- Bataille de La Croix-Avranchin
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La bataille de La Croix-Avranchin (ou deuxième combat de La Croix-Avranchin) opposa Républicains et Chouans pendant les guerres de la Chouannerie.
Sommaire
Prélude
Saint-Georges-de-Reintembault était une commune patriote encerclée par des paroisses acquises aux Chouans et avait déjà résisté à plusieurs de leurs attaques. Toutefois, le blocus des Chouans réduisait Saint-Georges-de-Reintembault aux abois et le général Delaunay, commandant à Avranches, décide d'envoyer une colonne pour la ravitailler. Aimé Picquet du Boisguy est rapidement informé de ce mouvement, n'ayant qu'environ 1 500 hommes avec lui, il envoie l'ordre à Bonteville de le rejoindre avec sa colonne. Mais Bonteville, ralenti par le mauvais temps, ne peut arriver à temps et les Chouans laissent passer le convoi républicain qui peut se rendre à Saint-Georges-de-Reintembault. Il y eut juste un petit accrochage entre une ou deux compagnies républicaines et quelques Chouans surpris à Saint-James, ces derniers prennent la fuite et laissent un mort.
Récit de Toussaint du Breil de Pontbriand « Du Boisguy apprit qu'une colonne de deux mille hommes devait venir d'Avranches à Saint-Georges, pour ravitailler la garnison de ce poste, réduit aux abois parce qu'il le tenait toujours bloqué. Il résolut de l'attaquer et envoya l'ordre à Bonteville de venir le joindre, à cet effet, avec la colonne Brutale. Bonteville fut retardé par le mauvais temps, et, malgré sa diligence, il ne put arriver que lorsque l'ennemi était déjà rendu à Saint-Georges[1]. »
— Mémoires de Toussaint du Breil de Pontbriand
La bataille
Selon le général républicain Delaunay, la colonne républicaine de Richon était forte de 800 hommes, et les Chouans « plus du quadruple ». D'après le colonel de Pontbriand, officier chouan mais n'étant pas présent au combat, les Républicains ont 2 000 hommes, il ne fixe pas précisément les forces de du Boisguy, cependant il chiffre la colonne de Bonteville à 1 200 hommes[1], quant à la colonne du Centre elle est généralement estimée à environ 1 500 soldats.
Le général chouan du Boisguy décide de tendre une embuscade au retour de la colonne entre Saint-James et Pontorson. Le combat se serait engagé dans un champ situé au peu au-delà du village de Saint-Benoît, au nord de Saint-James, à l'angle de la route de Saint-James à Avranches et de celle de Saint-Benoît à La Croix-Avranchin par les villages de l'Épine et du Bois[2]. Le mauvais temps persistant, lorsque Boisguy arrive au lieu choisi pour l'embuscade, il apprend que des troupes républicaines viennent de passer. Les chouans passent alors à l'attaque et chargent l'avant-garde républicaine qu'il prennent, suite à un renseignement erroné, pour l'arrière-garde. N'étant forte, selon Pontbriand, que de 200 hommes, celle-ci, totalement dépassée par le nombre, prend la fuite vers Pontaubault, n'opposant presque aucune résistance. Les Chouans se lancent à sa poursuite et se dispersent. Mais constatant le faible nombre de ses adversaires, Boisguy doute de ses renseignements et rappelle ses troupes. À ce moment le gros des troupes républicaines, commandé par l'adjudant-général Richon, apparait en bon ordre[1].
Les Chouans encore présents avec Boisguy ne sont plus que 600, espérant l'arrivée de la colonne de Bonteville en renfort, ils tentent néanmoins de résister. Richon fait donner la charge et en un quart d'heure, les Républicains enfoncent les lignes chouannes qui prennent la fuite, poursuivies par les Républicains[1].
Cependant les Républicains se dispersent également dans la poursuite, et le colonel Auguste Hay de Bonteville arrive sur le champ de bataille avec 1 200 hommes. Les Chouans se divisent en trois colonnes et attaquent les Républicains de flanc. Boisguy, lui-même, rallie ses hommes à La Croix-Avranchin et contre-attaque à son tour. Malgré tout, les Républicains résistent de tous les côtés, mais l'arrivée de Dauguet à la tête de la colonne normande décide de la victoire. Les Républicains sont mis en déroute et prennent la fuite vers Pontorson[1].
