- Empêché
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Empêchement
L'empêchement est un obstacle juridique, soit à la réalisation d'un acte et à sa validité, soit à l'exercice d'une fonction.
Sommaire
Belgique
Région wallonne
Empêchement du bourgmestre
Est considéré comme empêché, le bourgmestre qui exerce la fonction de ministre, de secrétaire d’État, de membre d’un Gouvernement ou de secrétaire d’État régional, pendant la période d’exercice de cette fonction[1].
Empêchement de l'échevin
Est considéré comme empêché l’échevin qui exerce la fonction de ministre, de secrétaire d’État, de membre d’un Gouvernement ou de secrétaire d’État régional, pendant la période d’exercice de cette fonction[2].
France
En droit civil français
L'empêchement au mariage
L'empêchement, évoqué par l'article 184[3] du code civil, se dit des cas, qu'il énumère à titre non exhaustif, qui font obstacle à la célébration du mariage. Soit l'empêchement est dirimant, ce qui rend annulable de manière absolue un mariage qui aurait été célébré en l'absence de ces conditions de fond (polygamie, entorse au caractère publique de la célébration). Soit il est simple (ou prohibant), ce qui ne rend pas annulable un mariage célébré dans ces conditions que le juge est libre d'apprécier, sous réserve qu'il n'y ait pas d'intention frauduleuse, et ce, quand bien même l'officier d'état civil avait le devoir de ne pas célébrer l'union.
Les hypothèses d'empêchement au mariage peuvent être résumées ainsi :- L'absence de majorité civile (article 144[4] du code civil). La majorité civile est exigée au moment de la célébration, soit 18 ans révolus pour les hommes et pour les femmes (depuis 2006). Toutefois, le procureur de la République peut accorder une dispense pour motif grave (article 145 du code civil). En pratique, en cas de grossesse par exemple.
- L'absence de consentement légitime (article 146 du code civil). Même un majeur sous tutelle doit consentir à son mariage mais une maladie mentale avérée ou un état de démence, voire d'ébriété au moment de la célébration sont susceptibles d'être appréciés par le juge comme ayant altéré le consentement. Il y a lieu également d'apprécier si les motifs du consentement ne sont pas étrangers à l'union célébrée, en particulier s'il s'agissait, à titre exclusif, d'obtenir un titre de séjour (domaine des mariages blancs dits aussi "simulés"). Par ailleurs, il appartient à l'officier d'état civil d'interpréter les signes du consentement d'un contractant ne pouvant parler ou les signes d'un consentement sous contrainte.
- La polygamie (article 147 du code civil). Les mariages précédents doivent être dissous avant de contracter un nouveau mariage, sans qu'il soit possible de régulariser a posteriori. Il s'agit ici d'une prohibition d'ordre public. Toutefois, un mariage contracté à l'étranger en état de bigamie de l'un ou des deux époux n'est pas nul en France si les lois nationales ou les statuts personnels, éventuellement différents, de chaque époux autorisent la bigamie.
- La consanguinité (articles 161, 162 et 163 du code civil). Que la parenté soit légitime ou naturelle, le mariage est ainsi impossible : en ligne directe entre ascendants et descendants, et les alliés dans la même ligne; en ligne collatérale, entre le frère et la sœur, ainsi que pour les alliés au même degré; entre l'oncle et la nièce, entre la tante et le neveu et, de jurisprudence, entre le grand-oncle et sa petite-nièce. Il s'agit ici d'une prohibition d'ordre public. Toutefois, le président de la République peut, pour des motifs graves accorder une dispense pour les mariages entre allies en ligne directe si la personne créant l'alliance est décédée, à ceux entre beaux-frères et belles-sœurs et à ceux entre oncle et nièce ou tante et neveu (article 164 du code civil).
- La clandestinité du mariage. Est ainsi envisagée d'abord l'absence de célébration publique (article 191 du code civil). Toutefois des raisons impérieuses peuvent être prises en considération pour aménager cette condition, comme de célébrer le mariage à l'hôpital en raison de l'aggravation de l'état de santé de l'un des contractants. Ensuite, depuis 1993, cela vise aussi expressément l'absence de comparution personnelle de l'un des contractants au mariage, y compris dans l'hypothèse où celui-ci serait célébré à l'étranger (article 146-1 du code civil). Il s'agit ici de conditions de fond au mariage.
