- Odonyme
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Un odonyme, parfois écrit hodonyme, est un nom propre désignant une voie de communication. Un odonyme peut être le nom d'une rue, d'une route, d'une place, d'un chemin, etc.
Typiquement, un odonyme comporte deux parties : un nom individuel (« Victor-Hugo », « République », etc.) et un indicateur du type de voie dont il s'agit (« rue », « boulevard », etc.). En général, un odonyme est un élément d'une adresse postale (mais ce n'est pas systématique) ; les édifices le long de la voie peuvent posséder un numéro pour permettre leur identification individuelle.
L'odonymie est l'étude des odonymes. Elle s'inscrit dans le domaine de la toponymie qui étudie plus largement les noms de lieux en géographie.
Sommaire
Terme
Le terme « odonyme » vient du grec ancien ὁδός (hodós, « route ») et du suffixe « -nyme », provenant du grec ancien ὄνομα (ónoma, « nom », que l'on retrouve dans anthroponyme, patronyme ou domonyme).
Principes
De façon typique, un odonyme est formé de deux parties :
- un terme générique, indiquant le type de voie ;
- un terme spécifique, désignant particulièrement la voie ;
- si la langue le permet, les deux parties peuvent être reliées par une préposition (« de », « au »), ou non.
Un odonyme classique peut donc être par exemple Main Street, Strada Nuova, Berliner Straße ou Route nationale 7. Certaines voies ne possèdent par de terme générique, comme par exemple The Mall à Londres. Réciproquement, certains odonymes ne possèdent aucun terme spécifique, comme par exemple le Boulevard à Atlanta.
Un odonyme peut inclure une direction (est, ouest, nord, sud ou les quadrants nord-ouest, nord-est, sud-ouest, sud-est), particulièrement dans les villes utilisant un plan en damier : East Roosevelt Boulevard, 14th Street NW, etc. D'autres qualificatifs peuvent être apportés : « haut/bas », « vieux/nouveau », « prolongé », etc.
Étymologie
Commerces
Certaines voies sont nommées pour le type de commerce ou d'industrie qui s'y tiennent, ou s'y tenaient. Cette pratique est moins courante à l'époque moderne, mais les noms peuvent avoir subsisté.
Exemple de voies :
- Carrer de Moles à Barcelone (« rue des meules »), où les tailleurs de pierre avaient leur boutique ;
- Rue des Lombards à Paris, d'après les changeurs de Lombardie qui s'y étaient établis au XIIIe siècle ;
- Haymarket à Londres (« marché au foin »), où un marché de fourrage se tenait ;
- Les rues des Faures (forgerons), Sabaterie (cordonniers et savetiers), Vieille-Boucherie, à Bayonne.
Sites
Certaines voies portent le nom de lieux, monuments, édifices qui y étaient présents lors de leur ouverture. Ces sites peuvent avoir disparus tandis que le nom est resté.
Exemples :
- À Barcelone, La Rambla est une série de rues. La Rambla de Canaletes porte le nom d'une fontaine qui s'y élève toujours, mais la Rambla dels Estudis porte celui de l'Estudis Generals, un bâtiment universitaire démoli en 1843. La Rambla de Sant Josep, la Rambla dels Caputxins et la Rambla de Santa Monica sont nommés d'après d'anciens couvents.
- À New York, Canal Street porte le nom d'un canal qui a été remblayé pour construire la rue.
Nom auto-descriptifs
Certaines rues décrivent simplement une de leur caractéristique.
Exemples :
- Rue Longue, Grande Rue
- Rue Pavée à Paris, l'une des premières du quartier à avoir été pavée
- Nine Mile Ride, route de 9 miles de long (14 km) de Bracknell à Finchampstead dans le Berkshire, au Royaume-Uni
Directions
De nombreuses voies portent le nom de la direction vers laquelle elles conduisent, par exemple une ville. Celle-ci peut être situé assez loin et ne pas avoir de lien particulier avec la voie. Les voies peuvent changer de nom en cours de route : par exemple, dans le Connecticut, Hartford Avenue à Wethersfield devient Wethersfield Avenue à Hartford. Au Royaume-Uni, la route entre Oxford et Banbury change de nom cinq fois, alternant entre Banbury Road et Oxford Road au fil des villages.
Une variante consiste à nommer une voie d'après les zones qu'elle relie. À Orlando en Floride, Clarcona Ocoee Road relie Clarcona et Ocoee. En Australie, la Jindivick–Neerim South Road relie les villes de Jindivick et Neerim South.
Il est également possible de nommer une voie d'après une zone qu'elle évite : la Newbury bypass (« déviation de Newbury ») évite précisément la ville de Newbury au Royaume-Uni.
Personnalités
Certaines voies portent le nom de personnalités diverses. De nombreuses possibilités existent :
- une personne célèbre qui a vécu ou travaillé à proximité. Par exemple, à Paris, l'avenue Victor-Hugo porte le nom de l'écrivain Victor Hugo qui y résida lors des dernières années de sa vie.
