Prosper d’Épinay

Prosper d’Épinay

Prosper d'Épinay

Prosper d’Épinay passe une partie de son enfance à Pamplemousses.

Prosper Caïez d’Épinay est né le 13 juillet 1836 à Pamplemousses et mort le 23 septembre 1914 à Saint-Cyr-sur-Loire.

Prosper d’Épinay est le fils du comte Adrien d'Épinay et le neveu de Prosper d'Épinay, célèbres hommes politiques mauriciens. Très jeune, il devient sculpteur et tout au long de son existence il va faire le portrait de nombreux princes en Europe. Mais, son œuvre ne se limite pas à cela. C’est aussi un caricaturiste et l’auteur de nombreuses sculptures très recherchées par tous les grands musées et les amateurs d’art très fortunés.

Sommaire

L’île Maurice (1836-1851)

Son père, avocat et issu d’une famille de grands planteurs est marié à Marguerite Le Breton de la Vieuville. Prosper d’Épinay est né à l'île Maurice le 13 juillet 1836. A peine âgé de trois ans, ses parents l’emmènent en France. Son père y décède au bout de quelques mois, au retour d’un voyage à Londres. Prosper retourne avec sa mère dans son île natale, où il fait des études dans la petite école de Pamplemousses, puis au pensionnat Snellgrove à Port-Louis. Très jeune, il manie l’ébauchoir et pétrit la terre glaise[1].

Paris, Rome Londres (1851-1864)

Le Marocain : le modèle pour cette aquarelle de Marià Fortuny est Prosper d’Épinay. La toile est réalisée par Fortuny dans l’atelier de son ami.

Prosper d’Épinay part faire ses études à Paris, en 1851. En France c’est un ancien préfet, Jacques Éloi Mallac, qui lui sert de tuteur légal.

Après un court retour en 1857, il doit quitter à nouveau l'île Maurice pour cette fois, aller étudier la sculpture à Paris dans l’atelier Dantan. Il est avec Jean-Baptiste Gustave Deloye (1838-1899), son seul élève, et de 1858 à 1860 se forme à la sculpture. Il réalise des portraits chargés qu’il modèle avec verve, mais à la différence de son maître il éprouve une attirance pour l’art du XVIIIe siècle, dont l’influence va se retrouver dans son œuvre.

Et à Rome il va être fasciné par la sculpture antique. Car Prosper d’Épinay décide d’aller à Rome, comme élève de son contemporain, Amici, auteur du tombeau du pape Grégoire XVI. Il est un pensionnaire de la Villa Médicis[2].

En Italie, il devient l’ami de deux célèbres artistes, Marià Fortuny (1838-1874), le peintre catalan et Henri Regnault (1843-1871), un artiste-peintre orientaliste français. Fortuny fait un portrait de d’Épinay qui nous présente un artiste jeune bien différent de son portrait âgé, que l’on voit sur ses rares biographies. Un autre portrait de d’Épinay datant de sa jeunesse nous montre un jeune artiste, qui n’a pas oublié ses origines aristocratiques et créoles.

Prosper est chargé, en 1873, par le musée de Madrid, de faire le buste en bronze du peintre Marià Fortuny[3].

D’Épinay partage sa vie entre Rome, Paris et Londres, où il s’installe. Il est très proche des milieux légitimistes parisiens et du comte de Chambord, mais aussi le prince Demidoff et des aristocrates anglais, souvent beaucoup plus libéraux.

Le succès

L’artère principale de Port Louis et la statue de William Stevenson. En arrière-plan the Government House.

En 1864, à Londres, Prosper d’Épinay obtient un certain succès avec l’une de ses nombreuses caricatures humoristiques, à cette époque toutes signées Nemo, intitulée Entente cordiale et représentant Napoléon III et Lord Palmerston bras dessus bras dessous et s’étudiant du coin de l’œil en politiciens retors. Des copies en bronze sont tirées à plusieurs milliers d’exemplaires par un éditeur londonien[4].