En droit constitutionnel français
L'empêchement du Chef de l'État
L'empêchement rend impossible d'exercer la fonction de président de la République, une fois qu'il a été officiellement constaté par le Conseil constitutionnel. Cette disposition n'a jamais encore été appliquée.
- Sources textuelles : Cette situation, qui n'a qu'une très lointaine parenté avec la procédure anglo-saxonne de l'Impeachment (cf. infra), apparaît plus ou moins nettement dans les constitutions antérieures. On prévoit seulement les cas de vacance ou de suppléance, pour décès ou démission, dans les constitutions du Directoire et du Consulat[5], ainsi que dans la les lois constitutionnelles de la troisième République[6]. Le terme apparaît explicitement dans la Constitution de 1848 (art. 70) et dans la Constitution de la Quatrième République (art. 41). Il est repris en 1958, sans doute avec un sens élargi approximativement plus proche de la notion anglo saxonne[7], à l'article 7 de la Constitution de la V° République; un sens qu'il a néanmoins sans doute perdu depuis 2007.
- Les cas d'empêchement. La constitution ne précise pas quelles sont les hypothèses où l'empêchement peut intervenir. Logiquement, il s'agit de toute cause incompatible avec la poursuite de la fonction. Mais il faut sans doute combiner aujourd'hui cette faculté avec celle de la destitution telle quelle apparaît redéfinie par le nouvel article 68 révisé en 2007[8] (cf. infra). En tout état de cause, l'empêchement peut être provisoire (on songeait à la maladie grave, l'enlèvement ou la disparition, un long déplacement, etc.) ou définitif (on songeait à la trahison, à la démence, une déchéance physique grave et irréversible, au scandale consécutif, par exemple, à un comportement personnel indigne ou une atteinte intolérable aux droits de l'homme[9], etc.). Dans le premier cas il y a seulement intérim, dans le second il y a aussi vacance. Mais il peut s'avérer difficile de savoir, selon la gravité, si l'on est dans l'un ou l'autre cas, par exemple dans l'hypothèse d'un scandale dont serait responsable le président, et à quel moment précis on passe d'un cas à l'autre. En conséquence de quoi le Conseil constitutionnel qui apprécie souverainement la situation dès lors qu'il est saisi, se trouverait devant une double difficulté : déterminer si le président est dans une situation d'empêchement; juger de son caractère définitif, ce qui peut s'avérer encore plus délicat sauf lorsqu'il y a vacance de fait. D'autant que l'incertitude demeure sur le fait de savoir si lorsqu'il est saisi, le Conseil constitutionnel est censé suivre l'évolution de la situation, ou s'il doit à nouveau être saisi comme il est probable pour prononcer l'empêchement définitif après avoir déjà prononcé l'empêchement provisoire.
- Toutefois, le champ d'intervention pratique de l'empêchement serait vraisemblablement réduit. D'abord par la faculté qu'a le président, en cas de scandale, voire de maladie, de démissionner avant que la procédure ne soit enclenchée. L'hypothèse de l'empêchement servirait seulement alors de moyen de pression[10]. À l'inverse, en cas de maladie, la situation s'apprécie vraisemblablement moins à l'égard de l'incapacité éventuelle du président qu'à l'égard des conséquences concrètes qu'a celle-ci sur le fonctionnement de l'État et sur l'image du pouvoir en place. Or, compte-tenu du bicéphalisme existant au sommet de l'État, et des articles 20 et 21 de la Constitution qui lui en donne les moyens, on peut penser que le Premier ministre est en mesure de pallier largement aux insuffisances éventuelles d'un président diminué et qu'il peut, s'il le souhaite, parfaitement s'en accommoder, voire, en tirer profit personnel. En outre, la nouvelle formule employée dans l'article 68 de la Constitution, depuis 2007, pour la destitution du président « manquement à ses devoirs manifestement incompatible avec l’exercice de son mandat » étend le champ traditionnel de la destitution, par la Haute Cour, limité antérieurement à la haute trahison et, concomitamment, réduit celui de l'empêchement. Dans l'hypothèse d'une destitution, le Conseil constitutionnel n'aurait vraisemblablement plus qu'à prendre acte et déclarer la vacance. Cependant la déclaration d'empêchement peut être le préalable nécessaire à la sérénité du procès. Restent les cas où le président ne pourrait même pas faire illusion et les hypothèses de son absence.
