Rafael Leónidas Trujillo Molina

Rafael Leónidas Trujillo Molina
Page d'aide sur l'homonymie Pour les articles homonymes, voir Molina et Trujillo.
Rafael Leónidas Trujillo
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Rafael Leónidas Trujillo

Mandats
Président de la République dominicaine
18 mai 194216 août 1952
Prédécesseur Manuel de Jesús Troncoso
Successeur Héctor Bienvenido Trujillo
Président de la République dominicaine
16 août 193013 mai 1938
Prédécesseur Horacio Vásquez
Successeur Jacinto Bienvenido Peynado
Biographie
Nom de naissance Rafael Leónidas Trujillo Molina
Date de naissance 24 octobre 1891
Lieu de naissance San Cristóbal, République dominicaine
Date de décès 30 mai 1961
Lieu de décès Cuidad Trujillo
Nationalité Dominicaine
Parti politique Parti dominicain
Profession Militaire
Religion Catholique

Coat of arms of the Dominican Republic.svg
Liste des présidents de la République dominicaine

Rafael Leónidas Trujillo Molina (San Cristóbal, 24 octobre 1891- Ciudad Trujillo, 30 mai 1961) est un militaire et homme politique dominicain qui fut à deux reprises le président de la République dominicaine, mais de 1930 à sa mort en 1961, il exerce un pouvoir sans partage sur le pays, même sans titre officiel, il était El Jefe (Le Chef).
à San Cristóbal, il rejoint la Garde nationale, entrainée par le corps des Marines des États-Unis, afin de maintenir l'ordre après l'occupation. Il monte rapidement en grade et renverse le président Horacio Vásquez en 1930. Fidèle soutien de la politique des États-Unis dans la Caraïbe, il est cependant impliqué dans la tentative d'assassinat du président vénézuélien Rómulo Betancourt. Ses liens avec les États-Unis se distandent alors et en 1960, l'Organisation des États américains approuve à l'unanimité de déstabiliser le régime de Trujillo par des sanctions et diverses démarches diplomatiques. Il fut assassiné par des militaires dominicains le 30 mai 1961 lors d'un voyage en automobile.

Sommaire

Trujillo avant son arrivée au pouvoir (1891-1930)

Famille et premières années (1891-1916)

Rafael Trujillo est le 24 octobre 1891 à San Cristóbal, son père, José Trjillo Valdez, est un petit commerçant d'ascendance canarienne, sa mère, Altagracia Julia Molina Chevalier, qui fut plus tard surnommée Mamá Julia est la fille d'un paysan dominicain et d'une fille d'un officier haïtien du temps de l'occupation haïtienne de la République dominicaine. Cette ascendance haïtienne de Trujillo fut plus tard occulté le plus soigneusement possible par le dictateur, particulièrement à partir du massacre des Haïtiens de 1937.
Rafael Leónidas est le troisième de onze enfants, certains de ses frères et sœurs joueront un rôle important pendant sa dictature. son enfance se passe sans incident notable, mais son éducation est irrégulière et assez limitée. En 1897, il est inscrit à l'école à San Cristóbal et suit une scolarité pendant quelques années. En 1907, il obtient un emploi de télégraphiste qu'il exerce durant trois ans. Cependant, il s'associe avec son jeune frère José Arismendi pour voler le courrier et falsifier des chèques. Ils furent découverts et, jugés coupables, furent emprisonnés pendant quelques mois.
Le 13 août 1913, Trujillo épouse Aminta Ledesma, une fille de bonne famille de sa ville natale. Il aura deux filles avec elle : Genoveva qui nait en 1914 et meurt peu de temps après sa naissance et Flor de Oro née en 1915 qui fut l'épouse de Porfirio Rubirosa de 1932 à 1938.
En 1916, il reprend ses activités délictueuses en s'associant à une bande nommée La 42, particulièrement crainte pour sa violence. Par la suite il s'éloigne de ses compagnons pour devenir garde dans les champs de cannes à sucre.

