- Histoire de la Virginie
-
Article principal : Virginie.
La Virginie est la première colonie anglaise d'Amérique du Nord. Fondée en 1584, elle disparut ensuite pendant une vingtaine d'années et ne prit son essor que lors d'une première vague d'immigration blanche, pendant la Première Révolution anglaise, puis noire lors de l'expansion des grandes plantations de tabac, après la Restauration anglaise en 1660.
Au XVIIIe siècle, elle est le berceau de nombreux dirigeants militaires lors de guerre de Sept Ans puis lors de la Guerre d'indépendance ainsi que le point de départ des premières tentatives de s'étendre vers l'Ouest, comme la Ohio Company.
Colonnie anglaise
Un début difficile
En 1584, le navigateur anglais Walter Raleigh fonde l’établissement de la Virginie (dont la première carte fut dressée par le mathématicien Thomas Harriot, qui l’accompagnait) sur l'île de Roanoke Island, à la pointe d'un archipel qui se trouve en réalité dans l'État actuel de Caroline du Nord. Il aurait également introduit le tabac dans la région, mais échoue et la colonie de Roanoke devient la Lost colony, reprise par les Amérindiens.
En 1607, une colonie anglaise fondée par la Virginia Company s’établit à Jamestown. C'est l'époque de John Smith et de Pocahontas. Parmi les fondateurs, des artisans de la cité de Londres qui ont préféré éviter les plantations en Irlande, mais qui sont vite pour la plupart décimés par le manque de ressources. Courant 1619, des bateaux néerlandais débarquent à Jamestown 19 travailleurs noirs[1], des engagés qui sont traités comme des esclaves[2]. George Yeardley, qui devient gouverneur de la Virginia Company la même année, veut développer le territoire. Il décide aussi de faire venir 150 femmes d'Europe et de créer une "Assemblée générale" élue de la colonie. Dans les mois qui suivent, un millier d'Européens arrivent, sur une dizaine de navires. Les amérindiens sont réduits en esclavage, pour cultiver le tabac, ce qui provoque de violents conflits avec eux en 1622. La population blanche ne parvenant pas à augmenter, avec seulement 1 277 personnes en 1624, le roi Jacques Ier, donne à la Virginie le statut envié de « colonie royale.
Augmentation démographique
Il faut attendre 1640 pour que la population atteigne 5 000 personnes. Elle triple ensuite dans les années 1640, et en 1650, la colonie compte déjà 15 000 habitants, dont seulement 300 noirs. Cet essor démographique bénéficie aussi à l'autre colonie importante du Nouveau Monde, sur fond de guerre civile en Angleterre : la Nouvelle-Angleterre a déjà environ 24 000 habitants en 1650[3]. Les arrivants sont pour une bonne partie des puritains protestants qui fuient l'intolérance religieuse et leur arrivée massive amène le gouverneur William Berkeley à prendre des mesures. « En 1643 il est défendu à tout ministre de prêcher ou d'enseigner en public » sans accord de l'Église anglicane et « tous les non-conformistes sont bannis de la colonie ». Et « quand les ministres arrivent de Boston arrivent munis de lettres de recommandation, le peuple a beau se montrer désireux de les entendre, ils reçoivent l'ordre de quitter le pays »[4]. Parallèlement, Berkeley ouvre sa demeure et sa bourse à tous les royalistes et amis du roi les « cavaliers », appartenant à la noblesse, à la bourgeoisie et au clergé.
Mais la "réunion du Parlement anglais en 1649 eut non seulement pour effet d'arrêter l'émigration en faisant renaître les espérances de liberté en Angleterre, mais encore de rappeler un certain nombre de colons en Europe. Pendant un quart de siècle le nombre des départs pour l'Angleterre parait avoir dépassé celui des arrivées", selon les historiens Jean Frédéric Astié et Édouard Laboulaye[4].