- Des exemples témoignent de la difficulté d'apprécier l'empêchement. En pratique, l'histoire de la V° République nous livre les cas des présidents Pompidou et Mitterrand, tous deux atteint en cours de mandat d'un cancer incurable et invalidant dont ils sont décédés, l'un avant le terme de son mandat (Pompidou en 1974), l'autre quelques mois après (Mitterrrand en 1996)[11]. Bien qu'il semble que tous deux aient gardé leurs facultés intellectuelles jusqu'au bout[12], on sait que l'un et l'autre ont sérieusement ralenti leurs activités, ce qui laisse entière la question de savoir s'ils étaient aptes à l'exercice de leur fonctions. Mais cela suppose en premier lieu d'apprécier quelles sont les exigences minimales de la fonction, ensuite, d'imaginer qui est susceptible de donner l'alerte dans l'entourage puisque l'on sait que le médecin personnel du président est lié par le secret[13]. Reste l'attitude respectueuse et convenue d'un Premier ministre qui, trop lié à la personne du Chef de l'État, peut avoir du mal à provoquer l'empêchement. Or, l'exemple du président Mitterrand qui, bien qu'il ait annoncé la transparence sur son état de santé s'est tu en apprenant qu'il était condamné, semble démontrer que l'on ne peut pas compter sur une prise de conscience et un choix lucide de la part de l'intéressé. Cela n'a d'ailleurs nullement empêché le président Mitterrand de briguer puis de poursuivre un second mandat. L'attitude de ce dernier est d'autant plus remarquable qu'il avait justifié de faire publier régulièrement un bulletin de santé le concernant, par sa volonté de trancher avec l'exemple de Pompidou[14]. C'est avec la même difficulté à prendre position sur cette question que l'on a pu évoquer l'hypothèse de l'empêchement lors d'une brève hospitalisation du président Jacques Chirac en septembre 2005[15]. Finalement, seule la suppléance du chef de l'État à la présidence d'un seul Conseil des ministres fut mise en œuvre cette fois là, comme ce fut aussi le cas à plusieurs reprises sous Pompidou et Mitterrand.
- La saisine du Conseil constitutionnel. Aujourd'hui, l'empêchement doit être constaté par le Conseil constitutionnel[16], saisi par Gouvernement, qui doit statuer à la majorité de ses membres. Le Conseil ne saurait donc s'autosaisir, ce qui laisse ouvertes quelques hypothèses théoriques sur lesquelles la constitution est muette[17] : celle où, pour des raisons politiques diverses, ou par convenances (cf. supra), le gouvernement se refuserait à demander à celui-ci de se prononcer sur un empêchement pourtant manifeste, la seule parade hypothétique étant de renverser le gouvernement; celle également où, à l'inverse, un Premier ministre appuyé par une majorité du Conseil pourrait obtenir l'empêchement d'un président avec lequel il serait seulement en conflit. Ces cas d'école mériteraient cependant d'être préventivement traités juridiquement, par exemple, en élargissant la saisine du Conseil aux présidents de l'Assemblée nationale et du Sénat et en posant la double exigence d'une décision conjointe, ou éclairée par une autre autorité, juridictionnelle ou médicale, suivant le cas. Reste l'hypothèse ou le président du Conseil constitutionnel, nommé par le président, entraîne la majorité des membres à ne pas se prononcer[18]. En outre, depuis 2007 il est clair que peut se poser la question de savoir quelle procédure déclencher dans certains cas qui, marginalement, peuvent sembler relever autant du nouveau champ de la destitution (art. 68) que de celui de l'empêchement tel qu'on l'entrevoyait auparavant. Autrement dit, par hypothèse, il y aurait concurrence entre la saisine du Conseil constitutionnel et celle de la Haute Cour. En pratique, il est probable que l'empêchement serait ainsi débarrassé de toutes les hypothèse politiques qu'on lui prêtait par défaut et qu'il interviendrait, le cas échéant, comme un complément de sérénité pour faciliter le déroulement d'une éventuelle procédure de destitution. Inversement on peut aussi défendre l'idée que l'on pourrait préférer masquer les aspects politiques d'une action envers le président par la saisine du Conseil constitutionnel.
