- Combats en Indochine (1945)
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Les Combats en Indochine de 1945 virent la prise de contrôle, pour quelques mois, de l'Indochine française par l'Empire du Japon. Le coup de force Japonais fut suivi de brèves périodes d'indépendances du Việt Nam, du Laos et du Cambodge. Des actions de guérilla s'ensuivirent, mais la reddition du Japon survint avant qu'une riposte de grande ampleur ne puisse être mise en œuvre par la France. Le résultat fut une situation chaotique au cours de laquelle le Việt Minh, durant l'épisode dit de la révolution d'Août, prit momentanément le contrôle d'une partie du territoire vietnamien.
Sommaire
Contexte
L'invasion du territoire indochinois en 1940, a permis à l'Empire du Japon de stationner ses troupes à sa guise Tonkin, tout en reconnaissant l'intégrité territoriale de la colonie française. L'administration coloniale de l'amiral Jean Decoux, mise en place par le gouvernement de Vichy est toujours en fonction en 1945, bien que le régime de Philippe Pétain ait, dans les faits, cessé d'exister en Europe.
Dès la fin 1943, le Comité français de la Libération nationale envisage la formation d'un corps expéditionnaire destiné à participer aux combats contre le Japon, condition du rétablissement de la souveraineté française en Indochine[3]. Des réseaux de résistance française se mettent en place en Indochine et renseignent les Alliés. Au début 1944, le général Mordant, chef de l'armée française en Indochine, devient secrètement le contact sur place du Comité français de la Libération nationale puis, en septembre, du Gouvernement provisoire de la République française (GPRF) : le gouverneur général Decoux, mis au courant de la situation en octobre, propose sa démission, mais se voit ordonner par Paris de demeurer en place et de couvrir Mordant en le prenant comme adjoint en qualité d'Inspecteur général. Decoux est néanmoins tenu en défiance par Mordant, seul à être en contact direct avec la métropole[4],[5]. Le GPRF prévoit la création des Forces Expéditionnaires Françaises en Extrême Orient (FEFEO), censées être fortes de 60 000 hommes : le général Blaizot, nommé commandant des FEFEO, est envoyé à Kandy auprès de Lord Mountbatten mais ne dispose au final que de moins d'un millier d'hommes. Le 28 février 1945, le GPRF crée un Comité de l'Indochine, chargé de superviser la situation[6].
La situation militaire du Japon, dans le cadre de la guerre en Asie et dans le Pacifique, devient entretemps particulièrement critique. Les États-Unis bombardent à partir de 1944 les positions japonaises en Indochine. Le Royaume-Uni commence à la fin de l'année à envoyer des commandos dans les montagnes du nord, avec le soutien de soldats du GPRF. Le 12 janvier 1945, l'aviation américaine débute un bombardement sur Saïgon, qui est désormais à la portée de ses avions. Une mauvaise récolte de riz, associée à la pénurie alimentaire et aux dégâts causés par la guerre, entraîne au Tonkin une famine de grande ampleur, qui cause plusieurs dizaines de milliers de victimes[7]. Les Japonais, craignant que les Alliés ne pénètrent en force sur le territoire de l'Indochine pour en faire une voie de passage pour leurs troupes, décident d'en prendre le contrôle.
Prise de contrôle de l'Indochine par le Japon
Au début de mars 1945, les troupes japonaises sont déployées autour des garnisons françaises. Le 9 mars 1945 au soir, l'amiral Jean Decoux, gouverneur général de l'Indochine, reçoit l'ambassadeur japonais Matsumoto pour une réunion de routine. A 19 heures, l'ambassadeur présente un ultimatum exigeant que les troupes françaises passent immédiatement sous commandement japonais. Decoux essaie de gagner du temps, mais les premiers coups de feu éclatent dans Saïgon. A 21h, Decoux et ses adjoints sont mis aux arrêts. Entre 20h et 21h, les garnisons françaises sont attaquées par surprise par l'armée impériale japonaise. Plusieurs officiers administrateurs et officiers français sont exécutés : à Lạng Sơn, le colonel Robert et le résident Auphelle, invités à dîner ce soir-là par leurs homologues japonais, sont arrêtés par surprise, et décapités à coup de sabre, de même que le général Lemonnier qui refusait de donner l'ordre de capituler. A Thakkek, l'administrateur Colin et l'inspecteur Grethen sont également tués. A Dong Dan, 400 prisonniers sont massacrés[8].
