Occitanie du XIVe au XVIIe siècles

Occitanie du XIVe au XVIIe siècles

L'histoire de l'Occitanie du XIVe au XVIIe siècles est caractérisée par la résistance à la perte de ses états, incorporés lentement mais inexorablement à la France.

Sommaire

Le Languedoc

La défaite cathare décima et ruina le pays et sa bourgeoisie. En 1295, les bourgeois de Carcassonne protestèrent, commandés par Bernard Délicieux, mais celui-ci fut emprisonné. En réponse, en 1296, un Lieutenant du Roi de France fut nommé. Le pays prit alors, pour les Français, le nom de Languedoc, et fut incorporé au comté de Toulouse. Avant le conflit, le Languedoc avait à peu près un million d'habitants, et la ville de Toulouse environ 20 000. En 1343, Albi avait 2 669 feux et ce nombre descendit à 1 200 en 1357 ; Toulouse avait 30 000 habitants en 1335 et sa population chuta à 26 000 en 1385, à 20 400 en 1398 et à 19 000 en 1405.

Le nom de Languedoc apparaît à la fin du XIIIe siècle dans les actes et procès-verbaux royaux pour désigner les régions Partes Occitaniae Linguae obtenues par le Traité de Paris de 1229 et à la mort d'Alphonse de Poitiers en 1271. Divisé en trois sénéchaussées (Carcassonne, Toulouse et Beaucaire), le territoire ainsi désigné incluait les terres comprises entre le Rhône et la Garonne toulousaine, et du Velay au Roussillon. Plus tard, de nouvelles sénéchaussées, Rouergue, Auvergne, Quercy et Albigeois furent créées. Le pays était marqué par les structures romaines, avec des communautés juives prospères; il était divisé entre de nombreux comtés dirigés par l'aristocratie militaire et où les femmes arrêtaient aussi le pouvoir. D'autre part, il y eut aussi des fondateurs comme Sulpice-Sévère, Césaire d'Arles, Benoît d'Aniane, moine bénédictin fils du comte de Maguelonne, et Guillaume d'Orange, fondateur de Saint-Guilhem (Gellone), avec une importante activité érudite.

Entre 1302 et 1305 une série de famines affaiblit le pays, et en 1306 on en expulsa les juifs, ce qui aggrava la crise économique. Le banditisme endémique, enfanté par la misère et l'instabilité politique, prenait parfois des apparences de croisades, comme celle des pastourels[1] ou Pastoureaux. En 1321, on a aussi brûlé sur le bûcher à Villerouge-Termenès (Narbonne) le dernier dirigeant cathare, Guilhem Bélibaste, ce qui signifia la disparition définitive de la secte en Occitanie.

En 1348, le pays subit une forte épidémie de peste noire venant de la Provence[2]. Jusqu'à cette date, les campagnes connaissaient le surpeuplement, le manque de terres et l'amoindrissement des bourgs, aussi bien que la raréfaction de main-d'œuvre qui entraînait une économie de subsistance. Après l'épidémie, l'intérieur du pays se désertifia et l'agriculture régressa.

En 1357-1358, le territoire fut parcouru pour les Grandes Compagnies de l'« archiprêtre » Arnaud de Cervole[3] sous le prétexte d'attaquer les Anglais en Guyenne, tandis que Rodrigue de Villandrando occupa l'Auvergne. Cette situation provoqua à partir de 1362 la révolte des Tuchins[4] en Auvergne et Languedoc, paysans et artisans écrasés par les impôts et subissant les extorsions des bandits anglais et français qui attaquaient les bourgs et châteaux. Pour réprimer le mouvement, fut envoyée l'armée du duc de Berry, nommé[5] en 1380 lieutenant royal du Languedoc. La ville de Toulouse en profita pour se révolter contre l'autorité royale. En 1382, on étouffa la révolte dans tout le Languedoc, et la ville de Toulouse fut condamnée par le roi à une amende de 800 000 francs or.

De manière générale, les Languedociens se rangèrent du côté des Bourguignons contre le roi de France, mais en 1420 ils décidèrent de changer l'alliance pour soutenir Charles VIII. En reconnaissance, celui-ci leur accorda des États Généraux avec la séparation de ceux de Langue d'oc et ceux de Langue d'oïl. En 1444 ce parlement s'établit à Toulouse, mais il rédigeait les actes et procès-verbaux en français, et dès 1478 il siégea définitivement à Montpellier.

