- Yann Sohier
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Yann Sohier de son nom breton, (Jean Sohier pour l'état-civil), né le 7 septembre 1901 à Loudéac et mort le 21 mars 1935 à Plourivo, est un instituteur, militant de la langue bretonne et internationaliste.
Sommaire
Enfance et adolescence
Il est né en pays gallo, où son père était gendarme. La famille se déplace successivement au Sel-de-Bretagne (mai 1905-décembre 1906), puis à Uzel (jusqu'en août 1907). Après 15 ans de service, le père se reconvertit comme percepteur, d'abord à Peillac (Morbihan) en août 1907, puis à Lamballe, de 1912 à 1918.
Instituteur breton
Il poursuit ses études d’instituteur jusqu'en 1921 à l'École Normale de Saint-Brieuc. Originaire de Haute-Bretagne, il s'efforce d'apprendre la langue bretonne et réussit à la lire et à l'écrire aisément, bien que n'ayant jamais réussi à la parler vraiment couramment. Il adhère, dès sa fondation semble-t-il, à l'Unvaniezh Yaouankiz Vreizh (Union de la jeunesse de Bretagne), où il est déjà en contact avec François Debeauvais et Olier Mordrel. Il est séduit à cette même époque par le tout jeune Parti communiste, auquel il n'adhère jamais. En octobre 1921, il est incorporé au Guingamp. Ses activités militantes se poursuivent ; il se lie d'amitié avec le frère François Uguen, spécialiste des langues celtiques. Il est déjà militant de Breiz Atao (revue, puis mouvement fondé en janvier 1919). Il devient aussi antimilitariste. Libéré de ses obligations militaires, il est nommé instituteur en Basse-Bretagne, à Plouguiel, près de Tréguier.
Il se marie le 31 janvier 1929 avec Anne Le Den, institutrice originaire de Lannilis, qui collabore à Ar Falz sous le pseudonyme de Naïg Sezny, et plus tard à la revue pédagogique An Eost. Mona (future Mona Ozouf) naît en 1931, elle est élevée en breton. À son mariage, célébré à la cathédrale de Tréguier, assistent, en plus de plusieurs membres de sa famille, Olier Mordrel, François Debauvais et son épouse Anna Youenou, Morvan Marchal et plusieurs autres militants. Le couple passe six mois à Prat puis, en août 1929 est nommé à Plourivo.
Activisme breton
Durant cette période, son activité culturelle et politique prend une grande ampleur : il participe au Congrès panceltique de Quimper de 1924, avec François Debauvais, Youen Drezen, Jakez Riou, Abeozen, Marcel Guieysse, sous la bannière de Breiz Atao. Il est au premier congrès de Breiz Atao à Rosporden, en septembre 1927, où le mouvement donne naissance au Parti autonomiste breton. Il devient un militant actif du nouveau parti. Au printemps 1929, il est élu à l'unanimité secrétaire général de la fédération du Trégor du Parti autonomiste breton.
Lors de la séparation de 1931 suite au départ des fédéralistes (dont Maurice Duhamel), il soutient les nationalistes François Debeauvais, Mordrel. Le congrès de Rennes du 11 avril 1931 décide l'abandon du journal Breiz Atao, qui est remplacé momentanément par War Sao, journal des nationalistes du Trégor, Goëlo, Haute-Cornouaille, qui réclame un retour au nationalisme sans exclure le séparatisme.
Au congrès de Guingamp (août 1931), le PAB devient le Parti national breton. Le 27 décembre 1931, à Landerneau, a lieu le premier congrès du PNB. Breiz Atao reparaît, simple organe de liaison entre les militants. Voici ce qu'en pense Sohier : « J'ai donc lu le nouveau Breiz Atao et bien que je regretterai en partie l'essentiel de la Déclaration de Châteaulin qui nous donnait une base précieuse pour la propagande, je pense qu'il y a du travail à faire sans songer à vouloir préciser ce que pourrait être la Bretagne future. Mais il fallait choisir, et je me rallie à cette idée que je préfère aux idioties de War Sao et de Breiz da zont ». L'histoire militante bretonne a retenu qu'en 1932, lors du 400e centenaire de l'union de la Bretagne à la France, le 7 août à Vannes, Sohier bondit sur la voiture d'Édouard Herriot en criant : « Vive la Bretagne indépendante ». Il aurait été conduit au poste de police. Cette action est démentie par sa propre correspondance, comme le rapporte sa fille Mona Ozouf dans Composition française.