Sur les 40 000 Français métropolitains dans la région dont 18 000 militaires, plus de 3 000 sont tués en moins de 48 heures. L'administration coloniale française est détruite dans les faits. Les postes militaires français à travers toute l'Indochine (Annam, Tonkin, Cochinchine, Laos, Cambodge) sont touchés. Les troupes japonaises prennent notamment les citadelles d'Hanoï et de Lạng Sơn et y massacrent les Européens et les troupes annamites, malgré les promesses faites en cas de reddition. Des camps de prisonniers sont créés pour y parquer civils et militaires. A Hanoï, la résistance est menée pendant plusieurs heures sous le commandement des généraux Mordant et Aymé, mais ceux-ci doivent finalement capituler[9].
Au Tonkin, le général Georges Sabattier, méfiant, a transféré peu avant le coup de force son poste de commandement hors d'Hanoï, tout en mettant en garde son subordonné le général Marcel Alessandri. Les deux généraux dirigent une résistance d'environ 6000 hommes. Une partie des troupes françaises est maîtrisée, tandis que d'autres prennent le maquis, l'armée japonaise mettant à prix les soldats Français échappés, pour 1000 piastres chacun[2].
Les six mois de captivité se solderont par plus de 1 500 disparus. Cette opération désorganise complètement l'administration coloniale. Tout en mettant en place sa propre administration militaire, le Japon décrète la fin de la colonisation française, encourageant la formation de régimes nominalement indépendants, dans le cadre de sa sphère de co-prospérité de la grande Asie orientale[10]. Bảo Đại, empereur d'Annam, obtempère et collabore avec les Japonais, proclamant l'indépendance de l'Annam et du Tonkin sous le nom d'Empire du Việt Nam. L'administration française est cependant maintenue par les Japonais en Cochinchine, dont le rattachement au Việt Nam n'est proclamé qu'en août[11]. Au Protectorat du Cambodge, le roi Norodom Sihanouk, pressé par les Japonais, proclame également l'indépendance du pays, mais s'abstient de trop s'engager dans la collaboration. Le leader indépendantiste Son Ngoc Thanh, exilé au Japon depuis 1942 et considéré par les Japonais comme un allié plus sûr que Sihanouk, revient au Cambodge pour assumer en mai le ministère des affaires étrangères . A Luang Prabang, le roi Sisavang Vong refuse pour sa part de coopérer et de proclamer l'unification du Protectorat du Laos en tant qu'État indépendant : le 16 mars, il invite le peuple Lao à aider les Français et à combattre les Japonais. Le 4 avril, les Japonais forcent le roi à décréter l'indépendance du Laos, le souverain se considérant alors comme prisonnier[12], et se trouve en conflit avec son premier ministre indépendantiste, le prince Phetsarath Rattanavongsa.
Résistance après le coup de force
Les généraux Sabattier et Alessandri se dirigent avec leurs troupes vers le pays Thaï, où Sabattier rencontre, dans la cuvette de Ðiện Biên Phủ, François de Langlade, représentant du général de Gaulle. Langlade confie à Sabattier tous les pouvoirs civils et militaires, et ce dernier choisit de déléguer son commandement militaire à Alessandri, pour se concentrer sur les tâches politiques. Mais les Japonais, décidés à nettoyer le pays de toute présence française, passent bientôt à l'attaque. Un repli vers le Yunnan est entamé[13]. Sabattier lui-même, ayant installé son P.C. au Laos dans la Province de Phongsaly, tient ses positions durant trois semaines avant de passer en Chine. Les groupes de militaires français, divisés en plusieurs colonnes, connaissent des fortunes diverses : la « colonne Caponi » succombe le 27 mars, tandis que les groupements Prugnat et Séguin se replient en Chine début avril[14].