- Autres conséquences institutionnelles. Selon l'article 7 alinéa 4, pendant l'empêchement, le président intérimaire est privé du recours à la dissolution (art. 12) et au référendum (art. 11). En outre, selon l'article 7 alinéa 11, si l'empêchement est définitif, il est impossible de renverser le gouvernement (articles 49 et 50) ou de réviser la constitution (article 89).
L'empêchement électoral du candidat à la présidence
L'empêchement électoral vise seulement la situation du candidat à l'élection présidentielle qui se trouve placé dans l'impossibilité de mener campagne ou d'aller jusqu'au bout du processus de l'élection. Cette situation est prévue à l'article 7 de la constitution de la V° République (depuis sa révision en 1976)[19] et donne lieu à l'intervention du Conseil constitutionnel sur saisine, soit du président de la République, soit du Premier ministre, de l'un des présidents des assemblées, ou de soixante députés ou sénateurs, ou cinq cents personnes ayant qualité pour présenter un candidat.
Trois situations sont à distinguer dans le temps :- L'empêchement ou le décès survenant dans les sept jours qui précèdent la date limite de dépôt des présentations des candidatures. Ici, le Conseil constitutionnel apprécie à titre discrétionnaire s'il convient de reporter la date du scrutin et de rouvrir la procédure de présentation des candidats.
- L'empêchement ou le décès survenant entre la date à laquelle la liste des candidats a été arrêtée et le premier tour du scrutin. Ici le conseil constitutionnel est obligé de reporter l'élection.
- L'empêchement ou le décès de l'un des deux candidats arrivés en tête à l'issue du premier tour et susceptible de se présenter au second. Le conseil constitutionnel est obligé de faire recommencer l'ensemble des opérations électorales.
L'empêchement du Premier ministre ou d'un ministre
Il n'y a pas de procédure constitutionnelle prévoyant cette hypothèse explicitement.
L'article 50 de la constitution prévoit cependant un cas d'empêchement définitif qui peut, néanmoins, n'être que provisoire en pratique. Tirant les conséquences du refus de la confiance parlementaire résultant de l'application de l'article 49, il oblige le Premier ministre à remettre la démission de son Gouvernement au président de la République. C'est donc un empêchement collectif qui conduira le président à nommer un autre Gouvernement, sachant qu'aucune disposition constitutionelle n'interdit qu'il renomme le même Premier ministre (cas de Pompidou renommé par le général de Gaulle en 1962).
Par ailleurs, si un Premier ministre (ou un ministre) était à titre personnel empêché définitivement pour quelque cause que ce soit (notamment physiquement), il serait immédiatement procédé à son remplacement par le président de la République selon la procédure prévue à l'article 8 de la constitution, malgré les termes de l'alinéa 1er qui conditionne le remplacement du Premier ministre à une démission formelle. Pour ce faire, le président pourrait s'appuyer sur l'obligation qui pèse sur lui d'assurer « la continuité de l'État » au titre de l'article 5. L'empêchement du Premier ministre entraînant selon toute vraisemblance la nomination d'un nouveau Gouvernement. Enfin, si, par hypothèse d'école, le Premier ministre était mis en examen par une juridiction quelconque[20] et qu'en accord avec le président de la République il refusait de démissionner, il n'est pas exclu de penser que les députés pourraient être tentés de renverser son Gouvernement malgré les liens qui unissent la majorité parlementaire à l'Exécutif.
