Louis Philippe d'Orléans (1747-1793)

Louis Philippe d'Orléans (1747-1793)
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Louis-Philippe d'Orléans
Louis Philippe II, duc d’Orléans
Louis Philippe II, duc d’Orléans

Pays Royaume de France Royaume de France
Titre Duc d'Orléans
(1785 - 1793)
Prédécesseur Louis Philippe Ier d'Orléans
Successeur Louis-Philippe III d'Orléans
Faits d'armes Bataille d'Ouessant (1778)
Biographie
Dynastie Maison d'Orléans
Naissance 13 avril 1747
Château de Saint-Cloud
Décès 6 novembre 1793
Paris
Père Louis Philippe d'Orléans
Mère Louise Henriette de Bourbon-Conti
Conjoint Louise Marie Adélaïde de Bourbon
Liaisons Félicité de Genlis
Marguerite Françoise Bouvier de la Mothe de Cépoy
Enfants Louis Philippe d'Orléans
Louis Antoine Philippe d'Orléans
Louise Marie Adélaïde Eugénie d'Orléans
Louis Charles d'Orléans

Blason duche fr Orleans (moderne).svg
Louis Philippe d'Orléans, duc de Chartres, par Joshua Reynolds

Louis Philippe Joseph d’Orléans, duc de Chartres, puis duc d'Orléans (1785-1792), ayant changé son nom en Philippe Égalité après 1792, est né au château de Saint-Cloud le 13 avril 1747 et mort guillotiné à Paris le 6 novembre 1793.

Fils de Louis Philippe d'Orléans (1725-1785), duc d'Orléans, dit « le Gros », et de Louise Henriette de Bourbon-Conti († 1759), il fut titré duc de Montpensier à sa naissance (1747-1752), puis porta le titre de duc de Chartres à la mort de son grand-père. A celle de son père, il devint alors duc d'Orléans et premier prince du sang. Il descendait en ligne masculine du régent Philippe d’Orléans et du roi Louis XIII.

Sommaire

Éducation

Dès la mort de son grand-père, le jeune duc de Chartres qui a pris ce titre à cinq ans est retiré du giron des femmes (l'habitude aristocratique est de retirer les enfants de leur gouvernante à sept ans). Son père confie son éducation au comte Pons Saint-Maurice. Ce dernier a la charge de former le prince à ses devoirs de représentation et choisit des personnalités en vue pour le reste de l'éducation proprement-dit tels Étienne Lauréault de Foncemagne ou Carmontelle[1].

Inquiet à la suite de la variole de sa femme Louise Henriette, le duc d'Orléans décide de pratiquer l'inoculation sur ses enfants Louis-Philippe et Bathilde en faisant appel au médecin suisse Théodore Tronchin. Cette initiative prise en 1756 est suivie avec attention par toute la Cour et son succès favorisera la diffusion de cette forme de protection[2]. Le jeune duc de Chartres, une fois marié, fera pratiquer cette mesure de prévention sur sa jeune femme Marie Adélaïde.

Mariage et descendance

Le père de Philippe d’Orléans avait d’abord envisagé de le marier à la princesse Cunégonde de Saxe, fille d’Auguste III de Saxe roi de Pologne et sœur de la Dauphine de France Marie-Josèphe. Mais cette dernière insista auprès de Louis XV pour qu’il s’oppose à ce projet, considérant que Chartres était de trop petite naissance pour prétendre épouser sa sœur Cunégonde.

L’abbé de Breteuil, chancelier de la maison d’Orléans, fut donc chargé de négocier, en substitution, un mariage avec Louise Marie Adélaïde de Bourbon (dite « Mademoiselle de Penthièvre »), petite-fille du comte de Toulouse, bâtard légitimé de Louis XIV et de Madame de Montespan, qui amenait dans la maison d’Orléans, avec encore un peu plus du sang des bâtards de Louis XIV, l’héritage fabuleux du duc de Penthièvre.

Philippe d’Orléans quant à lui descendait, par sa mère, d’une bâtarde de Louis XIV et de la marquise de Montespan (Mademoiselle de Nantes) et d’autre part une des arrière-grand-mères paternelles de Philippe d’Orléans était également une bâtarde de Louis XIV et de la marquise de Montespan (la seconde Mademoiselle de Blois).