La « Colonne Alessandri » résiste durant environ deux mois avant de se replier[14] : comptant environ 5 700 hommes, dont 3 200 vietnamiens[15],[16], elle est exfiltrée sur le territoire de la République de Chine, dans le but de revenir ensuite en Indochine pour y mener des actions de résistance. Les hommes de la colonne doivent affronter, outre le climat et les désertions de tirailleurs indigènes, le harcèlement des troupes japonaises, auxquels s'ajoute parfois l'hostilité des populations locales[13]. Les troupes du commandant Reul, composées presque exclusivement d'autochtones, subissent l'assaut d'hommes du Việt Minh et doivent abandonner le terrain, rejoignant le repli général sur le territoire chinois[14].
En Chine, l'accueil des Alliés est très décevant : ni la République de Chine ni les États-Unis, hostiles au colonialisme français, ne sont disposés à venir en aide aux Français. Dans ses mémoires, Claire Lee Chennault écrit : « Les ordres du GQG précisaient que les unités françaises ne devaient recevoir ni armes ni munitions. J'ai appliqué les ordres à la lettre, sans pouvoir me faire à l'idée que je laissais les Français se faire massacrer dans la jungle, tandis qu'on m'obligeait à ignorer officiellement leur sort » [I carried out my orders to the letter, but did not relish the idea of leaving Frenchmen to be slaughtered in the jungle while I was forced officially to ignore their plight.][17]. La situation en Indochine ne provoque pas de grandes réactions dans la métropole française, encore occupée à se relever de la guerre en Europe. Le 20 avril, ce qui reste de l'armée française d'Indochine est rattaché au théâtre Chine : le général Sabattier est nommé chef de la mission militaire de Chongqing[18].
Bien que les Japonais se soient posés en libérateurs et leur aient initialement manifesté leur appui, le Việt Minh n'envisage pas de coopérer avec eux et se prépare à entrer en résistance dans ses territoires du nord du pays, sous la direction de Hô Chi Minh et Võ Nguyên Giáp. Le Việt Minh prend progressivement le contrôle de différentes localités rurales du pays en y établissant des « comités révolutionnaires populaires », sans rencontrer beaucoup d'opposition de la part des Japonais, dont les troupes sont surtout présentes dans les villes et sur les voies de communication[19]. Hô Chi Minh désire éviter les actions spectaculaires, et se limite initialement à tendre quelques embuscades. En juillet, le Việt Minh prend d'assaut le poste japonais de Tam Doa[20].
Dans les montagnes du nord, la Force 136, présente depuis la fin 1944, reçoit le renfort de nouveaux commandos français et britanniques[21]. Ils sont rejoints par les soldats français ayant fui le coup de force de mars, et mènent des actions de guérilla. La résistance française, ne bénéficie cependant pas d'ordres précis de la part du Gouvernement provisoire de la République française ni de moyens d'envergure, les intentions des Alliés étant imprécises et contradictoires. Les commandos ne sont pas en mesure de mener une résistance armée très conséquente et, recevant dès avril l'ordre de ne pas se livrer à des « manifestations provocatrices » en l'attente d'une offensive alliée, doivent limiter leurs actions de guérilla[2]. Les Britanniques apportent également leur soutien au Việt Minh. Les Japonais n'ayant qu'un contrôle imparfait du Laos du fait de la mauvaise volonté du Roi, les maquis français peuvent s'y déployer avec plus d'aisance, et reçoivent l'aide d'une partie de la population laotienne. Le prince Boun Oum mène de son côté une guérilla anti-japonaise[22]. Les groupes de guérilla franco-lao mènent la résistance antijaponaise depuis la jungle mais ne disposent que de quelques centaines d'hommes, répartis par groupes de dix ou quinze, mal armés et sans grandes réserves de munitions[23].