La carrière militaire (1916-1930)

Le 18 décembre 1918, Trujillo intègre la Guarda Nacional qui est formée et entraînée par les Marines, sa carrière militaire est brillante. Il est rapidement promu second lieutenant et prête serment le 11 janvier 1919. Il devient ainsi le quinzième des seize lieutenants qui existent à cette époque au sein de la Guardia Nacional. Il intègre larmée avec un objectif d'ascension sociale, puisqu'avant dintégrer larmée, il prononce cette phrase : « Je vais entrer dans larmée et je ne marrêterai pas avant dêtre son chef ».
En 1921, il est admis dans une Académie militaire fondée par lArmée dOccupation à Haina, et le 22 décembre de cette même année, il est désigné pour occuper la tête de la Garnison de San Pedro de Macorís il dirige la répression contre la guérilla des Gavilleros dans les provinces d'El Seibo et San Pedro de Macorís, qui s'étaient soulevés contre loccupation américaine. Il est alors promu capitaine sans passer par le grade de premier lieutenant, fait irrégulier si lon prend en compte le tableau davancement militaire, mais explicable en raison des « services » rendus par Rafel Leónidas à loccupant américain. Il est muté au Cibao en 1922. Cette promotion est accompagnée par la réorganisation de la Garde nationale, qui devient la Police nationale dominicaine, au sein de laquelle il occupe peu de temps après le commandement de la 10e Compagnie. Cest aussi quil est loué pour ses services et, durant les mois de mai et août 1923, avant dêtre nommé inspecteur du premier district militaire, il participe en tant quétudiant à lécole des Officiers du Département du Nord.
Au début de 1924, il est nommé de façon temporaire au commandement de la Garnison du Département du Nord et, en septembre de cette même année, il reçoit sa nomination définitive, qui le promeut au rang dofficier. Lorsque Horacio Vásquez triomphe lors des élections après le retrait des troupes doccupation américaines, Trujillo reçoit la demande de demeurer à la tête de la Police nationale. Le 6 décembre de cette même année, le président Vásquez le nomme lieutenant colonel et chef de lÉtat-Major. Il est très populaire parmi ses hommes et transforme la Police nationale en une véritable armée.
Trujillo divorce de sa femme Aminta Ledesma, qui obtient la garde de leur fille Flor de Oro ainsi quune pension mensuelle de 100 pesos. En 1925, il se remarie avec Bienvenida Ricardo, jeune femme provenant dune famille de notables de Monte Cristi, ce qui ne lempêche pas de continuer ses aventures extraconjugales. Le couple traverse une crise sévère lorsque Trujillo tombe amoureux de celle qui deviendra sa troisième et dernière épouse, « la Españolita » María Martínez, issue dune famille respectée mais pauvre. Ils ont trois enfants : Ramfis, Angelita et Radhamés. Ramfis, son aîné serait en réalité le fils du cubain Rafael Dominicis, amant de cette dernière avant quelle ne se marie avec Trujillo.
Le 13 août 1927, Trujillo est nommé général de brigade, quatre jours avant la transformation de la Police nationale en Brigade nationale. « Sa constitution consécutive en tant quArmée nationale, conformément à la Loi numéro 928 du 17 mai 1928, compléta le chemin parcouru par Trujillo depuis le grade de Second Lieutenant jusquau grade de Général de Brigade et Commandant en chef de lArmée nationaletout cela en moins de dix ansen même temps quelle signalait son apparition comme figure notoire dans le panorama national » (Grassweller).

L'ère Trujillo (1930-1961)

Le coup d'État et l'arrivée au pouvoir (1930)

Rafael Leónidas Trujillo Molina et sa femme, le 7 mars 1934.

