Politique italienne de Napoléon III

Politique italienne de Napoléon III

La politique italienne de Napoléon III est marquée par le soutien de la France à l'unification italienne, menacée par les ambitions de l'empire d'Autriche.

Arrivé au pouvoir par son coup d'État de 1851, Napoléon III, ex-carbonaro, demeure préoccupé par la question de l'unité italienne. La nation italienne reste en effet divisée en de nombreuses petites entités territoriales qu'il a désormais — en tant que maître d'une puissance militaire d'importance — le pouvoir d'unifier. Malgré sa volonté propre, il doit d'abord gérer la situation française et s'allier les catholiques, inquiets des menaces sur les intérêts du Pape. Il décide finalement de s'engager pour la cause italienne et contre l'empire d'Autriche en 1859, gagne, mais doit finalement modérer son action du fait d'une situation diplomatique inquiétante, notamment la menace prussienne.

La France y gagne la Lombardie qu'elle rétrocède à Victor-Emmanuel II. Après l'annexion des duchés de Parme, Modène et de Toscane, la France reçoit la Savoie et le Comté de Nice. La paix de Villafranca est signée, mais laisse la France dans une situation diplomatique difficile.

Sommaire

La situation en Italie

La situation géopolitique italienne est très morcelée entre les États pontificaux, les royaumes des Deux-Siciles, de petits duchés (Parme, Modène et le Grand-duché de Toscane) et de Piémont-Sardaigne ainsi que l'Autriche. Elle est en position dominante car elle contrôle directement la Lombardie Vénétie et, par princes interposés, Modène et la Toscane.

En 1847, l'Italie connait une poussée libérale avec l'élection de Pie IX qui amnistie les prisonniers politiques et l'introduction de réformes institutionnelles[1]. L'opinion libérale est galvanisée par la position de l’Église, Léopold II de Toscane réduit la censure[1].

Louis-Napoléon Bonaparte, bien avant d'être élu président de la République sous la Deuxième République, est profondément marqué par les évènements de février 1848 qui débute à Paris et qui ont des répercussions dans toute l'Europe. En Autriche, le 14 mars, Metternich doit laisser son poste[2].

Les évènements à Vienne ont une répercussion immédiate dans le Royaume lombard-vénitien, Venise s'insurge la 17 mars suivie par Milan qui chasse les troupes autrichiennes au cours de cinq jours d'insurrections[2]. Un gouvernement provisoire est constitué[2]. Les différents États mettent en place une constitution sur le modèle de la constitution française et dont les parlements se montrent anti-autrichiens [3]. Le 23 mars, Charles-Albert de Savoie, roi de Piémont-Sardaigne, décide d'apporter son aide aux insurgés et déclare la guerre à l'Autriche[2]. Il est soutenu militairement les États pontificaux, le royaume des Deux-Siciles, le Grand-duché de Toscane avant qu'ils ne fassent volte-face, les officiers supérieurs qui assument le commandement sont pour la plupart des carbonari qui refusent de renoncer à l'expédition[4]. Pie IX recule devant le mécontentement de Vienne au soutien de Rome à une telle action[5] et Ferdinand II qui entrevoit l'hégémonie piémontaise lorsque celle-ci procède à l'annexion par plébiscite de la Lombardie et des différents duchés alors même que la guerre n'est pas finie[6] et surtout la Sicile qui déclare la déchéance de Ferdinand II et son indépendante (13 avril)[7],[8].

Après les premiers succès, le 25 juillet 1848, le royaume de Sardaigne est défait par les troupes autrichiennes mené par Schwarzenberg à Custoza[9].

Face à la contestation libérale et démocratique et l’assassinat de son chef du gouvernement Pellegrino Rossi, le pape Pie IX quitte Rome et une république est instituée dont Giuseppe Mazzini est un des principaux dirigeants. Le pape revient à Rome le 1er avril 1849 avec l'aide militaire des Français, fidèles alliés du Pape[10].

Charles-Albert reprend les hostilités mais après avoir été définitivement battu à la bataille de Novare, il abdique au profit de son fils Victor-Emmanuel[11] qui signe l'armistice avec les Autrichiens[11]. La Lombardie redevient Autrichienne, les petits duchés retrouvent leur souverains, seule Venise résiste provisoirement[9]. Cavour est appelé au pouvoir en octobre 1850[12] et devient président du conseil (premier ministre) en février 1852[13].

Afin de donner une dimension internationale au « problème italien », Cavour convainc Victor-Emmanuel à envoyer des troupes à la guerre de Crimée[14].

« Le principe de nationalités » : la liberté pour les Italiens

Caricature de 1861

Lorsqu'il prend le pouvoir par les élections, puis par le coup d'État du 2 décembre 1851, Napoléon III est occupé par « le principe des nationalités » du Printemps des Peuples. Il souhaite que les Italiens soient libres. Son véritable problème, qui se développe au fil des années, est de soutenir ou non l'unité italienne. Mais les Français, catholiques pour beaucoup, pensent que cette unité italienne se fera au détriment du Pape car il n'aura alors plus d'États pontificaux. Cela entraînerait aussi une guerre contre l'Autriche.