En 1440 s'installa à Montpellier le commerçant Jacques Cœur, inspecteur des gabelles et commissaire dans les États du Languedoc. Le commerce avec la Méditerranée portait sur des vêtements de Normandie et d'Angleterre, des tissus de Hollande, la soie, l'orfèvrerie, les épices et le coton d'Orient. En 1450, Jacques Cœur s'établissait à Marseille, époque où les Français commencèrent la colonisation économique du bas Quercy, du Rouergue et du Limousin. En 1463 un incendie dévastait la ville de Toulouse, raison pour laquelle elle fut réorganisée de façon urbaine.

La France en 1477

En 1510, Pierre Lancefoc (mort en 1519), de Toulouse, s'associe avec d'autres marchands, Cheverry et Serravère, afin de développer l'industrie du pastel[6], qui fut très importante pendant la période de 1515 à 1540, dans la zone du Lauragais jusqu'à l'Albigeois. On en faisait des boules (coques ou cocagnes)[7] desquelles on tirait une teinture bleue. Le commerce du pastel a généré un commerce assez important entre Toulouse et Bordeaux. En 1549 la Bourse de Toulouse a été créée, représentative du fort élan économique dont la région a bénéficié pendant le XVIe siècle : les tissages de Rodez et les monnaies et orfèvrerie de Villefranche, par exemple. Mais l'introduction de l'indigo américain provoqua le déclin, et à la longue, la ruine des nouveaux bourgeois occitans, ce qui fut la cause du retard économique et des nombreuses révoltes qui se produisirent dans ce siècle et le suivant.

Sur le plan religieux, en 1555, les jésuites s'établirent dans le pays, en même temps que les protestants ouvrirent des écoles à Nîmes (1561), Orange (1573), Die (1603), Montpellier et Montauban.

Annexion de la Provence

En 1481 Charles V d'Anjou a vendu ses droits sur la Provence au roi de France, mais jusqu'à 1487 les États Généraux n'ont pas voté l'annexion à la France, et quand ils l'ont fait, ils l'ont fait selon le modèle confédéral qui garantissait le maintien de l'autonomie. De cette manière, en 1501 un Parlement fut créé à Aix doté de pouvoirs juridiques, politiques et fiscaux en Provence, mais, là aussi, avec des fonctionnaires français.

De 1524 à 1544, elle fut attaquée par le roi d'Espagne Charles Ier. En 1524, son lieutenant général en Italie, le connétable de Bourbon, entra dans Aix et assiégea sans succès Marseille[8]. Après ces faits, François Ier punit les Provençaux qui s'étaient soumis. En 1527, Charles Quint attaque une autre fois par mer, et en 1536 il débarque même à Aix pour se proclamer roi d'Arles[9], mais il échouera à nouveau devant Marseille.

Les tribunaux de première instance de comté furent supprimés, par l'Édit de Joinville de 1555, et le pays fut divisé en sénéchaussées, de type français, en même temps qu'on limitait l'exercice du pouvoir parlementaire. Finalement, en 1547, le roi de France sanctionne définitivement l'union franco-provençale. En 1552 un Trésorier Royal est nommé à Aix, siège des États Provençaux, et en 1555 la Chambre d'Aix devient Tribunal des Comptes.

Mais ces mesures heurtèrent les aspirations particularistes du consulat de Marseille. D'abord la noblesse provençale, dirigée par Christine Daguerre, comtesse de Saut, en 1589 appela Charles Manuel de Savoie, qui avait été nommé comte de Provence au nom de la Ligue catholique avec le support du Parlement d'Aix pour s'opposer au protestant Henri IV. Cependant, en 1590 le roi français Henri IV se convertit au catholicisme, et le mouvement s'évanouit. En 1591, se produit la sécession du Consulat de Marseille, qui fut proclamée république, appuyée par l'Espagne, et dirigée par le dictateur proclamé Charles de Casaulx, chef de la Ligue catholique, qui fait installer une imprimerie officielle et fait venir Mascaron d'Avignon. On édite ainsi quelques classiques provençaux. Le Consulat marseillais résiste jusqu'à l'assassinat de Casaulx en 1596[10]. Quand ils se sont rendus, le roi français supprime le consulat et la ville de Marseille est occupée par le commandant français Guillaume du Vair.

