- Royaume vandale de Carthage
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Royaume vandale
Le royaume vandale d'Afrique ou Royaume de Carthage existe de 429 à 533. Il disparaît après une reconquête byzantine de la province.
Il s'agit de la sédentarisation la plus éloignée atteinte par les colonnes de peuples des Grandes invasions, entreprise par les Vandales et des Alains qui leurs sont subjugués (c’est-à-dire que leur aristocratie dominante devient peu à peu celle des Vandales).
De 429 à 439, les Vandales conquièrent une partie des territoires situés sur la côte Nord-africaine, et s'établissent durablement en Algérie orientale avec comme capitale Bougie situé en Kabylie et en Tunisie. Ils contraignent Rome à établir un traité (fœdus) avec eux par deux fois (en 435 et 442), et constituent un original royaume vandale et Alains d'Afrique, parfois nommé « royaume de Carthage », du nom de la riche capitale romaine d'Afrique qu'ils prennent en 439 et qui devint la capitale de leur royaume. La chute du royaume se joue sur les années 533–534.
Sommaire
L'installation du royaume d'Afrique
- La phase de conquête a lieu de 429 à 439 dans les provinces d'Afrique. Elle se poursuit par une hégémonie sur le bassin méditerranéen occidental.
Nous sommes principalement renseignés sur les incursions vandales en Africa, par une source qui leur est violemment hostile, l'Histoire de la persécution vandale en Afrique, de Victor de Vita, longtemps considérée comme pleine d'exagération.
L'arianisme a unifié en Bétique des populations hétérogènes : Alains, Goths, Suèves. Cette unité va être renforcée par l'arrivée à la tête du peuple, en 428, de Genséric, souverain d'une grande énergie et d'une grande habilité au règne particulièrement long et fertile. Il est intéressé par les provinces Afrique – en particulier par Césarée – informé qu'il est de la situation de crise interne de l'Empire. Le comte d'Afrique alors en place, Boniface, est soupçonné par Valentinien III - du moins par la régente Galla Placidia - d'un certain nombre de méfaits. On lui reproche également de n'être pas assez actif contre l'arianisme. En 427, il est appelé à Ravenne et, refusant de se soumettre, il est décrété ennemi public en 428. Le risque d'une nouvelle guerre civile est réactivé. Genséric est au fait de cette situation qu'il va exploiter. Une thèse malveillante, qui s'appuie sur Procope de Césarée et Jordanès, soutient que Boniface aurait, en 429, “invité” le roi vandale pour s'opposer à Aetius, thèse qui peut être écartée. En revanche les divisions internes à l'Empire doivent être mises en évidence.
En 429, les Vandales débarquent en Maurétanie Tingitane. On dénombre environ 80 000 individus, soit 15 à 20 000 soldats (selon Victor de Vita et Procope [1]). S'ensuit une longue marche de 429 à 439, scindée en plusieurs phases : une phase dramatique, marquée par le siège d'Hippone et la mort d'Augustin en 430 (28 août), et qui se conclut par un premier traité avec Rome en 435 (traité d'Hippone, qui accorde aux envahisseurs un établissement en Afrique au service de Rome), puis une seconde phase de 435 à 439. En 437, Genséric établit sa capitale à Hippone. L'établissement vandale correspond alors aux limites de l'ancienne province de Numidie, ainsi qu'à l'est de la Maurétanie sitifienne et à l'ouest de la Proconsulaire.
En 439, les Vandales s'emparent de la ville de Carthage (dans l'actuelle Tunisie), alors capitale de l'Afrique romaine. Ils menacent ensuite rapidement l'Italie après avoir débarqué en Sicile en 440.
Aussi, en 442, l'empereur Valentinien III leur abandonne de nouvelles terres en Afrique, par le biais d'un deuxième fœdus, reconnaissant ainsi la constitution du royaume vandale d'Afrique autour de Carthage.