Le vrai succès arrive la même année avec la statue de L’Innocence que le duc de Luynes lui commande pour son château de Dampierre. En 1865, Prosper d’Épinay sculpte le buste de la princesse de Galles, la future reine du Royaume-Uni, Alexandra de Danemark, dont l’amitié lui ouvre les portes de la haute société britannique.

Une autre œuvre magistrale de Prosper en tant que sculpteur est sans doute la sculpture de son père qui est dévoilée au public mauricien le 26 septembre 1866 au jardin de la Compagnie à Port-Louis. En 1867, toujours son île natale, il fait la statue de William Stevenson, gouverneur de l'île Maurice. Il réalise aussi un grand nombre de statuettes et de portraits de types orientaux.

Il revient en Europe. A cette époque, le jeune sculpteur est membre de plusieurs associations connues, telles le Cercle de l’Union artistique de Paris, ainsi que le Circolo della Caccia de Rome, qu’il contribue activement à fonder toutes deux avec quelques amis, respectivement en 1860 et 1870.

En 1864, il s’établit à Rome et crée l’atelier de la via Sistina, qu’il va diriger de 1864 à 1912[5].

Son mariage (1869)

Prosper d’Épinay se marie le 25 novembre 1869, à Paris, avec Claire Mottet de La Fontaine (1844-1936), fille d’Adolphe Mottet de La Fontaine, capitaine au service du Nizam de l'Hyderâbâd Asaf Jah IV et d’ Élisabeth de Warren, une artiste-peintre. Claire est comme lui une quasi-orientale, aux yeux des Européens de son époque. Elle est née à Golconde le pays des contes[6].

Elle est la grande-tante de Denise des Méloizes, dite Denyse Renaud.

Pour la généalogie de sa femme, voir Famille Mottet

Sculpteur des familles princières

Statue de Jeanne d'Arc, cathédrale de Reims.

Parmi ses clients figurent des souverains, des nobles, ou de multiples célébrités du moment. Durant sa carrière, il exécute nombre de bustes, surtout de reines et de princesses, ce qui lui valut le surnom de 4'sculpteur de souveraines. En 1870, il réalise un buste de l’impératrice Élisabeth d’Autriche. Une lettre écrite à l'artiste par Henri Regnault fait louange du portrait : Mon brave d'Epinay, je commence par te faire compliment de ton buste de l'Impératrice d'Autriche: il a une belle allure, quelque chose de grand et de distingué qui me plaît énormément. C'est princier...

Le Salon de 1874 voit le couronnement de son talent et détermine l’orientation de son art. Son œuvre en marbre de Carrare d'une jeune femme nue, essayant de fermer une ceinture, Ceinture dorée connaît une grande notoriété en France, mais aussi à l’étranger.

Dans le même temps, Prosper d’Épinay fait plusieurs portraits de la gracieuse épouse du roi Édouard VII. La famille royale est admirative de son travail.

L’une des œuvres majeures exposées en Angleterre par Prosper d’Épinay, est son Le jeune Hannibal étranglant l’aigle Courtauld Institute of Art, Londres.. Le propriétaire du marbre, le duc de Buccleuch, John Montagu-Douglas-Scott remarque que lorsque le jury de la Royal Academy s’arrête devant cette magnifique production représentant le jeune Carthaginois en lutte avec l’aigle, il ne peut s’empêcher d’applaudir au chef-d’œuvre, incident paraît-il sans précédent dans l’histoire de l’Académie. Cette œuvre démontre chez l’artiste une prise de conscience des différences ethniques, attitude nouvelle dans l’art occidental.

En 1875, il fait un portrait chargé d'Ernest Meissonier, musée d'Orsay Musée d'Orsay..

Il réalise également les bustes de Napoléon III, d’Eugénie et du Prince impérial exposés au château de Compiègne. Il sculpte aussi un buste d'Eugène-Louis Napoléon, le Prince Impérial.

