- Invasion soviétique de la Mandchourie
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L'Invasion soviétique de la Mandchourie, dite officiellement Opération offensive stratégique en Mandchourie (Russe : Манчжурская стратегическая наступательная операция, Manchzurkaya Strategicheskaya Nastupatelnaya Operaciya) fut l'une des dernières grandes opérations de la guerre du Pacifique, en 1945, à la fin de la Seconde Guerre mondiale. Déclenchée entre les deux bombardements atomiques de Hiroshima et Nagasaki, elle vit l’invasion par l'Armée rouge de la Mandchourie, qui était alors le protectorat japonais du Mandchoukouo, ainsi que de divers territoires appartenant alors au Japon, comme la Corée. L'opération est également désignée sous le nom d'Opération tempête d'août, appellation utilisée en 1983 par l'historien américain David M. Glantz[1].
Sommaire
Historique
Lors de la conférence de Yalta, Joseph Staline, sur l'insistance de Franklin Delano Roosevelt, avait promis aux Alliés que l'Union soviétique entrerait en guerre contre le Japon trois mois après la fin des hostilités contre l'Allemagne. Dès le 2 avril 1945, Viatcheslav Mikhaïlovitch Molotov informa l'ambassadeur japonais Naotake Satō de l'abrogation du Pacte de neutralité soviéto-japonais de 1941[2].
Après le 8 mai, des transferts importants de troupes ont lieu de l'Europe vers l'Extrême-Orient. Le rapport de force entre URSS et Empire du Japon était jusque-là favorable dans la région à l'armée du Guandong, à laquelle faisait face l'armée autonome de Sibérie, dotée d'une quarantaine de divisions. Du fait de ponctions répétées, les effectifs de l'armée du Guandong étaient descendus à 500 000 hommes. Avec l'arrivée des renforts venus du front allemand, les effectifs soviétiques montent à 1 500 000 hommes et 5 500 chars.
Placée sous les ordres du Maréchal Aleksandr Mikhaïlovitch Vassilievski, les troupes soviétiques sont disposées en trois fronts : le front de Transbaïkalie, comptant quatre armées, chargé d'attaquer d'ouest en est; le 2e front d'Extrême-Orient, avec deux armées, attaquant du nord au sud; le 1er front d'Extrême-Orient, disposé à l'est, avec trois armées et un corps de blindés, dirigé plein ouest vers le Khingan où des guérillas coréennes sont actives.
Parallèlement à l'opération en Mandchourie, la Flotte du Pacifique et la XVIe armée sont chargées de récupérer le sud de Sakhaline (occupée par le Japon depuis la guerre russo-japonaise de 1905) et de réaliser une invasion des Îles Kouriles[3].
Le 8 août 1945, Molotov convoque à nouveau Satō et l'informe brutalement que leurs pays sont désormais en état de guerre.
Le lendemain, l'Armée rouge envahit sur trois faces la Mandchourie (occupée depuis 1931 par les Japonais qui y avaient installé l'État du Mandchoukouo), ainsi que la Mongolie-Intérieure et la partie sud de Sakhaline. Des débarquements sont réalisés sur la côte orientale du nord de la Corée, alors colonisée par le Japon.
En huit jours, les armées soviétiques progressent de 400 kilomètres en direction de la grande plaine centrale, aidées par des unités de cavalerie de la République populaire mongole, continuant leur avance alors même que l'empereur Hirohito a annoncé la capitulation du Japon. Le 16 août, les Soviétiques réalisent à Kalgan leur jonction avec les troupes du Parti communiste chinois, encerclant l'armée du Guandong. Le général Otozō Yamada entame des pourparlers de capitulation. Le 20 août, le cessez-le-feu est proclamé. Le 23 août, Port-Arthur, sur lequel la République de Chine, par un traité passé quelques jours plus tôt, a reconnu la souveraineté soviétique, est occupé par l'Armée rouge.
Parallèlement, entre le 11 et le 25 août, la XXVe armée soviétique pénètre en Corée jusqu'au 38e parallèle nord. Les Kouriles et quatre îles de la province d'Hokkaidō sont occupées par les Soviétiques[4].