- une figure historique majeure. Par exemple, le boulevard René-Lévesque à Montréal, le boulevard Léopold III à Bruxelles ou la rue Pasteur dans de nombreuses villes de France.
- une personne associée à la rue. Par exemple, la Şoseaua Kiseleff à Bucarest porte le nom du gouverneur Paul Kisseleff, qui en ordonna la construction.
Certaines juridictions restreignent les nommages de voies d'après des personnalités, par exemple en n'autorisant que les personnes décédées, parfois avec un période d'attente de dix ans ou plus.
Thèmes
Des groupes de voies d'une même zone peuvent parfois être nommées suivant un thème particulier. Par exemple, à Washington, chacun des 50 États des États-Unis a donné son nom à une avenue (par exemple, Pennsylvania Avenue relie le Capitole à la Maison-Blanche). Ces avenues traversent le plan en damier de la ville en diagonale.
Nomenclature systématique
Dans de nombreuses rues suivant un plan en damier, les rues portent un nom permettant de les situer les unes par rapport aux autres. Par exemple, le Commissioners' Plan de 1811 pour Manhattan prévoyait des numéros pour les rues parallèles au petit axe de l'île et des numéros et des lettres pour les avenues parallèles au grand axe. À Washington, le plan initial prévoyait que les rues nord-sud portent des numéros croissants depuis le Capitole et les rues est-ouest des lettres. Au fil de la croissance de la ville, les rues est-ouest au-delà de W Street reçurent des noms de deux syllabes dans l'ordre alphabétique (par exemple Belmont Street, Clifton Street, Euclid Street), puis des noms de trois syllabes (Allison Street, Buchanan Street, etc.), puis finalement des noms liés aux fleurs et aux arbustes (Aspen Street, Butternut Street, Cedar Street, etc.), toujours dans l'ordre alphabétique.
Ce système est parfois utilisé pour des lieux qui ne suivent pas un plan en damier, comme par exemple dans le comté d'Arlington en Virginie.
Renommage
Généralités
Les noms des voies peuvent changer au fil du temps, pour de nombreuses raisons. Par exemple, l'actuelle rue de la Petite-Truanderie à Paris, petite voie qui existe au moins depuis le XIIIe siècle, s'est également appelée rue d'Ariane, rue d'Arienne et rue du Puits-d'Amour, sa désignation évoluant simplement au cours des siècles[1]. L'évolution des villes peut également conduire à modifier les noms : toujours à Paris, l'ouverture de la rue du Pont-Neuf a conduit à la suppression des rues Estienne, Tirechappe et de la Tonnellerie, ainsi que de la place des Trois-Maries[2].
Changement politique
Certains noms sont modifiés lors de changement de régime ou de politique. Par exemple, à la suite de l'indépendance du Zimbabwe en 1980, les noms des colons britanniques furent remplacés par ceux des leaders zimbabwéens.
Il est également possible de modifier le nom d'une voie pour commémorer un événement (victoire militaire, etc.) ou une personnalité : à Paris, en 2003, une partie des quais des Tuileries et du Louvre a été dénommée quai François-Mitterrand en mémoire de l'ancien président[3]. Pendant la période de l'apartheid et l'emprisonnement de Nelson Mandela, plusieurs rues autour d'ambassades d'Afrique du Sud furent renommées en son honneur.
Certaines rues sont renommées pour éviter les associations négatives. Malbone Street à New York devint Empire Boulevard après le déraillement meurtrier d'un train de la Brooklyn Rapid Transit Company à cet endroit en 1918. À Montréal, la rue Cadieux fut renommée rue de Bullion car le terme original était connu pour ses anciens lupanars. Pendant la Première Guerre mondiale, de nombreuses rues portant des termes liés à l'Allemagne (comme « Berlin » ou « Hambourg ») furent modifiées en France, au Royaume-Uni et aux États-Unis.
Uniformisation
Lors de modifications territoriales, il arrive que des voies soient renommées suivant un système uniformisé. Par exemple, lorsque Georgetown cessa d'avoir une existence indépendante de Washington, les rues de Georgetown furent renommées pour suivre les conventions de Washington.
Changement de langue
Les noms des voies peuvent être affectés par un changement de langue officielle. Après la mort de Francisco Franco, la transition démocratique espagnole accorde à la Catalogne le statut de communauté autonome où le catalan est langue co-officielle. Certains noms de rues de Catalogne changent intégralement, tandis que la plupart adoptent une traduction en catalan de leur nom précédent en castillan ; par exemple, la calle San Pablo (rue Saint-Paul) de Barcelone devint carrer Sant Pau.
Similairement, les noms de rues en anglais furent modifiés en français au Québec pendant les années 1970.
Changement d'orthographe
Les noms de rues peuvent être légèrement modifiés suite à des modifications ou des rectifications orthographiques.
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La rue Poulletier à Paris, orthographiée « Rüe Poultier » dans l'inscription encore visible dans la pierre.
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Angle de la Kongressstraße à Aix-la-Chapelle, dont le nom Kongreßstraße est barré, suivant la réforme orthographique de 1996.