L'homme d'Ar Falz
Il fonde son Bulletin Ar Falz (La Faucille) en janvier 1933 et en fait en moins de deux ans le centre de tout un mouvement en faveur du breton à l'école laïque, auquel s'intéressent non seulement ses collègues instituteurs, mais encore des Bretons de toutes professions. Il rédige la plupart des articles sous divers pseudonymes : Yann ar Ruz, Mestr skol bihan, Fañch Divadou, Yann Keryel. Il s'inspire fortement de l'écrivain Emile Masson, bretonnant, libertaire et internationaliste.
Il continue à travailler à son manuel de breton Me a lenno, qui ne paraît qu'en 1941, avec une préface fort contestée de Roparz Hemon.
Il entretient des relations plus ou moins étroites avec une pléiade d'écrivains bretons, surtout Fañch Elies (Abeozen), Jakez Riou, Youenn Drezen, Loeiz Andouard, sans parler de Yann Kerlann qui collabore étroitement à la rédaction d'Ar Falz, et qu'il choisira pour successeur.
Il s'occupe de sa famille et élève en breton sa fille Mona, pour qui il traduit Per ar C'honikl ! et Hiawaza de l'Américain Henry Longfellow. Il compose des poèmes comme E tal ar groaz, mis en musique par Alan Stivell sur Trema'n Inis (1976).
Son activité politique se ralentit. Il adhére, sans doute dès 1931 au Parti national breton ; mais il se trouve en désaccord avec le programme Saga présenté dans Breiz Atao par Olier Mordrel en mars 1933. Son engagement politique très marqué ne l'empêche pas de fréquenter Marcel Cachin. Celui-ci possède une maison à Lancerf, près de Plourivo, il tint à faire la connaissance de Sohier. Les deux hommes se revirent à plusieurs reprises.
Mais, déjà en 1934-35, des ennuis financiers s'abattent sur Ar Falz.
Yann Sohier meurt d'une bronchopneumonie le 21 mars 1935.
Une foule hétéroclite assista à ses obsèques célébrées deux jours plus tard en l'église de Plourivo. Entre autres l'abbé Perrot, les frères Herry et Ronan Caouissin, le socialiste Marcel Cachin, le fasciste Olier Mordrel, Yann Kerlann, Anna Youenou. Le cercueil était recouvert du gwenn ha du. Mordrel sur la demande de madame Sohier, parle au nom de Breiz Atao, en lançant comme conclusion : « la Bretagne aux Bretons ».
Sohier ne sépara jamais, dans son esprit, la lutte pour la langue bretonne de celle pour l’émancipation des classes populaires. Il voulait que le breton soit enseigné dans les écoles du pays. Dans « Ar Falz » et dans ses actes, les multiples facettes de sa personnalité apparaissent :
- inconditionnellement breton, antimilitariste : « nous devons réclamer avec force le droit pour les Bretons de ne pas faire de service militaire hors de Bretagne ou celui de ne pas le faire du tout » ;
- antifasciste « Bretonnistes ! Le fascisme vous menace. Le fascisme, c'est demain la prison pour tous les militants bretons » ;
- laïque et anticlérical « l'école libre en Bretagne est cléricale et réactionnaire »
- ami de l’abbé Perrot,
- fasciné par l'URSS : « Pour nous, Bretons et instituteurs, l'exemple des Soviets a une valeur immense » ;
- ami de Marcel Cachin, défenseur du prolétariat breton, mais membre du PAB, puis du PNB, qui rejette « le dogme de la lutte des classes » ;
- s'exclamant à Vannes en 1932 sur le marchepied de la voiture d'Edouard Herriot : « Vive la Bretagne indépendante ! » mais écrivant « Cette émancipation pour être totale, complète, doit aussi être nationale». ["sociale", plutôt, non? note d'un lecteur]
La phrase suivante résume la dualité fondamentale de son personnage : « Nous devons être — nous tous les “Falzerien» — de vivants exemples que l'on peut être à la fois Bretonnistes acharnés et Prolétariens agissants ».
Sources
- Mona Ozouf, Composition française. La fille de Yann Sohier livre son regard sur l'œuvre de son père.
Publications
- Me a lenno, Rennes, imprimerie centrale de Rennes, 1941, contient 48 dessins de R.-Y. Creston et un portrait de Yann Sohier.
Catégories :- Nationalisme breton
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