- Erik Satie
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Erik Satie Nom de naissance Alfred Erik Leslie Satie Naissance 17 mai 1866
Honfleur, FranceDécès 1er juillet 1925
Paris, FranceActivité principale Compositeur, pianiste
Style Musique moderne
Années d'activité 1892-1923 Alfred Eric[1] Leslie Satie, dit Erik Satie, né à Honfleur le 17 mai 1866 et mort à Paris le 1er juillet 1925, est un compositeur et pianiste français.
Sommaire
Biographie
Né de Jane Leslie Anton, d’origine écossaise et d’Alfred Satie, courtier maritime normand[2], élevé dans la religion anglicane[2], Erik Satie a passé sa jeunesse entre la Normandie et Paris. En 1870, la famille Satie quitte Honfleur pour Paris où le père a obtenu un poste de traducteur. Après la mort de leur mère en 1872, Erik et Conrad retournent à Honfleur chez leurs grands-parents paternels[2], avec qui ils embrasseront le catholicisme, tandis que leur sœur reste avec leur père à Paris. À la mort de leur grand-mère paternelle en 1878, retrouvée morte sur une plage de Honfleur[2], ils vont vivre à nouveau chez leur père à Paris. Ce dernier s’est remarié avec une femme de dix ans son aînée, Eugénie Barnetche[2], professeur de piano, qui enseigne à Erik les bases de l’instrument : « L’enfant prend aussitôt en haine et la musique et le conservatoire[2]. »
En 1879, il entre pourtant au Conservatoire de musique[2]. Jugé sans talent par ses professeurs, il est renvoyé après deux ans et demi de cours avant d’être réadmis, fin 1885. C’est durant cette période qu’il composera sa première pièce pour piano connue, Allegro (1884). Cependant, incapable de produire une meilleure impression sur ses professeurs, il décide de s’engager dans un régiment d’infanterie.
Après quelques semaines, constatant que l’armée n’est pas pour lui, il se fait réformer en exposant sa poitrine nue au froid de la nuit hivernale au point d’en attraper une congestion pulmonaire.
En 1887, il s’installe à Montmartre et compose ses quatre Ogives pour piano, dont les partitions ne font apparaître aucune barre de mesure, caractéristique qui sera réutilisée pour de nombreuses autres compositions. Il développera aussi très vite son propre style d’annotations sur la manière d’interpréter ses œuvres.
À cette époque commence une longue amitié avec plusieurs poètes, comme Stéphane Mallarmé, Paul Verlaine ou le poète romantique Patrice Contamine, avec qui il collaborera par la suite sur le ballet Uspud. Il fait éditer ses premières compositions par son père. En 1888, il compose ses trois Gymnopédies pour piano.
En 1890, il déménage au 6 rue Cortot, toujours à Montmartre, et fréquente le cabaret le Chat noir où il fait la connaissance de Claude Debussy. En 1891, les deux amis s’engagent dans l’« Ordre kabbalistique de la Rose-Croix » fondé par le « sâr » Joséphin Péladan et par Stanislas de Guaita. En qualité de maître de chapelle de cet ordre, il compose plusieurs œuvres dont les Sonneries de la Rose-Croix et Le Fils des Étoiles. Poursuivant son engouement mystique, il crée sa propre église : l’« Église métropolitaine d’art de Jésus-Conducteur » et lance des anathèmes contre les « malfaiteurs spéculant sur la corruption humaine ». Il en est à la fois le trésorier, le grand-prêtre, mais surtout le seul fidèle. Contraint à cette réalité, il l’abandonne.
Le 18 janvier 1893, Satie commence une relation amoureuse avec l’artiste peintre Suzanne Valadon. Bien qu’il l’ait demandée en mariage après leur première nuit, le mariage n’aura jamais lieu, mais Valadon s’installe rue Cortot dans une chambre près de Satie qui, dans sa passion pour elle, l’appelle sa « Biqui ». Il rédige des notes enflammées sur « tout son être, ses beaux yeux, ses mains douces et ses pieds minuscules » et compose à son intention ses Danses Gothiques tandis qu’elle réalise son portrait. Cinq mois plus tard, le 20 juin, leur rupture brisera Satie « avec une solitude glaciale remplissant la tête de vide et le cœur de tristesse ». On ne lui connaît aucune autre relation sentimentale sérieuse et avouée. Comme pour se punir lui-même, il compose Vexations, un thème construit à partir d’une mélodie courte, qu’il faut répéter 840 fois, selon ses notes. Des compositeurs comme John Cage ou Thomas Bloch jouent la pièce dans son intégralité durant presque 20 heures.