Entre-temps, Nice, qui restait au pouvoir des Savoie, fut assiégée en 1543 par les Français et les Turcs, parce qu'elle était alliée de l'Empire, et elle résista à la tentative d'occupation grâce au soulèvement lors duquel s'illustra par Caterina Segurana. La langue italienne s'y impose en 1562, malgré l'édition d'un dictionnaire occitan par Joan Badat (1516-1567). Et finalement, en 1588 Jean de Breuil annexe Nice à la Savoie, de sorte qu'elle conserve ses libertés, franchises et langue propre, encore qu'influencée par l'italien, même au début du XIXe siècle.

Humanisme et guerres de religion

Pendant le XVIe siècle le territoire occitan fut un centre d'impulsion du modernisme humaniste avec l'influence italienne et latine. Le Collège de Guyenne, à Bordeaux, avec André de Gouvéa et Jean de Gelida, forme les fameux humanistes Michel Eyquem, seigneur de Montaigne (1533-1592), auteur des Essais (1572-1592) et Étienne de la Boétie (1530-1563) traducteur de Xénophon, Aristote et Plutarque, et auteur du Discours de la servitude volontaire ou contr'un (1576), fort plaidoyer contre la tyrannie, et le guyennais Clément Marot (1496-1544), secrétaire de François Ier et exilé en Italie, qui introduit en France le sonnet italien, aussi bien que d'autres comme Joseph Scaliger, Elie Vinet, Salluste du Bartas, Brantôme et, quelques siècles plus tard, Fénelon et Montesquieu. À Limoges se détachent Jean Dorat (1508-1588), précepteur des enfants d'Henri II et auteur d'une Poematia (1586) en latin, français et grec, et Marc-Antoine Muret (1526-1585), maître de Montaigne, avec Juvenilia (1552) et Hymnorum sacrum liber (1576). En Provence, les frères, Jean de Notre-Dame (1507-1577) procureur du Parlement de Lyon et auteur des Vies des plus célèbres et anciens poétes provençaux (1575), écrite en provençale d'abord puis en français, et César de Notre-Dame (1555-1629), chroniqueur officiel de la Provence et auteur d'Histoire et chronique de Provence ; en 1555 Vasquin Philieul d'Aix traduit en français les œuvres de Pétrarque, de la même manière que l'ont fait le baron d'Oppéde et Henri d'Angoulême. En Béarn, se signalent aussi le poète en français Bernard du Poey de Montclar, auteur des Odes du gave, fleuve en Béarn (1551) et Jean-Henri de Fondevila (1633-1703) auteur bilingue du Calvinisme en Béarn, qui ne fut publié qu'en 1880, et Pastorale du paysan, publié en 1761.

Suivant cet exemple, des collèges majeurs se fondent aussi à Tournon (1536), Auch (1543), Clermont (1555) par l'évêque Guilhem Dupart, Pamiers (1558) et Le Puy (1588), en plus des écoles des jésuites de Toulouse.

En 1530 apparut dans le pays le mouvement scepticiste de l'École de Padoue, qui facilitera pendant la période de 1528 à 1532 l'expansion du luthérianisme en bas Languedoc, grâce aux soutiens de Gérard Roussel et Lefèvre d'Etaples, protégés par la cour de la reine Marguerite de Navarre à Nérac. Pour leur part, les calvinistes convertissent les régions de Nîmes-Uzès-Alès, la vallée de l'Hérault, le Rouergue (sauf Rodez), Montauban et ils obtiennent même la conversion du roi de Navarre Jean d'Albret. Cette expansion a été facilitée par le fort anticléricalisme dominant en Occitanie et la méfiance généralisée envers Rome.

Ce fait provoqua la réaction catholique qui alluma les guerres de religion de la période 1547-1574. Le parti catholique, appelé Ligue catholique, était dirigé par le gascon Blaise de Montluc et par le provençal Pontevès-Flassans, et il ferait face à l'Union Protestante, antimonarchique et fédérale, et dirigée par le prince de Condé et par le roi de Navarre. Le conflit sembla s'apaiser avec la Paix d'Amboise de 1563[11] et la nomination du protestant Henri de Navarre comme héritier de la couronne française, mais le Massacre de la Nuit de la Saint Barthélémy déclencha la guerre de nouveau. Finalement, Henri de Navarre devint roi de France en 1589 avec la seule opposition des ducs de Joyeuse, retranchés en Languedoc et qui se rendirent à Toulouse en 1596[10]. Par contre, les Français profitèrent de cette période pour abolir les droits du Limousin en 1531, et ceux du Dauphiné en 1560.