Le 23 février 1930, Une rébellion contre le président Horacio Vásquez commence à Santiago de los Caballeros, Trujillo en tant que chef d'État-major, reçoit l'ordre de les arrêter alors que les rebelles marchent sur Saint-Domingue (ville), mais au lieu de s'opposer à eux, il s'allie au contraire avec leur chef Rafael Estrella Ureña pour envoyer Vásquez en exil et s'emparer du pouvoir. Le 26 février 1930, Rafael Estrella Ureña devient provisoirement Président de la République dominicaine.
Ils procèdent alors à lorganisation des élections du 16 mai 1930, Trujillo se présente comme candidat à la présidence et Estrella à la vice-présidence. Cette candidature est appuyée par une bonne partie des élites du pays. Les autres candidats, Federico Velázquez à la présidence et Ángel Morales à la vice-présidence renoncent à aller jusqu'au bout, menacés de mort par les paramilitaires de La 42 dirigée par Miguel Ángel Paulin. La campagne électorale est conduite dans un climat de terreur. Les membres de la Commission électorale centrale sont forcés à démissionner le 7 mai pour être remplacés par des fidèles de Trujillo. Le 24 mai 1930, Rafael Leonidas Trujillo Molina est proclamé président de la République dominicaine avec 95% des voix.

Le premier mandat (1930-1938)

Trois semaines après son investiture, l'ouragan San Zenon frappe Saint Domingue et fait 3 000 morts. Avec les dons de la Croix-Rouge américaine, Trujillo reconstruit la ville. Le 16 août 1931, pour le premier anniversaire de son investiture, Trujillo fait du Parti dominicain le seul parti autorisé en République dominicaine.
En 1934, Trujillo est réélu face à une opposition totalement laminée. En 1936, il fait renommer Santo Domingo en Cuidad Trujillo ((es) : Cité Trujillo) et la province de San Cristóbal est rebaptisée Trujillo, enfin, le Pico Duarte, plus haute montagne de la Caraïbe nommée ainsi en l'honneur du Père de la patrie dominicaine Juan Pablo Duarte est rebaptisé Pico Trujillo. De nombreuses statues sont élevées en l'honneur du Jefe, les églises doivent proclamés Dios en cielo, Trujillo en tierra ((es) : Dieu au Ciel, Trujillo sur Terre).
Le 2 octobre 1937, Trujillo ordonne le Massacre des Haïtiens à l'ouest de la République dominicaine. De 15 000 à 30 000 Haïtiens travaillant dans les champs de cannes sont tués, pour beaucoup d'entre eux à la machette. La frontière entre Haïti et la République dominicaine est fermée et un filtrage des Haïtiens est instauré. Le régime tente de justifier cette atrocité arguant du prétexte de la peur des infiltrations, mais en réalité Trujillo croit que le gouvernement haïtien de Sténio Vincent coopère avec des dominicains en exil pour le renverser. Après des pressions des États-Unis, Trujillo accepte d'indemniser Haïti.
En 1938, lors de la Conférence d'Évian Trujillo propose aux Juifs fuyant les persécutions nazies de se réfugier en République dominicaine, il se déclare près à accueillir 100 000 d'entre eux. Entre 1940 et 1945, 5 000 visas dominicains furent émis à destination des Juifs persécutés, mais seul 645 d'entre eux vinrent réellement en République dominicaine. Trujillo les installa dans la ville de Sosua avec le soutien financier du Joint. Trujillo cherchait vraisemblablement à effacer l'image du Massacre du Persil dans l'opinion américaine et aussi à "blanchir" la race dominicaine[1].
Après la guerre civile espagnole, Trujillo permet aussi à des réfugiés et exilés de la guerre d'Espagne de sinstaller dans le pays, même sil maintient par ailleurs de bonnes relations avec Francisco Franco, pour lequel il éprouve de ladmiration et quil essaye dimiter dans son faste militariste.
En 1938, Trujillo renonce à se présenter à nouveau à l'élection présidentielle pour suivre en cela l'exemple des États-Unis d'Amérique. Le Parti dominicain choisit alors Jacinto Bienvenido Peynado son vice-président âgé de 71 ans comme candidat. L'élection du candidat trujilliste fut une formalité, mais Trujillo reste le Généralissisme et garde la réalité du pouvoir.