La même année, il fait la connaissance de Maurice Ravel, dont il écrira plus tard : « Ravel vient de refuser la Légion d’honneur, mais toute sa musique l’accepte ».
En 1895, il hérite une certaine somme d’argent qui lui permet de faire imprimer plus d’écrits et de changer de vêtements, abandonnant le style ecclésiastique pour le velours. Il achète un même costume en sept exemplaires, couleur moutarde, qu’il portera constamment. Il est surnommé à Paris le « Velvet Gentleman ». En 1896, tous ses moyens financiers ayant fondu, il doit s’installer dans un logement moins coûteux, d’abord dans une chambre minuscule rue Cortot, puis en 1897, à Arcueil.
Il rétablit le contact avec son frère Conrad et abandonne des idées religieuses auxquelles il ne s’intéressera plus avant les derniers mois de sa vie. Il surprend ses amis en s’inscrivant, en octobre 1905, à la Schola Cantorum de Vincent d’Indy pour y étudier le contrepoint classique avec Albert Roussel: "En 1905, je me suis mis à travailler avec d'Indy. J'étais las de me voir reprocher une ignorance que je croyais avoir, puisque les personnes compétentes la signalaient dans mes oeuvres. Trois ans après un rude labeur, j'obtins à la Schola Cantorum mon diplôme de contrepoint, paraphé de la main de mon excellent maître, lequel est bien le plus savant et le meilleur homme de ce monde."[3] C’est également à cette époque qu’il devient socialiste, est employé au Patronage laïc de la communauté d’Arcueil et change à nouveau d’apparence pour celle du « fonctionnaire bourgeois » avec chapeau melon et parapluie.
En 1915, il fait la connaissance de Jean Cocteau avec qui il commencera à travailler à partir de 1916. Tous deux seront les pères spirituels du Groupe des Six, créé en 1920, composé de Georges Auric, Louis Durey, Arthur Honegger, Darius Milhaud, Francis Poulenc et Germaine Tailleferre[4]. Il fait également la connaissance, par l’intermédiaire de Picasso, d’autres peintres cubistes, comme Georges Braque, avec qui il travaillera sur Le piège de Méduse, ainsi que sur des projets qui ne verront pas le jour.
En 1919, il est en contact avec Tristan Tzara qui lui fait connaître d’autres dadaïstes comme Francis Picabia, André Derain, Marcel Duchamp, Man Ray avec lequel ils fabriqueront son premier ready-made dès leur première rencontre. Au commencement de l’année 1922, il prend le parti de Tzara dans le différend entre Tzara et André Breton au sujet de la nature vraie de l’art d’avant-garde, tout en parvenant à maintenir des relations amicales dans les deux camps.
En 1923, il est l’inspirateur de l’École d'Arcueil, groupe informel composé de Henri Cliquet-Pleyel, Roger Désormière, Maxime Jacob et Henri Sauguet[4]. Ce groupe ne survivra pas au décès du « Maître d’Arcueil ».
Le 1er juillet 1925, Erik Satie meurt sur son lit d’hôpital. L’anecdote la plus connue concernant Satie est probablement celle relative à ce que ses amis trouvèrent lorsque, à sa mort, ils pénétrèrent dans son studio d’Arcueil, auquel Satie refusait l’accès à quiconque.
Ils y trouvèrent deux pianos complètement désaccordés et attachés ensemble, remplis de correspondances non ouvertes (auxquelles il avait toutefois en partie répondu) et derrière lesquels ont été retrouvées un certain nombre de partitions jusqu’alors inédites, comme celle de Geneviève de Brabant qu’il pensait avoir perdue. Dans un placard, une collection de parapluies et de faux-cols. Et dans l’armoire, des costumes de velours gris identiques au sempiternel costume que Satie portait toujours : il les avait fait faire d’avance et en prenait un nouveau lorsque le précédent commençait à être trop usé.
L’état du studio révélait la pauvreté dans laquelle avait vécu Satie : ne pouvant vivre de ses talents de musicien, il ne se plaignait toutefois pas ou très peu. Quant à demander une aide financière à ses proches, c’était chose encore plus rare et plus difficile pour lui. Il n’allait pratiquement jamais demander de l’aide à ses amis, lui qui était pourtant très entouré.
