- Colonne Trajane
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Colonne de Trajan
La colonne Trajane.Lieu de construction Forums impériaux Date de construction 113 ap. J.-C. Ordonné par Trajan Type de bâtiment Colonne commémorative Le plan de Rome ci-dessous est intemporel.
Localisation de la Colonne de Trajan dans la Rome antique (en rouge)Coordonnées Liste des monuments de la Rome antique modifier La colonne Trajane (en latin : Columna Traiani) est un monument situé à Rome, sur le Forum de Trajan, au centre d'une place rectangulaire, derrière la Basilica Ulpia, entre la Bibliothèque Ulpia et le temple de Trajan, dont l'emplacement exact est sujet à controverses.
Elle fut érigée en 113 par Trajan (96-117), pour immortaliser les campagnes qu'il mena contre les Daces en 101-102 et 105-107 ap.J.C..
Sommaire
Historique
La colonne fut érigée sous le règne de l'empereur Trajan, de 107 à 113, peut-être par l'ingénieur Apollodore de Damas, dont le rôle dans la construction de l'ensemble du forum de Trajan n'est pas bien établi : il est possible que celui-ci ait seulement supervisé les travaux.
La colonne était à l’origine couronnée d'une statue de l'empereur Trajan, revêtu d’une armure, tenant une lance et un globe[1]. Le pape Sixte Quint la fit remplacer en 1588, par une statue de bronze de saint Pierre, œuvre de Tommaso della Porta et de Leonardo Sormani[2]. Les cendres de l’empereur étaient contenues dans une urne en or, sur une banquette de marbre, dans une petite chambre du soubassement de la colonne[3]. Elles y restèrent jusqu’au Moyen Âge.
Description
Le fût de la colonne est constitué de 18[4] blocs colossaux de marmor lunensis, appelé aujourd'hui marbre de Carrare[5], ou bien en marbre de Paros[4], d'un diamètre de 3,70 m et pesant chacun environ 40 tonnes, évidés pour l'aménagement d'un escalier intérieur en colimaçon de 186 marches éclairé de 43 petites ouvertures rectangulaires[4]. Le fût est décoré d'une frise continue en bas-reliefs de 200 mètres de long enroulée en spirale jusqu'au sommet. À ce fût haut de 100 pieds (29,78 m) s'ajoute le piédestal et la base de la statue : l'ensemble atteint alors une hauteur de 40,50 m.
Le fût
Le fût figure une colonne dorique dont le chapiteau et la base sont apparents, ainsi que les cannelures supérieures. L'ensemble est entouré d'une longue bande historiée identifiable à un immense rouleau de papyrus montant en spirale, développant en tout environ 200 mètres d'une frise de 2500 personnages en bas-reliefs disposés sur 23 spires.
Ce long bas-relief hélicoïdal fournit de précieux renseignements sur les arts, les mœurs et l'équipement militaire, tant des Romains que des Daces. Le monument est entièrement à la gloire du monarque. Les reliefs, considérés comme un des chefs-d’œuvre de la sculpture romaine, montrent un récit de 184 scènes.
Les scènes
Le récit, qui se déroule en continu, ne montre pas seulement des scènes de batailles, mais aussi des transferts et des départs de troupes, des travaux de fortifications, des conciliabules, des sacrifices, des ambassades et des soumissions. Les différents épisodes sont mis en scène avec des décors de rochers, arbres, bâtiments qui semblent bien se référer à des événements particuliers et vécus, et non à des modèles convenus, idéalisés.
Les scènes de travaux accomplis par les soldats sont particulièrement riches en détails tels que ponts, forts, camps ou vues de fleuves et de fortifications à vol d'oiseau, appartenant probablement à la tradition de la peinture romaine des vues triomphales, dont on portait les panneaux en procession lors des triomphes des généraux victorieux, dont on voulait montrer au peuple les exploits et faits de guerre les plus marquants.
Trajan lui-même est représenté 59 fois : sa présence est soulignée par la convergence de la scène et des regards tournés vers lui. Il est à la tête des colonnes, représenté de profil, le manteau au vent ; il surveille les travaux de fortifications, sacrifie aux dieux, parle à ses soldats, les réconforte, reçoit la soumission des barbares et assiste aux exécutions.
Un rythme pressant, tout en action, lie entre elles les différentes scènes dont le vrai protagoniste est la valeur, la virtus de l'armée romaine. Les épisodes dynamiques, dramatiques, pathétiques, joyeux, solennels, les cérémonies se succèdent dans une gamme de tonalités très variées et atteignent des accents d'une intensité toute spéciale dans la scène de la torture infligée par les femmes daces aux prisonniers romains aux corps nus et vigoureux, dans la présentation à Trajan des têtes tranchées des Daces, dans la fuite des Sarmates aux lourdes armures, dans la réception des ambassadeurs barbares selon de longues et fastueuses coutumes exotiques, jusqu'au souffle grandiose de la scène de soumission des Daces à la fin de la première campagne, reposant sur le contraste entre les lignes verticales et le calme solennel du groupe de Trajan assis, entouré par les officiers, avec les enseignes, et les lignes obliques de la masse confuse des Daces agenouillés, les boucliers à terre et les bras tendus, invoquant la clémence impériale. Le suicide du roi dace, Décébale, y est également représenté.