Les débuts d'une immense fortune

La présidence permet à Trujillo de convertir une bonne partie du pays en sa propriété. Il utilise la méthode dacquisition de propriétés, établissements et commerces lucratifs à des prix très bas, ce qui explique la peur des secteurs de la classe aisée et des investisseurs lorsque Trujillo sintéresse à lune de leurs propriétés. Trujillo avait de nombreuses possessions. En 1931, il sapproprie la production et la vente de sel, ce qui lui fait gagner environ 400 000 pesos nets par an, il ajoute rapidement le commerce de la viande qui lui rapporte plus de 500 000 pesos par an. Il interdit limportation de riz et permet seulement la consommation de riz créole que distribue une de ses nombreuses entreprises personnelles. Enfin, au cours de son règne, Trujillo va contrôler plus ou moins directement de nombreuses entreprises : Centrale laitière, Compagnie anonyme du tabac, Fabrique dominicaine de chaussures, Peintures dominicaines, Engins Porvenir, Ozama, Amistad, Monte Llano, Barahona, Consuelo, Quisqueya, Boca Chica, Las Pajas, Santa Fe, Catarey et Río Haina, Les assurances San Rafael, la fabrique de liqueurs La Altagracia, etc.

Les présidences de Jacinto Bienvenido Peynado et Manuel de Jesús Troncoso (1938-1942)

Traité Hull-Trujillo

Le 24 septembre 1940, Trujillo signe avec le Secrétaire d'État des États-Unis, Cordell Hull, un traité réglant le problème des dettes de la République dominicaine envers les États-Unis et mettant fin au contrôle de ces derniers sur les finances et les douanes dominicaines qu'ils administraient depuis 1905.

La participation à la Seconde Guerre Mondiale

Le régime de Trujillo était farouchement anticommuniste mais aussi lié aux États-Unis ce qui explique que durant la Seconde guerre mondiale, la République dominicaine participa à la coalition des Alliés contre les forces de l'Axe. Elle déclara la guerre au Japon et à l'Allemagne le 11 décembre 1941, mais ne participa pas aux opérations militaires. Cette participation formelle lui permit cependant d'assister à la Conférence de San Francisco et d'être ainsi un des membres fondateurs de l'Organisation des Nations unies.

Le second mandat (1942-1952)

En février 1942, Trujillo est de nouveau candidat à la présidence de la République dominicaine à la tête d'une coalition rassemblant le Parti dominicain et d'autres organisations récemment créées pour former le Parti trujilliste ((es) : Partido Trujillista). Le 16 mai 1942 il est réélu par plus de 600 000 Dominicains.

Crise sucrière de 1946

À la fin de 1945, la crise dans les usines sucrières s'aiguise à cause de l'inflation qui érode considérablement le pouvoir d'achat des ouvriers sucriers. Trujillo envoie l'armée pour réprimer les ouvriers en grève qui restaient chez eux pour protester. Les ouvriers capturés sont condamnés pour "vagabondages", enfermés et condamnés au travail forcé dans les usines sucrières.
En janvier 1946, un groupe de manifestants ouvriers appelé Fédération locale du travail ((es) : Federación Local del Trabajo) fondé par Mauricio Báez lance une grève qui dure plus d'une semaine. Le Régime finit par céder sur certaines de leurs revendications, mais les dirigeants du mouvement sont persécutés, assassinés ou bien contraints à l'exil.

L'élection de 1947

En mai 1947, la réélection de Trujillo se joue avec un multipartisme de façade. Face à Trujillo soutenu par le Parti dominicain, se présentent aussi Rafael ESpaillat soutenu par le Parti national travailliste ((es) : Partido Nacional Laborista) et Francisco Pratts Ramìrez soutenu par le Parti national démocratique ((es) : Partido Nacional democrático). Néanmoins, l'élection est gagnée par Trujillo avec plus de 90 % des voix.

Les présidences d'Héctor Bienvenido Trujillo et Joaquín Balaguer Ricardo (1952-1962)

Derniers voyages hors du pays

Le 5 décembre 1952 Trujillo voyage aux États-Unis, il reste trois mois et quinze jours, en tant quambassadeur plénipotentiaire devant l'Organisation des États américains (OEA).

