Mauretania (paquebot)

Mauretania (paquebot)

RMS Mauretania

Mauretania
RMS Mauretania.jpg
Type : Paquebot transatlantique
Histoire
Quille posée : 1904
Lancement : 20 janvier 1906
En service : 16 novembre 1907
Statut : Retiré du service en 1934 et démoli en 1935
Caractéristiques techniques
Longueur : 240,7 m
Maître-bau : 26,8 m
Tonnage : 31 938 tjb
Propulsion : Turbine à vapeur (2 turbines haute pression et 2 basse pression)
Puissance : 68 000 chevaux, 90 000 chevaux par la suite
Vitesse : 26 à 28 nœuds
Autres caractéristiques
Passagers : 2 165 (563 de première classe, 464 de deuxième classe, 1 138 de troisième classe)
Équipage : 802
Chantier : Swan Hunter & Wigham Richardson, Wallsend, Tyne et Wear
Armateur : Cunard Line
Pavillon : Royaume-Uni Royaume-Uni

Le RMS Mauretania, jumeau du paquebot Lusitania, est un paquebot transatlantique britannique armé par la Cunard et construit par les chantiers Swan Hunter & Wigham Richardson à Wallsend, Tyne et Wear. Lancé le 20 janvier 1906, il est alors l'un des paquebots les plus grands et les plus rapides du monde. Il remporte le Ruban bleu en 1907 et conserve son record pendant vingt-deux ans. Son nom vient de la province romaine de Maurétanie, tout comme ses sister-ships qui tirent les leurs des provinces de Lusitanie et d'Aquitaine.

Le Mauretania, et son jumeau le Lusitania, surnommés les « lévriers des mers », constituent dans l'histoire les deux seuls bateaux du début du XXe siècle propulsés par des turbines à vapeur à commande directe, cette technologie revêtant un caractère exceptionnel pour l'époque. Certains paquebots construits ultérieurement furent adaptés en tenant compte d'une réduction des turbines.

Sommaire

Histoire

Contexte

Au début du XXe siècle, l'Allemagne détient les records de vitesse avec ses super paquebots Kaiser Wilhelm der Grosse et le Deutschland. Ceux-ci ont en effet battu les records établi par le Campania et le Lucania, appartenant à la Cunard Line[1]. Dans le même temps, le financier américain John Pierpont Morgan réunit au sein de l'International Mercantile Marine Company de plus en plus de compagnies maritimes, notamment la White Star Line et la Red Star Line. La Cunard reste la seule compagnie britannique indépendante[2]. Retrouver son prestige n'est donc pas qu'une question concernant la compagnie mais une question de prestige national.

En 1902, le gouvernement britannique et la Cunard signent un accord concernant la construction de deux super-paquebots, le Lusitania et le Mauretania : le gouvernement finance en partie les navires contre la garantie d'une vitesse supérieure à 24 noeuds et la possibilité de convertir les navires en croiseurs auxiliaires en cas de besoin. Ainsi, la Cunard obtient du gouvernement un crédit de 2,6 millions de livres à 2,75 % d'intérêts[2].

Conception et construction

Le Mauretania est conçu par un architecte de la Cunard, Leon Peskett, et Swan Hunter. L'idée de départ des architectes est de construire des paquebots à trois cheminées. Une quatrième cheminée factice est rajoutée pour des raisons esthétiques et symboliques[3], ce qui avait déjà été fait sur les paquebots allemands de la Norddeutscher Lloyd et qui est plus tard vu sur les paquebots de Classe Olympic de la White Star Line. Pour permettre au navire de naviguer plus vite, sa largeur est réduite, lui donnant une fâcheuse tendance à rouler en haute mer.