La Colonie connut une courte période de suffrage universel entre 1652 et 1660, après la destitution de son gouverneur emblématique William Berkeley, mais la dernière assemblée élue date de 1669. « Pendant les quelques années d'interruption de la monarchie en Angleterre, le souverain avait été le peuple de la Virginie; sa législation douce et bienfaisante, insouciante des théories et cédant sans s'en apercevoir aux impulsions qui sollicitaient le progrès général de l'humanité, avait commencé à détendre les liens du fanatisme religieux, à confirmer l'égalité des droits et à encourager l'industrie de la colonie en laissant le commerce libre de trafiquer avec le monde entier. La restauration-de la monarchie changea le cours des événements; le peuple de la Virginie se vit enlever le pouvoir qu'il ne devait pas recouvrer avant un siècle plus lard et l'aristocratie en formation trouva un allié puissant dans le gouvernement royal et dans ses agents », a ainsi raconté l'historien George Bancroft[5].
La croissance démographique n'est sera pas freinée pour autant. La Virginie a 15 000 habitants en 1650, 40 000 en 1670, puis 40 000 également en 1688, mais 95 000 dès 1715 après l'arrivée des protestants. De 190 000 en 1740, elle passe à 250 000 en 1750, dont 43% d'esclaves, soit 107 000. Les esclaves noirs n'étaient que 150 en 1640 et 300 en 1649[6] puis 2 000 en 1671 et 3 000 en 1680, et 6 000 en 1700. La jurisprudence Elizabeth Key encore incertaine dans les années 1650 est contrecarrée dans les années 1660 par un durcissement de la législation, à la restauration anglaise. L'historien Fernand Braudel souligne que « si les exportations de tabac de la Virginie et du Maryland sextuplent en trente ans, entre 1663 et 1699, c'est qu'il y a eu passage du travail des blancs à la main-d'œuvre noire »[7]. Certains s’enfuient et créent des communautés près de la frontière sud, vers la Caroline. Les esclaves sont 10 000 en 1704[8] leur nombre ayant triplé depuis 1680, en un peu plus de vingt ans.
L'arrivée des « cavaliers » marque profondément la colonie
En 1639 une loi déclare que les Noirs n'ont pas, au contraire des Blancs, l'obligation de porter des armes[9], tandis qu'en 1640, à l'arrivée du gouverneur William Berkeley, John Punch, un esclave en fuite est condamné à la servitude à vie. C'est la première trace écrite d'un statut d'esclave[9], qui est peu à peu défini par la loi : ainsi, en 1642, une nouvelle loi interdit de porter aide aux esclaves en fuite[9]. Le gouverneur William Berkeley accueille de nombreux immigrants dans les années 1640, pendant la guerre civile en Angleterre, puis tente en 1652 de résister à la flotte envoyée d'Angleterre par Olivier Cromwell, mais sans succès. Il perd son poste de gouverneur, qu'il retrouvera en 1660 à Restauration anglaise. La Virginie a accueilli les « Cavaliers », des gentilshommes restés fidèles au roi Charles Ier d'Angleterre, avec leurs serviteurs suite à la guerre entre les partisans d'Oliver Cromwell et ceux du roi. Ces « Cavaliers » marquèrent profondément la Virginie, par leurs grandes plantations de tabac.
Article détaillé : Green Spring plantation.C'est en 1660, à la restauration anglaise, que l'esclavage, déjà pratiqué, est officiellement légalisé[9]. La loi virginienne de 1662 sur l'esclavage stipule qu'une esclave ne peut donner naissance qu'à des esclaves, pour contrecarrer la Jurisprudence Elizabeth Key et empêcher le métissage, un texte écrit au même moment que le Code des Barbades.
La dynastie Stuart, avec Charles II, fils de Charles Ier, qui redonne à William Berkeley la gouvernance du territoire. Des planteurs venus de la Barbade, tels que le colonel Benjamin Berringer, ou John Yeamans, s'installent au sud en 1664 pour fonder la Caroline et au Nord pour fonder le New Jersey. Toujours en 1664, Charles II rachète aux Hollandais la région de la Nouvelle-Amsterdam, qui inclut l'ex-colonie suédoise de la rivière Delaware, et rebaptise la ville centrale New York en l'honneur de son frère le duc d'York Jacques Stuart. Avec le Maryland, les catholiques anglais possèdent désormais six colonies, ce qui leur permet de faire le pendant aux colonies protestantes puritaines de la Nouvelle-Angleterre et d'empêcher leur extension.
