- Maria Tesselschade Roemersdochter Visscher
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Maria Roemersdochter Visscher Dessin de Hendrik Goltzius, représentant une personne inconnue. Longtemps on a voulu voir dans ce dessin le portrait de Maria TesselschadeNom de naissance Marritgen[1] Autres noms Tesselschade Activités Poète
Graveuse sur verreNaissance 25 mars 1594
Amsterdam
Provinces-UniesDécès Enterrée le 24 juin 1649 (à 55 ans)
Amsterdam
Provinces-UniesLangue d'écriture Néerlandais
ItalienMouvement Renaissance
BaroqueGenres Poésie Maria Tesselschade Roemers[dochter] Visscher, également connue comme Tesselschade, née à Amsterdam, le 25 mars 1594, enterrée à Amsterdam, le 24 juin 1649, est une poétesse de la République des Sept Pays-Bas-Unis[1].
Sommaire
Biographie
1594-1623 : Enfance – Éducation – Période pré-maritale
Elle était la plus jeune des filles de Roemer Visscher (1547-1620), marchand de grains et poète, et de Aefgen Jansdochter Onderwater, originaire de Delft et décédée en février 1619[2].
Maria Roemersdochter Visscher, saluée par ses contemporains de sexe masculin comme l'« élite du sexe féminin » (puikjuweel der vrouwelijke sekse), fut dotée par son père d'un prénom extraordinaire, Tesselschade, rappelant la débâcle financière qui lui survint[1], en tant qu'assureur[2], suite à la catastrophe maritime qui se produisit le 24 décembre 1593, trois mois avant sa naissance, près de Texel[1], et qui causa la perte de vingt navires marchands[2].
Grâce à un père instruit, elle reçut une éducation polyvalente, axée sur le développement de ses talents artistiques et littéraires, mais aussi des aptitudes physiques telles que la natation et l'équitation. Tesselschade s'exerçait, entre autres, dans l'art du dessin, de la calligraphie et de la broderie et dans le jeu de différents instruments de musique. Elle devint très habile dans la gravure sur verre, mais excellait plus particulièrement dans l'art du chant[3]. Elle maîtrisait les langues française et italienne[2] et étudia l'histoire[3].
Avec ses sœurs aînées Anna et Geertruyd[4] (ou Truitje)[5], Tesselschade, grandit au domicile parental, au Geldersekade contemporain, à Amsterdam[4]. Cette maison fut jadis, dans la deuxième décennie du XVIIe siècle, un lieu de rencontre de l'avant-garde littéraire auquel appartinrent des hommes de lettres et des savants de renom tels que Spieghel, Hooft, Reael, Vondel et Bredero ; bien qu'en vain, ce dernier faisait la cour à la jeune Tesselschade[2].
Après la mort de Roemer Visscher, survenue en 1620[2], ses filles Anna et Tesselschade - Geertruyd étant déjà mariée – continuèrent encore quelques années à accueillir des rencontres littéraires, jusqu'à ce qu'elles se marient, l'une peu de temps après l'autre.
1624-1634 : Années de mariage
Le 26 novembre 1623 Tesselschade se marie, à Amsterdam, avec Allard Janszoon Crombalch, officier de marine[2]. Étant un proche de certains régents d'Alkmaar, Allard fréquenta leur milieu. Vraisemblablement, Tesselschade fit la connaissance d'Allard parce que son père, Roemers Visscher, possédait un domaine situé au nord d'Alkmaar, dans le village de Wieringerwaard[4]. Leur mariage fut célébré dans des poèmes attentifs et ludiques de Hooft et de Vondel, ainsi que de Constantijn Huygens[2], qui vint de rejoindre le cercle littéraire autour de Hooft. Rien n'indique que son mari se serait intéressé à l'art et la culture[4]. Le couple s'établit à Alkmaar et eut trois enfants : Teetgen en 1625, Maria en 1628 et une autre fille qui mourut peu après sa naissance, en 1631[2].
