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Bataille des Dardanelles
La bataille des Dardanelles, aussi appelée la bataille de Gallipoli, eut lieu durant la Première Guerre mondiale.
Le but de cette bataille était de contrôler la mer de Marmara. L'idée d'éliminer l'Empire ottoman de la guerre par une action navale fut présentée au conseil de guerre par le premier lord de l'Amirauté, Winston Churchill, vers la fin de novembre 1914. Selon le plan initial, une force navale devait attaquer le détroit afin d'ouvrir la route vers Istanbul. Malgré les réserves présentées de plusieurs côtés, ce plan fut dûment approuvé en janvier 1915.
Sommaire
L'expédition alliée, conçue comme une attaque contre Istanbul, démarra laborieusement. La première étape fut une série de bombardements navals alliés à partir du 19 février. Le but de l'opération était de forcer le détroit, mais les eaux sont minées et les rivages sont fortifiés. S'ensuivit un déminage des 60 kilomètres du détroit. S'il avait été efficace, la campagne aurait pu réussir. Mais le danger des mines ne fut pas éliminé.
La seconde phase des opérations commença le 18 mars. Les navires alliés bombardèrent à nouveau les positions ottomanes, mais trois cuirassés furent coulés — l‘Irresistible de la Royal Navy et le Bouvet de la Marine nationale par des mines, l'Ocean de la Royal Navy par un obus de 276 kg tiré d'une position turque — et trois autres furent sérieusement endommagés (dont le Gaulois). Six cuirassés hors de combat donc, ce qui obligea à suspendre la tentative de forcer le détroit.
Plusieurs autres navires, alliés et ottomans, furent coulés durant cette campagne par des sous-marins. Le sous-marin australien AE2 fut lui aussi coulé.
Campagne terrestre
Une expédition terrestre fut alors organisée contre Gallipoli. 75 000 soldats alliés débarquèrent le 24 avril, mais l'effet de surprise était raté et les défenses ottomanes avaient été renforcées. Les gains initiaux des alliés furent perdus et les forces britanniques, françaises, australiennes et néo-zélandaises se trouvèrent bloquées sur le cap Helles, entre la mer et les collines tenues par les Ottomans. Les défenses ottomanes, sous le commandant du général Liman von Sanders, étaient habilement manœuvrées, à la grande surprise des alliés. Parmi les hommes qui se distinguèrent dans le camp ottoman se trouvait un jeune colonel, Mustafa Kemal, qui devait plus tard instaurer la République et moderniser le pays, devenant le premier président sous le nom d'Atatürk.
Un débarquement de troupes fraîches plus au nord, le 6 août, fit peu de différence, sinon d'allonger la liste des victimes. Celles-ci augmentèrent de façon inquiétante dans la chaleur de l'été. Les alliés connurent l'enfer des rats, de la dysenterie, de la soif et des insectes. Les survivants furent évacués de décembre 1915 au 9 janvier 1916. L'opération manquée fit environ 48 000 morts du côté des alliés, contre environ 70 000 côté ottoman.
Stratégie
Les stratèges britanniques, par tradition, par situation (insularité, flotte, empire éclaté) sont sensibles à la stratégie dite indirecte, plutôt qu'aux conceptions "Clausewitziennes", concentration et bataille décisive sur le front principal. La situation sur le front de l'Ouest vire à une guerre de siège moderne (après l'ultime fiasco des stratégies françaises - voir Général de Grandmaison). Les Britanniques étudient alors une opération sur les Dardanelles. Le premier Lord de l'Amirauté, Winston Churchill appuie un projet audacieux qui donne la part belle à la marine. Malgré d'âpres discussions, il impose une attaque uniquement navale pour forcer les détroits. Les assauts échouent en entraînant des pertes élevées. Winston Churchill, qui s'est beaucoup investi dans ce projet, s'entête et prévoit une opération combinée : attaque navale des détroits et débarquement sur la presqu'île de Gallipoli. L'opération trop ambitieuse et mal préparée échoue.