Louis Philippe en roi de pique.

Le mariage eut lieu à Versailles le 5 avril 1769. La dot, sans doute la plus importante qu’on ait jamais vue, se montait à 6 millions de livres, dont 3 865 000 livres étaient remis sur-le-champ, sous forme d’une dotation produisant un revenu annuel de 245 000 livres. Le duc d’Orléans s’engageait de son côté à loger, meubler, faire servir les époux et à leur assurer au surplus un revenu de 400 000 livres par an.

Louise Marie Adélaïde de Bourbon lui donna six enfants :

  1. N... d’Orléans (mort-née le 10 octobre 1771) ;
  2. Louis Philippe d'Orléans (1773-1850), titré duc de Valois puis duc de Chartres, puis duc d'Orléans, puis roi des Français ;
  3. Louis Antoine Philippe d'Orléans (1775-1807), titré duc de Montpensier ;
  4. Louise Marie Adélaïde Eugénie d'Orléans (1777-1847), titrée Mademoiselle de Chartres ;
  5. N... d’Orléans (née le 23 août 1777 - morte en 1782), jumelle de la précédente, titrée Mademoiselle d’Orléans ;
  6. Louis Charles d'Orléans (1779-1808), comte de Beaujolais, qui prit, à partir de 1792, les prénoms Alphonse Léodgard.

Les deux époux se séparèrent en 1790.

Le duc de Montpensier et le comte de Beaujolais moururent tous deux, l’un au Royaume-Uni et l’autre à Malte, d’une tuberculose contractée lors de leur séjour en prison pendant la Révolution. Leur frère Louis-Philippe y avait échappé en quittant la France en même temps que Dumouriez, provoquant l’arrestation de toute la famille par mesure de représailles.

À force d’intrigues compliquées, Madame de Genlis parvint à être seule chargée de l’éducation de ces enfants - elle fut pensionnée en qualité de « gouverneur » des enfants d'Orléans à la suite du chevalier de Bonnard -, sur lesquels elle expérimenta ses idées pédagogiques « modernes ».

Naissances illégitimes

Le duc d’Orléans eut des bâtards, entre autres avec deux de ses maîtresses connues :

Sous l’Ancien Régime

Un destin militaire contrarié

Chartres avait eu la promesse, au moment de son mariage, que son beau-père solliciterait pour lui la survivance de sa charge de grand amiral de France. Il s’y prépara en faisant une carrière d’officier de marine. En 1772, il s’embarqua sur le vaisseau l’Alexandre avec le grade de garde-marine (aspirant). Après deux campagnes en 1775 et 1776, il fut promu lieutenant général des armées navales (contre-amiral). En 1778, lorsque les hostilités recommencèrent avec la Grande-Bretagne, il se vit confier le commandement[3] de l’arrière dans l’escadre commandée par le comte d'Orvilliers. Le 27 juillet 1778, au large d’Ouessant, la bataille s’engagea. Une manœuvre commandée par d’Orvilliers amena les vaisseaux du duc de Chartres sur l’avant ; le prince n’hésita pas à foncer sur les vaisseaux britanniques, mais à la suite d’une mauvaise communication avec le vaisseau amiral, une erreur fut commise qui permit aux vaisseaux britanniques de prendre la fuite. La bataille se soldait par un demi-succès.

A Paris, chacun rendit d’abord hommage à la belle conduite du duc de Chartres avant qu’on ne reçût le témoignage des marins ayant participé à la bataille. Par peur d'exposer la vie du prince de sang royal, le capitaine du navire avait prétendu ne pas avoir compris l'ordre de manœuvre de l'amiral : il avait mis en panne sa division et envoyé un canot pour prendre les ordres de vive voix. Le retard ainsi provoqué empêcha le mouvement de la flotte française et permit aux Britanniques de s'échapper. Les moqueries qui s'ensuivirent dans tout Paris affectèrent profondément le duc qui essuya une certaine disgrâce et essaya de se venger en montant une cabale contre le ministre de la marine Sartine[4].

