Seconde campagne d'Indochine

Seconde campagne d'Indochine

Combats en Indochine (1945)

Combats en Indochine (1945)
Informations générales
Date 9 mars 1945 - 19 août 1945
Lieu Indochine française
Issue Capitulation japonaise
Belligérants
Flag of France.svg France
Flag of Colonial Vietnam.svg Indochine française
Flag of North Vietnam 1945-1955.svg Việt Minh
Flag of the United Kingdom.svg Royaume-Uni
Merchant flag of Japan (1870).svg Empire du Japon
Commandants
Flag of France.svg Marcel Alessandri
Flag of North Vietnam 1945-1955.svg Hô Chi Minh
Flag of North Vietnam 1945-1955.svg Võ Nguyên Giáp
Merchant flag of Japan (1870).svg Yuichi Tsuchihashi
Merchant flag of Japan (1870).svg Takeshi Tsukamoto
Forces en présence
mars 1945 :

env. 24 000 hommes (dont 12 000 soldats annamites environ)[1]
ensuite : commandos français et britanniques de la Force 136, maquis français, guérilla Việt Minh

Armée impériale japonaise : env. 65 000 hommes [2]
Milices annamites
Pertes
2,129 européens tués lors du coup de force du 9 mars  ?
Seconde Guerre mondiale
Batailles
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Les Combats en Indochine de 1945 virent la prise de contrôle, pour quelques mois, de l'Indochine française par l'Empire du Japon. Le coup de force Japonais fut suivi de brèves périodes d'indépendances du Việt Nam, du Laos et du Cambodge. Des actions militaires s'ensuivirent, mais la reddition du Japon survit avant qu'une riposte de grande ampleur ne puisse être mise en oeuvre par la France.

Sommaire

Contexte

Depuis son invasion du territoire indochinois en 1940, le Japon stationnait ses troupes en Indochine, notamment au Tonkin, tout en reconnaissant l'intégrité territoriale de la colonie française. L'administration coloniale mise en place par le gouvernement de Vichy était toujours en place en 1945, bien que le régime de Philippe Pétain ait, dans les faits, cessé d'exister en Europe.

La situation militaire du Japon devenait cependant particulièrement grave dans le cadre de la guerre en Asie et dans le Pacifique. Les Etats-Unis avaient déjà bombardé à partir de 1942 les positions japonaises en Indochine. Le Royaume-Uni commença fin 1944 à envoyer des commandos dans les montagnes du nord, avec le soutien de soldats du Gouvernement provisoire de la République française. Le 12 janvier 1945, l'aviation américaine débuta un bombardement sur Saïgon, qui était désormais à la portée de ses avions. Les Japonais, craignant que les Alliés ne pénètrent en force sur le territoire de l'Indochine pour en faire une voie de passage pour leurs troupes, décidèrent d'en prendre le contrôle.

Prise de contrôle de l'Indochine par le Japon

Au début de mars 1945, les troupes japonaises furent déployées autour des troupes de garnison. Le 9 mars 1945, les troupes françaises furent attaquées par surprise par l'armée impériale japonaise. L'amiral Jean Decoux fut arrêté. Plusieurs officiers administrateurs et officiers français furent exécutés : à Langson, le colonel Robert et le résident Auphelle, invités à dîner ce soir-là par leurs homologues japonais, furent arrêtés par surprise, et décapités à coup de sabre, de même que le général Lemonnier qui refusait de donner l'ordre de capituler. A Thakkek, l'administrateur Colin et l'inspecteur Grethen furent également tués. A Dong Dan, 400 prisonniers furent massacrés[3].

Sur les 40 000 Français métropolitains dans la région dont 18 000 militaires, plus de 3 000 furent tués en moins de 48 heures. L'administration coloniale française fut détruite dans les faits. Les postes militaires français à travers toute l'Indochine (Viet Nam, Laos, Cambodge) furent touchés. Les troupes japonaises prirent notamment les citadelles d'Hanoï et de Langson et y massacrèrent les Européens et les troupes annamites, malgré les promesses faites en cas de reddition. Des camps de prisonniers furent créés pour y parquer civils et militaires.

