- Tube pneumatique
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Un tube pneumatique, appelé aussi transport par tube pneumatique, est un système propulsant par différence de pression des navettes cylindriques, lesquelles servent à transporter des objets.
Sommaire
Histoire
Les pneumatiques sont décrits par Héron d'Alexandrie au cours du premier siècle après J.C. À l'époque victorienne, ils étaient employés pour transmettre des télégrammes depuis les stations de télégraphe jusque dans les immeubles alentour.
Ils sont encore couramment employés — le plus souvent dans les banques, les hypermarchés et certaines grandes administrations — pour transporter de petits paquets et des documents. Mais dans les années 1800, leurs promoteurs envisageaient aussi de les faire servir au transport du fret lourd, et même d'employer des réseaux de tubes pour le transport de passagers dans des chemins de fer atmosphériques. Ces projets ne furent jamais réalisés.
La poste pneumatique
La poste pneumatique, appelée aussi télégraphe pneumatique, télégraphe atmosphérique ou poste atmosphérique, est un système d'acheminement rapide du courrier (plis urgents, télégrammes, sacs de dépêches, lettres et petits paquets) dans des « curseurs » (appelés aussi navettes ou cartouches, ce sont des boîtes cylindriques creuses) circulant dans des tubes pressurisés essentiellement en fer-blanc. Il a été inventé par l'ingénieur écossais William Murdoch dans les années 1800 et développé par la suite par la London Pneumatic Dispatch Company. Des systèmes de poste pneumatique ont été employés dans plusieurs grandes villes à partir de la deuxième moitié du XIXe siècle mais ont été largement abandonnés au XXe.
On envisageait qu'un système de tubes pourrait déposer le courrier dans chaque maison des États-Unis. Des tubes pneumatiques sont toujours en service à Prague, en République tchèque. Ce service de potrubní pošta fut ouvert en 1899 et couvre en 2009 environ 60 kilomètres, transportant du courrier et de petits paquets.
Au début du XXIe siècle, les applications typiques se trouvent dans les banques et dans les hôpitaux. De nombreux hypermarchés emploient eux aussi des tubes pneumatiques pour transporter des chèques, billets et autres documents depuis les caisses jusqu'à la comptabilité. Un de ces systèmes affiche une vitesse de 10 m/s.
Les stations de poste pneumatique reliaient d'ordinaire les bureaux de poste, les bourses, les banques et les ministères. La France (timbre à date de grand format en 1901[1]) et l'Italie furent les seuls pays à émettre (entre 1913 et 1966) des timbres réservés à la poste pneumatique. L'Autriche, la France et l'Allemagne ont commercialisé de la papeterie à l'usage des pneumatiques.
La poste pneumatique en France
Un très grand réseau de tubes fut développé à Paris en 1866 et utilisé jusqu'au 30 mars 1984, date à laquelle il fut abandonné au profit du téléphone et des télécopies .
En 1866, Napoléon III constatant que le réseau de télégraphie électrique parisien arrive à saturation, décide de mettre en place un réseau pneumatique, sur le modèle de la capitale londonienne. Il s'appuie sur les travaux du chimiste français Ador qui en 1836 étudie le transport de lettres par air comprimé et teste ce système en 1852 dans le Parc Monceau.
Les premiers essais ont lieu en décembre 1866 sur une ligne de 1 050 m de longueur (tubes en acier à ciel ouvert) qui relie la Bourse de Paris au Grand-Hôtel (no 12, Boulevard des Capucines)[2]. La première ligne officielle ouvre dans la foulée entre le poste central télégraphique (103, rue de Grenelle) et le bureau de la Bourse, remplaçant ainsi le service postal des petits chevaux qui réalisaient le trajet de 3 km en 12 minutes. En 1867, cette première ligne est étendue à un réseau polygonal dans une seule direction qui part du bureau de la Bourse : il utilise comme relais les principales stations télégraphiques de Paris et emploie l'air comprimé issu du système d'eau sous pression alimentant Paris. Deux types de curseurs en fer sont utilisés : des boîtes-pistons munies à l'avant d'un nez en cuir (destiné à amortir le choc de l’arrivée) et à l'arrière d'une rondelle de cuir emboutie (assurant l’étanchéité lors du transfert pneumatique) ; les boîtes ordinaires insérées dans des étuis en cuir et poussées par les premières[3].
