- Démographie du Massif central
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Cet article décrit la démographie du Massif central qui, avec une population d'un peu plus de 3 750 000 habitants, présente une densité d'environ 50 hab./km², ce qui est inférieur de moitié à la moyenne nationale. Cette situation s’explique par une évolution historique originale.
Sommaire
Vitalité démographique au XIXe siècle
Le Massif central de la tradition -celle du maximum démographique du XIXe siècle avec cinq millions d’habitants- est actif et caractérisé par une société rurale majoritaire. Les densités souvent supérieures à 50 hab./km², atteignant même 100 hab./km² (Limagnes du sud, Cévennes, Beaujolais…) ; seuls les hautes surfaces au-dessus de 1 000 m, notamment dans la partie méridionale (Causses), ne dépassaient guère les 30 hab./km², chiffre encore élevé compte tenu de la médiocrité des milieux.
L’occupation rurale se double d'une armature de petites cités marchandes au contact des différents « pays », de villes-évêchés ou de pèlerinage, de rares villes industrieuses et surtout de grosses bourgades... Le thermalisme, précocement développé, favorise également l’essor de stations bien équipées, singulièrement avec la venue du chemin de fer (Vichy, Le Mont-Dore-La Bourboule).
L'effondrement démographique du XIXe siècle
À partir de la deuxième moitié du XIXe siècle, par une inversion de situation remarquable, le Massif central connaît un effondrement démographique ; le recul est souvent précoce (dès le début du XIXe siècle dans le Cantal, l’Aubrac et les Causses), devenant dramatique de 1890 à 1914. Dans beaucoup de communes rurales, entre la moitié et les deux tiers de la population disparaissent. L'exode est tel que l'on invente le thème du Massif central « pôle répulsif » qui envoie des émigrants vers les plaines : bassin aquitain, Bas-Languedoc, couloir rhodanien mais surtout bassin parisien.
D’après le géographe P. Estienne, les hautes terres ont fourni près d’un million de migrants entre 1831 et 1911. Et jusqu’en 1975, les soldes migratoires sont continuellement négatifs dans l’espace rural. Or, par sa sélectivité, l'émigration touche particulièrement les jeunes gens. Il en résulte un vieillissement, une dénatalité préoccupante et finalement des bilans naturels négatifs (excédent des décès sur les naissances). Certes, la dépopulation n'atteint pas cette intensité en tous lieux et à toutes les périodes mais la crise concerne la majeure partie d'un Massif central qui détenait 13 % de la population française au milieu du XIXe siècle et n'en possède plus que 6 % aujourd'hui.
Aujourd'hui
Désormais, les densités humaines sont généralement très basses. Dans les campagnes, les densités se tiennent souvent entre 10 et 20 h/km², rarement au-dessus (plaines d’Allier et de Loire, Ségalas, bas-pays limousin, Yssingelais), et déjà quelques taches de très basses densités (< 10) couvrent de vastes ensembles (Margeride, plateaux de la Chaise-Dieu, Aubrac, haut Cantal et Cézallier, Montagne limousine, Causses, Cévennes, Vivarais, Monts de Lacaune, Espinouse, Montagne Noire...). Les auréoles de densités plus élevées sont réduites aux rayons urbains et périurbains dont l'ampleur dépend étroitement de la taille de l'agglomération ; c'est ainsi que l'on repère sans difficulté sur la carte les influences positives de Brive-Tulle, de Guéret, de Limoges, de Rodez-Decazeville-Figeac, de Clermont-Ferrand ou de Saint-Étienne, voire de Lyon.
Ces constats débouchent sur des perspectives contrastées. Certes, le Massif central a encore perdu plus de 40 000 personnes entre 1990 et 1999 et la fragilité humaine demeure. Toutefois, certains territoires se signalent par une légère amélioration (Puy-de-Dôme, Haute-Loire, Loire, Rhône, Lot). Certes, le solde naturel reste souvent négatif -à la différence des Vosges, du Jura ou des Alpes en dehors de quelques secteurs méridionaux– mais le bilan migratoire est devenu légèrement positif depuis 1990 ; désormais, l’ouest du Limousin, les cantons méridionaux, les Limagnes ou la bordure orientale constituent des zones d'accueil avec le soutien actif des collectivités territoriales.