Après cette affaire d'Ouessant, il trouva son beau-père inquiet car on l’avait persuadé que Chartres voulait le dépouiller de sa charge de grand amiral. Le duc de Chartres écrivit à Louis XVI pour le détromper et, dans un souci d’apaisement, renonça à la marine en sollicitant le roi de créer pour lui un emploi de colonel général des troupes légères, ce à quoi Louis XVI consentit.

Mais en 1780, le roi lui refusa la permission de faire partie du corps expéditionnaire de Rochambeau qui partait pour l’Amérique.

Un opposant de plus en plus déclaré

Philippe d’Orléans en grand maître du Grand Orient de France.

Pair de France, Philippe d’Orléans fit de bonne heure preuve d’indépendance. Comme tous les princes des branches cadettes de la maison de Bourbon, il prit le parti des Parlements en 1771 et refusa de siéger au « parlement Maupeou ».

En 1771, il se fit élire grand maître de la franc-maçonnerie réorganisée en Grand Orient de France deux ans plus tard.

À partir de 1785, devenu duc d’Orléans à la mort de son père, il offrit au Palais-Royal - « l'anti-Versailles » - un centre et un point de ralliement aux ennemis de la cour. Les relations du duc avec la famille royale s'étaient en effet aigries depuis l'affaire d'Ouessant. Le roi Louis XVI n'avait jamais vraiment apprécié son lointain cousin ; en revanche, Marie-Antoinette avait entretenu des relations cordiales avec le jeune duc de Chartres. Désormais le ressentiment était grand entre les deux personnalités.

Adepte des idées nouvelles et grand admirateur des institutions britanniques, le duc de Chartres manifesta plus d’une fois avant la Révolution son hostilité au régime et à la Cour, notamment lors de l’assemblée des notables (1787). Chef du 3e bureau à l’Assemblée des notables (1787), il déclara que les États généraux avaient seuls le droit de voter les impôts, et protesta contre les édits bursaux : il fut exilé.

Le Palais-Royal

Il réalisa une spéculation immobilière restée célèbre au Palais-Royal. Depuis son remariage morganatique avec Madame de Montesson, son père le duc d’Orléans avait cessé d’habiter le Palais-Royal. Il en fit concession à son fils en 1776, et le lui abandonna en toute propriété en 1780. Peu après, en juin 1781, la salle de théâtre dite du Palais-Royal, qui se trouvait du côté de l’actuelle rue de Valois, brûla une nouvelle fois. Le duc de Chartres la fit reconstruire de l’autre côté par l’architecte Victor Louis (c’est l’actuelle salle de la Comédie-Française) et en profita pour réaliser une vaste opération immobilière autour des jardins du Palais-Royal : il fit édifier des immeubles uniformes, comportant des galeries marchandes au rez-de-chaussée surmontées d’appartements d’habitation. Les rues bordant l’ensemble furent baptisées des noms des fils du duc : Valois, Montpensier et Beaujolais.

Cette opération fut vivement critiquée. Le public, qui avait toujours été admis librement dans les jardins du Palais-Royal, critiqua leur rétrécissement. On jugea l’architecture mesquine. Louis XVI se serait moqué du duc de Chartres en lui lançant : « Eh, bien, mon cousin ! Il paraît que vous ouvrez boutique ? On ne vous verra plus que le dimanche ? ». Authentique ou non, le mot courut Paris, avec des dizaines d’épigrammes et de chansons. Mais l’affaire ne fut pas excellente et tarda à s’équilibrer, le duc ayant dû emprunter 4 millions pour financer les constructions, qui s’avérèrent difficiles à vendre et à louer.

La spéculation des arcades du Palais-Royal entraîna des procès nombreux de la part des riches riverains qui se trouvèrent privés de la vue sur les jardins. Elle ne fut pas aussi rentable qu’il l’escomptait, tandis que le nombre des pensions qu'il accordait à ses protégés ne faisait qu'augmenter avec le temps (une association des créanciers du duc d'Orléans réunissant ces pensionnaires viagers fut d'ailleurs créée en 1792).