Suppression du suffrage universel en 1669 et révolte de Bacon en 1677
La population de Virginie reste turbulente et n'admet pas facilement la suppression du suffrage universel, le droit de vote étant réservé à partir de 1670 aux seuls chefs de familles et propriétaires[4]. La législation de l'esclavage est parallèlement durcie, pour tenter de souder la population blanche contre des dangers communs. En 1669, une loi indique que la mort d'une esclave pendant une punition corporelle n'est pas un délit[9], suivie par une autre, en 1670, dans le sillage de la volonté du gouverneur de souder la population blanche autour de lui, qui déclare que tout non-chrétien arrivant en Virgine par la mer est un esclave et que les Amérindiens et Africains n'ont pas le droit d'avoir des esclaves d'une autre race. Puis en 1671 une autre loi dit que les esclaves africains sont des éléments mobiliers, attachés aux propriétés immobilières[9].
En 1674 la création en France de la ferme du tabac, qui achète à très bas prix le tabac des planteurs pour le revendre très cher en métropole donne un avantage concurrentiel au tabac de Virginie, où de grandes plantations prennent leur essor et importent des esclaves via la Compagnie royale d'Afrique, ce qui attise les tensions avec les communautés riveraines d'Amérindiens. Le gouverneur William Berkeley vante à son ami le roi l'absence d'imprimerie et contestation dans sa colonie. Satisfait, Charles II distribue des terres aux soldats qui l'avaient soutenu après la mort d'Olivier Cromwell, suscitant la colère des anciens pionniers[10].
La révolte de Nathaniel Bacon, qui réunit autour de lui des blancs pauvres menacés par l'arrivée des esclaves, éclate en 1676. A l'origine un conflit avec la tribu des Andastes, elle servit de prétexte à une rébellion des petits colons blancs virginiens, menacés par le boom de l'esclavage et une chute des prix du tabac. Charles II la réprima par la force et édicta des lois interdisant toute critique, écrite ou orale.
L'arrivée de protestants à l'Ouest, d'esclaves sur la côte atlantique
Également à la fin des années 1670, mais dans une autre partie de la colonie, des protestants s'installent sur les terres pauvres de l'Ouest virginien. Une société virginienne complexe, conflictuelle, se construit, avec de riches planteurs, des « pauvres blancs » sans esclaves, des noirs affranchis, des métis (indiens, blancs et noirs) et des agriculteurs protestants, vers les Appalaches[11]. À partir de 1689, les protestants sont majoritaires chez les blancs et de nouveaux heurts se produisent avec les grands planteurs catholiques[11].
L'onde de choc de la Glorieuse Révolution
En 1688, en Angleterre, la monarchie est renversée par les parlementaires, qui font appel aux souverains hollandais William et Marie à l'occasion de la Glorieuse Révolution, ce qui entraîne des mouvements similaires aux colonies, où les protestants se sont proclamés maîtres du pays en lieu et place du propriétaire légitime dépossédé (1689). Les révolutionnaires conservèrent le pouvoir pendant trois ans jusqu'à l'arrivée d'un gouverneur royal, Lionel Copley, qui procéda à la réorganisation du pays (1692), comme le racontent Jean Frédéric Astié et Édouard Laboulaye, dans Histoire de la république des États-Unis depuis l'établissement des premières colonies jusqu'à l'élection du président Lincoln: (1620-1860)[12].
Les années 1700 et deux formes de peuplement antagonistes
Dans les années 1700, la population continue à diversifier ses origines: les esclaves sont importés en masse sur les plantations proches de l'océan, mais de nombreux colons irlandais et écossais gagnent dans la partie occidentale de la Virginie, qui se scindera plus tard. Plus pauvres, ils n'ont pas d'esclaves et s'installent dans le Piémont des Appalaches, en suivant la Great wagon road. Sur la côte, les grands planteurs de tabac contrôlent l'économie et la politique de la Virginie au XVIIe siècle, à l'aube de la guerre d'indépendance américaine. Parmi eux, Thomas Fairfax, petit-fils de Thomas Culpeper II, qui possède 6 millions d'acres, Thomas Jefferson et sa superbe plantation de Ponticello, George Washington et ses 350 esclaves le long de la rivière Potomac, ou Lord Granville, petit-fils de George de Carteret, l'un des plus riches propriétaires virginiens, président du conseil à Londres, et qui possède le tiers des terres de Caroline du Nord, selon Fernand Braudel (Civilisation matérielle, économie et capitalisme, page 507).