Une partie des troupes françaises fut maîtrisée, tandis que d'autres, sous la direction de Marcel Alessandri, prenaient le maquis, l'armée japonaise mettant à prix les soldats Français échappés, pour 1000 piastres chacun[4]. La « Colonne Alessandri », comptant environ 5700 hommes, dont 3200 vietnamiens[5],[6], fut exfiltrée vers le Yunnan, sur le territoire de la République de Chine, dans le but de revenir ensuite en Indochine pour y mener des actions de résistance. Ni la Chine ni les Etats-Unis, hostiles au colonialisme français, n'étaient cependant disposés à venir en aide aux Français. Dans ses mémoires, Claire Lee Chennault écrivit : « Les ordres du GQG précisaient que les unités françaises ne devaient recevoir ni armes ni munitions. J'ai appliqué les ordres à la lettre, sans pouvoir me faire à l'idée que je laissais les Français se faire massacrer dans la jungle, tandis qu'on m'obligeait à ignorer officiellement leur sort » [I carried out my orders to the letter, but did not relish the idea of leaving Frenchmen to be slaughtered in the jungle while I was forced officially to ignore their plight.][7]. La situation en Indochine ne provoqua pas de grandes réactions dans la métropole française, encore occupée à se relever de la guerre en Europe.

Les six mois de captivité se soldèrent par plus de 1 500 disparus. Cette opération détruisit l'administration coloniale. Tout en mettant en place sa propre administration militaire, le Japon décréta la fin de la colonisation française, encourageant la formation de régimes nominalement indépendants, dans le cadre de sa sphère de co-prospérité de la grande Asie orientale[8]. Au Việt Nam, l'empereur Bảo Đại obtempéra et collabora avec les Japonais. Au Cambodge, le roi Norodom Sihanouk, pressé par les Japonais, proclama également l'indépendance du pays, mais s'abstint de trop s'engager dans la collaboration. Le leader indépendantiste Son Ngoc Thanh, exilé au Japon depuis 1942 et considéré par les Japonais comme un allié plus sûr que Sihanouk, revint au Cambodge pour assumer en mai le ministère des affaires étrangères . Au Laos, le roi Sisavang Vong refusa cependant de coopérer avec les Japonais en déclarant l'indépendance et, le 16 mars, invita les laotiens à aider les Français et à combattre les Japonais. Le 9 avril, les Japonais décrétèrent l'indépendance du Laos : le roi se considéra alors comme prisonnier[9], et se trouva en conflit avec son premier ministre indépendantiste, le prince Phetsarath Rattanavongsa.

Résistance après le coup de force

Bien que les Japonais se soient posés en libérateurs et leur aient initialement manifesté leur appui, le Việt Minh n'envisageait pas de coopérer avec eux et se prépara à entrer en résistance dans ses territoires du nord du pays, sous la direction de Hô Chi Minh et Võ Nguyên Giáp.

Dans les montagnes du nord, la Force 136, présente depuis la fin 1944, reçut le renfort de nouveaux commandos français et britanniques[10]. Ils furent rejoints par les soldats français qui avaient fui le coup de force de mars, et menèrent des actions de guérilla. La résistance française, ne bénéficiait cependant pas d'ordres précis de la part du Comité de libération de l'Indochine ni de moyens d'envergure, les intentions des Alliés étant imprécises et contradictoires. Les commandos n'étaient pas en mesure de mener une résistance armée très conséquente et, recevant dès avril l'ordre de ne pas se livrer à des « manifestations provocatrices » en l'attente d'une offensive alliée, durent limiter leurs actions de guérilla[11]. Les Britanniques apportèrent également leur soutien au Việt Minh. Les Japonais n'ayant qu'un contrôle imparfait du Laos du fait de la mauvaise volonté du Roi, les maquis français purent s'y déployer avec plus d'aisance, et reçurent l'aide d'une partie de la population laotienne[12].

De leur côté, les Japonais employèrent des troupes supplétives de nationalistes annamites, organisées en « Milices patriotiques ». La France mit sur pied le Corps expéditionnaire français en Extrême-Orient, placé sous le commandement Philippe Leclerc de Hautecloque, et se prépara à l'envoyer combattre les Japonais. Au Cambodge, Son Ngoc Thanh s'auto-proclama premier ministre dans la nuit du 8 au 9 août, avec le soutien des Japonais[13]. Au Việt Nam, Hô Chi Minh décréta le 10 août un soulèvement général et ses troupes entrèrent en conflit ouvert avec les Japonais.