Déjà en 1625, Tesselschade ne s'étant pas encore fait un nom, Huygens insère un de ses sonnets dans son recueil Otia, comprenant des poèmes amicaux de Hooft et Huygens, tous sur les mêmes rimes. Elle conservait les liens d'amitié avec Hooft encore après son mariage en secondes noces, qui eut lieu en 1627. Depuis ce temps, avec sa famille, elle passera pratiquement tous ses étés au château de Muiden où Hooft résidait en tant que « drost » ou bailli. Elle chantait pour les invités de Hooft et contribuait à la conversation spirituelle que l'on y cultivait. Les lettres de Hooft montrent combien il était impressionné par son charme.
De la traduction du poème épique La Gerusalemme liberata (1575) de Torquato Tasso sur laquelle elle travailla vers 1630[4], on ne conserve qu'une seule strophe[6] insérée dans une lettre d'elle à Barlæus[1]. En outre, avec Hooft[4], elle traduisit le poème épique Adone (Adonis) de 1623 du poète Giambattista Marino[7]. Elle partagea le goût de Hooft pour la poésie moderne cérébrale de l'Anglais John Donne, que Huygens leur fit connaître. De l'époque de son mariage, on connaît quelques poèmes, dont un vers réconciliant en réponse à un concours poétique organisé par Vondel en 1630 et conçu comme une offensive contre les manifestations d'intolérance religieuse. Il lui arrivait parfois de réprimander, même, bien qu'amicalement, ses amis. Dans une lettre à Caspar Barlæus, datée du 12 août 1636, Hooft transformait son nom de façon significative dans l'anagramme Sachte sedeles (Douces leçons de morale)[4].
En mai 1634, Tesselschade Roemersdochter reçut un double coup de la fortune[2] : en un jour, elle perdit à la fois sa fille aînée Teetgen, âgée de neuf ans, et son mari ; Teetgen mourut de la variole, Allard d'une hémoptysie que le médecin attribua à sa douleur écrasante, mais qui serait plutôt due à une trop grande dose de sédatifs[4]. L'enterrement du père et de sa fille eut lieu le 29 mai 1634[8]. Hooft et Huygens se renvoyaient la balle quant à ce qui concerne la tâche douloureuse de trouver des mots réconfortants adéquats. Par une lettre à Hooft, Tesselschade sut rompre le silence elle-même. Elle écrivit au bailli de Muiden qu'elle subit cette rude épreuve, par lequel le sort amer lui avait brisé le cœur, dans la soumission complète à la volonté de Dieu et sans verser de larmes. De la mort tragique de son mari, elle ne pouvait rapporter que sous la forme d'un poème en italien, réaffirmant ainsi sa conviction dans la fonction cathartique de la poésie[4]. Hooft lui écrivit combien il l'admirait pour sa maîtrise stoïcienne de soi : « Gloire à vous, noble héroïne, de qui les héros devraient prendre des leçons » (Heil zij UE, heldinne, daer de helden bij ter schoole behoorden te gaan)[9]. Elle sut porter son malheur mieux que lui lorsqu'il perdit sa première femme et ses enfants, dix ans auparavant. Tesselschade continua à visiter Hooft et sa famille, mais dorénavant seul ou accompagné de sa fille Maria, le seul enfant qui lui restait[4].
1634-1649 : Années de veuvage
Après la mort de son mari, Tesselschade Roemersdochter allait se profiler de façon plus prononcée comme poétesse aimant participer dans le mouvement socio-littéraire des hommes perspicaces autour de Hooft. Par l'intermédiaire de Hooft, elle avait fait connaissance du professeur et poète latin Caspar Barlæus d'Amsterdam, avec qui elle entretint une correspondance régulière. Barlæus, à son tour, consacra d'innombrables vers aux dons artistiques de Tesselschade qui devint ainsi l'enjeu d'une compétition littéraire amoureuse avec son ami et compagnon dans le veuvage Constantijn Huygens. Tesselschade considéra tout cela avec beaucoup d'ironie. Elle assura Hooft que l'amitié sincère qui les liait, conférerait une protection suffisante contre ces chants de sirènes masculines : « même s'ils peuvent si bien flatter, je saurais bien les garder hors de mon lit » ([…] al konden zij nog zo pluimstrijken, ik zal ze wel van mijn bed houden […])[4].
