- Fils de Noé
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Table des peuples
La Table des peuples est une liste des descendants du patriarche Noé qui apparaît dans l'Ancien Testament, au 10e chapitre de la Genèse. Elle représente une carte ethnologique de l'âge du fer selon la perspective des peuples du Levant et eut une large influence dans les recherches historiques et généalogiques du Moyen Âge et de l'époque moderne.
Sommaire
Historicité et portée
Selon Genèse 10, toute la population du monde descendrait des trois fils de Noé : Sem, Ham et Japhet. Nombreux furent ceux qui considérèrent ce point de vue comme historiquement avéré jusqu'à la moitié du XIXe siècle. De nombreux Juifs orthodoxes, Musulmans[réf. nécessaire] et certains Chrétiens[1] la considèrent toujours comme véridique.
Des débats ont toujours lieu à propos du nombre de peuples qu'elle prétendait effectivement couvrir ainsi que sur sa fiabilité.
D'après la Torah, les prénoms des descendants de Noé listés correspondent à différentes nations et peuples. Selon l'interprétation classique, les fils de Noé correspondent à trois peuples : Européens, Sémites et Africains. D'autres n'y voient qu'un guide des groupes ethniques locaux.
La critique moderne rejette cette vue traditionnelle de l'historicité de la Table, affirmant plutôt qu'il ne s'agit que d'une généalogie traditionnelle, visant à expliquer les relations existantes entre les différents groupes ethniques du Proche-Orient ancien, peut-être réaménagée au moment de la rédaction définitive du texte, vers le VIIe siècle av. J.-C..
Présentation
La Table commence par une liste des descendants directs de Noé. Les noms de ces personnages éponymes ou de leurs enfants ont une signification en hébreu :
- Ham, est le père des peuples du sud (Afrique hamitique). Ham (חם) signifiant « chaud »[2] ;
- Sem, est le père des peuples du milieu (Sémites). Shem (שם) signifiant « nom » ou renom », « prospérité »[3] ;
- Japhet, est le père des peuples du nord (Eurasie japhétique). Japhet (יפת) signifiant « ouvert »[4].
La Table présente ensuite plus en détail leurs descendants respectifs :
- Fils de Japhet :
- Gomère (dont les descendants sont identifiés aux Cimmériens). Il est lui-même notamment père d'Ashkenaz (père des Scythes) et de Togarma ;
- Magog ;
- Madaï ;
- Yavane, quelquefois identifié comme le père des Ioniens ;
- Toubal, identifié par certains comme le père des peuples ibériques ;
- Mèshek ;
- Tirass.
La Septante inclut entre Yavane et Toubal un autre fils présumé de Japhet, Elisha, mais on ne le retrouve dans aucune autre source antérieure.
Japhet est traditionnellement considéré comme père des Européens, bien que l'adjectif « japhétique » ait été parfois utilisé comme synonyme de « caucasien ». Le même terme a également été utilisé par des anciens linguistes pour désigner ce que l'on dénomme aujourd'hui les langues indo-européennes (notamment Jacob et Wilhelm Grimm, Rasmus Christian Rask et William Jones).
- Fils de Ham (Hamitiques) :
- Fils de Shem (Sémites) :
Dans l'historiographie
Flavius Josèphe
Dans ses Antiquités judaïques, l'historien du Ie siècle Flavius Josèphe fut parmi les premiers à essayer d'identifier les peuples présentés dans la Table aux ethnies connues de son époque[5]. Ses conjectures, qui servirent de base à nombre d'auteurs postérieurs, reposent sur les noms qu'auraient eus ces divers peuples avant que ceux donnés par les Grecs ne les remplacent.
Ci-dessous quelques unes des relations qu'il a établies :
- Gomère : « ceux que maintenant les Grecs nomment Galatiens, mais étaient autrefois nommés Gomérites » ;
- Rifath : Paphlagoniens ;
- Togarma : Phrygiens ;
- Magog : Scythes ;
- Yavane : Ioniens et Grecs ;
- Toubal : Ibères ;
- Mèschek : habitants de la Cappadoce ;
- Tirâs : Thraces ;
- Koush : Éthiopiens ;
- Misraïm : Égyptiens ;
- Pout : Libyens ;
- Canaan : Judéens (il associe également le nom de plusieurs de ses fils à certaines villes de Judée) ;
- Élam : Perses ;
- Ashshur : Assyriens ;
- Arpakshad : Chaldéens. Il est également le grand-père d'Eber, que Josèphe identifie aux Juifs hébreux ;
- Aram : Syriens ;
- Guèthèr : habitants de Bactriane ;
Hippolyte
Dans ses chroniques, écrites vers 234 et diffusées en un grand nombre de copies grecques et latines, Hippolyte tente de même d'attribuer les nations mentionnées dans Genèse 10 à des peuples connus. Il coïncide en grande partie avec Josèphe, mais diverge toutefois sur certains points, notamment :
- Gomère : Cappadoce ;
- Misraïm
- Anamim : Pamphylieens ;
- Pathrusim : Lyciens ;
- Caphtorim : Ciliciens ;
- Pout : Troglodytes ;
- Canaan : Phéniciens et Carthaginois ;
- Arqite : Tripoli.
