- Théorème de Burnside (groupe résoluble)
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Pour les articles homonymes, voir Théorème de Burnside.
En mathématiques, le théorème de Burnside appartient à la théorie des groupes finis. Son énoncé est :
Théorème — Si p et q sont deux nombres premiers et n et m deux entiers positifs, alors tout groupe d'ordre pn.q m est résoluble. .
Il est nommé en l'honneur de William Burnside, qui l'a démontré en 1905, à l'aide de la théorie des représentations d'un groupe fini.
Sommaire
Histoire
En 1872, Ludwig Sylow énonce[1] trois célèbres théorèmes dont l'un indique le caractère nilpotent et donc résoluble d'un groupe de cardinal pn.
Georg Frobenius démontre en 1895[2] que tout groupe de cardinal pn.q est résoluble. Ce résultat est généralisé trois ans plus tard par Camille Jordan au cas où m est égal à deux. C'est en 1905 que William Burnside démontre la véracité du résultat dans le cas où n et m sont quelconques[3].
Démonstration
La démonstration de Burnside utilise beaucoup des méthodes existantes au moment de la rédaction de son article. On trouve bien évidemment la notion de groupe résoluble, mais aussi un théorème de Sylow avec l'utilisation de p-groupes, les classes de conjugaison découvertes par Burnside. Enfin la théorie des représentations d'un groupe fini est largement utilisée avec sa dimension arithmétique[précision nécessaire] qu'Issai Schur venait de découvrir.[réf. souhaitée]
DétailsRaisonnons par l'absurde : G désigne un groupe non résoluble (noté multiplicativement et d'élément neutre noté 1) d'ordre pn.qm minimal.
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- G est un groupe simple de centre {1} et n est non nul.
G n'est bien sûr pas trivial. S'il existait dans G un sous-groupe normal H différent de G et de {1} alors (par minimalité de G), H et G/H seraient résolubles donc G aussi, ce qui est exclu. Donc G est simple.
Si n était nul, G serait un q-groupe fini, donc nilpotent, donc résoluble, ce qui est exclu.
De même, G ne peut être abélien, car il serait alors nilpotent. Son centre n'est donc pas égal à G, donc (par simplicité de G) il est égal à {1}.
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- Il existe dans G un élément g dont le nombre de conjugués est de la forme qd pour un certain d>0.
L'un des théorèmes de Sylow montre que G contient un sous-groupe S d'ordre pn. Comme S est un p-groupe non trivial, son centre Z(S) est encore non trivial. Fixons alors dans Z(S) un élément g différent de 1. Le nombre de conjugués de g est égal à l'indice du stabilisateur de g, qui divise l'indice qm de son sous-groupe S. Ce nombre est donc de la forme qd. De plus, l'entier d est strictement positif car g est différent de 1 donc non central dans G.
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- Il existe un caractère irréductible χ non trivial, tel que l'entier χ(1) ne soit pas divisible par q et que le complexe χ(g) soit non nul.
Soit (χi)1≤i≤h la famille des caractères (sur ) irréductibles de G (ici χ1 désigne le caractère trivial). Comme g n'est pas dans la même classe de conjugaison que le neutre 1, la relation d'orthogonalité sur les colonnes de la table des caractères (en) du groupe[4] donne :
Or les χi(g) sont des entiers algébriques, comme sommes de racines de l'unité. Si tous les caractères irréductibles non triviaux qui ne s'annulent pas en g prenaient en 1 une valeur multiple de q, on en déduirait que le nombre
est un entier algébrique (comme combinaison linéaire à coefficients dans d'entiers algébriques), ce qui est absurde. Cette contradiction démontre la proposition.
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- Le nombre complexe qd.χ(g)/χ(1) est un entier algébrique.
Soit u l'élément de l'algèbre du groupe G sur les nombres complexes égal à la somme des qd éléments de la classe de conjugaison cg de g. D'après le paragraphe Entier algébrique de l'article Algèbre d'un groupe fini, le complexe suivant est alors un entier algébrique :
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- La nombre complexe χ(g)/χ(1) est un entier algébrique.
En effet, q étant premier avec χ(1), l'identité de Bézout montre l'existence de deux entiers a et b tels que :
La valeur recherchée est donc combinaison linéaire à coefficients entiers d'entiers algébriques, ce qui démontre la proposition.
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- L'image de g, par la représentation ρ de caractère χ, est une homothétie.
Notons ζ le nombre complexe χ(g)/χ(1). C'est un entier algébrique non nul, donc sa norme N(ζ) (i.e. le produit de ses conjugués (en), c'est-à-dire des racines de son polynôme minimal sur Q) est un entier relatif non nul. Or ζ est une moyenne arithmétique de racines de l'unité (les valeurs propres de ρ(g)), donc ses conjugués aussi, donc tous sont de module inférieur ou égal à 1. Comme leur produit N(ζ) est de module supérieur ou égal à 1, tous sont en fait de module 1, en particulier ζ, ce qui signifie que les valeurs propres de ρ(g) sont égales, donc que ρ(g) est une homothétie.
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- Conclusion
Soit N le noyau de ρ. L'homothétie ρ(g) est centrale dans Im(ρ) (qui est canoniquement isomorphe à G/N), alors que g n'est pas central dans G. Par conséquent, le sous-groupe normal N du groupe simple G est non trivial, donc égal à G, si bien que la représentation ρ est triviale, ce qui contredit le choix de χ (caractère non trivial).
Cette contradiction démontre le théorème.
Notes et références
Notes
- M. L. Sylow, « Théorème sur les groupes de substitutions », dans Mathematische Annalen, vol. 5, 1872, p. 584-594
- (de) Georg Frobenius, « Über auflösbare Gruppen, II », dans Sitzungsber. Akad. Wiss. Berlin, 1895, p. 1027-1044
- (en) William Burnside, Theory of Groups of Finite Order, Dover Publications, 2004
- ISBN 978-2-73021257-1), p. 35 Yvette Kosmann-Schwarzbach, Groupes et symétries, Éditions École Polytechnique, 2005 (
Références
- (en) Marshall Hall, Jr. (en), The theory of groups [détail des éditions]
- Serge Lang, Algèbre [détail des éditions]
- Pierre Samuel, Théorie algébrique des nombres [détail des éditions]
- Jean-Pierre Serre, Cours d'arithmétique [détail des éditions]
Liens externes
- (en) Finite Group Representations for the Pure Mathematician, par Peter Webb
- Deux résultats de Burnside, par Benoît Claudon (chargé de recherches au CNRS, Institut Élie Cartan de Nancy)
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