- Histoire De La Vigne Et Du Vin
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Histoire de la vigne et du vin
L'histoire de la vigne et du vin est si ancienne qu’elle se confond avec l'histoire de l’homme. La Bible fait de Noé le premier agriculteur.[1] tandis qu'un récit babylonien vieux de quatre mille ans parle déjà du vin, dans la plus vieille œuvre littéraire connue.
La vigne et le vin ont représenté un élément important des sociétés occidentales, intimement associés à leurs économies et à leur cultures. Le vin synonyme de fête, d'ivresse, de convivialité, qui a investit le vaste champ des valeurs symboliques, est aujourd'hui présent dans la plupart des pays du monde. Son existence est fruit d’une longue histoire mouvementée.
Sommaire
Bref historique
Historique de l'implantation de la vigne 6000 av. J.-C. apparition de la vigne dans le Caucase et en Mésopotamie 3000 av. J.-C. la vigne est cultivée en Égypte et en Phénicie 2000 av. J.-C. apparition en Grèce 1000 av. J.-C. la vigne est cultivée en Italie, en Sicile et en Afrique du Nord 1000-500 av. J.-C. apparition en Espagne, au Portugal et dans le sud de la France 500 av. J.-C. - Moyen Âge implantation au nord de l’Europe, sous l’influence des Romains, et jusqu’en Grande-Bretagne. L'Antiquité
La vigne sauvage est une liane qui poussait sur les arbres des lisières et ripisylves jusqu'à plusieurs dizaines de mètres de hauteur. Elle est apparue avant l'humanité, et elle est encore représentée en Europe par Vitis vinifera subsp. sylvestris, notamment en forêt rhénane inondée.
Les premières traces de ceps de vigne cultivée ont été relevées sur les flancs du Caucase, dans l’actuelle Géorgie et datent d’il y a plus de 7000 ans. C'est dans le village Shoulaveris Gora que l'on a trouvé des vestiges de vigne et de vin antérieurs à 5000 à 5600 ans avant notre ère. La première représentation du procédé de vinification est le fait des Égyptiens, au IIIe millénaire av. J.-C. sur des bas-reliefs représentant des scènes de pressurage et de vendange et datant de 2500 av. J.-C. Après son implantation en Grèce antique, la vigne devient un élément essentiel de l'agriculture pour les Grecs, et devient l'un des trois piliers de la « triade méditerranéenne[2] » céréales-olivier-vigne. Grecs et Phéniciens, eux-mêmes producteurs, implantent la vigne dans l'ensemble du bassin méditerranéen au cours de leurs nombreux voyages, entre 1500 et 500 av. J.-C, notamment en Italie ; les Romains en développent la culture et ainsi que son industrie[réf. nécessaire]. C'est lors de la création de Massalia (Marseille) aux environs de 600 av. J.-C., que les Phocéens implantent la vigne dans la Gaule celtique. L'avancée romaine en 125 av. J.-C., le long du couloir rhodanien vers le nord, et à l'ouest vers le Languedoc, voit la diffusion de la vigne et le développement de son industrie. Narbonne et Port-Vendres en sont les centres commerciaux les plus importants[réf. nécessaire].
La production narbonnaise commençant à concurrencer les vins romains, en 92 l’empereur Domitien fait interdire la plantation de vignes et ordonne l’arrachage de 50 % du vignoble méditerranéen, interdiction levée seulement deux cents ans plus tard, par Probus. Les vignobles bordelais, languedocien et rhodanien s’épanouissent sous Jules César et la vigne atteint alors la région parisienne, qui restera longtemps l’une des plus grandes régions viticoles françaises. Les Gaulois, en développant la culture viticole, améliorent les procédés de vinification par la technique du vieillissement en fûts de chêne. La chute de l’Empire romain en 476 porte un coup au développement de l’agriculture gauloise.
Le Moyen Âge
À partir du IVe siècle, le christianisme concourt au renforcement de la valeur attachée au vin, prenant la relève d'un Empire romain anéanti. La liturgie de la communion sous les deux espèces pratiquée jusqu’au XIIIe siècle, est l’un des moteurs du maintien de la tradition viticole. Le Moyen Âge se fait le témoin des progrès de qualité du vin. Alors que les vins de l’Antiquité étaient coupés d’eau et agrémentés d’herbes et d’aromates, le vin sous la forme que nous le consommons aujourd'hui, apparaît au Moyen Âge. L’expansion de la civilisation chrétienne est à l’origine de l’expansion de la viticulture dans le monde.