La tournée européenne de 1954

Plus tard, le 2 juin 1954, à bord du transatlantique Antillas, il arrive au port de Vigo, en Galice, à partir duquel il initie un long voyage en Espagne et en Italie, il est reçu avec les honneurs militaires lors dune cérémonie menée par le ministre des Affaires Étrangères espagnol, Alberto Martín Artajo et dautres fonctionnaires du gouvernement espagnol. Le jour suivant, il voyage en train jusquà Madrid pour être reçu quelques heures plus tard dans la gare du Nord par Francisco Franco et son épouse Carmen Polo ainsi que quelques hauts fonctionnaires de son gouvernement, le corps diplomatique et des représentants de différents secteurs de la société espagnole. Depuis la gare, Trujillo et Franco se promènent dans les rues de Madrid, escortés par la Guardia Mora, jusquau lieu il est logé, le Palais de la Moncloa. Franco et Trujillo partagent des caractéristiques similaires dans leurs gouvernements respectifs et sont considérés comme des héros de lanticommunisme à cette époque.
Le 15 juin 1954, Trujillo arrive au port de Naples. De , il continue avec son cortège jusquau Vatican, il signe le concordat. Le 16 juin, après la signature du concordat, le pape Pie XII le reçoit en audience privée et lui accorde la Grande Croix de lOrdre de Pie IX. Pendant ce voyage, Trujillo est accompagné par Joaquin Balaguer, Anselmo Paulino Alvárez, Virgilio Trujillo et Atilano Vicini, entre autres.

Trujillo et François Duvalier

Le 22 décembre 1958, à la frontière dominico-haïtienne entre Jimaní et Mal Pase, Trujillo et le dictateur haïtien François Duvalier signent un accord de protection mutuelle. Laccord établit, entre autres choses, quaucun des deux gouvernements ne permettra dans son territoire respectif des activités subversives contre lun deux, ni que les exilés politiques réalisent de la propagande systématique incitant à lusage de la violence contre leurs États.

Les attentats contre Rómulo Betancourt et les sœurs Mirabal

Le Président vénézuélien Rómulo Betancourt s'était rapproché de démocrates dominicains, opposés à Trujillo. Ce dernier développe une haine de plus en plus féroce envers Betancourt et soutient à son tour des opposants à Betancourt. Ces complots sont dénoncés par le Venezuela devant l'Organisation des États américains (OEA), ce qui rend furieux Trujillo. Celui-ci ordonne à ses agents à l'étranger de tuer Betancourt. Le 24 juin 1960 une bombe explose dans la voiture du président vénézuelien, qui survit à ses blessures bien grièvement blessé. Les États membres de l'OEA décident alors de suspendre leurs relations économiques avec la République dominicaine. La même année, lassassinat des trois sœurs Mirabal, le 25 novembre 1960 dégrade encore plus l'image du régime, et les liens forts avec les États-Unis que Trujillo revendiquent deviennent de plus en plus un embarras pour ces derniers.

Les droits de lhomme

Ainsi que lexprime Jesús de Galíndez, exilé basque, professeur universitaire et victime de la dictature, le régime « nétait pas une des tyrannies du passé, à lancienne mode », mais il sappuyait apparemment sur le respect des accords internationaux et des lois nationales. Il ne faut pas sétonner que la République dominicaine ait participé à la Conférence de San Francisco, qui créa l'Organisation des Nations unies ; ni que le pays soit membre de l'Organisation des États américains. Pendant 31 ans, toutes les strates de l'État semblent fonctionner, sans aucun type de « violation ». Toute torture ou condamnation est effacée, niée. Une mort est transformée en accident ou ses supposés auteurs sont emprisonnés. Il nexiste pas le moindre respect pour la vie humaine. Ainsi, un Corse Natale Giraldi originaire de Nonza et militant du mouvement dit « du 14 juin » - il en sera le seul étranger - sera torturé pendant 24 jours dans la prison du dictateur jusqu'à ce que le général De Gaulle réclame la libération du jeune étudiant en architecture, pro-castriste, afin qu'il fasse son service militaire en France. Ce propriétaire terrien - il possède 700 hectares de canne à sucre au Nord de la Romana - est toujours actif au sein de la fondation du « 14 juin » dans la zona Coloniale vieille ville de Santo Domingo. La seule personne dont la tranquillité est assurée est Trujillo lui-même, et peut-être ceux qui partageaient son nom de famille. Plus de 30 000 personnes meurent sous sa gouvernance, et quelque autres 30 000 personnes sexilent pour ne pas subir le même sort.