A noter cependant que la mise en examen d'un ministre en fonction (ou du Premier ministre) par une juridiction ordinaire ou, par hypothèse, sa mise en cause devant la Cour de justice de la République, ne sont juridiquement pas un motif d'empêchement. Pourtant, en pratique, on constate que le ministre concerné est contraint à la démission. Cela s'est déjà produit huit fois sous la Cinquième République.
Le premier cas remonte à 1972, avec Philippe Dechartre, secrétaire d’Etat dans le gouvernement Chaban-Delmas. Mais, depuis 1992, c’était devenu un principe en vertu de ce que l’on a pris coutume de nommer la jurisprudence Bérégovoy-Balladur. Inventée par Pierre Bérégovoy, Premier ministre socialiste, à l'occasion des ennuis judiciaires de Bernard Tapie, cette règle non écrite qui veut que tout ministre mis en examen démissionne a été reprise et appliquée par son successeur, de droite, Édouard Balladur, et a continué de s'imposer ensuite. Les ministres suivants ont été contraints de s'y plier : Bernard Tapie en 1992, Alain Carignon, Gérard Longuet et Michel Roussin en 1994, Dominique Strauss-Kahn en 1999, Renaud Donnedieu de Vabres en 2002 et Pierre Bédier en janvier 2006.
S'il vise surtout à mettre le Gouvernement à l’abri des éclaboussures éventuelles, ce retrait momentané du devant de la scène politique permettrait au ministre concerné de mieux se défendre devant la justice[21]. Mais cette pratique qui s'impose politiquement est parfois dénoncée comme contraire à la présomption d'innocence, d'autant que la plupart des ministres en cause ont fait ensuite l'objet d'une relaxe[22]. C'est sans doute ce qui explique que la nomination au Gouvernement François Fillon (2) en juin 2007 d'André Santini, mis en examen depuis l'été 2006, semble marquer un coup d'arrêt à la jurisprudence Bérégovoy-Balladur. « La règle fixée par le Premier ministre (François Fillon) est la règle du suffrage universel », indiquait-on à Matignon à l'époque, sachant que le nouveau secrétaire d'État venait, entre temps, d'être réélu député. Pour sa part, l'intéressé se disait prêt à prendre les décisions qui s'imposent (ce que l'on peut traduire par "démissionner") si, contrairement à son pronostic, il n'obtenait pas un non-lieu[23], donc seulement après un renvoi en correctionnelle, voire après une éventuelle condamnation[24].
L'empêchement provisoire du Premier ministre ou d'un ministre débouche quant à lui sur une procédure d'intérim particulière.
Article détaillé : L'intérim du Premier ministre ou d'un ministre.L'empêchement du président du Conseil constitutionnel
Le cas s'est posé, en pratique, lors de la mise en examen de Roland Dumas le 29 avril 1998, par les juges d'instruction Eva Joly et Laurence Vichnievsky dans le dossier concernant l'affaire Elf. Si certains demandaient sa démission de la présidence du Conseil constitutionnel, comme Alain Peyrefitte, le président Chirac soulignait que rien ne l'y obligeait et que lui-même n'avait pas le pouvoir de le révoquer sans qu'une décision de justice ne l'y contraigne. Or, s'il appartient bien au président de la République de nommer le président du Conseil constitutionnel (art. 56 al. 3), ses membres sont inamovibles. Le règlement du Conseil constitutionnel ne prévoit d'ailleurs que les cas d'empêchement physique et l'incompatibilité[25]. La question s'est cependant posée compte tenu du précédent créé en 1986 par le président Mitterrand qui avait nommé Robert Badinter à la présidence du Conseil, avant la fin du mandat du président en place, Daniel Mayer, après avoir demandé à ce dernier, semble-t-il, de démissionner préalablement (ce qu'il fit mais en restant membre du Conseil). Dans le silence des textes à ce propos, l'attitude du président Mitterrand laissait donc à penser qu'existait une révocation implicite des fonctions de président, dès lors que le président de la République semblait pouvoir user de son pouvoir de nomination à tout moment sans pour autant atteindre à l'inamovibilité de celui-ci en tant que membre du Conseil. C'est cette interprétation controversée que rejeta implicitement le président Chirac. De son côté, amenée incidemment à se prononcer sur le maintien du président R. Dumas à la tête du Conseil, la chambre d'accusation de la cour d'appel de Paris s'y était elle aussi refusée en invoquant notamment le principe de la présomption d'innocence (décision du 22 septembre 1999)[26]. Finalement, R. Dumas décidera de suspendre l'exercice de ses fonctions le 24 mars 1999, puis de démissionner du Conseil Constitutionnel, sous la pression de ses membres, le 1er mars 2000. Normalement son mandat aurait dû se poursuivre jusqu'au 8 mars 2004, ce qui aurait fini par poser problème car R. Dumas fut effectivement condamné dans cette affaire en 2003. Il devait cependant être relaxé en appel.