En 800, Charlemagne prend des mesures pour améliorer la qualité du vin dans une ordonnance qui stipule : « Que nos intendants se chargent de nos vignes qui relèvent de leur ministère, et les fassent bien travailler, qu’ils mettent le vin dans une bonne vaisselle et qu’ils prennent toutes les précautions pour qu’il ne soit gâté d’aucune manière. » Mais les véritables dépositaires de la qualité sont les moines qui perpétuent la tradition viti-vinicole. Les cathédrales et les églises étant propriétaires des vignobles, sous couvert de l’activité du « vin de messe », les moines gèrent de nombreux vignobles monastiques, contribuant ainsi à la création de vignobles de qualité existant encore aujourd’hui.
À la fin du Xe siècle, Bordeaux, seule région viticole à ne pas être sous influence de l’Église, commence à se développer. Le grand Duché d’Aquitaine, uni à la couronne d’Angleterre, remplit les flottes anglaises de clairet dont les Anglais raffolent. Le vignoble bordelais prend son véritable essor à la fin du XIIe siècle.
Au début du XIIe siècle a lieu un acte très important pour le vignoble de Champagne : l'établissement de la grande charte champenoise par laquelle Guillaume de Champeaux, évêque de Châlons-sur-Marne, confirme les domaines agricoles et viticoles de l'abbaye Saint-Pierre-aux-Monts. Cette charte est considérée comme l'acte fondateur du vignoble de Champagne.
Progressivement les goûts évoluent et les vins capiteux sont délaissés pour des vins plus clairs et plus légers. Le vin fait l’objet d’une véritable bataille commerciale dans laquelle les différents vins affirment leur personnalité. S'il est difficile d’imaginer le goût des vins médiévaux, l'on peut supposer au vu des techniques employées, que les vins actuels en soient proches, le premier classement de crus jamais effectué consacrant en 1224 des vignobles encore réputés aujourd’hui.
Pendant toute la période du Moyen Âge, la France est le premier exportateur de vin. Paris et l'Île-de-France sont le plus grand vignoble de France, qui approvisionne les villes, grandes consommatrices de vin.
Les Temps modernes et l'époque contemporaine
La colonisation des nouveaux mondes se double rapidement d'une l’expansion de la vigne.
Les traces du premier vignoble sud-africain datées de 1659 sont attestées dans la province du Cap, où il a est implanté par les premiers colons. La conquête du Mexique et de toute l’Amérique du Sud, axée sur la diffusion de la religion chrétienne, s'accompagne pareillement d'un développement de la vigne dans ces contrées. On trouve des traces de vignes dans le Piémont andin (Chili central et Argentine) bien que le déploiement d'une industrie viti-vinicole dans ces pays soit dû à des cépages bordelais introduits au Chili au milieu du XVIe siècle.
En Amérique du Nord, la vigne existe déjà à l’état sauvage, tout particulièrement dans l'Est, dans l'acuel état de la Virginie, mais aussi au Canada, sous forme de lianes s'enroulant autour des arbres. Cette variété (Vitis riparia) aux fruits comestibles ne présente cependant qu'un très faible potentiel vinicole contrairement à la variété européenne (Vitis vinifera). Certaines congrégations missionnaires comme la Compagnie de Jésus et l'Ordre des récollets frères mineurs du Canada, tentent à plusieurs reprises de tirer du vin de ces lambrusques locales afin de pourvoir aux besoins de l'eucharistie, mais ces tentatives vinicoles sont abandonnées dès la fin du XVIIe siècle. Au XVIIe siècle, des plants européens sont importés et plantés sur la côte est des États-Unis, mais ils ne résistent pas aux maladies locales de la vigne. C’est au XVIIIe siècle que le vignoble californien se développe sous l’impulsion des moines franciscains. Au Canada, la région des Grands Lacs se révèle être la plus propice à l'acclimatation de la vigne ; certaines variétés européennes, implantées au milieu du XVIIIe siècle y croissent encore de nos jours. La production vinicole nord-américaine du XIXe siècle relativement importante, est stoppée nette au début du XXe siècle, par l'instauration de la Prohibition (1917). L’activité reprend à la fin de la période de « tempérance », en 1933. L’expérience de la Prohibition va inciter les viticulteurs américains à se lancer dans la production de vins de qualité. Des hybrides français sont introduits au XXe siècle et c’est en 1939 que l’importateur de vin Frank Schoonmaker lance l’idée des vins de cépage (vins issus d’un cépage unique), un produit qui va faire la renommée du vignoble nord-américain et avec lui, celui de tout le « Nouveau Monde ». L’industrie viti-vinicole américaine se développe particulièrement dans les années 1970 grâce à de nouvelles technologies[réf. nécessaire], même si ce sont des pieds de vigne européens qui sont encore à l’origine du vignoble[réf. nécessaire].