De leur côté, les Japonais emploient des troupes supplétives de nationalistes annamites, organisées en « Milices patriotiques ». Par une décision du 26 mai, la France met officiellement sur pied le Corps expéditionnaire français en Extrême-Orient, pour se préparer à l'envoyer combattre les Japonais : de Gaulle supervise personnellement et dans le détail la création du corps expéditionnaire, placé sous le commandement de Philippe Leclerc de Hautecloque[24]. A la conférence de Potsdam, sans consulter ni avertir les Français, les Alliés décident que la libération de l'Indochine, ainsi que le maintien de l'ordre et le désarmement des troupes japonaises, sera assurée au sud par les troupes du Royaume-Uni et au nord par celles de la République de Chine[25].
La famine, atroce et accompagnée d'épidémies, continue de sévir sur le territoire vietnamien, étant encore aggravée par les réquisitions des Japonais. Dépourvu de moyens pour faire face à la situation et pressentant l'effondrement du Japon, le premier ministre Trần Trọng Kim présente le 8 août sa démission à Bảo Đại[26]. Au Cambodge, Son Ngoc Thanh s'auto-proclame premier ministre dans la nuit du 8 au 9 août, avec le soutien des Japonais[27]. Après les bombardements atomiques de Hiroshima et Nagasaki, Hô Chi Minh décrète le 13 août un soulèvement général[28] dans le but de désarmer les Japonais et de prendre le contrôle de la situation avant l'intervention des Alliés : dans les jours suivants, les militants du Việt Minh s'emparent de divers points d'administration à travers le territoire vietnamien.
Reddition japonaise
L'annonce de la capitulation du Japon par Hirohito prend au dépourvu le gouvernement français. Le 15 août, de Gaulle écarte Sabattier et nomme Thierry d'Argenlieu haut-commissaire pour l'Indochine, avec pour mission de « rétablir la souveraineté française sur l'Union indochinoise »[29].
Le 19 août, quelques jours après l'annonce de la capitulation, les troupes japonaises présentent leur reddition à Hô Chi Minh, dont les forces armées prennent le contrôle d'Hanoi, déclenchant l'épisode dit de la révolution d'Août. Le 22 août, Bảo Đại propose au Viet Minh de former un nouveau gouvernement avec eux mais, sommé d'abdiquer[30], il obtempère le 25 et remet les symboles de sa souveraineté, le sceau et l'épée d'or, à une délégation Việt Minh. Il est conservé par les indépendantistes comme « conseiller politique »[31].
Des accrochages ont lieu en Annam entre le Viet Minh et les Japonais mais, dans l'ensemble du pays, les soldats nippons se montrent neutres, voire bienveillants envers les indépendantistes vietnamiens, préférant laisser l'Indochine à des asiatiques plutôt qu'aux anciens colonisateurs blancs[32]. La principale exception se déroule dans la Province de Thái Nguyên, où les troupes japonaises refusent de se rendre : le Việt Minh leur livre bataille entre le 20 et le 25 août. Le 26, la garnison de Thái Nguyên cesse le combat, permettant au Việt Minh de faire main basse sur ses armes et son matériel[33]. Le 22 août, le général Leclerc arrive à Kandy pour préparer l'entrée de ses troupes en Indochine : sur place, il apprend de la bouche de Mountbatten que Britanniques et Chinois vont pénétrer les premiers en Indochine française. Leclerc, bloqué sur place, alerte de Gaulle pour qu'il fasse pression sur Harry Truman, mais les États-Unis ne souhaitent pas mécontenter Tchang Kaï-chek. Le même jour, Pierre Messmer et Jean Cédile sont parachutés en Indochine pour y représenter le GPRF : Messmer est arrêté par le Việt Minh, échappant de peu à la mort, et Cédile par les Japonais[29]. Jean Sainteny est désigné par le GPRF pour remplacer Messmer, mais il se trouve encore à Kunming en Chine et ne reçoit pas d'ordre précis de la part du gouvernement français, pris de court par la capitulation japonaise. Transporté par un avion américain, il parvient à débarquer à Hanoï, lui aussi le 22 août, mais est rapidement isolé par les Japonais, qui pactisent avec les indépendantistes[34]. Le 2 septembre, Hô Chi Minh proclame l'indépendance du pays au nom du gouvernement provisoire de la République démocratique du Viêt Nam, dénonçant tant le colonialisme français que l'occupation japonaise[35].