Le Chronographe de 354, le Panarion, la Chronicon Paschale, l'Histoire de l'Albanie de l'historien géorgien Moïse Kaghankatvatsi et le Synopsis historiarum de Jean Skylitzès suivent les indications d'Hippolyte.
Jérôme
Autour de 390, Jérôme de Stridon donna une version actualisée des identifications de Josèphe dans son Quaestiones hebraicae in Genesin. Sa liste diffère cependant en quelques point notables. Il met notamment en relation Guèthèr, fils d'Aram, avec les Acarnaniens et les habitants de Carie.
Isidore de Séville
Dans ses Etymologiae, rédigés vers l'an 600, Isidore de Séville reprend le travail de Jérôme mais avec quelques modifications mineures :
- Yoqtân, fils d'Eber : Indiens ;
- Shèlef, fils de Yogtân : Bactriens ;
- Magog, fils de Japhet : Scythes et Goths ;
- Ashkenaz, fils de Gomère : Sarmates.
Cette interprétation fut reprise dans Historia Brittonum, attribué à Nennius, ainsi que par de nombreux autres érudits du Moyen Âge.
Doublons
La table présentée dans Genèse 10 présente plusieurs doublons apparents, en particulier, deux lignées distincte, l'une descendant de Ham Via Koush et l'autre de Sem via Yoktan, correspondant à des groupes ethniques de la région du Yémen et ses environs. Ainsi par exemple, les habitants de Saba semblent mentionnés dans les deux lignées, avec les noms similaires de Séva et Saba.
Selon l'hypothèse documentaire, ces doublons sont des éléments attestant de l'existence de multiples auteurs. Les défenseurs de cette théorie soutiennent que par le passé plusieurs sources du texte biblique ont coexisté, rédigées à des époques différentes et donc dans des contextes ethnologiques différents, avant d'être réunies dans une version plus finalisée et proche de celle qui est aujourd'hui connue.
Fils de Noé non mentionnés dans la Bible
Diverses traditions extrabibliques affirment que Noé eut d'autres enfants que les trois mentionnés, selon les cas avant, après ou même pendant le Déluge.
Selon le Coran (Houd, v. 42-43), Noé eut un fils (dont le nom n'est pas mentionné) qui refusa de monter dans l'Arche, et préféra grimper en haut d'une montagne, où il périt noyé. Certains commentateurs islamiques le nomment Yam ou Kan'an.
Dans la Mythologie celtique irlandaise, Noé avait un fils nommé Bith, à qui on ne permit pas de monter dans l'Arche, et qui essaya de coloniser l'Irlande avec 54 autres personnes, mais fut également emporté par le Déluge.
Au IXe siècle, des manuscrits de la Chronique anglo-saxonne soutiennent que Sceaf était le quatrième fils de Noé, né à bord de l'Arche, et qui serait l'ancêtre de Wessex ; selon la version de cette généalogie proposée par Guillaume de Malmesbury vers 1120, Sceaf est présenté comme un descendant de Strephius, qui serait lui-même le quatrième fils né dans l'Arche.
Dans la littérature de Clément Ier figure un livre des premiers temps de l'islam connu sous le nom de Kitab al-Magall ou Livre des Rouleaux et qui mentionne un quatrième fils de Noé nommé Bouniter, né après le Déluge et à qui sont attribuées l'invention de l'astronomie et la transmission de son savoir à Nimrod[6]. Des variantes de ce récit, proposant des noms similaires pour le quatrième fils de Noé, se retrouvent également dans une œuvre guèze du Ve siècle intitulée Conflit d'Adam et Ève avec Satan, dans le livre syriaque du VIe siècle Grotte des trésors et l'Apocalypse de Pseudo-Methodius du siècle suivant, le Livre des abeilles syriaque (1221), la Chronique de Jerahmeel hébreu (XIIe-XIVe s.), ainsi que dans la littérature apocryphe arménienne.
Martin d'Opava (vers 1250), des versions postérieures de Mirabilia Urbis Romae et le Chronicon Bohemorum de Giovanni di Marignola (1355) font de la divinité romaine Janus le quatrième fils de Noé, qui se serait rendu en Italie, aurait inventé l'astrologie, puis aurait instruit Nemrod.
Selon le moine Annius de Viterbe (1498), l'écrivain helléniste babylonien Bérose mentionne 30 fils de Noé nés après le Déluge, incluant notamment Tuiscon, Prométhée, Japet, Macrus, 16 titans, Cranus, Granaus, Océan et Tipheus. Sont également mentionnées des filles de Noé nommées Araxa la Grande, Regina, Pandore, Crana et Thétis. Cependant, le manuscrit d'Annius est aujourd'hui assez largement considéré comme une contrefaçon[7].
Notes et références
- ↑ Voir notamment le mouvement Créationnisme Jeune-Terre
- ↑ Lexicon Results for Cham (Strong's 02526)
- ↑ Lexicon Results for Shem (Strong's 08035)
- ↑ Lexicon Results for Yepheth (Strong's 03315)
- ↑ Antiquités judaïques, Livre I, chapitre 6
- ↑ Seth in Jewish, Christian, and Gnostic Literature p. 54
- ↑ Travels of Noah into Europe
Voir aussi
Article connexe
Liens externes
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