La fin de lÈre Trujillo (1961-1962)

Quand John F. Kennedy arrive à la présidence des États-Unis le vendredi 20 janvier 1961, les plans de la CIA pour renverser Trujillo sont déjà en marche. Malgré tout, le président Kennedy envoie le diplomate Robert D. Murphy pour quil sentretienne avec Trujillo et le persuade de se retirer pacifiquement du pouvoir. Murphy arrive à Santo Domingo le samedi 15 avril 1961 : il est le quatrième et dernier émissaire du gouvernement des États-Unis, qui tente de convaincre le dictateur de se retirer dans les meilleures conditions, mais Trujillo reste ferme sur ses positions : « ¡A sólo me sacan en camilla » (« Moi, on ne me fera sortir que sur un brancard »).

Bien que le gouvernement des États-Unis ait initialement offert son aide en armes et logistique à ceux qui cherchent à mettre fin à la dictature, il décide finalement de retirer son offre, ce qui laisse le soin de la préparation du coup aux organisateurs seuls. Même si le plan mit fin à la vie de Trujillo, il entraîna la mort horriblement sadique de presque toutes les personnes impliquées, étant donné que, sans appui international, ils étaient seuls. Le mardi 30 mai 1961, sur la route de Santo Domingo à San Cristóbal, la voiture dans laquelle voyageait Trujillo est mitraillée dans une embuscade et reçoit plus de soixante impacts de balles de divers calibres, parmi lesquels sept terminent dans le corps du dictateur, provoquant sa mort. Son chauffeur, Zacarías de la Cruz, reçoit lui aussi plusieurs balles, mais il ne meurt pas, même si les « justiciers » (cest le terme utilisé, une fois la démocratie revenue, pour désigner les personnes ayant participé à lembuscade) le croient mort.

Les armes fournies par la CIA avaient été préalablement cachées par Simon Thomas Stocker, citoyen américain, contacté par la CIA sous le nom de code « Hector » et résidant en République dominicaine depuis 1942. Stocker refusa la rémunération de la CIA pour ses efforts, alléguant sa conviction morale. Les armes furent cachées pendant plus de deux mois, entraînant des risques pour lui et sa famille, dans une petite armoire située dans son étude, dans sa résidence privée, récemment démolie et située sur un terrain du côté sud de lAvenida Independencia, proche de lavenue principale Máximo Gómez.

Certains[Qui ?] estiment que les armes ne sont jamais arrivées dans les mains des organisateurs de lembuscade contre le dictateur en raison du supposé défaut dune autorisation explicite de la CIA pour leur livraison. Cette opinion a été implicitement contredite par des témoignages de vive voix, émis par Stocker à des personnes de confiance et familières, après les avoir cachées sur sa propriété pendant trois mois, daprès son récit dune véracité acceptable. Certains analystes mentionnent que lintérêt des États-Unis pour en finir avec Trujillo était au fait que la répression de son gouvernement pouvait mener à une révolution en République dominicaine, de la même façon que la Révolution cubaine avait été la conséquence de la répression du dictateur Fulgencio Batista.

Description de la mort de Trujillo

Ont participé à cette embuscade : Eric Pérez Herrand, Huáscar Tejeda, Luis Amiama Tió, Antonio Imbert Barrera, Antonio de la Maza, Roberto Pastoriza Neret, Pedro Livio Cedeño Herrera, Amado García Guerrero. Ils mirent au courant les autres personnes impliquées dans la conspiration que le dictateur sortirait cette nuit pour aller à San Cristóbal.