En 1638, à l'occasion de l'entrée solennelle à Amsterdam de Maria de Médicis[8], elle composa quelques vers de circonstance en italien[10] qui ne manquèrent pas d'attirer l'attention[8].
Fin 1641 ou début 1642, Tesselschade Roemersdochter se convertit à l'église catholique romaine[8], qui avait regagné beaucoup de terrain à Alkmaar. Par le biais de quelques poèmes Huygens essayait de la ramener au calvinisme, en raison de laquelle elle défendit son choix tant de façon comique que dans des formes plus sévères[4]. Quand une étincelle de l'enclume d'un forgeron lui rendit aveugle de l'œil gauche, Huygens lui apprit, dans un vers peu amical, qu'elle devait en tirer la leçon de ne pas s'incliner devant des images[7]. Tesselschade signait sa douce réponse poétique par la devise Elck sijn waerom (À chacun son pourquoi), dont elle fit souvent emploi[11]. Son contact avec Vondel, qui venait de se convertir au catholicisme, semble s'être intensifiée en ce moment[4]. Vondel avait déjà, en 1639, dédicacé sa traduction d’Électre de Sophocle à Tesselschade, car elle avait connu, de sa propre expérience, la problématique des traductions[1]. À une « Eusebia », vraisemblablement à identifier avec Tesselschade, Vondel dédicacera en outre, en 1641, sa pièce Peter en Pauwels[8], que le compositeur Padbrué transformera quelques années plus tard en oratorio ; le premier au nord des Alpes[1].
En février 1645 Tesselschade Roemersdochter passa encore quelques jours à La Haye auprès de Huygens, avec qui l'amitié s'était resserrée, et l'été suivant, elle était une invitée ravie au Muiderslot. Les dernières années de sa vie, cependant, ont été marquées par de lourdes pertes personnelles. En mai 1647, elle perdit son ami Hooft et, le 31 août 1647, sa fille Maria. En janvier 1648 mourut son ami Barlæus [6]. Elle chantera encore la paix de Münster de 1648[7]. Décédée à l'âge de 55 ans, elle fut enterrée dans le tombeau familial des Visscher dans l’Oude Kerk (Vieille Église) d'Amsterdam[3]. Dans une épitaphe, rédigée le 15 juillet 1649, Huygens la commémorait comme une femme dont les qualités ne peuvent s'exprimer en mots[6].
Réputation
Déjà de son vivant, Tesselschade fut présentée par ses contemporains poétiques, tous des hommes, comme une amie aux conceptions similaires. En 1646[4], Barlæus lui dédia même, à part quelques poèmes en néerlandais, les Tessalica, un cycle à part parmi les œuvres latines[8] de ses Poemata. En tant que poétesse au goût pour les énoncés excentriques, elle obtint une grande réputation. Bien qu'elle n'envisageât pas la publication de ses œuvres, celles-ci circulaient - comme d'habitude à l'époque - sous forme de copie, et, un nombre d'entre elles ont été incluses dans des recueils d'autres poètes[4]. En 1642, le compositeur et prêtre catholique Joan Albert Ban mit en musique son poème Onderscheyt tusschen een wilde, en een tamme zangster (Différence entre une chanteuse sauvage et une apprivoisée)[6].
L'œuvre conservée de Tesselschade se limite à 34 poèmes et fragments de poèmes, dont deux en italien. Après sa mort, un certain nombre de vers épars furent repris dans des florilèges, mais les meilleurs de ses poèmes très personnels, restés en manuscrit, n'ont été découverts que bien plus tard. Parmi les trouvailles, la poésie en commémoration de son défunt mari et celles confirmant sa foi[4], ainsi qu'un sonnet de consolation pour Huygens, écrite après la mort de la femme de celui-ci, advenue en septembre 1637. Dans celui-ci, elle lui conseilla d'écrire sur sa souffrance, afin de pouvoir l'oublier. Huygens a été tellement impressionné par ses conseils sages et concis, qu'il dédiera encore, en 1681, un poème au conseil avisé de Tesselschade (Tesselschades wijs onderwijs)[8].