Alors qu’au sud de la Méditerranée, l'essor de l’Islam met un frein[réf. nécessaire] à la production viticole, le vignoble européen ne cesse de s’étendre. Jusqu’au XVIIe siècle, le vin constitue la seule boisson stockable et sûre. Ce n’est qu’avec le développement des bières d'une part, l'importation des lointaines colonies du thé, du café et du chocolat faisant apparaître de nouvelles boissons d'autre part, ainsi que le déploiement de l’eau courante, que le vin est détrôné. L’industrie du vin menacée par ces nouveaux venus reprend sa place avec l’invention de la bouteille et son développement rapide. Les premiers vins de garde donnent au commerce du vin un second souffle. Le château Haut-Brion fut le premier à commercialiser un vin de « réserve », vin pour lequel il a opéré une sélection pendant la vendange lui assurant une certaine qualité.
Pendant que la vigne s'étend autour du monde, la viticulture européenne, française en particulier, connaît son lot de problèmes. En 1731, Louis XV interdit les nouvelles plantations afin de juguler la production de vins médiocres, sauf dans des terroirs aptes à donner des vins de qualité. La Révolution française, en rétablissant la liberté de culture, et en morcelant les biens de l’Église pour les distribuer au peuple, va profondément bouleverser le paysage viti-vinicole français. La vigne et le vin deviennent les centres d’activités les plus importants, notamment en Europe du Sud où ils occupent en Italie 80 % de la population active. La révolution industrielle du XIXe siècle, en favorisant le développement des transports, va faciliter l’acheminement des produits et permettre l’essor de l’industrie du vin, asseyant la suprématie des vins d’Europe du Sud. On continue d'attribuer au vin les vertus d'une boisson hygiénique aux qualités antiseptiques[réf. nécessaire][3].
Mais le phylloxéra, importé par mégarde des États-Unis dans les années 1865-70, plonge la viticulture dans sa première grande crise. Le vignoble européen décimé est heureusement sauvé par l'importation de plants américains résistants à l'insecte. La production française chute et ce sont les vignobles méridionaux qui en profitent, en mettant sur le marché des vins de moindre qualité.
Le XXe siècle est propice en révolutions industrielles et techniques. Les progrès de la recherche et de nombreux investissements permettent l’avènement d'une science du vin, l'œnologie. La qualité du vin se précise et la hiérarchisation des vignobles s'opère peu à peu pour arriver à celle que nous connaissons aujourd’hui.
Longtemps le perfectionnement, l'expansion et le développement de la culture de la vigne dans le monde se ont été opérés sous l'impulsion des communautés religieuses. Au cours du siècle dernier, la recherche constante d’une meilleure qualité et l’importance culturelle accrue accordée au vin ont confirmé son rôle prépondérant dans la civilisation occidentale.
Notes et références
- ↑ « Il planta une vigne et il en but le vin. » Ancien Testament, Genèse, 9, 20/21, Traduction œcuménique de la Bible, Éditions du Cerf — les Bergers et les Mages, 1980
- ↑ Expression introduite par Sir Colin Renfrew dans The Emergence of Civilisation: The Cyclades and the Aegean in The Third Millennium BC, 1972.
- ↑ « Pris en quantité modérée, le vin est la plus saine et la plus hygiénique des boissons » Louis Pasteur.
Bibliographie
- Jean-Pierre Brun, Le vin et l'huile dans la Méditerranée antique : viticulture, oléiculture et procédés de fabrication, Errance, 2003
- Roger Dion, Histoire de la vigne et du vin en France des origines au XIXe siècle, Paris, 1959
- Marcel Lachiver, Vins, Vignes et Vignerons, Fayard, 1988
- Jean-François Gautier, Histoire du vin, Presses Universitaires de France, collection Que sais-je n°2676, Paris, 1992
- Gilbert Garrier , Histoire sociale et culturelle du vin, Bordas Cultures, Paris, 1995
- Hugh Johnson, Une histoire mondiale du vin, De l'Antiquité à nos jours, Hachette pratique, Paris, 2002
- Bibliographie de la vigne et du vin
- Jean-Robert Pitte, Le Désir du vin à la conquête du monde, Fayard, Paris, 2009
Liens internes
Liens externes et sources complémentaires
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