Conséquences
Les troupes du Royaume-Uni, au sud, et de la République de Chine, au nord, investissent ensuite le pays. En la mi-septembre, les troupes de la 20e division de l'Armée des Indes britanniques marchent sur Saïgon. Elles sont suivies par les hommes du 5e régiment d'infanterie coloniale, premiers soldats français à avoir pu débarquer. Les Britanniques rentrent les premiers et les Français ne reçoivent l'autorisation de réinvestir la ville qu'à la fin septembre[36]. Les soldats japonais, restés sur place sans ordres, sont un temps utilisés par les Chinois pour aider au maintien de l'ordre au Tonkin et demeurent l'arme au pied dans le reste du pays, quand ils ne favorisent pas ouvertement les indépendantistes. Les troupes chinoises du général Siao Wen se livrent en outre à des pillages au Tonkin, déjà durement éprouvé par la famine de 1945[37]. Sainteny appelle en renfort la mission française en Chine, mais les 5000 hommes commandés par Marcel Alessandri sont empêchés par les Chinois de pénétrer en Indochine[38].
Des violences, menées par le Việt Minh et par des bandes s'en réclamant, ont lieu contre les européens, les vietnamiens pro-français et les métis eurasiens. Le général britannique Douglas David Gracey et Jean Cédile tentent de couper court au désordre : Gracey ordonne un couvre-feu et le désarmement des milices vietnamiennes. Dans la nuit du 22 au 23 septembre, Jean Cédile fait reprendre manu militari le contrôle des bâtiments administratifs de Saïgon aux comités Việt Minh, qui doivent prendre la fuite. Le 24 septembre, le Việt Minh réagit en décrétant une grève générale. Des violences anti-européennes éclatent dans Saïgon, auxquelles se mêlent des bandes comme la secte des Binh Xuyen. Des cadavres mutilés sont retrouvés dans les rues. Dans la nuit du 24 au 25 septembre, des bandes fanatisées - que la rumeur publique décrit comme Việt Minh ou Binh Xuyen - prennent d'assaut un quartier européen, et notamment la Cité Hérault, où logent des fonctionnaires coloniaux. Plusieurs centaines de résidents de la Cité, hommes, femmes et enfants, sont massacrés dans des conditions abominables, et des centaines sont « enlevés », la plupart disparaissant à jamais : les nombre de victimes se monte à 400 environ[39],[40]. Une intervention commando du Corps Léger d'Intervention permet de récupérer quelques dizaines d'otages[41].Le lieutenant-colonel américain Dewey, neveu du gouverneur de New York Thomas Edmund Dewey, est assassiné, ce qui contribue à choquer les milieux politiques anglo-saxons. Les effectifs des troupes anglo-indiennes présentes sur place sont renforcés. Les Japonais, que Gracey a menacés de représailles s'ils persistaient dans l'inaction, reprennent eux-mêmes leurs patrouilles. Une relative accalmie revient, tandis que les services administratifs, comprenant une police française, se remettent peu à peu à fonctionner tant bien que mal[42]. Les accrochages avec les indépendantistes se poursuivent jusqu'au 2 octobre, quand Gracey parvient à obtenir une trêve[43].
Le gros des troupes du Corps expéditionnaire français en Extrême-Orient n'a la possibilité de débarquer que début octobre - Leclerc lui-même débarque le 5 octobre - et participe au désarmement des Japonais[43],[41].
L'administration coloniale de l'Indochine française a été totalement désorganisée par l'invasion japonaise. Le 1er octobre, l'amiral Jean Decoux, demeuré fidèle au gouvernement de Vichy et qui avait composé avec les Japonais jusqu'en 1945, est rapatrié en France pour y être jugé. Des fonctionnaires et militaires français, parfois tout juste libérés des camps japonais, sont accusés de collaboration et soumis à une épuration. Certains sont radiés[44],[45].