Distinction entre l'empêchement et d'autres situations
- l'incompatibilité (par exemple, la fonction de Chef de l'État est incompatible en France avec un mandat parlementaire) postule en pratique non un empêchement mais un choix obligatoire entre deux mandats incompatibles entre eux.
- l'intérim du président de la République, qu'il soit provisoire ou définitif, peut intervenir en dehors d'une cause d'empêchement bien qu'il puisse aussi en être la conséquence.
- les limites apportées à la mise en œuvre de dispositions constitutionnelles sont une sorte d'empêchement factuel lorsque les conditions extérieures à la disposition en cause sont réunies. L'empêchement constitue lui-même une de ces limites (supra) mais n'est pas la seule. Ainsi les limites apportées à l'usage du référendum (art. 7 al. 4), de la dissolution (art. 7 alinéa 11 et art. 16 al. 5), de la révision (art. 7 al. 11, art. 89 al. 4 et art. 89 al. 5), de la responsabilité gouvernementale (art. 7 al. 11 et, de fait, combinaison art. 16 al. 4/art. 49 al. 2).
En droit administratif français
L'empêchement des autorités administratives indépendantes individuelles
- L'empêchement du Médiateur de la République doit être constaté dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat conformément à l'article 2 loi du 3 janvier 1973 instituant cette autorité administrative indépendante. (modifié par la loi n°89-18 du 13 janvier 1989, art. 69 II).
- L'empêchement du Défenseur des enfants doit être constaté par le Conseil d'État conformément à l'article 2 de la loi n° 2000-196 du 6 mars 2000 instituant cette autorité administrative indépendante.
L'empêchement du maire
Article principal : Maire (France).Il y a lieu à suppléance du maire lorsqu’il est empêché provisoirement ou définitivement. Dans ce dernier cas, il est procédé à l'élection d'un nouveau maire. La question est régie par l'article L 2122-17 code général des collectivités territoriales (CGCT).
- L'empêchement provisoire
- Les conditions de l'empêchement : L’absence du maire ne justifie sa suppléance que dans la mesure où elle compromet l’exercice de ses fonctions. Ainsi l’empêchement doit être réel, effectif, établi et prouvé. Il doit être tel que le maire se trouve réellement et personnellement dans l’impossibilité d'accomplir les actes de sa fonction. Le juge administratif admet que le maire ait pu être empêché une partie de la journée seulement[27]
- N'est pas un cas d'empêchement : Le maire, même éloigné de sa commune, doit continuer de faire les actes « pour lesquels cet éloignement ne constitue pas un empêchement ». D’après le Conseil d’Etat, le fait qu’un maire soit en séjour à Paris ne l’empêche pas de convoquer le conseil municipal[28]. De même, le juge estime que les obligations imposées à un élu par l'ordonnance d'un juge d'instruction le plaçant sous contrôle judiciaire ne sauraient nécessairement l'empêcher d'exercer les fonctions liées à son mandat[29]
- Est un cas d'empêchement : Le juge considère que le maire est empêché lorsqu’il est intéressé à une affaire[30]. Le maire est également considéré comme empêché en cas d’hospitalisation de longue durée[31]. ou en cas d’incarcération de longue durée[32]. La suspension disciplinaire du maire donne lieu à suppléance.