Le Grand Orient de France

Pour couper court à toutes les spéculations entretenues sur ses intentions, il fit publier cette lettre importante dans le Journal de Paris du 22 février 1793 :

« Dans un temps où personne, assurément, ne prévoyait notre Révolution, je m'étais attaché à la franc-maçonnerie qui offrait une image d'égalité, comme je m'étais attaché au parlement qui offrait une image de la liberté. J'ai, depuis, quitté ce phantôme pour la réalité. Au mois de décembre dernier, le secrétaire du Grand Orient s'étant adressé à la personne qui remplissait auprès de moi les fonctions de secrétaire du Grand Maître, pour me faire parvenir une demande relative aux travaux de cette société, je répondis à celui-ci, sous la date du 5 janvier : « Comme je ne connais pas la manière dont le Grand Orient est composé, et que, d'ailleurs, je pense qu'il ne doit y avoir aucun mystère ni aucune assemblée secrète dans une République, surtout au commencement de son établissement, je ne veux me mêler en rien du Grand-Orient ni des assemblées de francs-maçons[5] ». Un « froid glacial » accueillit cette déclaration puis on procéda à « la dégradation maçonnique du citoyen Egalité en le faisant démissionnaire, et on le dépouilla de son titre de Grand maître ».

La faction d'Orléans

Philippe-Egalité.jpg

Pendant la Révolution, l'expression « faction d'Orléans » revient souvent. Elle désigne généralement les individus politisés qui, entre 1788 et 1792, appartinrent à l'entourage du duc d'Orléans, tant reçus par lui à Monceau ou au Raincy, que par les membres de son entourage immédiat, principalement à Bellechasse chez le marquis et la marquise de Sillery-Genlis. Camille Desmoulins a parfaitement exposé les choses dans le Vieux Cordelier en réponse à une question de Charles Barbaroux sur son éventuelle appartenance à la « faction d'Orléans »[réf. nécessaire].

Si, les premières années, le duc d'Orléans n'a pas protesté publiquement lorsque le bruit courait qu'il pourrait être désigné par l'Assemblée comme Lieutenant général du royaume ou « régent », il s'en est défendu dès son retour d'Angleterre et il l'a publié et signé dans les journaux en août 1791. À partir de cette date, on peut assurer que l'expression « faction d'Orléans » ne le désigne pas et que l'on entend par là, par commodité de langage, ceux et celles qui, se réclamant de lui ou de son fils aîné, ne désespèrent pas, comme Laclos, Clarke ou Lauzun, de l'établissement d'une dynastie orléaniste.

Pendant la Révolution

Le député aux États Généraux

Le duc d'Orléans est élu député de la noblesse aux États généraux de 1789. Proche des idées de Sieyès et conseillé par son secrétaire Choderlos de Laclos il est du groupe des 47 députés de la Noblesse qui se rallient au Tiers état, le 25 juin 1789. Il est porté à la présidence de l'Assemblée le 3 juillet, mais refuse cet honneur le lendemain.

Il est lié un temps à Honoré Gabriel Riqueti, comte de Mirabeau et espère, sinon usurper le trône de Louis XVI, du moins être nommé Lieutenant général du royaume ou assurer une fonction de régence. Cependant, par manque de résolution, il rate l'occasion de jouer un rôle de médiation après les évènements du 14 juillet. Compromis, sans doute à tort après les journées des 5 et 6 octobre 1789, Louis XVI préfère l'éloigner de la Cour en lui confiant une mission diplomatique en Grande-Bretagne. Il évite ainsi d'avoir à s'expliquer, lors de l'instruction menée au Châtelet de Paris, pour déterminer les responsabilités de ces journées révolutionnaires. Le duc est alors au sommet de sa popularité. C'est à Londres, à cette époque qu'il peut négocier ses emprunts avec la couronne britannique. Il s'intéresse également à la Révolution brabançonne et au rôle qu'il pourrait y jouer, gênant en cela la diplomatie française toujours portée sur l'alliance autrichienne[6].