Les troupes françaises ne reprennent que progressivement le contrôle du pays. La France, pour réinvestir son propre territoire, doit négocier laborieusement pour obtenir le départ des troupes d'occupation chinoises, qui menacent d'annexer le Tonkin. Tchang Kaï-chek, en contrepartie du départ de ses troupes au début 1946, obtient par un accord franco-chinois le renoncement de la France à ses concessions territoriales et commerciales en Chine. Les troupes commandées par Jacques Massu pénètrent dans Hanoï en mars 1946.
Au Laos, les groupes Việt Minh tentent de susciter une insurrection et se heurtent, parfois violemment, aux maquis franco-lao tous justes sortis de la jungle, et renforcés par des parachutages de 70 combattants environ[46]. En octobre 1945, le gouvernement Lao Issara du prince Phetsarath renverse le roi, pour tenter d'obtenir par la force l'indépendance du pays. Il doit cependant prendre la fuite en mai 1946, devant l'avance des troupes françaises; le roi est remis sur le trône.
Au Cambodge, Son Ngoc Thanh est personnellement arrêté par Leclerc le 15 octobre. Marcel Alessandri prend ses fonctions de commissaire de France à Phnom Penh[47]. Norodom Sihanouk, demeuré à la tête de l'État, doit manoeuvrer pour négocier avec les Français et gérer le processus d'indépendance du Cambodge, tout en ménageant les différentes factions rivales.
Au Tonkin, les indépendantistes de Hô Chi Minh se trouvent en position de force, sans réussir pour autant à faire reconnaître leur gouvernement[48]. La situation politique de 1945 constitue le prélude à la guerre d'Indochine.
Annexes
Articles connexes
- Histoire de l'Empire colonial français pendant la Seconde Guerre mondiale
- Invasion japonaise de l'Indochine
- Histoire de la marine française en Indochine de 1939 à 1945
- Famine de 1945 au Viêt Nam
Bibliographie
- Jacques Dalloz, La Guerre d'Indochine, Seuil, 1987
- Philippe Franchini, Les Guerres d'Indochine, tome 1, Pygmalion-Gérard Watelet, 1988
- Philippe Franchini, Les mensonges de la guerre d'Indochine, Perrin, Paris 2005, ISBN 2-262-02345-X
- Philippe Grandjean, L'Indochine face au Japon : Decoux-de Gaulle, un malentendu fatal, L'Harmattan, 2004
- Erwan Bergot, Commandos de choc en Indochine, les héros oubliés, Grasset, 1979
- Laurent Cesari, L'Indochine en guerres, 1945-1993, Belin Sup Prépa, 1995
- Jacques Valette, La Guerre d'Indochine, Armand Colin, 1994
- Pierre Montagnon, La France coloniale, tome 2 : retour à l'Hexagone, Pygmalion-Gérard Watelet, 1990
- Jean Sassi, Opérations Spéciales : 20 ans de guerres secrètes, Nimrod, 2009
Notes et références
- L'Harmattan, 2004 Philippe Grandjean, L'Indochine face au Japon : Decoux-de Gaulle, un malentendu fatal,
- Philippe Grandjean, L'Indochine face au Japon : Decoux-de Gaulle, un malentendu fatal, L'Harmattan, 2004
- Jacques Dalloz, La Guerre d'Indochine, Seuil, 1987, page 78
- Pierre Montagnon, La France coloniale, tome 2, Pygmalion-Gérard Watelet, 1990, page 123
- Jacques Dalloz, La Guerre d'Indochine, Seuil, 1987, pages 56-59
- Jacques Dalloz, La Guerre d'Indochine, Seuil, 1987, page 77-78
- Jacques Valette, La Guerre d'Indochine, Armand Colin, 1994, page 23