Il expose au Salon du cercle de l’Union artistique en 1898 le portrait du duc d’Aumale et ceux du marquis de Morès et de son épouse Medorah. À la mort de marquis de Morès il réalise un portrait de celui-ci et de sa femme pour orner leur tombe. L’exactitude du portrait est relevée par la critique : Enfin les beaux portraits de Morès et du duc d’Aumale par M. Prosper d’Épinay, qui s’y montre digne de ses deux modèles et de lui-même.

Quelques sculptures mauriciennes

En 1881, la mairie de Port-Louis lui commande Paul et Virginie. Une autre statue de Prosper d’Épinay représentant Paul et Virginie se trouve dans le jardin de l’hôtel de ville de Curepipe. Certaines de ses œuvres rappellent son île natale, comme par exemple Sylvain le piqueur et Cyclone de 1806, ou de superbes caricatures de la société mauricienne : La cour du roi Pétaud, et La Place d’armes.

Les honneurs

Prosper d’Épinay reçoit plusieurs décorations des mains de plusieurs souverains d’Europe en raison de son talent et de la haute appréciation que son œuvre suscite de par le monde. Il est commandeur du Royal Victorian Order, commandeur de l’ordre d’Isabelle la Catholique, officier de l’ordre du lion d'or de la maison de Nassau, chevalier de la Légion d’Honneur, chevalier de l’ordre des Saints-Maurice-et-Lazare, officier de l’ordre impérial de la Rose, de l’ordre de Saint-George, de l’Ordre de Saint-Grégoire-le-Grand... Il participe régulièrement aux séances de la Royal Academy de 1865 à 1881.

1900

Statue de Jeanne d'Arc, cathédrale de Reims.

Une photo de Prosper d’Épinay âgé doit dater du début du XXe siècle. C’est à cette époque qu’il réalise une splendide statue polychrome de Jeanne au sacre qui est exposée au Salon des Artistes Français en 1902. Elle est offerte par un mécène à la cathédrale de Reims en juillet 1909, à l'occasion des fêtes de la béatification de Jeanne d'Arc. Jeanne d’Arc au Sacre, au sein de la cathédrale de Reims, se trouve à l’endroit précis où Jeanne d’Arc se tint durant le Sacre de Charles VII.

En 1903, il sculpte le roi Édouard VII.

Lors de la grande Exposition Anglo-française de Londres, en 1908, il présente seulement son superbe buste en marbre de la Reine Alexandra de Danemark, réalisée en (1906), ainsi qu’une œuvre de M. de Saint Marceaux.

En 1909, Prosper d’Épinay figure même au Salon des Humoristes.

Prosper d’Épinay est aussi un collectionneur enthousiaste en particulier de José Villegas Cordero[7]. Il aide le jeune Alexandre Falguière. Il possède une bibliothèque considérable que le conseil de Curepipe décidera d’acquérir après sa mort et qui constituera le noyau de l’actuelle bibliothèque Carnegie. Il fournit des caricatures à Vanity Fair de novembre 1868 à 1914. C’est aussi un clubman élégant, un joueur effréné, un homme très poseur, mais très courtois [8]. Il se retrouve à la tête d’une polémique faite par quelques artistes, au sujet du buste de Benivieni, acheté comme authentique par le musée du Louvre et payé 50.000 francs[9].

Prosper d’Épinay est décédé le 23 septembre 1914,à La Chanterie, à Saint-Cyr-sur-Loire[10]. Il y était venu s'y reposer accompagné de sa fille, Marie d'Epinay. La propriété de La Chanterie appartenait alors à Florence Kidd, amie de Marie. Prosper d'Epinay est enterré au cimetière du Montparnasse à Paris. Sa tombe sera ornée du médaillon de celle qu'il appelait sa fille chérie.

Ses autres œuvres les plus admirées

Le printemps, œuvre de sa fille chérie, Marie d’Épinay, qui est artiste-peintre et contribue à certaines de ses oeuvres.