Le Mauretania pendant une épreuve de vitesse au large de St Abbs

Le 20 septembre 1906, le Mauretania est baptisé et lancé par la Duchesse de Roxyburghe. Il est alors le plus gros objet mobile jamais construit[4], plus grand que le Lusitania de 3 mètres et de 400 tonneaux. Les différences majeures entre les deux navires résident en deux points : le Mauretania est légèrement plus long et il possède des manches à air différentes (celles du Lusitania étant plates). Les sabords de sa passerelle sont carrés, contrairement à ceux de son sister-ship[2]. De plus, le Mauretania est légèrement plus puissant que son jumeau et possède des hélices plus larges de six pouces. Ce navire est le plus imposant à utiliser la récente invention de Charles Algernon Parsons, la turbine. Il comporte en effet quatre turbines à vapeur construites par la Walssend Slipway Co. Ltd qui actionnent quatre hélices à trois pales[1]. Contrairement au Lusitania, les turbines posèdent plusieurs étages. Lors des essais de vitesse, il montre une fâcheuse tendance à vibrer fortement, défaut qui est partiellement résolu avant son entrée en service.

Le Mauretania, contrairement à son frère[5], est richement décoré de panneaux de bois[6] et dispose même d'un ascenseur, innovation jamais vue sur un paquebot[2]. La salle à manger de première classe s'étend sur plusieurs ponts et est surplombée par une vaste verrière. De même, les salons de première et seconde classe sont richement décorés et surplombés de coupoles laissant entrer la lumière du soleil[7]. Ses cabines offrent une grande variété, 14 sortes en première classe, 5 en seconde et 10 en troisième, du jamais vu[8]. Le navire est enfin le premier à être pourvu d'un café véranda sur le pont supérieur, derrière la dernière cheminée[9].

Début de carrière

Vue en coupe du Mauretania

Le Mauretania quitte Liverpool pour son voyage inaugural le 16 novembre 1907 sous le commandement de John Pritchard. Il obtient le mois suivant le record de vitesse pour un paquebot, atteignant une vitesse moyenne de 23,69 nœuds (43,87 km/h). Le 2 mai 1908, le navire heurte un objet immergé et est endommagé. Cet accident est l'occasion de remplacer les deux hélices centrales par des hélices à quatre pales[1]. En septembre 1909, il remporte le Ruban bleu pour la traversée la plus rapide de l'Atlantique, d'est en ouest. Durant cette période, le Mauretania transporte notamment à son bord Alexander Carlisle, architecte naval des chantiers Harland & Wolff et futur concepteur du Titanic[10]. Il connait un désagrément en décembre 1910, lorsqu'il rompt ses amarres dans le Mersey. Les dommages qui en résultent conduisirent à l'annulation de son voyage de Noël vers New York. Le Lusitania le remplace finalement pour cette traversée. En juin 1911, le Mauretania transporte des milliers de personnes venues assister au couronnement de George V[10].

En 1913, il subit une remise en état annuelle et une modification des turbines. Le 26 janvier 1914, au cours de cette refonte à Liverpool, quatre hommes sont tués et six blessés par l'explosion d'une bonbonne de gaz au cours de travaux sur les turbines. Les dommages sont cependant suffisamment restreints pour que le Mauretania puisse reprendre du service deux mois plus tard[1].

Première Guerre mondiale

Lorsque le Royaume-Uni entre en guerre contre l'Allemagne le 4 août 1914, le Mauretania et l’Aquitania sont réquisitionnés par le gouvernement pour servir de croiseurs auxiliaires[11]. Cependant, leur taille et leur consommation de carburant en font des proies faciles, et ils reprennent leur service civil le 11 août. Le nombre de passagers se réduisant dans ce contexte troublé, le Mauretania est laissé à quai à Liverpool jusqu'en mai 1915, lorsque son jumeau le Lusitania est torpillé par un U-boot.