Alors qu’entre 1982 et 1990, le déficit migratoire atteignait encore 9 000 personnes, la période 1990-1999 est caractérisée par un renversement historique, avec un excédent de plus de 27 000 personnes qui recouvre l’arrivée d’environ 359 000 migrants (et le départ de 332 000 individus). Les résultats des enquêtes de recensement partiel réalisées depuis cette date confirment la reprise récente de croissance des régions du Massif central et en particulier de l’Auvergne et du Limousin, et cela essentiellement grâce à un renforcement de l’excédent migratoire. Bien sûr, il faudrait apprécier la « qualité » des migrants et en particulier leur âge : les retraités sont nombreux à s'installer dans le sud ou l'ouest du Massif central tandis que l’on note un déficit de jeunes actifs entre 18 et 29 ans. Ceci n’empêche pas le Massif central de recevoir des actifs, à la recherche d’un mode de vie différent. Ces nouveaux arrivants, souvent des citadins qui ont des racines locales, sont porteurs d’innovations et de projets pouvant, dans certains cas, impulser un renouveau économique dans quelques zones rurales en déclin.
Au total, il apparaît important de distinguer d'une part un grand nombre de cantons exsangues ou qui fléchissent depuis peu et, d'autre part, des secteurs vivants où la dénatalité est faible et où les tendances migratoires sont favorables. Ces foyers de bonne santé démographique se situent soit à proximité des aires urbaines, soit dans les Midis attractifs ou dans des milieux connaissant une dynamique de développement local (Yssingelais). De fait, sauf sur sa périphérie et surtout dans sa partie septentrionale, le Massif central souffre de l'absence de puissantes impulsions urbaines, conséquence à la fois de l'éloignement des grandes métropoles et des difficultés traditionnelles de la vie de relation à l'intérieur des hautes terres.
Le poids des héritages ruraux fait que la part des campagnards est toujours forte : majoritaire jusque dans les années 1960, ce monde rural conserve encore plus du tiers des habitants avec des taux records dans le Cantal, la Lozère ou la Creuse. D’après l’INSEE, les aires urbaines couvrent un quart de l’espace du Massif et concentrent un peu plus de 60 % de ses habitants, Toutefois, l'examen des cartes montre que l'on a souvent conclu trop vite à l'absence d'un véritable réseau urbain, hiérarchisé et fonctionnel. La formule est excessive car le Massif ne manque pas d’organismes urbains et on observe une trame régulière de bourgs-centres, de petites villes (36 de 5 à 10 000 habitants, 78 de moins de 5 000 ; 76 % des unités urbaines du Massif ont donc moins de 10 000 habitants et rassemblent 12 % de sa population citadine) et des villes moyennes de niveau supérieur (Roanne, Alès, Brive, Montluçon, Vichy, Castres, Le Puy, Moulins, Rodez, Aurillac, Mazamet, Annonay, Aubenas, Cahors, Millau). Manifestement, aucun espace n'échappe à leur polarisation. En outre, à la tête du réseau, on reconnaît deux métropoles régionales (Limoges et Clermont) et une importante agglomération (Saint-Étienne) qui assurent un bon contrôle et possèdent des activités tertiaires de commandement, du moins jusqu'à un certain stade. Les capitales régionales extérieures (Lyon, Montpellier, Toulouse) dont on redoute l'influence excessive, n'interviennent directement que sur des espaces bordiers, finalement limités[1].
Notes et références
- Laurent Rieutort, collectif CERAMAC, Massif central, hautes terres d'initiatives, Presses universitaires Blaise Pascal, Clermont-Ferrand, 2006
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