'y rallier (1796)
  • Des réactions politiques (1797)
  • Des effets de la Terreur (1797)
  • Fragments d'un ouvrage abandonné sur la possibilité d'une constitution républicaine dans un grand pays (publié en 1991 chez Aubier, ouvrage inédit probablement rédigé entre 1795 et 1810)
  • De l'esprit de conquête et de l'usurpation dans leurs rapports avec la civilisation européenne (1814)
  • Réflexions sur les constitutions, la distribution des pouvoirs et les garanties dans une monarchie constitutionnelle (1814)
  • Principes de politique applicables à tous les gouvernements représentatifs (1815)
  • Mémoires sur les Cent-Jours
  • Cours de politique constitutionnelle (1818-1820)
  • « De la liberté des Anciens comparée à celle des Modernes » (célèbre discours prononcé en 1819)
  • De la religion considérée dans sa source, ses formes et son développement (1824-1830)
  • Appel aux Nations chrétiennes en faveur des Grecs. (1825)
  • Mélanges de littérature et de politique (1829)
  • Du polythéisme romain considéré dans ses rapports avec la philosophie grecque et la religion chrétienne (1833)
  • Correspondance de Benjamin Constant et d'Anna Lindsay - L'Inconnue d'Adolphe, publiée par la baronne Constant de Rebecque. (Plon, 1933).

Romans

Affaire Wilfrid Regnault

  • Lettre à M. Odillon-Barrot, avocat en la Cour de Cassation, sur l'affaire de Wilfrid Regnault, condamné à mort (1818 puis publié chez P. Plancher en 1819)
  • Deuxième lettre à M. Odillon-Barrot, avocat en la Cour de Cassation, sur l'affaire de Wilfrid Regnault, condamné à mort (1818 puis publié chez P. Plancher en 1819)
  • De l'appel en calomnie de M. le marquis de Blosseville, contre Wilfrid-Regnault (1818 puis publié chez P. Plancher en 1819)

Bibliographie

  • « Benjamin Constant : l'illusion lucide du libéralisme », préface à Benjamin Constant, Ecrits politiques, collection «Pluriel»,Paris, L.G.F., 1980 (textes choisis, présentés et annotés par Marcel Gauchet).
  • Henri Guillemin, Benjamin Constant, muscadin, Paris, Gallimard, 1958
  • Georges Poulet, Benjamin Constant par lui-même, Paris, Éditions du Seuil, 1968, 188 p.
  • Andrew Oliver, Benjamin Constant, écriture et conquête du moi, Paris, Lettres modernes, 1970, 285 p.
  • Kurt Kloocke, Benjamin Constant : une biographie intellectuelle, Genève, Droz, 1984, 374 p.
  • Émile-François Callot, La Pensée libérale au XIXe siècle à travers trois moments de sa formation : Benjamin Constant, Alexis de Tocqueville, Lucien A. Prévost-Paradol, Lyon, L'Hermès, 1987, 146 p. (ISBN 2-85934-192-7)
  • Béatrice Fink (dir.), Benjamin Constant : philosophe, historien, romancier et homme d'État (actes du colloque de l'université du Maryland, octobre 1989), Lausanne, Institut Benjamin Constant ; Paris, J. Touzot, 1991, 186 p.
  • Tzvetan Todorov, Benjamin Constant : la passion démocratique, Paris, Hachette littératures, 1997, 214 p. (ISBN 2-01-235329-0)

La critique

  • Le critique Charles Du Bos (1882-1939) a dit de lui : « l'égal de quiconque (...) mais, pas plus que son esprit, sa langue ne témoigne d'aucun indice national. Elle est classique mais sans le "tour" classique. »

Voir aussi

Source partielle

Notes et références

  1. Daniel Robert, « Constant (de Rebecque), Henri Benjamin », dans Jean-Marie Mayeur, Yves-Marie Hilaire, André Encrevé (dir.), Dictionnaire du monde religieux dans la France contemporaine, Éditions Beauchesne, 1993, 531 pages, p. 138-140 (ISBN 2701012619).
  2. « Benjamin Constant », dans Jean-Claude Polet, Patrimoine littéraire européen, tome 10: « Gestation du romantisme, 1778-1832 », De Boeck Université, 1998, 1200 pages, p. 645-647.
  3. Dominique Verrey, Étienne Hofmann, Chronologie de la vie et de l'œuvre de Benjamin Constant, Slatkine, 1992, tome I, 740 pages (ISBN 2051011990).
  4. Jean René Derré, introduction à Wallstein : tragédie en cinq actes et en vers, de Benjamin Constant, Les Belles lettres, 1965, 262 pages, p. 4; Germaine de Staël-Holstein, Correspondance générale: 9 novembre 1805 - 9 mai 1809 (édition établie par Béatrice Watson Jasinski), Klincksieck, 1993, 671 pages, p. 622 (ISBN 2252027797).
  5. La Minerve, tome 1, p. 266, mars 1818.
  6. Principes de politique, Livre I, chapitre VI
  7. Principes de politique, Livre II, chapitre I
  8. Principes de politique, Livre VII, chapitre III
  9. Principes de politique, Livre III, chapitre I
  10. Principes de politique, Livre VIII, chapitre IV

Liens externes


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