À partir de 1868, les tubes sont posés dans les égouts et les galeries souterraines, ils sont toujours réservés à la circulation des plis entre les institutions publiques. Entre 1874 et 1880, installés sous les bureaux télégraphiques, huit ateliers de force motrice avec des machines à vapeur et des pompes à air sont fabriqués pour produire de l’air comprimé. Le maréchal Mac-Mahon signe un décret le 25 janvier en 1879 (appliqué le 1er mai) qui ouvre le réseau (alors long de 71 km, il est limité à l'ancien octroi de Paris) au public, marquant le début de la poste pneumatique en France[4]. À partir de 1907, le réseau prévoit de s'étendre aux banlieues, seule Neuilly-sur-Seine sera desservie en 1914, la première guerre mondiale sonnant la fin de ce projet[5]. De 1927 à 1942, les machines à vapeur sont remplacées par des moteurs électrique et des compresseurs rotatifs de surpression et de raréfaction. En 1934, le réseau pneumatique atteint son apogée avec une longueur de 467 km, il dessert plus de 130 bureaux télégraphiques et distribue une dizaine de millions de correspondances par an (chiffre record de 30 millions en 1945, les Parisiens ont gardé la nostalgie de leur petit bleu) par l’intermédiaire de facteurs tubistes[6] (à pied, à vélo à partir de 1916 puis à vélomoteur pour convoyer le courrier dans les banlieues). Les tubes ont différents diamètres selon les débits utilisés, les curseurs circulent à une vitesse de 400 mètres à 1 km par minute (soit plus vite que le courrier de surface). Il subit un programme de modernisation de 1930 à 1960 sous l'impulsion de l'ingénieur en chef des télécommunications Louis Gaillard qui développe son automatisation : expédition automatique des curseurs, sélection automatique des adressages grâce à un système de bagues sur le ventre des curseurs, éjection automatique dans des augets de réception[7]. Suite à des conflits d'arbitrage budgétaire entre les administrations qui s'en occupent (Administration des télécommunications pour la partie technique, P&T pour le service commercial), la maintenance n'est plus assurée (fin des années 1960, 30% du réseau ne fonctionne pas), ce qui amorce son déclin accéléré par les nouveaux moyens de communication. Le service étant en déficit malgré une politique tarifaire en hausse (7.8 fois le prix d'une lettre postale en 1975), il ferme en 1984[8].
En 1910, la ville d'Alger se dote du même type de réseau, puis celle de Marseille (de 1938 jusqu'en 1964), puis celle de Lyon. Ce type de réseau est toujours utilisé dans des commerces de détail, hôpitaux et banques françaises, ainsi qu'à l'Assemblée nationale et au Sénat pour le Journal officiel (il est potentiellement en état de marche pour des dépêches entre les chambres du Parlement français, les services du Premier Ministre et le palais de l'Élysée : conservation stratégique en cas de coupure des systèmes de télécommunication actuels, notamment en cas de guerre). D'autres services de la ville de Paris s'en servent aussi, alimentés par la SUDAC[9].
Chronologie des services de poste pneumatique
- 1853 : liaison entre le London Stock Exchange et la station de télégraphe principale de Londres (une distance de 200 mètres)
- 1864 : liaison à Sydenham sur une ligne souterraine (tube en briques) de 547 m de longueur qui transporte des voyageurs
- 1865 : Berlin (jusqu'en 1976), la Rohrpost, un réseau de 400 kilomètres au total
- 1866 : Paris (jusqu'en 1984) – Jusque là à l'usage exclusif des administrations, le réseau fut ouvert au public en 1879 ; il comptait 467 kilomètres au total à partir de 1934
- 1875 : Vienne (jusqu'en 1956)
- 1887 : Prague – Le réseau fut endommagé en 2002 à cause d'une inondation mais fonctionne encore aujourd'hui[10],[11]
- 1910 : Alger – Le réseau a continué à fonctionner quelques années après l'indépendance en 1962
- 1910 : Marseille (jusqu'en 1964)
- autres villes : Munich, Rio de Janeiro, Hambourg, Rome, Naples, Milan, Boston, New York, Philadelphie, Chicago, Saint-Louis, Manchester, Liverpool, Birmingham, Glasgow, Newcastle et Dublin.
Utilisation actuelle
Cette technique est toujours employée à petite échelle au début du XXIe siècle. Un grand nombre de banques drive through (accessibles sans descendre de voiture) utilisent des tubes pneumatiques pour transporter des espèces et des documents entre les voitures et les caissiers.