Après la capitulation de l'armée du Guandong, de nombreuses unités japonaises continuent de combattre, jusqu'à début septembre environ[5].
Conséquences
Le 15 août, l'empereur Hirohito annonce la capitulation du Japon et un cessez-le-feu est déclaré dans la région. Les gouvernements collaborateurs du Mandchoukouo et du Mengjiang cessent d'exister.
Commencée entre les deux bombardements atomiques américains, trois jours après celui d'Hiroshima et quelques heures avant celui de Nagasaki, l'attaque soviétique est, avec les frappes nucléaires, l'un des facteurs décisifs de la reddition du Japon. Le gouvernement japonais souhaitait notamment éviter une attaque et une occupation soviétiques sur son territoire national, ce qui aurait risqué de compromettre la survie du système impérial.
Les Soviétiques profitent de leur présence sur place pour opérer un pillage en règle de la Mandchourie, notamment en démantelant et transférant en URSS l'essentiel des infrastructures et des installations industrielles de l'ex-Mandchoukouo[6], au grand dam du Parti communiste chinois[7].
Tchang Kaï-chek n'ayant pas de troupes en Mandchourie, il négocie avec les Japonais pour éviter qu'ils se retirent trop tôt, ce qui aurait eu pour conséquence une prise de contrôle de la région par les communistes. Il fait transmettre aux troupes japonaises restées sur place l'ordre de ne pas remettre leurs armes aux communistes et d'attendre l'arrivée des soldats du Kuomintang[8]. Tchang ne peut cependant empêcher qu'une partie des territoires conquis par l'armée soviétique en Mandchourie soient investis par les troupes du Parti communiste chinois, qui gagne ainsi de précieuses bases d'opération, tandis que la guérilla communiste locale opère sa jonction avec les troupes régulières du PCC[6]. Les communistes chinois installent leur pouvoir à Harbin et s'étendent vers le sud[7]. La conquête définitive de la Mandchourie par les communistes est, à la fin 1948, l'un des points tournants de la guerre civile chinoise.
L'occupation du nord de la Corée par l'URSS fournit le terrain pour la naissance du régime communiste coréen et constitue le prélude à la guerre de Corée.
Entre 500 000 et 594 000 Japonais sont faits prisonniers par les Soviétiques, dont 148 généraux. Les Soviétiques annoncent n'avoir subi que 8000 pertes humaines environ[9]. Parmi les prisonniers japonais, 90 000 seulement reverront leur pays en 1949[7].
Annexes
Bibliographie
- Jacques Sapir, La Mandchourie oubliée : grandeur et démesure de l'art de la guerre soviétique, Éditions du Rocher, 1996, (ISBN 978-2268022949).
Liens externes
- David M. Glantz, "August Storm: The Soviet 1945 Strategic Offensive in Manchuria", Leavenworth Papers No. 7, Combat Studies Institute, février 1983
Notes et références
- "August Storm: The Soviet 1945 Strategic Offensive in Manchuria", Leavenworth Papers No. 7, Combat Studies Institute, février 1983 David M. Glantz,
- Philippe Masson, La Seconde Guerre mondiale - Stratégies, moyens, controverses, chronologie, filmographie, Tallandier, 2003, page 724
- Philippe Masson, La Seconde Guerre mondiale - Stratégies, moyens, controverses, chronologie, filmographie, Tallandier, 2003, page 724
- Philippe Masson, La Seconde Guerre mondiale - Stratégies, moyens, controverses, chronologie, filmographie, Tallandier, 2003, pages 724-725
- Alexander Werth, Russia at war, Pan Books Ltd, 1964, pages 927-928
- Encyclopedia Britannica
- Philippe Masson, La Seconde Guerre mondiale - Stratégies, moyens, controverses, chronologie, filmographie, Tallandier, 2003, page 725
- Peter Zarrow, China in War and Revolution, 1895-1949, Routledge, 2005, p.338
- Alexander Werth, Russia at war, Pan Books Ltd, 1964, page 928
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