- Vie en France sous l'Occupation allemande
-
La vie en France sous l'Occupation allemande se caractérise par la pénurie et par la dictature. L'Occupation allemande de la France commence avec l'armistice du 22 juin 1940 et s'achève avec la Libération du territoire en août 1944. La France, d'abord divisée en deux zones, la zone occupée au Nord et la zone dite « libre » au Sud, qui est sous l'autorité du régime collaborationniste de Vichy, se trouve de fait inféodée à l'Allemagne nazie durant cette période. Comme tous les pays occupés, la France a fait l'objet d'un pillage économique, humain, financier ainsi que territorial de la part des Allemands. En revanche, c'est le seul pays où il y eut des rafles de Juifs sur le territoire non occupé par les Allemands.
L'Exode
Article détaillé : Exode de 1940 en France.La pénurie
La vie des Français a d'abord été marquée par les pénuries. Elles s'expliquent par différents éléments :
- les réquisitions allemandes ;
- la désorganisation des transports et le blocus allié ;
- la pénurie de main d'œuvre et de sources d'énergie (charbon, électricité).
Le manque de nourriture
Les problèmes de ravitaillement touchent rapidement les magasins français qui manquent de tout. Face à ces difficultés de la vie quotidienne, le gouvernement répond en instaurant les cartes de rationnement et autres tickets d'alimentation avec lesquels on pouvait se procurer des produits de premières nécessités alimentaires (pain, viande, poisson, sucre, matières grasses, etc.) ou non-alimentaires (produits ménagers, vêtements, etc.). Même le tabac et le vin furent rationnés. Chaque Français était classé par catégorie en fonction de ses besoins énergétiques, de l'âge, du sexe et de l'activité professionnelle de la personne. Chacun recevait alors la ration en rapport à la catégorie à laquelle il appartenait[1].
La faim sévissait surtout en ville et affectait les plus jeunes. Les files d'attente s'allongeaient devant les boutiques qui devaient même parfois fermer sur ordres administratifs quelques jours par semaine. À défaut de viande et d'autres aliments, on se nourrissait de légumes peu prisés à l'époque, comme le rutabaga et le topinambour. Les produits tels que le sucre ou le café sont remplacés par des succédanés : les ersatz (comme la chicorée qui remplaça le café et la saccharine le sucre).
Cependant, certains Français (souvent commerçants) tiraient parti du marché noir pour vendre des aliments sans tickets mais à des prix très élevés. Les vols et le troc étaient aussi des pratiques fréquentes durant cette période de privations et d’abstinence.
Le manque de matières premières
En 1939, la consommation de carburant en France était de 3 millions de tonnes, tandis que la production métropolitaine était de 50 000 tonnes. Après l'armistice du 22 juin 1940, il ne restait que 200 000 tonnes en réserve. La mise en service de gazogènes permit la réduction de la consommation, durant l'Occupation allemande, à environ un quart de celle avant-guerre.
Les ersatz remplacèrent plusieurs produits devenus rares : le gazogène à la place de l'essence, le buna en remplacement du caoutchouc… Le cuir faisant également défaut, les semelles des chaussures étaient en bois.
Les transports
En 1939, le parc automobile français comprenait 2 015 000 voitures et 654 000 camions ; 645 000 voitures et 105 000 camions furent détruits ou pris par l'ennemi durant ce conflit. La vente de bicyclettes fut en forte hausse pour compenser la baisse des transports motorisés, 7 430 526 plaques d’immatriculation de bicyclettes furent vendues en 1940, 10 711 808 en 1942, sans compter le marché noir.
Les bombardements
Avec environ 75 000 victimes et 550 000 tonnes de bombes déversées, la France est, après l'Allemagne, le second pays le plus touché par les bombardements alliés de 1940 à 1945 sur le Front de l'Ouest[2]. Ceux-ci furent particulièrement intenses en 1944, à l'occasion de l'opération Overlord, avec en particulier le bombardement du 26 mai 1944.