Quelques rares proches se doutaient de sa situation, mais ce n’est qu’à sa mort, en découvrant l’appartement, qu’ils prirent conscience de la misère dans laquelle il vivait, misère qu’il surnommait « la petite fille aux grands yeux verts ».
Il eut une certaine influence sur les musiciens du groupe des six Darius Milhaud, Georges Auric, Francis Poulenc, et dans une moindre mesure sur Stravinski[5], Maurice Ravel et Claude Debussy. John Cage revendique une filiation avec lui. Il fut pianiste accompagnateur notamment du chansonnier Vincent Hyspa au cabaret Le Chat noir.
Une plaque à son nom est visible sur sa maison à Montmartre, à Honfleur, ainsi qu’à Arcueil. On peut visiter sa maison d’enfance à Honfleur, transformée en musée. C’était aussi le cas du petit Musée-Placard d'Erik Satie au 6 rue Cortot, à Paris, jusqu’à sa fermeture au public en 2008.
Satie et l’humour
Satie est souvent qualifié d’ironique, ce qui fait considérer la relation complexe qui existait entre Satie lui-même et l’humour :
- Jeune, il se prenait très au sérieux. « Je suis venu au monde très jeune dans un temps très vieux ». Souvent, il est clair qu’il veut se libérer d’une partie de ses opinions antérieures : mais au lieu de les dénoncer, il utilisera plus que souvent l’humour (de sorte que son public ne sache pas ce qu’il pense vraiment). Ce genre de procédé se trouve de façon évidente dans ses Mémoires d’un amnésique, qui n’auraient sûrement trouvé aucun éditeur si elles n’avaient été écrites par Satie lui-même (en effet, Satie se moque de ses propres œuvres).
- À côté de ce procédé dissimulateur, Satie est forcé une bonne partie de sa vie de fonctionner comme artiste de cabaret (donc de produire des mélodies frivoles, de « rudes saloperies » selon ses dires, souvent sur des textes humoristiques). Quoique plus tard il dénonce toute cette production comme contre sa nature, souvent ce sont nettement ces mélodies qui sont les mieux connues (par exemple Je te veux, Tendrement, Allons y Chochotte, etc.).
- À côté de cela, il écrivait et composait des blagues en qualité de compositeur sérieux, par exemple Le Piège de Méduse (lequel, étant en partie autobiographique, n’est pas vraiment capable de donner une idée sérieuse de Satie).
- Mais l’humour de Satie est sûrement le plus clair dans les annotations écrites sur ses partitions, que seuls les interprètes voient : par exemple, on trouve « Vivache » comme variante de « Vivace » dans la Sonatine Bureaucratique (qui est une parodie de Clementi). De même, il compose un pastiche de la célèbre Marche funèbre de Frédéric Chopin (deuxième pièce des Embryons desséchés), où il écrit « citation de la célèbre MAZURKA de SCHUBERT ». (Alors que Franz Schubert n’écrivit aucune mazurka « célèbre », tandis que la mazurka était un des genres favoris de Chopin). On trouve dans sa production musicale de semblables piques à propos de Camille Saint-Saëns, Debussy, etc. En somme, il ne faut peut-être pas prendre Satie pour plus sérieux que lui-même ne prenait pour « sérieux » les autres (compositeurs) !
- Il passa huit jours en prison pour avoir rétorqué au critique musical Jean Poueigh qui avait peu apprécié son ballet réaliste parade: « Monsieur et cher ami, vous n'êtes qu'un cul, mais un cul sans musique »
Néanmoins, Satie a aussi écrit, en fin de vie, des œuvres d’apparence plus sérieuse comme Socrate, sur un texte de Platon traduit par Victor Cousin, ou encore six Nocturnes pour piano.
Hommage
- Un laboratoire de l’ENS de Cachan a été baptisé le SATIE en hommage à Erik Satie.