En raison, notamment, de la publication de la correspondance de Hooft (1855-1857), la réputation de Tesselschade comme muse du cercle de Muiden grandit considérablement dans le courant du XIXe siècle jusqu'à atteindre des sommets inouïs. Cela s'est traduit par plus d'un poème ou roman, ainsi que par des pièces de théâtre ou des peintures d'histoire. Inspiré par un dessin de Goltzius, à tort identifié comme un portrait d'elle, chacun put projeter sur elle son image de la femme idéale. On a voulu la voir non seulement éduquée, artistique et belle, mais aussi épouse vertueuse et aimante et mère attentive qui n'aurait jamais voulu être une « savante »[4]. Au XIXe siècle, Adriaan Beeloo lui consacra une comédie, Maria Tesselschade Visscher op het slot te Muiden (Maria Tesselschade Visscher au château de Muiden), en 1819[12]. Van Vloten écrivit Tesselschade Roemers en hare vrienden (Tesselschade Roemers et ses amis) en 1852. De 1808 date le discours de Jacques Scheltema sur Anna et Maria Tesselschade, prononcé pour Letterkunde[11]. Par son choix pour le catholicisme[4], elle devint l'idole du chef de file des catholiques néerlandais, J.A. Alberdingk Thijm[1], alors que l'intérêt renouvelé pour les poèmes d'amour de Bredero faisait d'elle l'objet vertueux de la passion frustrée d'un « poète maudit ». La présentation de Tesselschade comme un parangon de créativité féminine a été confirmée, en 1872, par la création d'une association de femmes pour la promotion de l'artisanat féminin, fusionnée en 1953 avec son organisation sœur, Arbeid adelt (Le travail ennoblit)[4].
En 1918, Jacob Adolf Worp, dans Een onwaerdeerlycke vrouw rendit une image aussi complète[11] que possible de Tesselschade, fondée sur des poèmes et des lettres de, à et sur elle. L'intérêt porté aux qualités reconnues dans sa poésie, a connu une croissance considérable depuis les années quatre-vingt-dix du XXe siècle. En 1994, la quatre centième anniversaire de sa naissance fut commémorée par, entre autres, une biographie, une exposition et la parution de tous ses poèmes. À cette occasion, une réunion festive fut organisée au château de Muiden pour toutes les femmes et filles portant le prénom Tesselschade ou Tessel : des 170 personnes repérées, 120 s'étaient inscrites[4].
Lien externe
Sources
- (nl)A.J. van der Aa, Biographisch woordenboek der Nederlanden, vol. 19, J.J. van Brederode, Haarlem, 1876, p. 247-249
- (nl)W.J.C. Buitendijk, Visscher, Maria Tesselschade, in : G.J. van Bork & P.J. Verkruijsse (réd.), De Nederlandse en Vlaamse auteurs van middeleeuwen tot heden met inbegrip van de Friese auteurs, De Haan, Weesp, 1985, p. 602-603
- (nl)K. ter Laan, Letterkundig woordenboek voor Noord en Zuid, G.B. van Goor Zonen's Uitgeversmaatschappij, La Haye/Jakarta, 1952, second tirage
- (nl)Mieke Smits-Veldt, Visscher, Maria Tesselschade Roemersdr, site Web du Huygens Instituut voor Nederlandse Geschiedenis - Huygens ing, version de 1er juillet 2010 (dernière rédaction)
- (nl)Sterck, Visschersdr, Maria Tesselschade Roemer in P.C. Molhuysen en P.J. Blok (réd.), Nieuw Nederlandsch biografisch woordenboek, vol. 5, A.W. Sijthoff, Leyde, 1921, p. 1034-1037
- (nl)}(it)Joost van den Vondel, Jakob van Lennep, De werken van Vondel, in verband gebracht met zijn leven, en voorzien van verklaring en aanteekeningen, vol. 3, Frères Binger, Amsterdam, 1857, p. 443
Références
Catégories :- Décès en 1649
- Femme de lettres néerlandaise
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- Naissance à Amsterdam
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