Le style
Les scènes de la colonne de Trajan constituent un récit historique qui rassemble la tradition artistique de l'art hellénistique et la solennité toute romaine de l'exaltation de l'Empire. Le réalisme domine dans la narration et l'élément symbolique unique est la personnification de l'imposant et solennel Danube barbu qui, émergeant de son lit, invite les Romains à passer. On sent encore très bien dans la représentation de l'espace et du paysage, dans les scènes d'action pleines de dynamisme, dans le naturel avec lequel s'exprime la représentation de la figure humaine, la tradition profonde du naturalisme grec.
La grande qualité du relief a fait attribuer les sculptures à un « maître inconnu des entreprises de Trajan » à qui on doit peut-être aussi la « grande frise de Trajan » dont les plaques sont réemployées sur l'arc de Constantin. Giovanni Becatti a bien vu dans la colonne de Trajan l'exemple le plus lumineux de la "fusion de l'enseignement grec et de la tradition romaine dans l'art impérial du temps de Trajan".
La visibilité de la décoration n'était pas favorisée par la position de la colonne, placée au milieu d'un portique resserré, surtout si l'on tient compte de la présence possible de couleur, aujourd'hui disparue, et d'insertions de bronze pour les armes et les instruments. Il est possible qu'on pût avoir une vision plus rapprochée depuis les terrasses de couverture de la nef externe latérale de la basilique Ulpia, ou depuis celles qui couvraient probablement aussi les portiques, en face des deux bibliothèques. Une lecture "abrégée" était possible aussi sans qu'il fût nécessaire de tourner autour de la colonne pour suivre la narration entière, en suivant les scènes selon un ordre vertical, étant donné que leur recouvrement dans les différentes spires semble suivre une logique cohérente.
Le piédestal
Le piédestal est décoré sur trois faces de bas-reliefs représentant des armes empilées. Les angles sont surmontés de quatre aigles soutenant une guirlande de lauriers. La dernière face est celle de la porte, surmontée d'une dédicace incluse entre deux Victoires.
La dédicace
On peut lire sur la base de la colonne l'inscription suivante :
- SENATVS·POPVLVSQVE·ROMANVS
- IMP·CAESARI·DIVI·NERVAE·F·NERVAE
- TRAIANO·AVG·GERM·DACICO·PONTIF
- MAXIMO·TRIB·POT·XVII·IMP·VI·COS·VI·P·P·
- AD·DECLARANDVM·QVANTAE·ALTITVDINIS
- MONS·ET·LOCVS·TANT[IS·OPER]IBVS·SIT·EGESTVS
Cette inscription est un des plus fameux exemples d'épigraphie latine utilisant la capitale latine monumentale (« quadrata »), plus particulièrement utilisée pour les textes gravés. Le graveur a pris soin d'utiliser une échelle croissante pour la taille des caractères des lignes supérieures lues par un spectateur placé en contrebas. Les mots sont séparés par des points, les abréviations habituelles de l'épigraphie latine sont utilisées. La dernière ligne de l'inscription a été partiellement entaillée, mais on la restitue sans peine.
Traduction :
« Le sénat et le peuple romain, à l’empereur César Nerva Trajan Auguste, fils du divin Nerva Auguste, germanique, dacique, grand pontife, en sa 17e puissance tribunitienne, salué imperator pour la 6e fois, consul pour la 6e fois, père de la patrie, pour faire savoir de quelle profondeur la colline et l'endroit ont été creusés par de si grands travaux[6]. »
Destination de la colonne
Après la mort de Trajan, en 117, le Sénat romain décida que les cendres de l'empereur seraient déposées dans la colonne. La colonne a remarquablement résisté aux ravages du temps, mais la tombe fut violée à la chute de Rome (probablement dès 476).
Techniques de réalisation
La réalisation du monument nécessita la mise en œuvre de techniques complexes, avec une organisation avancée et une coordination exemplaire entre les différents corps de métiers qui travaillaient sur le chantier. Il s'agissait en effet de superposer des blocs de marbre d'un poids d'environ 40 tonnes et de les faire coïncider parfaitement, en tenant compte soit des reliefs, probablement ébauchés déjà et progressivement finis au cours du chantier, soit de l'escalier intérieur en colimaçon, qu'il fallait déjà avoir creusé dans les blocs avant de les disposer, ce qui pose de singuliers problèmes de stéréotomie.
Après l'Antiquité
La colonne resta toujours debout même après la ruine des autres bâtiments du forum de Trajan et le plus grand respect lui fut toujours accordé : un document mediéval du Sénat de 1162 en établissait la propriété publique et en interdisait tout endommagement.