La prise de contrôle de la Méditerranée
- Une fois le royaume concédé par le Fœdus, les Vandales poursuivent sur Mare Nostrum par des raids successifs à compter de 440.
Les Vandales, trop peu nombreux, n'occupent jamais véritablement l'ensemble des terres conquises ou abandonnées, principalement pour des raisons démographiques, et à cause de leur isolement par rapport aux populations Berbères et romaines. Ils créent ainsi un vide rapidement occupé par les tribus berbères voisines, peu ou pas romanisées. À l'inverse, c'est sur les territoires correspondant à l'actuelle Tunisie et à l'est de l'Algérie, qu'ils tentent d'asseoir durablement leur pouvoir depuis la ville de Carthage.
Pour cela, ils appliquent une politique de confiscation des terres romaines, contrairement aux autres peuples barbares qui partagent simplement les terres, à l'exemple des Burgondes. Les coutumes et les lois du Bas-Empire berbère romanisé sont conservées dans leur royaume (tablettes dites Albertini, 493–496), mais les Vandales refusent dans un premier temps toute fusion avec la population berbères, hypothéquant ainsi en grande partie leur avenir dans cette région. Ils se réservent les fonctions militaires et politiques, mais, par leur manque de connaissance en lois écrites et en administration, laissent ces tâches aux berbères lettrés.
Au-delà, ils assoient progressivement leur contrôle sur la Méditerranée méridionale : ils conquièrent la Corse et la Sardaigne (455), rançonnent Rome durant quinze jours de pillage systématique (2-16 juin 455), et prennent la Sicile (468), non sans avoir détruit une importante flotte byzantine envoyée contre eux. Finalement peu après la chute officielle de l'Empire romain d'Occident en 476, le pouvoir vandale est reconnu par le nouveau maître de Rome, le barbare Odoacre.
Seule la mort de Genséric, en janvier 477, marque un terme à leur expansion. A partir de cette date, les luttes intestines semblent entraîner un affaiblissement du royaume.
Politique, religion et culture
Dès 430 avec le siège d'Hippone – événement dont la notoriété postérieure est largement due au rôle de saint Augustin dans l'historiographie chrétienne médiévale – les Vandales se heurtent à l'Église catholique. Celle-ci, comme par la suite dans nombre de royaumes barbares, est le refuge privilégié des cadres de la civilisation romaine du Bas-Empire en Afrique du Nord.
L'inimitié est renforcée par la suite, notamment à cause des spoliations de terres et des mesures fiscales prises par les souverains vandales d'Afrique à l'égard des populations. Les spoliations furent de plusieurs ordres et obéirent à plusieurs logiques. La première est religieuse et concerne les temples et leur mobilier religieux - en particulier les vases sacrés - dépradations décrites par le Livre des promesses et des prédications de Dieu de Quodvultdeus. La seconde est d'ordre politique est concerne les bâtiments publics et les terres de l'aristocratie berbère romaine. Enfin, un troisième type de confiscation de terre fut d'ordre économique et servit au payement des troupes et au lotissement des vétérans ayant accomplis leur honesta missio. Ces lotissements étaient héréditaires et l'on peut voire ici une pratique toute romaine.
Les conséquences de l'isolement relatif du pouvoir vandale, en définitive, sont l'exclusion naturelle de véritable fusion entre Vandales et berbères. En définitive, l'intégration des populations vandales est un éléments que les historiens ont du mal à apprécier en particulier après 455 et avec l'apparition de rivalités internes. Lors de la chute de l'empire vandale ceux-ci fusinnèrent avec les berbères de Kabylie en Algérie.