Revenu en France en juillet 1790, il décide de prendre ses distances avec le débat politique malgré la pression de son entourage qui envisageait depuis 1789 un changement de dynastie en sa faveur. Toutefois, la popularité du prince est en baisse et ses soutiens à l'Assemblée constituante se raréfient. Malgré tout Orléans et d'autres députés, dont Mirabeau, mis en cause dans l'enquête du Châtelet sont lavés de toute accusation par l'Assemblée en septembre 1790[7].

Membre du Club des Jacobins depuis sa fondation, il est aussi membre fondateur du club de Valois qui s'oppose au club monarchique.

Après la fuite de Louis XVI à Varennes la question de l'abdication du roi et l'organisation d'une régence est à l'ordre du jour. Au grand dépit de Laclos qui ne ménage pas ses effort pour promouvoir cette solution, le duc d'Orléans déclare solennellement et par écrit le 28 juin qu'il renonce absolument à toute intention de prendre la régence en France[8].

En 1792, il se rend avec ses fils à l’armée du Nord, mais après la défection du général Dumouriez, il reçoit l’ordre de la quitter.

Philippe Égalité, député à la Convention

Il est élu à la Convention nationale en 1792 par le département de la Seine sous le nom de Philippe Égalité. C'est Manuel, le procureur de la commune et proche de Danton qui lui suggère d'adopter ce nom, les titres princiers étant proscrits[9]. Une lettre écrite en 1793 de prison à son avoué Jean-Baptiste Lemaire, montre qu'il n'a jamais signé autrement :

« Pourquoi m'appelez vous « Orléans » nom que vous savez que je n'ai pas signé depuis le début de l'assemblée constituante qui défendait de porter aucun titre ni nom de terre ? Est-ce qu'il y a un décret qui m'ordonne de m'appeler « Orléans » ? J'ai déjà fait cette question aux citoyens Gérard[10] et Voidel, mais je n'y ai reçu aucune réponse ; peut-être serai-je plus heureux en m'adressant à vous. Je désire le savoir car s'il y en a un, il est trop ridicule à moi de continuer à signer « Egalité ». Cependant ce ridicule serait bien involontaire puisque je n'ai aucune connaissance que je doive signer autrement[11] ».

Il siégea toujours avec les Cordeliers, au milieu de la Montagne.

Il vota la mort du roi Louis XVI, et sans appel. Le rejet de l'appel au peuple pouvant sauver Louis XVI se joua à très peu de voix. Cette action dégoûta jusqu’à Robespierre qui, selon une rumeur, aurait dit de lui : « il était le seul membre [de l’Assemblée] qui pût se récuser[12] ».

L'arrestation

Quand son fils aîné le duc de Chartres suit le général Charles-François Dumouriez dans son aventure personnelle, il devient suspect aux yeux des Montagnards. Tous les membres de la famille des Bourbons sont alors arrêtés le 7 avril 1793. La mesure concerne le duc d'Orléans, ses deux autres fils le duc de Montpensier et le comte de Beaujolais et sa sœur Louise-Bathilde. La Convention décide d'éloigner toute la famille de Paris et opère leur transfert immédiat au fort Saint-Jean à Marseille. Seule sa fille Marie-Adélaïde bénéficie d'une clémence et est assignée à résidence au château de Bizy[13].

La condamnation et l'exécution

Décrété d'accusation, Philippe-Égalité est ramené à Paris et envoyé à la Conciergerie le 2 novembre. Il est jugé par le Tribunal révolutionnaire, présidé par Herman, le 6 novembre 1793. Il n'y a pas de preuves contre lui, mais durant cette période, la simple suspicion suffit. Malgré la plaidoirie de Voidel, il est condamné à mort et guillotiné le jour même, avec pour compagnons d'infortune Pierre Coustard de Massi, représentant de la Loire-Inférieure à la Convention et chef de la Garde nationale de Nantes, et trois inconnus[14].

La fortune des ducs d’Orléans

Dès le début des années 1780, le duc de Chartres avait connu des difficultés financières.