- L'empêchement définitif du maire
- La révocation et La démission volontaire. Dès lors que la révocation disciplinaire du maire a été prononcée. La démission du maire constitue un empêchement à la poursuite de ses fonctions[33]. Dès la révocation ou l'acceptation de la démission du maire par le préfet, la suppléance est assurée par un adjoint non démissionnaire, dans l’ordre des nominations, et, à défaut d’adjoint, par un conseiller municipal. Le suppléant exerce les fonctions du maire et est chargé de convoquer le conseil municipal en vue de l’élection d’un nouveau maire.
- Autres cas d’empêchements définitifs. Constituent également des cas d’empêchements définitifs : le décès[34], l’absence ou la disparition au sens du code civil français, l’annulation de l’élection comme conseiller municipal ou comme maire, dès notification de la décision définitive d’annulation, tous les autres cas où il doit y avoir cessation immédiate de l’exercice de ses fonctions (cas d’inéligibilité ou d’incompatibilité à la fonction de conseiller municipal ou de maire…).
Autres pays
La procédure anglo saxonne de l'impeachment
- L'impeachment, qui signifie mise en accusation, est une procédure anglo-saxonne permettant au pouvoir législatif de destituer un haut fonctionnaire. Importée de Grande-Bretagne, où elle est encore utilisée aujourd'hui en de rares occasions, cette procédure est surtout connue aujourd'hui par l'utilisation qu'elle peut avoir aux États-Unis.
- L'accusé peut être tout haut fonctionnaire du gouvernement, ce qui aux États-Unis inclut notamment le président et son vice-président, les membres du cabinet (équivalent des ministres) et les juges fédéraux. Le prononcé de l'empeachment a pour but de permettre d'engager des poursuites judiciaires pénales à l'encontre des hauts fonctionnaires destitués.
- La procédure américaine connaît deux étapes :
- la mise en accusation (impeachment), qui doit être votée par la Chambre des représentants;
- le procès (impeachment trial) qui se tient devant le Sénat des États-Unis présidé par le vice-président, ou le président de la Cour suprême si c'est le président qui est jugé.Article détaillé : Impeachment.Notes et références
- ↑ Décret modifiant certaines dispositions du Code de la démocratie locale et de la décentralisation (DRW/20051208/AB)
- ↑ Décret modifiant certaines dispositions du Code de la démocratie locale et de la décentralisation (DRW/20051208/AB)
- ↑ Article 184 du code civil
- ↑ Article 144 du code civil
- ↑ Constitution de l'an III (art. 140); Constitution de l'an VIII (art. 40); Constitution de l'an X (art. 41)
- ↑ A l'article 7 de la loi constitutionnelle du 25 février 1875
- ↑ Il serait plus exacte de dire que l'impeachment se retrouvait en France, avant 2007, très partiellement dans cette procédure de l'empêchement, ainsi que, cumulativement, surtout dans celle de la destitution prévue à l'article 68
- ↑ Loi constitutionnelle n° 2007-238 du 23 février 2007 portant modification du titre IX de la Constitution
- ↑ On pourrait penser au scandale des écoutes téléphoniques de l'Élysée qui semblent avoir été commanditées par le président Mitterrand lui-même dans les années 1980. Aujourd'hui, cela rentrerait plutôt dans le champ de l'article 68 depuis sa révision en 2007
- ↑ On se rappellera le cas du président Paul Deschanel qui avait démissionné en 1920 après divers événements témoignant de troubles mentaux
- ↑ Le premier d'un cancer de la moelle osseuse, le second d'un cancer de la prostate
- ↑ Pour le président Pompidou, voir le récit du conseil des ministres du 27 mars 1974 par J. Mauriac (Le Monde, 9 avril 1974) et pour le président Mitterrand, l'ouvrage du docteur Claude Gubler, Le grand secret (Plon -1996)
- ↑ Cas du docteur Gubler précité qui s'est même vu interdire l'exercice de la médecine à la suite de la publication de son ouvrage après le décès du président Mitterrand
- ↑ Le docteur Gubler, précité, sera conduit à diffuser de faux bulletins de santé [1]
- ↑ L'hypothèse d'un empêchement fut évoquée lorsque le président Chirac fut hospitalisé sept jours à l'hôpital du Val-de-grâce à la suite d'un accident vasculaire cérébral qui, un moment, fit planer le doute sur son état de santé réel [2]. En revanche, la question ne fut pas évoquée lors de l'intervention bénigne que subit le président Sarkozy en octobre 2007, s'agissant de l'incision d'un abcès phlegmon que l'on n'apprit qu'après coup
- ↑ Dans les républiques antérieures ce constat était le fait du Parlement
- ↑ J. V. D. Amson, Une lacune de la constitution, Le Monde, 19 février 1974; A Brimo, L'empêchement du président de la République, ibid; A Passeron, Certitudes, 9 février 1974; Gicquel, Droit constitutionnel et institutions politiques, Montchretien 10° édition, p626, note 27.