Le royaume de Navarre, dernier réduit occitan

Catherine de Navarre (1483-1518) succéda à son frère François Phébus, et se maria au noble béarnais Jean d'Albret. Elle suivit une politique francophile qui incita le roi de Castille et d'Aragon, Fernand le Catholique, en accord avec le pape de Rome, à envahir la partie péninsulaire de la Navarre, et en 1510 le roi français essaya de s'annexer le Béarn. De cette manière, le royaume serait réduit au Béarn, Foix, « Iparralde » (ou Pays basque français) et les autres fiefs gascons, tout en conservant le nom de Royaume de Navarre.

Leur fils Henri II de Navarre (15 8-1555) fut aussi comte de Foix et d'Armagnac, il essaya de récupérer la partie péninsulaire en 1521, mais il ne trouva pas de soutien, et en 1526 il fut emprisonné avec François Ier à Pavie. Pour cela, en 1527 il obtint la Gascogne et le Rouergue, et en 1530 le roi de France reconnut le Béarn comme état indépendant et protestant, où le gascon était langue officielle. Il institua les Fors (Organisation forale), qui avaient les Syndicats comme pouvoir électif, et des États composés du Majour (pour les barons) et la Cour des Communautés. Cependant, la tête du parlement béarnais était nommée par le roi de France. En 1538 on établit un recensement des propriétés, une imprimerie (qui assure la publication d'œuvres en gascon et basque), une armée propre et une Chambre des Comptes. Toutes ces institutions furent réglées avec la publication en 1552 des Fors et Coutumes de Béarn.

Son successeur, Jeanne III de Navarre (1555-1572) se maria à Antoine, duc de Vendôme et lieutenant de France, ce qui la rapprocha des positions françaises. Une renaissance littéraire se produisit en occitan et la cour ancienne d'Orthez s'installe à Pau.

Le dernier roi fut Henri III (1572-1610), plus tard Henri IV de France, en 1564 il a fait publier Stil de la Justicy deu Pays de Bearn, et il promouvra les travaux publics, aussi bien que le commerce avec Lisbonne, Séville et Barcelone. En 1566 il a fait ouvrir une école protestante à Orthez, mais en 1572 se convertit au catholicisme afin d'accéder au trône de France. En 1576 il unit à nouveau la Gascogne et le Rouergue, mais il dut fuir Paris et il déplaça la cour à Nérac. Il devint une sorte de roi de la Gascogne et il vainquit les protestants à Cahors (1580) et Coutras (1587). En 1584 il fut déclaré définitivement héritier du trône français, auquel il n'accéda pas officiellement avant 1589. Il intégra définitivement le Béarn et la Gascogne dans la France, mais il dut réprimer une révolte de paysans.

Le XVIIe siècle et le « problème occitan »

Pendant la période de gouvernement d'Henri IV un fort développement économique se produisit, en même temps qu'une forte présence des Gascons à la cour de Paris : Adrien de Montluc a été nommé lieutenant au Pays de Foix et conseiller particulier du roi ; Antoine de Roquelaure, lieutenant royal en Guyenne, et les Montmorency-Damville, gouverneurs du Languedoc. En ce qui concerne l'économie, depuis 1600 on a introduit la vigne en Languedoc et à Béziers, de sorte que peu à peu le vin remplaça le blé dans les exportations du pays, et depuis 1636 on introduisit aussi la culture du millet dans toute l'Aquitaine, important comme fourrage. Pour augmenter les terres de culture, en 1642-1649 l'ingénieur Van Ens assécha les marais d'Arles et de Tarascon (Provence), de sorte que ces terres devinrent utiles pour la culture. Plus tard, en 1680, Grizot apporta d'Angleterre le premier métier à tisser à Nimes, berceau d'une future industrie textile, en même temps qu'en 1681 on inaugurait le Canal des Deux Mers.

Le pays du Limousin fut l'objet de plusieurs révoltes hostiles au roi. D'une part, il y eut les insurrections des Croquants, provoquées par la misère aggravée par l'augmentation des impôts, et qui s'étendirent au Périgord et au Quercy. La première, en 1594, finit avec une baisse générale des impôts ; la deuxième, en 1624, avec l'exécution de ses chefs, Donat et Barran ; et la troisième, en 1636, avec une amnistie générale. Par ailleurs, en 1602, la conspiration de Turenne entraîna l'abolition définitive des droits du Limousin et de la Marche, incorporée en 1531 par les Bourbons.