Son train de maison, tant en France qu’en Angleterre, était extrêmement dispendieux, et absorbait l’essentiel de son revenu. Par l’intermédiaire de Nathaniel Parker-Forth - ministre plénipotentiaire du roi d'Angleterre auprès de la cour de France et premier agent d'influence du gouvernement britannique et intrigant intéressé selon le comte de Montesquiou -, qui avait su se rendre indispensable pour lui et Mme de Genlis, Chartres effectuait avec sa suite nombreuse des voyages réguliers en Angleterre. À Londres, il avait obtenu du roi d'Angleterre l'autorisation exceptionnelle de disposer d'un palais princier à Portland place et une autre maison située Chapel Street, n°3 à Park Lane. De 1779 à 1789, Parker-Forth le mit peu à peu dans une dépendance dangereuse : à la fois affective - il supervisa l'adoption prétendue des filles du duc et de Mme de Genlis - et financière.

Ses dépenses excédaient de beaucoup ses revenus, et l’héritage de son père en 1785, qui était grevé de 2 millions de dettes, ne suffit pas à rétablir sa situation financière.

À la mort de son père en 1785 le duc de Chartes devenu duc d’Orléans avait pu obtenir du roi l’autorisation d’émettre un emprunt de 6 millions de livres (le prix de 2 vaisseaux de lignes ou de 3 frégates) portant création de 240 000 livres de rentes viagères tontinières à 4%, dit « tontine d’Orléans » (27 novembre 1785).

Pressé par ses créanciers, il obtint de la duchesse d’Orléans qu’elle consentît à engager sa dot, ce qu’elle fit. Puis il commença à aliéner un certain nombre de ses biens mobiliers et immobiliers en France pour les placer avantageusement, croyait-il, à la City. La mesure la plus connue et la plus spectaculaire est la vente à Londres de la magnifique collection de tableaux de maître des ducs d'Orléans, constituée par Richelieu puis par le Régent dont se chargèrent Édouard de Walckiers, Jean-Joseph Laborde de Méréville et John Christie, commissaire priseur à Londres.

Continuant de restructurer et placer ses biens mobiliers, il réunit un ensemble de bijoux et diamants de la famille d'Orléans qu'il fit passer en Angleterre via Saint-Omer en 1790 par l'intermédiaire de Nathaniel Parker-Forth, puis, en 1792, une cassette de diamants[15] qu'il confia à Edouard de Walckiers pour être déposée chez « Boyd et Benfield », banquiers (Dover Street) à Londres.

Fin 1789, il gagea la créance représentée par le capital de la dot de la reine d’Espagne d’un montant de 4 millions (V. biens de la maison d'Orléans).

En 1792 et 1793, il mit en ventes d’immenses terrains dans la région d’Avesnes, puis, à Paris, il vendit plusieurs immeubles dont la Chancellerie d'Orléans, rue des Bons-Enfants, les Écuries d'Orléans, rue Saint-Thomas du Louvre, et d'autres immeubles dont la fameuse « Civette » dans le quartier du Palais-Royal.

Sous la pression du gouvernement britannique qui, selon le ministre des Affaires étrangères Montmorin et le comte de La Luzerne son ambassadeur à Londres, cherchait à fomenter des troubles en France, il fit procéder à d’importants achats spéculatifs de blé, qui avec la disette de 1789 déclencha les premières émeutes et particulièrement l'affaire des 5 et 6 octobre 1789. Dans cette affaire, le gouvernement Pitt joua un rôle essentiel puisque l'on sait aujourd'hui que c'est la banque britannique « Turnbull et Forbes » qui solda au nom du gouvernement britannique, auprès de la Municipalité de Paris, les acquisitions de blé à destination de l'Angleterre.