Alors qu'il est sur le point de remplacer le Lusitania dans ses traversées de l'Atlantique, le gouvernement le réquisitionne pour participer à la campagne de Gallipoli comme transport de troupes. Sa vitesse et son camouflage lui évitent d'être torpillé par un sous-marin allemand qui l'avait pris en chasse[1]. En effet, son camouflage est composé de nombreuses figures géométriques de couleurs vives destinées à casser la continuité du navire et, de fait, à éviter tout torpillage[12].

Le HMHS Mauretania

Quand les armées britannique et française commencent à subir des pertes, le Mauretania est choisi pour devenir un navire hôpital, tout comme l’Aquitania[13] de la Cunard et le Britannic de la White Star Line[14], et le 25 janvier 1916, il est prêt à s'occuper des blessés. Sept mois plus tard, il redevient transport de troupes et est chargé par le gouvernement canadien de transporter des troupes entre Halifax et Liverpool. Enfin, lorsque les États-Unis entrent en guerre en 1917, ils transporte des troupes américaines jusqu'à la fin de la guerre.

Lorsqu'il servait de navire hôpital, son camouflage était changé pour une peinture blanche et de grandes croix rouges peintes sur les flancs du navire.

L'après guerre

Le fumoir de seconde classe du Mauretania

Le Mauretania revient à la vie civile le 21 septembre 1919. La compagnie est contrainte de différer des travaux initialement prévus pour faire face à la demande croissante[7]. En 1921, il connaît un nouveau problème lorsqu'un incendie se déclare sur le pont E, les dommages se limitant finalement à la zone des cabines de première classe après l'intervention des pompiers de Southampton. Sa compagnie lui offre donc une refonte dans les chantiers qui l'avaient vu naître, et il subit notamment des changements concernant ses chaudières qui fonctionnent désormais au gasoil. Lorsqu'il reprend du service, il devient rapidement évident que ses turbines commencent à montrer des signes de faiblesse. Il subit une nouvelle remise à neuf en 1923 à Southampton. Une grève éclatant pendant les réparations, la Cunard le fait déplacer à Cherbourg où les travaux sont achevés. Il reprend finalement du service en mai 1924.

Un nouveau problème peu commun se pose au Mauretania lorsque la commission du port de Cowes, sur l'île de Wight, se plaint du fait que les accélérations du paquebot ont provoqué une inondation dans la rue principale de la ville, entrainant de nombreux dégâts. Le pilote est alors inculpé pour avoir fait accélérer le navire trop près des côtes[7].

En 1928, sa décoration intérieure est modernisée, et en 1929, il est détrôné par le paquebot transatlantique allemand Bremen, de la Norddeutscher Lloyd[15]. Le 27 août, la compagnie permet à son lévrier des mers de tenter de reprendre son record en lui offrant une nouvelle refonte. Cependant, ces efforts sont vains. Ceci permet cependant au Mauretania de surpasser ses propres records dans les deux sens. En 1929, il heurte un ferry au large du phare de Robbins Reef (New Jersey), mais personne n'est tué ou blessé et les dommages sont rapidement réparés[7]. En 1930, la Grande Dépression et l'apparition d'une nouvelle génération de paquebots conduit à sa conversion en navire de croisière (fonction qu'il avait déjà endossée dans la Méditerranée en janvier 1923). Lorsque la Cunard et la White Star fusionnent en 1934, le Mauretania est retiré du service tout comme l’Olympic et le Majestic.

Fin de carrière

Le Mauretania (à droite) et l’Olympic (à gauche) en 1935, attandant leur dernier voyage pour la démolition.

Le Mauretania est retiré du service en septembre 1934, au terme d'une dernière traversée reliant New York à Southampton. Il effectue cette traversée à une vitesse moyenne de 24 nœuds, celle-là même qui était prévue dans son contrat de départ, puis est laissé à quai avec l’Olympic dans le port de Southampton, après vingt-huit ans de bons et loyaux services pour la Cunard. En effet, la fusion des deux compagnies implique un double stock de navire qu'il s'agit de réduire, et l'arrivée du Queen Mary nécessite de se débarrasser des plus anciens navires[7].