La gravité du problème apparut cependant lors du grand débat sur le protestantisme, aux États Généraux de 1614. Henri IV étant déjà mort, il y fut aussi proposé pour la première fois l'annulation de l'autonomie béarnaise. Déjà la grande majorité d'intellectuels occitans s'exprimaient en français, comme le poète gascon Théophile de Viau (1590-1626), auteur du Parnasse satirique (1623), l'humaniste bordelais Isaac de la Peyrère (1600-1676) poursuivi par l'inquisition castillane depuis 1655 pour avoir soutenu qu'il existait une vie humaine avant Adam, et le périgourdin Fénelon (1651-1715). En 1640 Pèire de la Marque (1594-1662), président du Parlement de Pau depuis 1622 et conseiller d'état lors de la Paix des Pyrénées (1659), a composé une Histoire du Béarn en français, et il y associe l'avenir du pays à celui de la France.

Le soulèvement des protestants béarnais en 1619 sera réprimé en 1620, avec l'entrée en personne de Louis XIII à Pau[12]. Plus important, cependant, fut le soulèvement à Privas (Languedoc) du Breton Henri de Rohan (1579-1638), chef du parti protestant depuis 1611. Le roi réussit à réprimer la révolte à Montauban, Saint-Antonin-Noble-Val, Layrac. Nérac, Casteljaloux et Montpellier en 1622, mais Rohan se rebella à nouveau en 1625-1626 et en 1627-1629. Pour ce motif le roi Louis XIII édicta en 1628 l'Édit de Nîmes, par lequel les protestants perdirent leur autonomie politique, et finalement en 1629 le roi et Rohan signaient la Paix d'Alès, qui supposait le démantèlement de toutes les forteresses de l'Occitanie.

Pourtant, la promulgation de l'Édit des Élus en 1630, par lequel il retirait aux États Provinciaux et aux agents du pays la répartition et la perception d'impôts, créa un nouveau climat de mécontentement, aggravé par les calamités (faim et peste), aussi bien que par une forte hausse des prix. Ainsi, se produisirent encore deux soulèvements importants.

D'une part, en 1630 Laurent de Coriolis dirigea en Provence la révolte des cascavèus[13] jusqu'à sa répression en 1632. D'autre part, se produisit une conspiration contre le roi, de Gaston d'Orléans avec le soutien d'Henri II de Montmorency (1595-1632), gouverneur général du Languedoc depuis 1613. Il s'agissait d'une révolte de caractère fédéral et un peu anachronique en ce qu'elle supposait le soulèvement de tout le Languedoc, de la Marche, du Limousin et de la Gascogne. Mais ils furent vaincus le premier septembre 1632 à Castelnaudary. Blessé et fait prisonnier, Montmorency fut exécuté à Toulouse le 30 octobre de la même année. Pendant le conflit, il avait reçu le soutien de Montpellier et de Toulouse, pour la lutte que les États menaient contre Richelieu, mais pas du tout de Nîmes ni de Narbonne.

L'échec de cette révolte provoqua la liquidation des classes dirigeantes occitanes. Le nouveau lieutenant général, Schomberg, fit emprisonner en 1637 Adrien de Montluc, par ordre de Richelieu. Manquant du soutien des classes dirigeantes, la langue occitane s'en ressentit. Et le gouverneur suivant du Languedoc, le prince de Conti (1653-1657) ne protégea plus aucun écrivain occitan, et il fit même venir à Toulouse des écrivains français, comme Molière et d'autres.

Le retentissement de ces révoltes provoqua à Paris une suite d'œuvres littéraires fortement anti-occitanes. Agrippa d'Aubigné écrivit les Aventures du Baron de Faeneste (1617-1620) où il oppose l'ëtre (l'homme d'oil) au semblant d'être (l'homme d'oc). Il fut appuyé par François de Malherbe (1555-1628), qui se propose de « dégasconiser la langue française », et par le même Molière, auteur de Monsieur de Pourceaugnac où il se moque de la « grossièreté limousine ».