Une petite église, Saint Niccolò de Columna, qui devait s'élever au pied du monument, est attestée à partir de 1032, avec un oratoire au sommet de la colonne, mais elle remonte peut-être au VIIIe ou IXe siècle. L'église fut démolie probablement à l'occasion de la venue à Rome de Charles Quint en 1546. Toujours au cours du XVIe siècle, on fit de la place autour de la colonne avec l'élimination de quelques bâtiments privés, pendant que le piédestal était dégagé des gravats sous lesquels il était enseveli. Sous le pape Sixte Quint fut érigée la statue en bronze de saint Pierre et un mur de clôture fut aménagé autour de la place. La zone de vision autour du piédestal fut encore arrangée et nettoyée à plusieurs reprises, jusqu'aux fouilles du début du XIXe siècle.
Copies et moulages de qualité muséographique
L'étude des bas-reliefs étant incommode sur place (les jumelles sont fortement conseillées), on peut avoir recours à des copies de bonne qualité, permettant une observation facile :
- Le musée de la Civilisation romaine de l'EUR, à Rome, présente une des trois copies réalisées en 1861 par Napoléon III, qui donna cet exemplaire au pape Pie IX (en tout 125 moulages de plâtre). L'exposition actuelle, qui se déroule sur 200 mètres, permet une observation parfaite et rapprochée de tous les reliefs de la colonne.
- Le musée d'Archéologie nationale de Saint-Germain-en-Laye possède une galvanoplastie du XIXe siècle de la partie basse du fût (dans les fossés, côté ouest).
- Le musée du Louvre conserve, dans sa collection de moulages hébergée dans les Petites Écuries de Versailles[7], environ un tiers de la frise, ainsi que toute la base remontée.
- Un moulage complet est présenté au Victoria and Albert Museum de Londres.
- Le Musée national d'histoire de Roumanie de Bucarest présente un autre moulage complet de la colonne, réalisé par les Allemands durant la Seconde Guerre mondiale[8].
L'influence de la colonne Trajane
En 161, au décès d'Antonin le Pieux, Marc Aurèle et Lucius Verus décident l'érection d'une colonne en sa mémoire et en celle de son épouse Faustine l'Ancienne. Dressée sur le Champ de Mars, elle comportait un fut de granit entièrement lisse et une base décorée de reliefs (apothéose d'Antonin et Faustine et scène de decursio). Seule la base subsiste (Musées du Vatican).
À partir de 176, Marc Aurèle fait construire une colonne sur le Champ de Mars. Entièrement sculptée, elle commémore les deux campagnes de l'empereur contre les Marcomans et les Sarmates.
D'autres imitations furent naturellement réalisées à Constantinople, la Nouvelle Rome fondée par Constantin en 324. il s'agit de :
- colonne théodosienne, en fait un obélisque égyptien du XVe siècle av. J.-C. sur une base de l'époque de Théodose Ier
- colonne d'Arcadius
La colonne Trajane a souvent servi de modèle pour des monuments célébrant la gloire d’autres monarques. Le meilleur exemple est la colonne Vendôme, à Paris, dédiée à l'empereur Napoléon Ier et qui reprend le principe du bas-relief en spirale.
On trouve aussi de par le monde de nombreuses colonnes ayant pris un ou plusieurs éléments à celle de Trajan.
- colonne de saint Bernward à Hildesheim (vers 1018)
- colonne Médicis (1574) à Paris
- monument au Grand incendie de Londres (1677)
- deux colonnes de l'église Saint-Charles-Borromée à Vienne, Autriche (1716-1737)
- Nelson à Montréal (1809)
- pilier de Nelson Dublin (1811)
- colonne du duc d'York Londres (1834)
- colonne de Juillet à Paris (1840)
- colonne Nelson à Londres (1843)
- Colonne du congrès à Bruxelles (1859)
- colonne d'Astoria dans l'Oregon
Notes et références
- Penelope J. E. Davies, The Politics of Perpetuation : Trajan's Column and the Art of Commemoration, American Journal of Archaeology, Vol. 101, No. 1. (Jan., 1997), pp. 41-65.
- Marcia B.Hall, Artistic centers of the Italian Renaissance, Rome, Cambridge University Press, 2005.
- Raymond Chevallier, Le forum de Trajan, Les dossiers de l’Archéologie 17, juillet-août 1976.
- Samuel Ball Platner (as completed and revised by Thomas Ashby): A Topographical Dictionary of Ancient Rome, London, Oxford University Press, 1929, Trajan's Forum p. 237-245.
- Coarelli op. cit., p. 85.
- Références : CIL VI, 960 = ILS 294
- Cette collection est gérée par le département des Antiquités grecques, étrusques et romaines.
- Colonne Trajane, association orléanaise Guillaume Budé
- Cet article est partiellement issu d’une traduction de l’article de Wikipédia en italien intitulé « Colonna di Traiano ».
Articles connexes
Liens externes
- (en) Une iconographie complète des bas-reliefs de la colonne
- (fr) L'intégralité de la colonne Trajane en frise
- Colonne Trajane, association orléanaise Guillaume Budé
- (it) Foro di Traiano, Roma segreta
Bibliographie
- Filippo Coarelli, Guide archéologique de Rome, Hachette, 1998, p. 85 (ISBN 2012354289)
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