État américain
C'est l’une des Treize colonies britanniques en Amérique du Nord qui a fondé les États-Unis, en jouant un rôle moteur. Quatre des cinq premiers présidents des États-Unis venaient de Virginie (Washington, Madison, Monroe et Jefferson).
- En juin 1776, la déclaration d'indépendance de la Virginie, rédigée par Thomas Jefferson, pionnier de l'indépendance américaine, complète la constitution de Virginie. Cette déclaration sert de modèle à la déclaration d'indépendance des États-Unis du 4 juillet 1776. Jefferson deviendra le troisième président des États-Unis.
La Virginie est l'une des premières colonies à abolir l'esclavage, décision qui permet à ses dirigeants comme George Washington, planteur de tabac, de jouer un rôle majeur dans la guerre d'indépendance américaine.
- En 1784, la Virginie cède aux États-Unis les territoires au nord de l'Ohio pour le développement vers l'ouest, selon le système des townships.
- En 1787, le rédacteur de la Constitution américaine, James Madison, est également originaire de Virginie, et deviendra le quatrième président des États-Unis.
- La Virginie fut le premier État du Sud qui adopta la coutume de Thanksgiving.
- En 1862, lors de la guerre de Sécession, les comtés de l'Ouest de l’État, plus pauvres et dont les sympathies vont majoritairement au Nord font sécession. Ils deviennent la Virginie-Occidentale, situation confirmée par une décision de la Cour suprême en 1870.
Voir aussi
Articles connexes
- Théories du premier peuplement de l'Amérique.
- John Smith of Jamestown
- Virginia Company
- histoire de la Barbade
- Compagnie Royale d'Afrique
- Ferme du tabac
Liens externes
- (en) Virginia Historical Society short history of state, with teacher guide
- (en) WPA project: Indians in Virginia
- (en) WPA Project: History of Virginia
- (en) Virginia and the Civil War
- (en) Civil War timeline
Notes et références
- Christian Delacampagne, Histoire de l'esclavage. De l'Antiquité à nos jours, Paris, Le livre de poche, 2002 (ISBN 2253905933), p.144
- http://www.herodote.net/histoire/synthese.php?ID=49
- http://books.google.fr/books?id=wvNWhkSyBCcC&pg=PA440&dq=histoire+du+tabac+de+virginie&lr=&as_brr=3&cd=12#v=onepage&q=&f=false
- Histoire de la république des États-Unis depuis l'établissement des premières colonies jusqu'à l'élection du président Lincoln: (1620-1860) --, Paris, Grassat, 1865, p. 207
- George Bancroft, Histoire des Etats-Unis depuis la découverte du continent américain, Paris, Firmin Didot frères, 1862 (ISBN 2253905933), p.28
- http://pazzoni.jp.free.fr/histoire_de_l'esclavage3.htm
- Fernand Braudel, Civilisation matérielle, économie et capitalisme, page 494
- http://www.astrosurf.com/luxorion/esclavage5.htm
- Virginia Studies Timeline [PDF]
- http://books.google.fr/books?id=IX8rBdXthgQC&pg=PA82&dq=%22virginie%22++lord+granville&ei=3uvbSOiHIoy4yASJk-3rDg#PPA32,M1
- http://www.cineclubdecaen.com/analyse/cinemaethistoirenouveaumonde.htm
- http://books.google.fr/books?output=text&as_brr=3&id=pXqokHi4_60C&dq=John+Yeamans&q=Lionel+Copley#v=snippet&q=Lionel%20Copley&f=false
Wikimedia Foundation. 2010.