- ↑ Par exemple, en acceptant sa nomination à la tête du Conseil en mars 1974, Roger Frey pouvait sembler cautionner le maintien du président Pompidou dont il connaissait l'état de santé dégradé
- ↑ Loi constitutionnelle no 76-527 du 18 juin 1976 modifiant l'article 7 de la Constitution
- ↑ En effet, le Premier ministre ne bénéficie pas de l'immunité des poursuites conférée au président de la République au titre du nouvel article 67 de la constitution.
- ↑ On note d'ailleurs que Bernard Tapie, après avoir été poussé à la démission en juin 1992, avait été renommé dès décembre par le président Mitterrand
- ↑ Seul Alain Carignon a été condamné à de la prison ferme. Michel Roussin a finalement été condamné mais à 4 ans de prison avec sursis (rejet de son pourvois en cassation en date du 20 février 2008).
- ↑ C'est du moins ce qu'il déclarait sur RTL tel que rapporté sur le site du Nouvel Observateur qui fait le point sur cette nomination : A.P., « La nomination d'André Santini enterre la jurisprudence Bérégovoy-Balladur sur les ministres mis en examen », dans Le Nouvel Observateur, 19 juin 2007 [texte intégral (page consultée le 29 juillet 2008)],
- ↑ La mise en examen a cependant été confirmée par la Cour de Cassation le 20 février 2008 - Aurore Merchin, « Santini : mise en examen confirmée », dans France Soir, 21 février 2008 [texte intégral (page consultée le 29 juillet 2008)]
- ↑ Selon ce règlement, un membre du Conseil peut être déclaré démissionnaire d'office en cas d'incompatibilité ou d'incapacité physique permanente constatée par le Conseil constitutionnel
- ↑ La décision avait pour principal effet de valider l'instruction en cours et de rejeter la compétence exclusive de la cour de justice de la République qu'invoquait R. Dumas
- ↑ CAA Paris 25 mai 2000, n° 97PA03686 : « que la circonstance qu'un autre acte administratif du maire concernant l'intéressée portait la même date du 1er avril 1997, si elle est de nature à établir que le maire n'était pas empêché durant une partie de ce jour-là, ne saurait constituer la preuve qu'il n'était pas empêché pour la totalité de la journée du 1er avril 1997. »
- ↑ CE 22 décembre 1911, n° 43080
- ↑ CAA Marseille 1er avril 1999, n° 97MA00223.
- ↑ CE 19 mai 2000 Commune du Cendre, n° 208542.
- ↑ CE 1er octobre 1993, n° 128485.
- ↑ CAA Bordeaux 6 juillet 1998, n° 96BX32961
- ↑ Article L.2122-15 du CGCT
- ↑ CE 17 décembre 1997, n° 140357 140838 : un premier adjoint était compétent pour signer un arrêté délivrant un permis de construire, dès lors que cet arrêté a été signé postérieurement au décès du maire, dans l'attente de l'élection de son successeur.
Bibliographie
- Th. S. Renoux, M. de Villiers, Code Constitutionnel, commenté et annoté, Litec, 1994, pp 248-250
- François Luchaire, Gérard Cognac, La constitution de la République française, Economica, 1987, p 354
- Code civil (français), Dalloz
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