- Pierre Montagnon, La France coloniale, t.2 : retour à l'Hexagone, Pygmalion-Gérard Watelet, 1990, pp. 124-125
- Jacques Dalloz, La Guerre d'Indochine, Seuil, 1987, page 63
- (fr) Le coup de force du 9 mars 1945
- L'Harmattan, 2004, p. 256 Philippe Grandjean, L'Indochine face au Japon : Decoux-de Gaulle, un malentendu fatal,
- Pierre Montagnon, La France coloniale, t.2 : retour à l'Hexagone, Pygmalion-Gérard Watelet, 1990, pp. 127-128
- Jacques Dalloz, La Guerre d'Indochine, Seuil, 1987, page 64
- Philippe Franchini, Les Guerres d'Indochine, tome 1, Pygmalion-Gérard Watelet, 1988, page 187
- Entretien sur l'Indochine
- Pierre Montagnon, La France coloniale, t.2 : retour à l'Hexagone, Pygmalion-Gérard Watelet, 1990, p. 125
- Claire Lee Chennault, Way of a Fighter: The Memoirs of Claire Lee Chennault, Major General, U.S. Army (Ret.), G.P. Putnam's Sons, New York, 1949
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- Laurent Cesari, L'Indochine en guerres, 1945-1993, Belin Sup Prépa, 1995, pages 30-31
- Jacques Valette, La Guerre d'Indochine 1945-1954, Armand Colin, 1994, p. 387
- Jean Sassi, Opérations Spéciales : 20 ans de guerres secrètes, Nimrod, 2009
- Pierre Montagnon, La France coloniale, t.2 : retour à l'Hexagone, Pygmalion-Gérard Watelet, 1990, pages 128 et 133
- Jacques Valette, La Guerre d'Indochine 1945-1954, Armand Colin, 1994, p. 41
- Jacques Dalloz, La Guerre d'Indochine, Seuil, 1987, page 78
- Jean Sainteny, Indochine 1945-1947, Amiot-Dumont, 1953, page 49
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- L'Harmattan, 2004, pp. 277-278 Philippe Grandjean, L'Indochine face au Japon : Decoux-de Gaulle, un malentendu fatal,
- Jacques Dalloz, La Guerre d'Indochine, Seuil, 1987, page 79
- Laurent Cesari, L'Indochine en guerres, 1945-1993, Belin Sup Prépa, 1995, page 32
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- Philippe Franchini, Les Guerres d'Indochine, tome 1, Pygmalion-Gérard Watelet, 1988, page 203
- Cecil B. Currey, Vo Nguyên Giap - Viêt-nam, 1940-1975 : La Victoire à tout prix, Phébus, 2003, pages 160-161
- Philippe Franchini, Les Guerres d'Indochine, tome 1, Pygmalion-Gérard Watelet, 1988, page 204 et 225
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- Jacques Dalloz, La Guerre d'Indochine, Seuil, 1987, page 80
- Philippe Franchini, Les Guerres d'Indochine, tome 1, Pygmalion-Gérard Watelet, 1988, pages 241-243
- Jacques Dalloz, La Guerre d'Indochine, Seuil, 1987, page 82
- Jacques Valette, La Guerre d'Indochine 1945-1954, Armand Colin, 1994, p. 45
- Philippe Franchini, Les Guerres d'Indochine, tome 1, Pygmalion-Gérard Watelet, 1988, page 243
- Jacques Dalloz, La Guerre d'Indochine, Seuil, 1987, page 85
- Jacques Dalloz, La Guerre d'Indochine, Seuil, 1987, page 88
- Pierre Montagnon, La France coloniale, tome 2, Pygmalion-Gérard Watelet, 1990, page 135
- Jacques Valette, La Guerre d'Indochine 1945-1954, Armand Colin, 1994, p. 41-42
- Pierre Montagnon, La France coloniale, tome 2, Pygmalion-Gérard Watelet, 1990, page 133
- Jacques Valette, La Guerre d'Indochine 1945-1954, Armand Colin, 1994, p. 31
Catégories :- Indochine française
- Bataille de l'histoire de France
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