Sur le plan de la religion, les Vandales continuent à être adeptes de l'arianisme (hérésie chrétienne). Cela contribue également à ne pas faciliter les relations entre les Romains d'Afrique – les notables locaux – majoritairement catholiques et leurs nouveaux maîtres. Les rois Genséric et Hunéric persécutent ceux des catholiques qui s'opposent à leur pouvoir, en bannissent certains, et, pour mettre fin à l'opposition systématique des évèques (sacerdotes) placent certains d'entre eux en résidence surveillée dans le sud Tunisien (Gafsa). Cet exil fut longuement décrit par Victor de Vita qui devait y accompagner ses coreligionaires à Sicca Veneria et à Lares, puis dans le désert du Hodna (Histoire de la persécution vandale, II, 27-28). Les berbères Catholiques qui se soumettent à leur pouvoir n'ont pas plus de problèmes, dès lors qu'ils paient l'impôt, qu'avec l'administration romaine antérieure. En 442, après la révolte avortée des optimates vandales, une nouvelle aristocratie se met en place à la tête du royaume, aristocratie de dignitaires et de fonctionnaires qui emprunte beaucoup à l'ancienne administration romaine. Au demeurant, l'administration vandale appliquait la fiscalité et le droit romains et comprenaient nombre d'administrateurs romains de haut rang (ainsi, les veredarii, messagers royaux). Les institutions curiales continuèrent à fonctionner comme peut l'attester la présence de flamine vandale (ainsi, Flavius Geminius Catullinus, propriétaire des terres mentionnées dans les tablettes Albertini, était flamen perpetuus) mais on ignore quels étaient leurs buts et leurs fonctions.
On s'est aperçu, que de nouvelles églises ont alors été construites, y compris même pour le culte catholique berbère. Certes, les souverains vandales ont executé leurs opposants religieux, les ont condamnés aux travaux forcés dans les mines de Sicile, de Sardaigne et de Corse -tout comme le faisaient les Romains avant eux. Hunéric, fervent arien, s'est particulièrement distingué dans la mise au pas des opposants berbères catholiques. Cependant, dès 494, Gunthamund, à la demande d'Eugène de Carthage, rouvrit les églises et rappela d'exil les évêques catholiques.
Malheureusement, les seuls témoignages anciens disponibles sur les Vandales émanent de chroniqueurs catholiques, tel le berbère Victor de Vita, Quodvulteus, Procope de Césarée, Prosper d'Aquitaine.L'apport des Vandales à l'Afrique du Nord a longtemps été évalué comme très faible ; constat établi à regard de la faiblesse des témoignages archéologiques dont nous disposons, et qui répose sur le fait que les Vandales s'installent dans le tout-fait des berbères et des Romains. Dernier élément, les Vandales enterrent leurs morts avec très peu, voire aucun objet. Mais rien ne semble aujourd'hui autoriser à dire que la période vandale a marqué la fin de la civilisation urbaine en Afrique, bien au contraire, comme le soulignent les travaux de Claude Lepelley.
La nouvelle aristocratie vandale adopte progressivement la langue latine et, dès le règne de Genséric, le style de vie des dignitaires berbères romanisés. L’équipement des domi atteste de l'opulence de cette aristocratie, comme l'illustre à ce titre l’étude d'Yvon Thébert sur les thermes de Sidi Ghrib (région de Carthage). L'archéologie le confirme encore par l'invention de sépultures à inhumation offrant des objets attribuables à une culture germanique orientale (plaques et boucles de ceinture en métal cloisonné, fibules en arbalète, etc.), mais aussi des bijoux et du mobilier méditerranéens (bagues, bracelets, colliers, poteries).
Ces tombes sont situées dans des nécropoles suburbaines, dans des églises, comme à Haïdra ou à Tébessa et permettent d'évoquer une certaine acculturation, voire un phénomène de romanisation des élites vandales. Ces dernières ont pu être promptes à adopter un style de vie urbain à l'instar, par exemple, des Ostrogoths en Italie ou des Wisigoths en Espagne au VIIe siècle. À Tebessa, une mosaïque montre encore un enfant vandale portant des vêtements romains : évidemment, ces témoignages ne valent que pour l'aspect matériel de la vie, et peuvent aussi s'expliquer par la faiblesse numérique des envahisseurs immergés dans un milieu étranger à leur culture et leur mode de vie d'origine.