Pour accroître son revenu le duc souscrivit avec le prince de Galles, le duc d’York et le duc de Clarence, les trois fils du roi d’Angleterre trois emprunts obligataires à taux élevés, gagés sur le duché de Cornouailles. Cette longue négociation de deux ans (1789-1790) fut menée par Nathaniel Parker-Forth avec les notaires Rouen et Brichard. Il était entendu que le duc commencerait à percevoir ses dividendes après la mort du roi d’Angleterre. Dans la requête présentée au tribunal de Paris par la duchesse d'Orléans pour obtenir sa séparation de biens (1792), elle déclarait qu'après avoir reçu en dot 6 100 000 livres et une rente perpétuelle de 50 000 livres, elle s'était vue contrainte d'engager toute sa fortune pour cautionner son mari qui ne lui allouait pour toute pension que 1 000 livres par mois. Cette requête révélait en outre que l'actif de Philippe, évalué 66 698 000 livres était absorbé par un passif de 75 234 648 livres, réparti entre trois mille créanciers. Le jugement définitif de séparation ne fut rendu que le 8 octobre 1793, peu de jours avant la mort d'Égalité dont la ruine était attribuée à ce que lui avait coûté la Révolution, mais en réalité, une grosse partie de sa fortune était en Angleterre.

Ses biens considérables furent en partie spoliés, et son fils Louis-Philippe 1er n'en recouvra qu'une partie. Une lettre du comte de Montesquiou qui s'est chargé des intérêts du fils aîné du duc, futur roi des Français, écrivait à ce sujet, pour ce qui concerne la partie placée en Angleterre : « Au moyen des indications que je peux vous donner, je crois qu'il ne vous sera pas difficile de remonter à la source des différents dépôts que feu M. le duc d'Orléans a faits en Angleterre, d'en constater les valeurs et d'en prévenir l'abus que les dépositaires pourraient être tentés d'en faire. J'aperçois un danger auquel il est important de parer. Les papiers de M. le duc d'Orléans, saisis à Paris, ont fort bien pu mettre, entre les mains de quelques membres des comités de la Convention nationale, les titres de ses propriétés anglaises; ceux-ci peuvent avoir été trafiqués, et peut-être même quelques dépositaire infidèle aurait pu négocier la remise de ces pièces.. Voilà ce qui rend important d'accélérer les informations afin de pouvoir mettre obstacle à ce brigandage[16] ». Deux noms ont été avancés, Bertrand Barère de Vieuzac, rapporteur et membre éminent du Comité de salut public, l'organisateur de la Terreur, et le conventionnel Merlin de Douai, rédacteur de la loi des suspects, tous deux pensionnés par le duc d'Orléans et donc intéressés au contrôle de sa succession.

Bibliographie

  • François-Anatole Gruyer, La jeunesse de Louis-Philippe, Paris 1909
  • Carton de Wiart, La Candidature de Philippe d'Orléans à la souveraineté des provinces belges en 1789 et 1790, Bruxelles 1924
  • André Castelot, Philippe-Égalité, le prince rouge, Paris 1950
  • Marguerite Castillon du Perron, Louis-Philippe et la Révolution française, Paris 1984
  • Evelyne Lever, Philippe-Égalité, Fayard 1996, (ISBN 978-2-213-59760-7)

Voir aussi

Liens internes

Filmographie

Notes

  1. Évelyne Lever, Philippe Égalité, Fayard 1996 p.47-57
  2. Lever, Op. Cit. p.51
  3. Compte tenu de l'inexpérience du duc, le commandement réel de l'escadre était confié à La Motte-Picquet
  4. Lever Op. Cit. p.168-183 sur cette affaire d'Ouessant
  5. Journal de Paris, le 22 février 1793
  6. Lever, op?cit. p.372-376
  7. Lever, op.cit. p.397
  8. Lever, op.cit. p.418
  9. Gabriel Peignot, Précis historique, généalogique et littéraire de la Maison d'Orléans, Paris, Crapelet p.106
  10. Gérard de Rayneval
  11. Correspondance du duc d'Orléans à Jean-Baptiste Le Maire, lettre datée le Fort Saint-Jean à Marseille, le 5 août 1793, AN, F/7/4774/15
  12. http://www.lodace.net/ca1jour/nov/06111793b.htm
  13. Lever, op.cit. p.482
  14. Lever, op.cit. p.491
  15. Contenant au moins un Saint-Esprit, une épaulette superbe de colonel, une autre sans frange, une ganse et un bouton de chapeau, un bouton de col de diamant jaune, des boucles de souliers et de jarretières, etc.
  16. « A la recherche de la fortune du duc d'Orléans », Revue historique de la Révolution française, 1912, p.539-540
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