Les autres portraits

Prosper d’Épinay est l’auteur de 500 portraits parmi lesquels ceux de l’impératrice de Russie, la reine d’Italie, la princesse Marie de Bade, de la princesse A. de Broglie, de Madame Sarah Bernhardt, de Lady Walter Scott, de Mademoiselle Croizette, de Madame de Flavigny, de Madame Henry Say, de la baronne de Bosmelet, de Mademoiselle Madrazo (femme de Marià Fortuny), de Mademoiselle Legault, de sa fille Marie d’Épinay, de la princesse de Teano, de la marquise Laviggi, du général de Charrette, du peintre Sir Edwin Landseer, de James Gordon Bennett junior, de la duchesse Mario Grazioli, de la duchesse Eugène de Leuchtenberg (en Diane enchaînant l’amour), Lady Randolph Churchill, de Madame von Siemens, de Mademoiselle Marie Neyt, comtesse de Lutzow, Madame J. de Günsburg, comtesse d’Estrella...

Les origines très variées de ces personnages montrent que Prosper d’Épinay n’est en rien un sculpteur Mauricien ou Français, mais universel. Il travaille à Londres, Rome, Paris ou l’île Maurice. Il est l’ami, le mécène ou le client de peintres espagnols. Il vend ses œuvres régulièrement à des aristocrates allemands ou russes. Certes, il a la réputation d’être le sculpteur des familles princières, toutefois à cette époque-là les acheteurs de sculpture sont souvent des hommes ou des femmes très fortunés. Prosper d’Épinay a donné d’eux plus que la ressemblance physique le signalement moral. Ils ont tous un je ne sais quoi dans le regard, dans le port, dans un simple pli de la lèvre qui trahit leur naissance[12].

Prosper d’Épinay est un sculpteur du XIXe siècle, même s’il est mort en 1914. C’est l’année du début d’une guerre qui verra ses clients ou leurs descendants massacrés ou contraints à l’exil. Il ne connaîtra pas l’après-guerre cette époque où bien des sculpteurs œuvreront pour les régimes totalitaires.

Notes et références de l'article

  1. La Nouvelle revue, 1887/11-12 (A9,T49), p.832.
  2. La Nouvelle revue, 1887/11-12 (A9,T49), p.835.
  3. Louis Dussieux, Les Artistes français à l'étranger, 1876.
  4. La Nouvelle revue, 1887/11-12 (A9,T49), p.832.
  5. Dictionnaire national des contemporains: contenant les notices des membres de l'Institut de France, du gouvernement et du parlement français, de l'Académie de médecine... / sous la dir. de C.-E. Curinier, Paris : Office général d'éd. de librairie et d'impr., 1899-1919, p. 189.
  6. Les peintres de la femme, de comtesse de Alix Laincel, Alix Laincel - 1888 - Page 234
  7. Les orientalistes de l'école italienne par Caroline Juler (1996), p. 186.
  8. Mes souvenirs, 1844-1928 - Page 161 de Gustave Léon Schlumberger – 1934.
  9. Claude Vento, Les salons de Paris en 1889, p.23.
  10. Acte de décès de Prosper d'Epinay
  11. Dictionnaire national des contemporains: contenant les notices des membres de l'Institut de France, du gouvernement et du parlement français, de l'Académie de médecine... / sous la dir. de C.-E. Curinier, Paris : Office général d'éd. de librairie et d'impr., 1899-1919, p. 189.
  12. La Nouvelle revue, 1887/11-12 (A9,T49), p.833.

Bibliographie

  • Patricia Roux-Foujols, Prosper d’Épinay. Un sculpteur mauricien à la cour des princes, L'Amicale Ile Maurice-France, 1996 ISBN 9990336024
  • Allister Macmillan, Mauritius Illustrated Historical and Descriptive, Commercial and Industrial…, Originally published: London : W.H. & L. Collingridge, 1914.

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