Reddition japonaise

Le 19 août, quelques jours après l'annonce de la capitulation du Japon par Hirohito, les troupes japonaises présentèrent leur reddition à Hô Chi Minh, dont les forces armées prirent le contrôle d'Hanoi, déclenchant l'épisode dit de la révolution d'Août. Bảo Đại abdiqua le 25. Le 2 septembre, Hô Chi Minh proclama l'indépendance du pays au nom du gouvernement provisoire de la République démocratique du Viêt Nam, dénonçant tant le colonialisme français que l'occupation japonaise[14].

Les troupes du Royaume-Uni, au nord, et de la République de Chine, au sud, investirent ensuite le pays, tandis que les Français commandés par Jacques Massu prenaient Saïgon. Les soldats japonais, restés sur place sans ordres, furent un temps utilisés par les Chinois pour aider au maintien de l'ordre. Le Corps expéditionnaire français en Extrême-Orient n'arriva que début septembre, et participa au désarmement des Japonais.

Conséquences

L'administration coloniale de l'Indochine française avait été totalement désorganisée par l'invasion japonaise. L'amiral Jean Decoux, demeuré fidèle au gouvernement de Vichy et qui avait collaboré avec les Japonais jusqu'en 1945, fut rapatrié en France pour y être jugé.

Les troupes françaises ne reprirent que progressivement le contrôle du pays. La France, pour réinvestir son propre territoire, dut négocier laborieusement pour obtenir le départ des troupes d'occupation chinoises, qui menaçaient d'annexer le Tonkin. Tchang Kaï-chek, en contrepartie du départ de ses troupes au début 1946, obtint le renoncement de la France à ses concessions territoriales et commerciales en Chine.

Au Laos, en octobre 1945, le prince Phetsarath tenta d'obtenir par la force l'indépendance du pays en détrônant le roi. Il dut cependant prendre la fuite en avril 1946, devant l'avance des troupes françaises.

Au Cambodge, Son Ngoc Thanh fut arrêté par les Français. Norodom Sihanouk, demeuré à la tête de l'État, dut manoeuvrer pour négocier avec les Français et gérer le processus d'indépendance du Cambodge, tout en ménageant les différentes factions rivales.

Au Việt Nam, les indépendantistes de Hô Chi Minh se trouvaient en position de force. La situation politique de 1945 fut le prélude à la guerre d'Indochine.

Voir aussi

Notes et références

  1. Philippe Grandjean, L'Indochine face au Japon : Decoux-de Gaulle, un malentendu fatal, L'Harmattan, 2004
  2. Philippe Grandjean, L'Indochine face au Japon : Decoux-de Gaulle, un malentendu fatal, L'Harmattan, 2004
  3. Pierre Montagnon, La France coloniale, t.2 : retour à l'Hexagone, Pygmalion-Gérard Watelet, 1990, pp. 125
  4. Philippe Grandjean, L'Indochine face au Japon : Decoux-de Gaulle, un malentendu fatal, L'Harmattan, 2004
  5. Entretien sur l'Indochine
  6. Pierre Montagnon, La France coloniale, t.2 : retour à l'Hexagone, Pygmalion-Gérard Watelet, 1990, p. 1125
  7. Claire Lee Chennault, Way of a Fighter: The Memoirs of Claire Lee Chennault, Major General, U.S. Army (Ret.), G.P. Putnam's Sons, New York, 1949
  8. (fr) Le coup de force du 9 mars 1945
  9. Pierre Montagnon, La France coloniale, t.2 : retour à l'Hexagone, Pygmalion-Gérard Watelet, 1990, pp. 127-128
  10. Jean Sassi, Opérations Spéciales : 20 ans de guerres secrètes, Nimrod, 2009
  11. Philippe Grandjean, L'Indochine face au Japon : Decoux-de Gaulle, un malentendu fatal, L'Harmattan, 2004
  12. Pierre Montagnon, La France coloniale, t.2 : retour à l'Hexagone, Pygmalion-Gérard Watelet, 1990, p. 128
  13. Pierre Montagnon, La France coloniale, t.2 : retour à l'Hexagone, Pygmalion-Gérard Watelet, 1990, p. 127
  14. Déclaration d'indépendance


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