En 1639 les États Provinciaux de la Provence furent supprimés, bien que le Parlement se soit tenu fin 1771. Cependant, les révoltes continuèrent. En 1645 une nouvelle insurrection s'étendit à l'Aquitaine et à Montpellier contre la fiscalité royale. Les rebelles tinrent la ville trois jours, mais ils furent soumis et commença une forte répression. De plus, le roi édicta en 1648 l' « Édit de la Rançon », par lequel le salaire des députés des parlements régionaux était suspendu pendant quatre ans. Celui de Bordeaux le rejeta, et commença le mouvement appelé la Fronde, en connexion avec d'autres, partout en France, et qui a le soutien du prince Louis II de Bourbon-Condé (1621-1686), qui marche sur la Guyenne en opposition à Mazarin, et il reçoit le renfort de l'Ormée, milice républicaine bordelaise qu'il dirigera contre Paris. Néanmoins, il est vaincu par Turenne en juillet 1652 et il doit partir en exil. De plus, pendant la période de 1648 à 1650, les armées royales pillèrent la Gascogne afin de réduire les rebelles. Et finalement, en 1675 a lieu l'exil définitif des parlementaires de Bordeaux.

De 1655 à 1660 une autre révolte frondiste éclata à Marseille, dirigée par Gaspard de Glandevès de Niozelles, quand le roi essaya de remplacer illégalement les consuls, et ils empêchèrent l'entrée au port marseillais de la galère du chevalier de Vendôme. Louis XIV en personne dirigea l'assaut final de la ville, et y fit construire la forteresse de Saint-Jean afin de surveiller la ville, raison pour laquelle la ville reçut le nom de citadelle. De plus, en 1665-1666 un Tribunal Royal fut établi à Clermont afin de supprimer définitivement les nobles qui avaient participé aux révoltes frondistes, ceci à la la grande joie du peuple. Le brigandage endémique faisait aussi des ravages : un des bandits les plus connus fut Marcoman, qui ravagea Arles, l'Hérault et l'Aude et vainquit souvent les troupes royales, jusqu'à ce qu'il fût pris et exécuté à Aix en 1667.

Comme note finale, en 1685 fut révoqué l'Édit de Nantes, ce qui obligea les protestants français à changer de foi ou à partir. Ceci provoquerait déjà au siècle suivant des éclats de violence, comme la révolte des camisards des Cévennes. Au vu de ce qui s'est passé au cours de ce siècle, nous pouvons analyser les causes du manque d'un futur nationalisme occitan :

  • La bourgeoisie cesse d'élaborer des valeurs de civilisation.
  • Il apparaît seulement un localisme aux perspectives réduites (comme à Marseille) ou d'aspect réactionnaire (comme à Toulouse).
  • Transformation des élites, qui deviennent des conservateurs à la défense de leurs privilèges, et ankylosent la vie économique.
  • Les écrivains prennent les modèles français et abandonnent la vie nationale ethnique (comme Montaigne ou La Boëtie). La séparation entre élites et peuple fera que la littérature produite dans cette période soit dialectale, et que se perde le sentiment d'identité collective (par exemple, de l'expression bretonne bar a gwin, « du pain et du vin » il se formera l'expression française baragouin (langage incompréhensible).

Les conséquences de ces faits ont entraîné l'Occitanie vers le manque d'un modèle national qui puisse être opposé au Français.

Notes, sources et références

  1. Pages 229 à 231 d'un ouvrage consultable en ligne
  2. pages 333-334 : Journal de la France et des Français - Chronologie politique, culturelle et religieuse de Clovis à 2000, éd. Quarto Gallimard, 2001, 2408 p. - (ISBN 2-07-073756-X)
    « En novembre 1347, la peste noire fait son apparition à Marseille. Arrivée en Provence par voie maritime depuis la Mer Noire et le sud de l'Italie, elle se propage de là vers Arles, Avignon en janvier 1348… le sud de la France au printemps. Elle atteint Lyon en mai, Bordeaux en juin 1848… la Bourgogne au début juillet. »
  3. page 341 : Journal de la France et des Français (détails ci-dessus)
  4. page 345 : Journal de la France et des Français (détails ci-dessus)
  5. page 361 : Journal de la France et des Français (détails ci-dessus)
  6. Site de l'Académie de Toulouse : page « Les fortunes pastellières »
  7. page 478 : Marcel Lachiver, Dictionnaire du monde rural - Les mots du passé, Éditions Fayard, 1997, 1770 pages - (ISBN 2-213-59587-9)
  8. page 486 : Journal de la France et des Français (détails ci-dessus)
  9. page 506 : Journal de la France et des Français (détails ci-dessus)
  10. a et b page 668 : Journal de la France et des Français (détails ci-dessus)
  11. page 580 : Journal de la France et des Français (détails ci-dessus)
  12. page 721 : Journal de la France et des Français (détails ci-dessus)
  13. Extrait consultable en ligne

(ca) Bibliographie


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