Le STO
Article détaillé : Service du travail obligatoire.Pour contenter les besoins de main-d'œuvre du Troisième Reich dont les soldats se trouvaient au front ou dans les territoires occupés, le régime de Vichy devait fournir à l'occupant 150 000 ouvriers qualifiés nécessaires au bon fonctionnement de l'industrie de guerre allemande, contre la libération de 50 000 prisonniers de guerre français retenus en Allemagne. Une propagande fut donc instaurée, comme celles glorifiant le « sacrifice » du soldat allemand devenu l’ultime rempart contre le bolchévisme (« Ils donnent leur sang - Donnez votre travail pour sauver l'Europe du Bolchévisme » disait une célèbre affiche de l’époque) incitant les candidats à partir travailler volontairement Outre-Rhin. Cette « relève » s'étant soldée par un échec, le régime de Vichy utilisa alors la contrainte en instituant le STO : « Service du travail obligatoire » à la place du service militaire, ce qui conduisit de nombreux jeunes réfractaires à rejoindre les maquis.
Le couvre-feu
La nuit tombée, les habitants devaient fermer leurs volets ou occulter leurs fenêtres à l'aide de tissu de coton bleu marine fourni par la Défense passive. Sans autorisation, il était interdit de sortir la nuit sous risque de peine de mort s'ils se faisaient voir. Dans les trains, les ampoules étaient peintes en bleu pour que les convois ne soient pas repérés par les avions allemands.
La ligne de démarcation
Article détaillé : Ligne de démarcation .Pour passer de la zone occupée (au Nord) à la zone libre (au Sud), les Français étaient obligés de franchir la ligne de démarcation, veritable « frontière intérieure » gardée par les soldat allemands, soit de façon officielle grâce à une autorisation , soit clandestinement.
Il existe une troisième zone qui sépare l'Alsace de la zone occupée.
L'école
Les enfants devaient chanter Maréchal, nous voilà ! Le portrait de Philippe Pétain trônait sur les murs des classes, créant ainsi un culte de la personnalité en la personne du maréchal. La propagande était présente jusque dans l'éducation pour former les jeunes aux idées du nouveau régime de Vichy. Cependant, contrairement à d'autres pays occupés, comme par exemple la Pologne où les élites enseignantes furent liquidées, il n'y eut pas de reprise en main idéologique, comme des mutations ou des emprisonnements d'enseignants, sauf en ce qui concerne les enseignants juifs, francs-maçons, communistes, résistants, dont bon nombre furent révoqués, ou emprisonnés et, pour certains d'entre eux, exécutés. Globalement, les programmes ne furent pas modifiés. Dans le secteur privé catholique, de nombreux chefs d'établissements cachèrent des enfants juifs en les scolarisant jusqu'à la fin de la guerre.
Les Juifs
Articles détaillés : Régime de Vichy#Les Juifs en France pendant le régime de Vichy, Lois sur le statut des Juifs, Rafle du Vélodrome d'Hiver, Rafle de Marseille, Camp de Drancy, Enfants d'Izieu, Shoah#Les victimes françaises et Collaboration policière sous le régime de Vichy.Dès le début de l’occupation, le Régime de Vichy qui était désireux de garder le contrôle de l'administration des juifs français, édicte un Statut des juifs assez proche de celui pris en zone occupée par les Allemands. En particulier, il les obligeait à se faire recenser, leur interdisait de travailler dans certains secteurs sensibles comme la Presse, la fonction publique, l'enseignement,.. Certains furent laissés en fonction avec un emploi contractuel, ou reclassés dans des services moins visibles.
En zone occupée, les lois allemandes obligeaient les Juifs à porter l'étoile jaune. À Paris, ils furent également contraints d’emprunter la dernière voiture du métro.