Beaucoup d'hôpitaux ont un réseau de ce genre pour transporter des médicaments, des documents et des spécimens entre les postes infirmiers. De nombreuses usines les emploient pour transporter des pièces détachées rapidement à travers de vastes sites. Beaucoup de grands magasins les utilisent pour rapatrier les espèces en excès des caisses vers les bureaux et pour renvoyer de la monnaie aux caissiers. Le premier centre de contrôle des missions de la NASA à Houston avait des tubes pneumatiques reliant les consoles de contrôle aux salles d'assistance au personnel. L'Aéroport international de Denver est remarquable pour ses multiples réseaux de tubes pneumatiques, au nombre desquels un réseau de 10 pouces (env. 25 cm) de diamètre, un de 4 pouces (env. 10 cm) pour la billetterie de United Airlines et un réseau renforcé de collecte des sommes versées pour le paiement des parkings qui compte un terminal dans chaque guérite.
Les pneumatiques au cinéma
Les pneumatiques sont souvent utilisés dans les œuvres de fiction et notamment au cinéma.
Dans le film Baisers volés de François Truffaut, Antoine Doisnel envoie un pneumatique à Mme Tabard. Truffaut filme le parcours du pneumatique à travers les différentes rues parisiennes.
Dans le film Le Corniaud de Gérard Oury, Léopold Saroyan (Louis de Funes) reçoit Antoine Maréchal (Bourvil) dans son bureau parisien et est dérangé par la réception de pneumatique. Ce qui ne manque pas d'impressionner Maréchal...
Dans Une femme est une femme de Jean-Luc Godard, Alfred raconte à Angela l'histoire d'une fille qui a deux amoureux et qui envoie un pneumatique à chacun des deux. Croyant s'être trompée, elle court chez l'un puis chez l'autre et leur avoue tout. Cette histoire est ensuite mise en scène par Godard dans Montparnasse et Levallois, court-métrage inclus dans le film Paris vu par….
Dans le film Brazil de Terry Gilliam, l'administration utilise des tubes pneumatiques. Ces derniers participent à l'esthétique rétro-futuriste de l'œuvre. Dans une scène comique, Sam Lowry, le personnage principal, relie deux tuyaux pneumatiques et altère ainsi son fonctionnement.
Notes et références
- Timbres de la poste pneumatique
- « Sciences », dans La Presse, 31 mars 1867 [texte intégral]
- Charles Cassaigne, Documentation et notes réunies en 1966 à l'occasion du centenaire du réseau pneumatique, Direction des télécommunications de Paris, p. 72.
- Carte du réseau des tubes pneumatiques de Paris en 1888
- Guy Lazo, La Télégraphie pneumatique 1866-1927, Cahier des PTT, n° 2, 1985
- Engagés entre 13 et 16 ans, des anecdotes littéraires mentionnent des dames d'un certain standing utilisant ce réseau uniquement pour les voir.
- Thierry Poujol, Des réseaux pneumatiques dans la ville, un siècle et demi de techniques marginales, LATTS-ENPC, 1986
- « Pneumatiques : fin d'un service », dans Timbroscopie, no 3, mai 1984, p. 44
- France Culture, 5 mars 2011 Documentaire de Olivier Chaumelle et Anne Fleury, La mémoire du pneu sur
- (en) Prague Pneumatic Post
- (cs) Pražská potrubní pošta, avec des illustrations
- (en) Cet article est partiellement ou en totalité issu de l’article de Wikipédia en anglais intitulé « Pneumatic tube » (voir la liste des auteurs)
Voir aussi
Liens externes
- (de) Die Berliner Rohrpost
- (en) The Museum of RetroTechnology: Pneumatic Networks.
- (en) BUISPOST.EU Information on Pneumatic Tube Systems
- (en) The Pneumatic Post of Paris
- (fr) Messagerie en sous-sol – La mémoire du pneu
Bibliographie
- Ingmar Arnold, Luft-Züge: die Geschichte der Rohrpost in Berlin und anderswo. - Berlin, 2000 ISBN 3-89218-061-x
- Anne-Laure Cermak, La poste pneumatique, un système original d'acheminement rapide du courrier : l'exemple du réseau de Paris des origines à sa suppression : 1866-1984, mémoire de maîtrise, Paris 4, 2003. [présentation en ligne]
- Elisa Le Briand, Anne-Laure Cermak, Le réseau avant l´heure : la Poste pneumatique à Paris (1866-1984), Comité pour l’histoire de La Poste, 2006
- John D. Hayhurst, The Pneumatic Post of Paris, The France & Colonies Philatelic Society of Great Britain, 1974 [(en) lire en ligne]
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