  • Le premier coup de feu contre Trujillo, qui fut un tir descopette, partit quand la voiture que conduisait Antonio Imbert et dans laquelle se trouvaient Antonio de la Maza, Salvador Estrella Sadhalá et le lieutenant Amado García Guerrero, se trouvait toujours derrière celle de Trujillo et non, comme le déclarent trois des participants (Antonio Imbert, Huáscar Tejeda et Salvador Estrella Sadhalá), quand les deux voitures étaient à la même hauteur. Ce premier coup blessa le dictateur. Dautres versions nous permettent de savoir que cest Antonio de la Maza qui tira ce premier coup de feu, depuis le siège avant droit du véhicule.
  • Zacarías suggéra à Trujillo de quitter le lieu, mais le dictateur insista pour quil sarrêtât pour se battre. Salvador Estrella Sadhalá, une fois prisonnier, déclara que Trujillo avait ordonné « Párate a pelear » (« Arrête-toi pour quon se batte »).
  • Depuis le véhicule, et pendant quils dépassaient la voiture du dictateur, les quatre agresseurs tirèrent avec un fusil M-1. Certaines balles purent toucher Trujillo. Une autre version nous permet de savoir que cest Amado García Guerrero qui tira, depuis le siège arrière droit.
  • Comme Trujillo avait ordonné que la voiture sarrête, le véhicule conduit par Imbert les dépassa, et il dut freiner et faire marche arrière. Alors, le véhicule des agresseurs tourna et bloqua le côté droit de lautoroute. Zacarías tenta de faire demi-tour en direction de Ciudad Trujillo, mais il ne le fit pas car Trujillo, blessé, opta pour descendre de la voiture et se battre, sans la protection de lintérieur du véhicule. Cette version concorde avec la déclaration de Huáscar Tejeda quil a faite lorsquil était en prison.
  • La seule arme quutilisa Trujillo fut un petit revolver 38 de poche.
  • Zacarías prévint Trujillo quil était lui aussi blessé. Comme son véhicule sétait déjà arrêté, il put tirer avec un fusil M-1. Le dictateur, une fois sorti de la voiture, put lui aussi tirer avec son revolver, avançant de trois ou quatre mètres depuis lavant de sa voiture, se déplaçant à découvert vers les véhicules qui lattaquaient. Soudain il sétala de tout son long, inerte, sans doute déjà mort.
  • Zacarías, seul, continua à tirer, dabord avec son M-1 puis avec une mitrailleuse Luger. Il vit quun des agresseurs savançait vers le corps de Trujillo, ce qui lui procura loccasion de lui tirer dessus et de le blesser. Sur les quatre personnes présentes dans la voiture des agresseurs, trois furent légèrement blessés : Amado García Guerrero, Salvador Estrella Sadhalá et Antonio Imbert.
  • Lorsque les tirs à lencontre de Zacarías se calmèrent, il sortit du véhicule pour chercher une mitrailleuse qui se trouvait sur le siège derrière. Cest à ce moment quil fut blessé par un tir à la tête et quil sévanouit. Il reçut au total neuf balles. Sil lon en croit sa version des faits, les attaquants ne le virent ni ne lachevèrent pas quand ils sapprochèrent du véhicule. Ceci est néanmoins improbable, il semblerait plutôt quil se soit caché dans une propriété qui longeait alors lautoroute.
  • Zacarías ne fait pas mention de larrivée du second véhicule, conduit par Huáscar Tejeda, et dans lequel se trouvaient Pedro Livrio Cedeño et Fifí Pastoriza. Il sétait sans doute évanoui avant, ce qui induit que la grave blessure subie par Pedro Livio fut sans doute faite par un de ses compagnons. Luis Savaldor Estrella, dans son livre, probablement à partir des faits racontés par Salvador Estrella Sadhalá cette nuit du 30 mai, avant de se cacher, affirme que le second véhicule arriva après la mort de Trujillo et que Salvador fut celui qui, par erreur, blessa Pedro Livio, qui fut en effet blessé par un pistolet 38. La seule personne qui possédait une telle arme cette nuit était Salvador.