Puis, les rafles organisées par les services et les forces allemandes, avec l'aide de la police françaises, se succédèrent, d'abord en zone occupée, puis en 1942 en zone libre à partir de son invasion par les forces d'occupation allemande. Au total, 75 000 Juifs, soit le quart de la population juive présente en France à la veille de la guerre, disparaissent dans les camps de la mort nazis.L'internement des « nomades »
Article détaillé : Roms#Les camps d'internement de « nomades » en France.La vie des résistants
Article détaillé : Résistance intérieure française.Lors de la signature de l'armistice, certains français répondirent à l’appel du 18 juin lançé par le général de Gaulle sur les ondes la BBC appelant à l’organistion de la Résistance. Beaucoup d’entre eux furent contraint d’opter pour la clandestinité afin de continuer leurs activités qui revétait plusieurs formes :
- Recueil et transmision de renseignements
- Sabotage (voies ferrées, etc.)
- Assassinat d’officiers et de soldats allemands, ainsi que de collaborateurs
- Soutient logistique aux aviateurs alliés parachutés
- Organisation de filières d’évasion ou de passage des frontières (y compris la Ligne de démarcation)
- Fabrication de faux papiers
- Edition de journaux clandestins
Le lien entre la France libre et la résistance intérieure, se faisait par le biais d’émissions de radio émises par la BBC (Radio Londres), comme « Les Français parlent aux Français » (diffusant des messages codés) ou « Honneur et Patrie ».
La collaboration
Article détaillé : Collaboration en France.Des Français choisissent de collaborer avec l'ennemi, des écrivains, des chanteurs, des acteurs et hommes politiques rejoignent ce camp.
Journaux et radios
Article détaillé : Journaux clandestins de la Résistance.La plupart des journaux sont contrôlés par les services de la censure sous l'occupation allemande en France, quelques journaux clandestins arrivent à être publiés et distribués sous le manteaux, d'autres journaux choisissent ouvertement la collaboration, écrivant une page noire de l'histoire de la presse écrite.
La radio est aussi contrôlée par le régime de Vichy (Radio Paris, la Radiodiffusion nationale dont Radio Vichy), il n'y a pas d'émetteurs clandestins (installation trop lourde à mettre en place et trop facilement repérable). Le contrôle de l'édition se réalise aussi au travers de la répartition du peu de papier disponible au travers du Comité d'organisation des industries, arts et commerces du livre (COIACL).
L'épuration
Paris
Article détaillé : Paris sous l'Occupation allemande.Notes et références
- « Guerres, Crises économiques et les monnaies… — Le rationnement en France pendant la deuxième guerre mondiale », sur le site nithart.com, consulté le 24 octobre 2009.
- Centre d'études d'histoire de la défense, « Les bombardements alliés sur la France durant la Seconde Guerre Mondiale – Stratégies, bilans matériels et humains », présentation du colloque du 6 juin 2007, consulté le 5 novembre 2009.
Bibliographie
Ouvrages généraux
- Henri Amouroux, La Vie des Français sous l’Occupation, éd. Fayard, coll. « Les grandes études contemporaines », Paris, 1961, 577 p.
- Henry Amouroux, La Grande Histoire des Français sous l'Occupation, 10 volumes, Éditions Robert Laffont, Paris, 1975-1993.
- Olivier Barrot et Raymond Chirat, La Vie intellectuelle et culturelle sous l'Occupation, Gallimard, coll. « Découvertes », Paris, 2009.
- Philippe Burrin, La France à l’heure allemande 1940-1944, Éditions du Seuil, Paris, 1995, 559 p. ; édition de poche, 1997.
- Stéphanie Corcy, La Vie culturelle sous l'Occupation, Éditions Perrin, Paris, 2005, 407 p.
- Jean Eparvier, À Paris sous la botte des nazis, Éditions Raymond Schall, Paris (non paginé), achevé d'imprimer par Draeger, le 28 novembre 1944.
- Pierre Laborie, L'Opinion française sous Vichy, Éditions du Seuil, Paris, 1990, 405 p.