Récit de Toussaint du Breil de Pontbriand « Du Boisguy prit alors la résolution d'aller attendre les Républicains à leur retour, sur la route entre Saint-James et le Pont-Aubault; mais le mauvais temps continuait, et il ne put prendre position au lieu où il voulait dresser son embuscade qu'au moment où l'avant-garde républicaine venait de passer. Un paysan lui dit que c'était l'arrière-garde, et, sans autres informations, il ordonna de l'attaquer. Il n'avait autour de lui, dans ce moment, que sa colonne du Centre et quelques compagnies normandes. Cette avant-garde, composée de deux cents hommes, ne fit presque aucune résistance et prit la fuite vers le Pont-Aubault ; les Normands et plusieurs compagnies de la colonne du Centre se mirent à sa poursuite. Ce fut alors que du Boisguy, réfléchissant qu'il avait peut-être été trompé par un faux rapport, envoya Sans-Chagrin pour rappeler ses troupes. A peine celui-ci était-il parti, qu'il aperçut le corps principal venant de Saint-Georges, commandés par l'adjudant-général Richon, qui marchait contre lui on bon ordre. Il ne lui restait pas plus de six cents hommes ; cependant, l'espoir que Bonteville ne pouvait manquer d'arriver le détermina à tenir tête à l'ennemi. Il fit prendre à ses troupes les meilleures positions que le terrain put lui présenter, et il accueillit les Républicains par une fusillade bien soutenue ; mais, après un quart d'heure de combat, se voyant chargé de toutes parts et bientôt environné, il voulut faire sa retraite. Il n'en était plus temps ; ses troupes enfoncées prirent la fuite, et lui-même, obligé de les suivre, fut poursuivi par cette masse d'ennemis jusqu'à la Croix-Avranchine, à plus d'une lieue du point où l'action avait commencé. Mais le général républicain fit la même faute que du Boisguy avait faite à l'attaque de l'avant-garde : il laissa ses troupes se débander pour poursuivre les Royalistes. Pendant ce temps, Bonteville, qui ne voulait donner sur l'ennemi qu'après l'action engagée, marchait en bon ordre avec douze cents hommes. Il fut étonné de la direction que prenait la fusillade ; néanmoins il la suivait dans sa marche, et ce fut seulement auprès du bourg de la Croix qu'il fut assuré que du Boisguy était en déroute et vivement poursuivi. Il forma aussitôt trois colonnes sous les ordres du chevalier de Saint-Gilles et de Boismartel, et lui-même, à la tête de la première, attaqua l'ennemi en flanc. Aussitôt que Richon entendit le bruit de cette nouvelle fusillade, qui se prolongea bientôt sur toute sa ligne, il voulut reformer ses troupes, mais il était trop tard ; du Boisguy avait déjà rallié, dans le bourg de la Croix, toutes ses compagnies, et, irrité par la déroute qu'il venait d'éprouver, il s'élança sur l'ennemi avec une nouvelle ardeur. D'abord, les Républicains se battirent avec beaucoup de vaillance et firent face de tous côtés, mais Dauguet, que le capitaine Sans-Chagrin était allé rappeler, avait eu le temps de rallier ses compagnies et arriva dans ce moment. Sans-Chagrin forma la tête de cette nouvelle attaque avec trois compagnies de la colonne du Centre, qu'il avait réunies ; il enfonça les Républicains, et ce fut lui qui décida la victoire[1]. »
— Mémoires de Toussaint du Breil de Pontbriand
Conséquences
Dans la soirée, à Avranches, le général Delaunay apprend la défaite de Richon. Ayant promis un rapport, il écrit :