La présence de sépultures sans objet, aussi, échappe à toute analyse, tout comme l'extrême rareté de témoignages archéologiques attribuables aux Vandales en milieu rural.
Le saccage systématique des côtes et des îles de Méditerranée occidentale (Espagne, Sicile (440), Corse, îles Baléares, ...) par les Vandales, fidèles à leur tradition de pillages, et désireux de profiter de leur supériorité maritime, a aussi comme conséquences d'affaiblir un peu plus l'Empire romain, et les provinces touchées ne s'en relèvent jamais. Le royaume vandale s'étendant sur des régions productrices de céréales, l'approvisionnement en blé de l'Italie aussi en est réduit.
Pour autant, il semble que l'Afrique vandale conserve sa prospérité économique. Plusieurs signes semblent en témoigner, comme la présence d'épaves africaines datées du Ve au VIe siècles au large de la Gaule ou, et même dans des temps troublés, l’acheminement constant de vaisselles africaines dans les grands sites portuaires occidentaux.
La chute des Vandales
L'instabilité du trône vandale à la mort de Genséric (luttes intestines), l'affaiblissement des Vandales eux-mêmes, notamment du point de vue militaire (goût du luxe, confort et oisiveté, manque d'entraînement et d'ennemis sérieux à combattre, baisse de la combativité, difficulté de recruter pour l'armée,…...), les conflits politiques et religieux, la division de la noblesse entre nationalistes et pro-byzantins, les attaques de plus en plus fréquentes des Berbères et l'énergie de l'empereur Justinien et de son général Bélisaire, provoquent la chute rapide du royaume vandale d'Afrique du nord.
À la fin du mois d'août 533, Bélisaire débarque en Afrique avec 15000 mercenaires barbares, des Hérules et 1000 Huns : il se rend maître de Carthage à peine deux mois plus tard (octobre) après les batailles de Tricamarum et Decimum, non-loin de Carthage. Au printemps 534, le dernier roi vandale Gélimer, qui s'est réfugié un temps chez ses alliés berbères dans les montagnes de l'Ouest (en kabylie), et qui aurait cherché à rejoindre l'Espagne est emmené à Byzance, où il figure dans le triomphe de Justinien, et il finit ses jours en Galatie.
Les Vandales survivants se réfugièrent dans la partie ouest de leur royaume d'Afrique où l'armée byzantine ne pût pénètrer, cette terre de refuge est l'actuelle région de kabylie en Algérie où l'on y croise leurs descendants à la peau blanches et aux yeux bleus, les vandales de la ville de Carthage fait prisonniers furent déportés en Asie (534-535), d'autres enrôlés de force comme cavaliers auxiliaires de l'Empire byzantin à l'Est.
Voir aussi
Notes et références
- ↑ Ch. Courtois, Les Vandales et l'Afrique romaine, op. cit., p. 216
Sources
- Procope, traduction de Denis Roquet, La guerre contre les Vandales, Les Belles Lettres, série La roue à livres, 1990, (ISBN 2-251-33905-1)
Bibliographie
- Auguste Audollent, « Les Veredarii émissaires impériaux sous le Bas-Empire », Mélanges d'archéologie et d'histoire, 1889, vol. 9, n° 9, pp. 249-278.
- Christian Courtois, Les Vandales et l'Afrique, Paris, 1955.
- Serge Lancel (édition et introduction), Histoire de la persécution vandale en Afrique, Les Belles Lettres, 2002.
- Lucien Musset, Les invasions, les vagues germaniques, PUF, collection Nouvelle Clio – l’histoire et ses problèmes, Paris, 1965, 2e édition 1969
- Yves Modéran, Les Maures et l’Afrique romaine (IVe-VIIe siècle), Bibliothèque de l'École française de Rome (BEFAR), vol. 314, Rome, 2003.
Liens internes
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