Œuvres
- Pour piano
- Ogives I, II, III, IV pour piano (1886)
- Trois sarabandes I, II, III (1887)
- Gymnopédies (en grec « fêtes des enfants nus ») I, II et III (1888)
- Gnossiennes I, II, III, IV, V, VI, VII (1890)
- Vexations (1893)
- Pièces froides - trois airs à fuir (1897)
- Pièces froides - trois danses de travers (1897)
- Prélude de la porte héroïque du ciel (1897)
- Jack in the Box (1899)
- Trois morceaux en forme de poire, pour piano à quatre mains (1903)
- Le Picadilly (1904)
- Prélude en tapisserie (1906)
- Aperçus désagréables (Pastorale, Choral, Fugue), pour piano à 4 mains (1908-1912)
- Deux rêveries nocturnes (1910)
- Quatre préludes flasques (pour un chien) (1912)
- Vieux Sequins et Vieilles Cuirasses (1913)
- Embryons desséchés (1913)
- Les Trois Valses distinguées du précieux dégoûté (1914)
- Avant-dernières Pensées (1915)
- Sonatine bureaucratique (1917)
- Nocturnes I, II, III, IV, V (1919)
- La Belle Excentrique (1920)
- Vocales
- Messe des pauvres (1895)
- Je te veux (valse chantée) (1902)
- La Statue de bronze
- Daphénéo
- Le Chapelier
- Socrate (1918)
- Les Ludions, cycle de 5 mélodies pour piano et voix sur des poèmes de Léon-Paul Fargue (Air du rat, Spleen, La grenouille américaine, Air du poète, Chanson du chat), éditées en 1926 chez Salabert.
- Pour orchestre
- Parade, musique pour le ballet de Léonide Massine et les Ballets russes
- Mercure (1925)
- Relâche, musique pour le ballet de Jean Börlin et les Ballets suédois (avec des séquences pour le film Entr’acte)
- Jack in the Box, ballet (1926)
- Écrits
- Écrits, éditions Champ libre, Paris, 1977
Enregistrements
- Intégrales de l'œuvre pour piano
- 1967-1971 : Aldo Ciccolini, EMI (devenue incomplète avec la découverte de nouvelles partitions)
- 1994 : Jean-Pierre Armengaud, avec Dominique Merlet pour les pièces à quatre mains, Mandala
- 1996 : Jean-Joël Barbier, avec Jean Wiener pour les pièces à quatre mains, Accord
- 2003 : Jean-Yves Thibaudet, Decca
- Intégrale de l’œuvre pour piano à quatre mains
- 1990 : Duo Campion/Vachon, Analekta
- Autres interprètes
- Francis Poulenc et Jacques Février, Jacques Loussier, Laurence Allix, Hakon Austbö, André Bernot, Chantal de Buchy, John Mac Cabe, France Clidat, Eveline Crochet, Peter Dickinson, Reinbert de Leeuw, Daniel Varsano, Alexandre Tharaud, Anne Queffélec, Stéphane Blet, Philippe Entremont,etc.
Bibliographie
- Anne Rey, Érik Satie, Éditions du Seuil - Collection Solfèges, no 35, 1974.
- Érik Satie, Écrits, éditions Champ Libre, 1977.
- Vincent Lajoinie, Érik Satie, édition L'Âge d'Homme Lausanne, 1985.
- Michel Faure, Debussy et Satie : Deux frères ennemis ou Les chassés-croisés du social, du psychique et du musical, in Écouter/Voir, no 59, novembre 1996.
- Michel Faure, L'Antithèse Schoenberg/Satie : Vienne la rouge et la France bleu-horizon in « Du néoclassicisme dans la France du premier XXe siècle », Paris, 1997.
- Ornella Volta, La banlieue d'Erik Satie, Macadam & Cie, Arcueil, 1999.
- Jean-Pierre Armengaud, Erik Satie, Fayard, Paris, 2009.
Liens externes
- www.erik-satie.com Site entièrement consacré au musicien, blog, chronologie, galerie, biographie, forum, etc.
- Gallica Iconographie
- Les maisons Erik Satie à Honfleur dans le Calvados
- Satie sur musicologie.org: biographie, catalogue complet et chronologique des œuvres, bibliographie et documents contemporains.
Partitions gratuites
- WIMA Partitions diverses, pour piano surtout.
- e-Partitions Musique pour orgue.
- IMSLP Nombreuses partitions.
Notes
- Ornella Volta, Erik Satie, Paris, Hazan, coll. « Hazan Lumières », 1997, 197 p. (ISBN 2 85025 564 5), p. 18
- Rey Anne, Satie, seconde édition, Paris, Le seuil, 1995, pp. 9-10
- ISBN 2213606749), p. 145 Lettre à Conrad Satie, le 17 janvier 1911 dans Correspondance presque complète, Paris, Fayard, (
- Michèle Reverdy et Jean et brigitte Massin, Histoire de la musique occidentale, Paris, Fayard, coll. « Les indispensables de la musique », 1985, 1312 p. (ISBN 35.7804.4)
- Roland de Candé, Dictionnaire des musiciens, Microcosme éd. du seuil, 1964 p.218
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