« L'alarme donnée hier à Avranches, citoyens, était d'autant plus outrée que notre colonne, composée de huit cents hommes et attaquée par un nombre plus que quadruple d'ennemis a soutenu un combat de plus de deux heures et ne s'est retirée qu'après avoir tué plus de deux cents hommes à l'ennemi, tandis que nous n'avons pas plus de trois quarts moins de républicains à regretter, sans la bouillante ardeur de l'avant-garde, les brigands n'en seraient pas quittes à si bon marché. PS: Deux charretiers, dont un conseil militaire fera justice, ont apporté un grand obstacle à la réussite totale de cette affaire[3]. »
Le livre paroissial de Saint-Benoît-de-Beuvron, en Saint-James, contient également quelques lignes, qui selon Félix Jourdan semblent se rapporter à cette bataille :
« Les villages de Touchegate en Saint-Benoit, et de la Croisette, furent, au fort de la Révolution, le théâtre d'un combat acharné entre 1 500 Chouans, commandés par Boisguy, Breton, et 800 républicains ; les pertes furent considérables de part et d'autre. Le champ de bataille resta aux Chouans[3]. »
Les pertes
Il semble que les rapports des deux camps aient eu tendance à grossir les pertes de leurs adversaires ; pour le général Delauney les Chouans ont 200 morts et les Républicains environ 50[3]. Selon le colonel chouan Pontbriand, 1 200 Républicains ont été tués contre 35 Chouans morts et environ 80 blessés[1]. D'après l'historien Félix Jourdan, 60 Républicains ont péri[3]. Enfin d'après des témoignages de l'époque, les corps des soldats républicains, estimés au nombre de 100 à 150 auraient été enterrés dans le champ les Douaires, sur le bord de la route à la hauteur du village du Bois[2].
Récit de Toussaint du Breil de Pontbriand « Richon prit la fuite du côté de Pontorson avec six cents hommes, mais il en laissa douze cents sur le champs de bataille.
Du Boisguy eut trente-cinq hommes tués et environ quatre-vingt blessés. Les capitaines Louis Vigron (ou Vigrou), de Montours ; Pierre Montembault, de Laignelet ; les lieutenants Louis Gautier, de Fougères ; Julien Guillaume, de Luitré ; Jacques du Pontavice, de Saint-Sennier ; Mathieu Pingolé (ou Poujolle), du Ferré, et Jean Chauvin, de la Croix ; François Trohu, de Lécousse, Jean Louvet, François Montorin, du Châtellier ; Pierre Mauffray, et Pierre Roustiau, de Fougères ; Jean Cotherel, de Saint-James ; Georges Buron, de la Croix-Avranchine ; Vincent le Noble, Guillaume Berthelot et Pierre Gaudin, de Coglès ; Julien Beaulieu et Joseph Baluais, de Saint-Marc-sur-Couesnon ; J. Grouazel, de Tremblay ; Joseph Delorme et Louis Bon-Cœur, de Montours ; Toussaint Gautier, de la Selle-en-Coglais ; Thomas la Noë, de la Croix ; Jean Béhitre, de Fleurigné ; Pierre Chotard, de Larchamp ; Gilles Roux, de Parigné ; Pierre Hattais, de la Selle-en-Coglais, tous sous-officiers et soldats, furent grièvement blessés[1]. »
— Mémoires de Toussaint du Breil de Pontbriand
Bibliographie
- Toussaint du Breil de Pontbriand, Mémoire du colonel de Pontbriand sur les guerres de la Chouannerie, édition Plon, Paris, 1897 (réimpr. Y. Salmon, 1988), p. 314-317.
- Christian Le Boutellier, La Révolution dans le Pays de Fougères, Société archéologique et historique de l'arrondissement de Fougères, 1989, p. 530-533.
- Marie-Paul du Breil de Pontbriand, Un chouan, le général du Boisguy, édition Honoré Champion, Paris, 1904 (réimpr. La Découvrance, 1994), p.254-261.
- Félix Jourdan, La chouannerie dans l'Avranchin, 2e partie, 1907, p.49-51. texte en ligne p.130-131.
Références
Catégories :- Chouannerie
- Bataille des guerres de la Révolution française en Normandie
- Bataille de 1795
- Histoire de la Manche
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