En mai 1935, ses meubles et aménagements sont vendus aux enchères, et il quitte Southampton pour la dernière fois le 1er juillet de cette même année pour les ferrailleurs T. W. Wards de Rosyth. L'un de ses anciens commandants, Sir Arthur Rostron (capitaine du Carpathia durant le naufrage du Titanic) vient le voir pour son départ, mais refuse de monter à bord, déclarant préférer s'en souvenir tel qu'il était sous son commandement.

En chemin vers la casse, le Mauretania s'arrête dans son berceau de la Tyne pour une heure et demie, accueillant une foule de touristes et le Lord Maire de Newcastle. Le maire lui dit adieu de la part des habitants de la ville, et son dernier capitaine, A. T. Brown, achève son voyage. Il passe notamment sous le pont Forth[1], ce qui le force à couper ses mâts, puis arrive à la casse.

La démolition de ce paquebot tant aimé entraîne une vague de protestations de nombreux habitués, dont le Président Franklin D. Roosevelt qui écrit une lettre s'opposant à sa démolition.

L'héritage du Mauretania

Le Mauretania sur une carte de cigarettes

Certains des meubles du Mauretania ont été installés dans un bar/restaurant de Bristol, le Mauretania Bar (de nos jours le Java Bristol). La salle du bar était décorée d'un panneau d'acajou venant de la bibliothèque des premières classes.

Le Mauretania est également cité dans une chanson, « Firing the Mauretania », interprétée par Redd Sullivan et Hughie Jones. Il est également cité dans le film Titanic de James Cameron, lorsque Rose déclare à propos du Titanic : « Il n'est pas beaucoup plus grand que le Mauretania », et que son fiancé lui répond : « Mais il est trente mètres plus long que le Mauretania ».

Notes et références

  1. a , b , c , d , e  et f Corrado Ferulli (dir.), Au coeurs des Bateaux de légende, Hachette Collections, 2004, pp. 122 - 123
  2. a , b , c  et d Olivier Le Goff, Les Plus Beaux Paquebots du Monde, Solar, 1998, pp.32 - 33
  3. Corrado Ferulli (dir.), Au coeurs des Bateaux de légende, Hachette Collections, 2004, pp. 124 - 125
  4. La construction du Mauretania, Tyne and Wear Archives Service
  5. Le Lusitania est en grande partie décoré de panneaux de stuc blanc.
  6. Frank Jubelin et Christian Mars, Paquebots, Sélection du Raeder's Digest, 2001, p. 52 - 53
  7. a , b , c , d  et e Corrado Ferulli (dir.), Au coeurs des Bateaux de légende, Hachette Collections, 2004, pp. 126 - 127
  8. Il était une fois les Grands Paquebots : Mauretania
  9. Simon Adams, la tragédie du "Titanic", Gallimard, 1999, p.9
  10. a  et b Le Mauretania sur Ocean liners.com
  11. Olivier Le Goff, Les Plus beaux paquebots du monde, Solar, 1998, pp. 54 - 55
  12. Olivier Le Goff, Les Plus beaux paquebots du monde, Solar, 1998, pp. 50 - 51
  13. Olivier Le Goff, Les Plus beaux paquebots du monde, Solar, 1998, pp. 54 - 55
  14. Olivier Le Goff, Les Plus beaux paquebots du monde, Solar, 1998, p. 39
  15. Olivier Le Goff, Les Plus beaux pquebots du monde, Solar, 1998, pp. 70 - 71

Voir aussi

Liens internes

Ouvrages

  • Olivier le Goff, Les Plus beaux paquebots du monde, Solar, 1998
  • Corrado Ferulli (dir.), Au cœur des Bateaux de légende, Hachette Collection, 2004
  • Frank Jubelin et Christian Mars, Paquebots, Sélection du Reader's Digest, 2001

Liens externes

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