Les objectifs sont multiples comme toujours en histoire : contrôle des détroits, liens avec la Russie, coup contre l'Empire Ottoman, influence/menace sur les États des Balkans encore neutres (Grèce, Bulgarie), soutien aux Serbes (ce qu'il en restait), effet psychologique (enfin une victoire pour la Triple-Entente, reprise du mouvement, menace sur le ventre mou de la Triplice)...
Le rôle des français
L'envoi de troupes françaises et l'ouverture d'un second front en Orient ne sont pas des initiatives de l'Hexagone mais bien du jeune premier lord de la flotte britannique, Winston Churchill.
Tout commence aux Dardanelles. L'attaque navale et le débarquement sont d'inspiration et d'exécution britanniques, les Français n'y étant conviés qu'en raison du manque d'effectifs britanniques. Ils ne participent pas aux querelles sur les différentes conceptions stratégiques de l'opération qui opposent les Britanniques, ils ne semblent même pas s'y intéresser, sauf Briand et Franchet d'Espérey. Les Français acceptent même l'esquisse d'un commandement unique britannique.Chronologie des événements
Les tentatives du 3 novembre 1914 et du 19 février 1915 : en riposte à l'attaque navale ottomane contre les ports russes de la mer noire, une flotte franco-britannique bombarde les forts de l'entrée des Dardanelles et occupe l'île grecque (État neutre) de Lemnos, où l'on installe une base. Devant les appels russes, les Britanniques décident de forcer les Dardanelles. Le 19, les deux forts ottomans (Seddulbahr, Kumkale) placés à l'entrée du détroit sont écrasés et les mines draguées. Mais la flotte se trouve bloquée dans le défilé à la hauteur des forts du goulot de Çanakkale( 80 pièces lourdes, six de 355, six obusiers de 150). Les attaques précédentes ont prévenu les Ottomans du danger : sous les ordres de Von Sanders, la défense des détroits se renforce.
L'échec du 18 mars 1915 : devant les premiers succès, Londres envoie en soutien un corps expéditionnaire sur l'île de Lemnos afin d'occuper le canal et de menacer Istanbul, on lui adjoint une division française. Les stratèges ont mal estimé la situation, ils croient les défenses ottomanes à bout alors qu'elles peuvent encore être redoutables, de plus le dragage des mines n'est même pas terminé. Une nouvelle tentative de forcement s'engage mais après la perte de trois cuirassés et des dégâts importants sur les autres bâtiments, la flotte se retire sur l'Égypte (territoire ottoman déjà occupé). Le corps expéditionnaire de Lemmos doit être replié lui aussi afin de le réorganiser en vue, cette fois, d'une opération combinée sur la presqu'île de Gallipoli.
Les débarquements du 25 avril :
Les britanniques et les ANZAC au Cap Tekke, Krithia, Seddulbahr.
Il s'écoule cinq semaines avant que l'opération ne puisse commencer. Les débarquements s'effectuent sur la pointe sud-ouest de la presqu'île de Gallipoli. La flotte soutient avec ses pièces lourdes les hommes qui débarquent, malheureusement les pièces à tirs tendus se révèlent peu efficaces contre les tranchées. Les soldats sont arrêtés à quelques centaines de mètres du rivage, les premières lignes ottomanes, pourtant tenues par 67 Ottomans seulement, ne tombent que le lendemain au soir.
Les Français à Kumkale.
Ces soldats effectuent une diversion sur la côte asiatique qui se déroule mieux que les opérations de Gallipoli. Le village de Kumkale se rend après de féroces combats; les Ottomans lancent de multiples contre-attaques, au prix d'efforts surhumains, le village reste aux mains des envahisseurs. Mais le général britannique Hamilton les rappelle à Gallipoli devant les pertes extrêmement sévères que subissent les britanniques.