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Stradă Smîrdan/Stradă Smârdan (rue de Smârdan), plaque de Bucarest indiquant les deux orthographes du même nom, avant et après la réforme de 1993.
Valeurs véhiculées par l’odonymie
Au même titre qu’un pays, une ville se veut le porte drapeau de certaines valeurs. Le fait est que ce sentiment se traduit dans le nom des rues et des places parce que l’attribution des noms est le privilège des municipalités. Chaque ville défend, par ses plaques, l’image qu’elle donne d'elle-même et la plupart du temps ses habitants soutiennent cette image. Une ville religieuse mettra en avant ses lieux saints et les piliers de la religion qu’elle accueille, « rue du Mausolée » ou « place de la Miséricorde ». Une ville qui se veut à l'avant-garde de l’urbanisme choisira ses noms parmi les grands architectes. De même, Paris est la ville où le nombre de rues portant le nom d’un soldat (surtout des officiers) est le plus important au monde (juste devant Londres) : cela illustre le passé combatif et courageux de la cité.
Selon les pays, la volonté politique exprime des images différentes. En Angleterre, l'accent est mis sur l'Empire britannique. En France, la plupart des villes arborent une rue de la République, souvent héritière d'une Rue impériale issue des percées haussmanniennes du XIXe siècle. Aux États-Unis, on met l'accent sur l'Acte d'indépendance. En Allemagne, ce sont les philosophes et les compositeurs, en Italie les artisans de l'unification.
Il est rare de trouver des odonymes qui soient légion dans tous les pays. Bien sûr, les nombreuses rues, quartiers et places « des États-Unis » montrent bien la théorie de l'image commune que veulent se donner les pays occidentaux. L'odonyme « États-Unis » était très utilisé durant les années 1960-70 pour signifier la réussite économique, les urbanistes l'ont souvent donné à des quartiers nouveaux. De la même manière, beaucoup de villes anglo-saxonnes utilisent le nom de « Paris Street » ou « France Avenue » pour indiquer la rue où se trouve le théâtre ou les galeries d'art.
Pour ce qui est de trouver des personnes qui aient donné leur nom à des voies dans plusieurs pays, la tâche est plus difficile. En effet, peu nombreuses sont les personnalités qui ont imposé leur nom au point de passer les barrières nationalistes inhérentes à toute institution étatique. Notons cependant des noms comme Mozart, Martin Luther King ou Kennedy.
Il y a parfois contradiction dans les termes : de nombreuses municipalités ont donné à des quartiers nouveaux des noms champêtres ; il y a ainsi abondance de rues « des lilas » ou « des saules » voire « des canaris » dans les quartiers urbains créés depuis les années 60, qu'il s'agisse de barres d'immeubles ou de quartiers pavillonnaires. Ces noms passe-partout ont les qualités suivantes : ils sont faciles à identifier, simples à retenir et ne portent pas de valeurs sensibles (politiques, religieuses, historiques, etc.). En contrepartie, ils n'apportent aucune information sur la ville, il s'agit de noms purement fonctionnels.
Une autre vision des noms de rues
Aux États-Unis, les grandes villes de l'est n'ont jamais utilisé les noms que pour les grandes voies et aussi pour les plus anciennes. La plupart du temps, pour un souci de repérage et de facilité, les rues ont été numérotées, ainsi en Amérique du Nord, le nom de rue le plus répandu est « Second Street », et le suivant est « Main Street[4],[5] ».
Toujours par facilité, les villes, et surtout celles qui se dotent ou qui refondent leurs noms de rues, adoptent des noms de fleurs ou d'arbres. Ces odonymes-là n'entrent que très rarement dans les études.
Enfin il faut noter les traditions locales. Souvent elles s'appuient sur le milieu naturel antérieur à la fondation de la ville. On trouve aussi des appellations traditionnelles à une région : la « rue de la cave » dans les régions viticoles, la « place du peuple » dans les villes de tradition marxiste, etc.
Voir aussi
Liens internes
Bibliographie
- Stéphane Gendron, La Toponymie des voies romaines et médiévales : Les mots des routes anciennes, Paris, Errance, 2006 (ISBN 2-87772-332-1)
- D. Badariotti, Les noms de rues en géographie. Plaidoyer pour une recherche sur les odonymes, vol. 625, Armand Collin, mai-juin 2002
- Jean-Claude Bouvier et Jean-Marie Guillon, La Toponymie urbaine : significations et enjeux, actes du colloque tenu à Aix-en-Provence (11-12 décembre 1998) organisé par l'UMR Telemme, Paris, L'Harmattan, 2001 (ISBN 2-7475-0656-8)
Notes et références
- Rue de la Petite Truanderie, Ville de Paris
- Rue du Pont Neuf, Ville de Paris
- Quai François Mitterrand, Ville de Paris
- http://www.highbeam.com/doc/1G1-21200716.html
- http://web.archive.org/web/20051027093314/http://www.nlc.org/about_cities/cities_101/184.cfm
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