Cette version des faits diffère sensiblement de celle racontée par Antonio Imbert à la presse, mais aussi de celle de Huáscar Tejeda, Pedro Livio Cedeño, Roberto Pastoriza et Salvador Estrella Sadhalá, lors de leur interrogatoire après avoir été détenus, et celle de leurs amis en prison, avant dêtre assassinés en novembre 1961. Plusieurs heures après la mort de Rafael Leónidas Trujillo Martínez, son fils Ramfis, qui se trouvait à Paris, loua un avion Air France et rentra à Santo Domingo aux premières heures du mercredi 31 mai, se positionnant immédiatement à la tête de la situation et se convertissant en lhomme fort de la situation. Le Service dintelligence militaire (SIM) et tous les services de sécurité de lÉtat réalisèrent de larges rafles dans tous les secteurs de la ville, à la recherche des participants.

Funérailles

Les obsèques ont lieu le 2 juin 1961 au Palais national. Des milliers de personnes de toutes les couches sociales défilent devant le cercueil qui contient les restes de Trujillo, « lhomme qui avait été semé dans leurs esprits comme leur protecteur et leur guide, lhomme qui apparemment pouvait tout faire, était mort ». Le cortège funèbre part du Palais national pour arriver à San Cristóbal, il reçoit une sépulture chrétienne dans léglise de sa ville natale, comme il lavait exprimé dans ses dernières volontés. Après la messe, tous les péchés du défunt lui sont pardonnés, le Dr. Joaquín Balaguer procède à la lecture dun panégyrique de circonstance. Dans une des parties du discours, il déclare : « Le moment est donc propice pour que nous jurions sur ces reliques armées que nous défendrons sa mémoire et que nous serons fidèles à ses consignes maintenant lunité. Cher Jefe, (cest ainsi que Trujillo était surnommé par la majorité de ses collaborateurs), à bientôt. Tes fils spirituels, vétérans des campagnes que tu as livrées pendant plus de trente ans, nous regarderons ton tombeau comme un symbole de droiture et nous nomettrons aucun moyen pour empêcher que séteigne la flamme que tu as allumée sur les autels de la République et dans lâme de tous les dominicains ». Une fois les cérémonies terminées, son cadavre est transféré au panthéon spécial quil avait fait construire quand il était en vie, sous le principal autel de léglise.

La transition vers la démocratie

Après la mort de Trujillo, le pays passa sous la direction du Dr. Joaquín Balaguer, Président constitutionnel de la République, et du général Rafael Leónidas Trujillo Martínez, « Ramfis », fils du dictateur et chef de lÉtat-Major conjoint des Forces armées. Afin dobserver la situation des droits de lhomme et la transition, une sous-commission de lOEA présidée par lambassadeur colombien Augusto Arango et composée de douze autres personnes arriva dans le pays le 7 juin 1961. Arango sentretint avec Ramfis, et aussitôt Balaguer annonça la tenue délections libres en 1962, et offrit des garanties aux exilés politiques pour quils puissent rentrer au pays pour y initier leurs activités politiques.

Après plusieurs tentatives de la part de la famille de Trujillo pour prendre le pouvoir et après le coup dÉtat réussi du commandant de lArmée de lair, le général Pedro Rodríguez Echavarria, qui renversa le nouveau président, Joaquín Balaguer, un Conseil d'État mit en marche un processus douverture politique, qui culmina par la célébration délections libres le 20 décembre 1962, les premières élections depuis 1930 au moins dans lesquelles les partis politiques jouèrent un rôle significatif. Les comices donnèrent la victoire au Parti révolutionnaire dominicain ; son candidat, Juan Bosch, obtint 59,5 % des suffrages.

Notes et références

Bibliographie

  • (en) Robert D. Crassweller, Trujillo : the life and times of a Caribbean dictator, New York, Macmillan, 1966, 468 p. (LCCN 66014689) 

Filmographie ayant trait à la biographie de Trujillo

Année Film Réalisateur Acteur
2006 La fiesta del chivo (*) Luis Llosa Tomas Milian
2001 In the Time of the Butterflies (TV) Mariano Barroso Edward James Olmos

Notes

Voir aussi


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Contenu soumis à la licence CC-BY-SA. Source : Article Rafael Leónidas Trujillo Molina de Wikipédia en français (auteurs)

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