- Pierre Laborie, Les Français des années troubles – De la guerre d'Espagne à la Libération, Desclée de Brouwer, Paris, 2001, 265 p.
- Pierre Laborie, Les Français sous Vichy et l'Occupation, Milan, Paris, 2003, 64 p.
- Henry Rousso, Les Années noires – Vivre sous l’Occupation, Gallimard, Paris, 2006, 192 p.
- Ouvrages en anglais
- Robert O. Paxton, La France de Vichy 1940-1944, Éditions du Seuil, 1973, préface de Stanley Hoffmann.
- (en) Robert Gildea, Marianne in Chains, Picador USA, 2004, 528 p. (ISBN 9780312423599)
- Témoignages et œuvres de fiction
- Marcel Aymé, Uranus (1948), roman sur les derniers mois de l'Occupation.
- Jean-Louis Bory, Mon village à l'heure allemande, roman, prix Goncourt 1945.
- Jean-Louis Curtis, Les Forêts de la nuit, roman, prix Goncourt 1947, sur les derniers mois de l'Occupation.
- Jean Dutourd, Au bon beurre, roman satirique qui traite des problèmes de pénurie alimentaire.
- Irène Némirovsky, Suite française 2004, Prix Renaudot 2004
- Gertrude Stein, Les Guerres que j'ai vues, sur la vie de Gertrude Stein réfugiée dans un village du Bugey pendant l'Occupation.
- Vercors, Le Silence de la mer, 1942, nouvelle.
Filmographie
Article connexe : Catégorie:Film sur l'Occupation allemande en France.- Documentaires
- Le Chagrin et la Pitié, documentaire de Marcel Ophuls (1969), sur la vie des Français sous l'Occupation allemande, qu'ils soient résistants, simples profiteurs, pétainistes, ou collaborateurs.
- L'Œil de Vichy, documentaire réalisé par Claude Chabrol (1993), à partir d'extraits de la propagande du régime de Vichy.
- Œuvres de fiction
- Le Silence de la mer, film de Jean-Pierre Melville (1947), d'après la nouvelle de Vercors, avec Nicole Stephane et Howard Vernon.
- La Traversée de Paris, film de Claude Autant-Lara (1956), avec Jean Gabin et Bourvil.
- La Ligne de démarcation, film de Claude Chabrol (1966).
- Le Vieil Homme et l'Enfant, film de Claude Berri (1967), d'après ses propres souvenirs, avec Michel Simon.
- L'Armée des ombres, film de Jean-Pierre Melville (1969).
- Lacombe Lucien, film de Louis Malle (1974).
- Le Vieux Fusil, film de Robert Enrico (1975).
- Le Dernier Métro, film de François Truffaut (1980).
- Au revoir les enfants, film de Louis Malle (1987).
- Uranus, film de Claude Berri (1990), d'après le roman de Marcel Aymé, avec Gérard Depardieu, Jean-Pierre Marielle et Philippe Noiret.
- Monsieur Batignole, film de Gérard Jugnot (2002), avec Gérard Jugnot et Jules Sitruk.
Annexes
Articles connexes
- Régime de Vichy
- Philippe Pétain
- Révolution nationale
- Collaboration
- Résistance intérieure française
- Résistance en Alsace et en Moselle annexées
- Occupation allemande
- Annexion de la Moselle (1940)
- Gestapo
- Zone d'occupation italienne en France
- Vie en Belgique durant la Seconde Guerre mondiale
Liens externes
- On chantait quand même !, chansons sous l'Occupation, Hall de la Chanson.
- Pénurie dans la France occupée, coupures de presse.
- Tickets et cartes de rationnement.
- Vie quotidienne sous l'Occupation, Cliotexte.
- Deux récits de résistants faits prisonniers, l'un en région parisienne, l'autre en Picardie.
Catégories :- Régime de Vichy
- Histoire de la France pendant la Seconde Guerre mondiale
Wikimedia Foundation. 2010.