Un front sans profondeur (mai 1915) : ce n'est que le 1er mai que les alliés réussissent à installer véritablement leur tête de pont. Elle reste très fragile de par son absence de profondeur. L'évacuation des blessés, le débarquement de nouvelles troupes ou de matériel se fait sous le feu ottoman. Il n'existe pas de secteur calme et chacun, du soldat de première ligne au général de division, court un perpétuel danger (général Gouraud blessé le 30 juin). La situation perturbe le ravitaillement qui ne peut bientôt plus s'effectuer que de nuit.
Les attaques de l'Entente sur Kerevedere et sur l'Hacibaba : le 6 mai, Hamilton décide une attaque frontale par les français et un débordement des britanniques, cette opération se solde par un échec sanglant. À la mi-mai, on lance de nouvelles actions sur le Kerevedere qui entraînent des pertes sévères pour la conquête de quelques mètres. Les attaques de sous-marins et la perte de plusieurs bâtiments obligent la flotte à se replier après le 27 août, privant les troupes débarquées de la protection de son artillerie lourde.
La manœuvre de débordement de Suvla-Bay (6 août 1915) : afin de faciliter le débarquement à Suvla et d'encercler les Ottomans, on décide deux manœuvres de diversion pour fixer les éléments mobiles turcs. L'opération commence par une nouvelle attaque de 5 divisions sur le Cap Hellès et des ANZACS sur Sarı-Bari. L'attaque frontale échoue, les ANZACS, malgré un engagement total, ne parviennent à s'emparer de leur objectif. Alors que le débarquement s'effectue sans opposition (seulement des gendarmes ottomans) les 25 000 britanniques inexpérimentés restent immobiles sur les plages. L'incompétence des chefs britanniques à Sulva laisse aux Ottomans le temps de réagir et de les stopper. Quand Hamilton arrive sur place et qu'il tente de reprendre l'initiative, la situation est bloquée et les Ottomans retranchés.
L'aveu de l'échec : après le départ forcé de Churchill, c'est au tour d'Hamilton de supporter la défaite, son remplaçant Monro, devant la situation bloquée et l'arrivée de l'hiver ordonne la retraite. Kitchener confirme cet ordre après une inspection sur place. Le rapport entre les effectifs combattants tourne largement à l'avantage des Ottomans, le terrain supporte les mêmes tranchées qu'en France et les défenseurs possèdent l'avantage en artillerie lourde; la retraite devient obligatoire d'autant que la situation dans les Balkans s'aggrave. Deux divisions, celle de Bailloud et une britannique, s'embarquent pour Salonique au secours de la Serbie en violant la neutralité grecque.
L'évacuation, seule réussite de la campagne : du 8 octobre au 9 janvier, 100 000 hommes, 200 canons, 5 000 animaux sont évacués exclusivement de nuit sans que les Ottomans ne puissent s'y opposer. Le repli commence par l'évacuation de Suvla et des positions isolées. L'évacuation de la position principale sur la pointe sud de la presqu'île semble plus complexe mais l'armée ottomane ne réagit pas et l'évacuation se termine bien pour les Alliés.
L'expédition aura coûté la mise hors combat de 50 000 sénégalais et français et 200 000 britanniques et ANZACS (Australiens et Néo-Zélandais). Les Ottomans se sont battus héroïquement, tandis que les agresseurs devaient envahir une région moins bien défendue, pour cause de neutralité du royaume de Grèce.Conclusion
Les restes des armées alliées furent débarqués plus tard à Salonique en violation de la neutralité grecque. Elles échouèrent à empêcher la Bulgarie de rejoindre la Triplice. Après de multiples déboires politiques, militaires, diplomatiques, elles connurent un épilogue glorieux en 1918. Un assaut génial monté par Franchet d'Espérey emporta la Bulgarie, l'Empire Ottoman, l'Autriche et força l'Allemagne à capituler le 11 novembre.
Il est évident que ce n'est pas l'armée d'Orient qui a vaincu à elle toute seule la Triplice. Mais c'est elle qui imposa un armistice aussi rapide. Elle était aux portes de l'Allemagne, beaucoup plus près que les troupes alliées du front ouest et n'avait devant elle aucune troupe germanique organisée.
Voir aussi
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