La situation dans les États occupés[Lesquels ?] après février 1848 devient de plus en plus difficile pour les populations : de nombreuses insurrections (entre 1850 et 1857) ont lieu[Lesquels ?] et sont violemment réprimées par les Autrichiens. Les Autrichiens mettent en place dans les États pontificaux une autorité corrompue, violente et autoritaire[réf. nécessaire]. Cavour, au pouvoir depuis 1852, souhaite moderniser le Royaume de Sardaigne. Il essaie d'entretenir de bonnes relations diplomatiques avec l'Empire en jouant sur le sentiment pro-italien de Napoléon III. La guerre de Crimée permet ces rapprochements diplomatiques[14]. Orsini, lors de son procès, est défendu par l'avocat républicain Jules Favre.

Napoléon III, sortit indemne de cet attentat comme son épouse Eugénie, laisse circuler les écrits nationalistes d'Orsini, et prend contact avec Cavour, par l'entremise de Henri Conneau, durant l'été 1858. Ils se rencontrent à Plombières le 21 juillet 1858 et mettent en place une alliance, définissant une stratégie pour que l'unité italienne voit le jour[15]. En premier, une alliance militaire entre la France et le Piémont se met en place afin de chasser les Autrichiens du territoire italien. En second lieu, une organisation politique de l'Italie est décidée lorsque la victoire sera acquise. Le pape présidera alors cette Italie réunifiée, composée de quatre États : l'Italie du Nord, l'Italie Centrale, les États pontificaux et le royaume des Deux-Siciles[15].

En échange de l'aide de la France, Cavour promet à Napoléon III la Savoie et la ville de Nice[15]. À partir de novembre 1858, la préparation française à la guerre se met en place par l'entremise d'Adolphe Niel[réf. nécessaire]. Deux mois plus tard, le prince Napoléon se rend dans le Piémont afin d'y préparer son mariage avec la fille de Victor-Emmanuel, mais aussi pour signer un accord trilatéral (militaire, financier et diplomatique)[15].

Pendant ce temps, à Paris, l'empereur reçoit les différents corps diplomatiques des pays européens et conclut dans le plus grand secret un accord avec le tsar Alexandre II de Russie afin que son pays reste neutre si une guerre voit le jour entre la France et l'Autriche. La reine Victoria manifeste son désaccord en apprenant les intentions de l'Empereur[16].

La guerre d'Italie : avril à juin 1859

Les États italiens et les dates de leurs annexions.

La guerre commence par un ultimatum des Autrichiens lancé au gouvernement de Cavour qui fait le nécessaire pour les provoquer[17] : si les préparatifs militaires ne s'arrêtent pas, alors ils entreront dans le royaume de Piémont-Sardaigne. C'est ce qui se passe le 27 avril 1859 lorsque les troupes de Ferencz Gyulai pénètrent dans le royaume pour anticiper l'arrivée des troupes françaises[17].

Le 3 mai 1859, Napoléon III déclare son intention de libérer l'Italie « des Alpes à l'Adriatique. » Comme il l'avait déjà fait quatre ans plus tôt en Crimée, il lance ses généraux dans une guerre surprise face à laquelle l'état major n'a ni plan établi, ni préparation. L'empereur a de grands espoirs mais sans penser aux efforts nécessaires pour les réaliser. L'essentiel des opérations militaires se déroulent en deux mois sur le territoire de la Lombardie. Les premiers combats victorieux ont lieu à Palestro, Magenta, Solférino et San Martino pour les Piémontais durant les mois de mai-juin 1859[18].

Le 6 juin, Napoléon III, effrayé par les ravages meurtriers de la guerre (presque 12 000 morts, blessés ou prisonniers dans chaque camp à Solférino[18]) , déclare la fin des hostilités. Napoléon III craint aussi que les Autrichiens, alliés aux Prussiens, se mobilisent sur le front du Rhin, afin de créer un nouveau front, et donc déstabilisent l'armée française. L'empereur propose à l'empereur d'Autriche François-Joseph de se rencontrer à Villafranca. Un armistice est signé le 11 juillet 1859[18]. L'Autriche cède la Lombardie à la France qui la rétrocède au Royaume de Sardaigne et retire ses armées présentes dans les États pontificaux. Les duchés de Modène et de Parme doivent être restaurés[19].

Cavour, en total désaccord avec cet armistice, se sentant trahi, démissionne pour marquer sa desaprobation[18]. En novembre 1859, la paix à Zurich met un terme définitif à la guerre et donc à la participation française dans cette guerre. Napoléon III compose avec la méfiance du Royaume-Uni en remplaçant Walewski, qui est hostile à sa politique, par Thouvenel, un anticlérical et un défenseur de l'alliance avec le Royaume-Uni. Napoléon, comme tous les gouvernements français, ne trouve qu'une solution provisoire au problème italien. Pour autant, Napoléon III réaffirme son soutien aux Italiens dans leur processus d'unification.

De juillet 1859 à mars 1860, les duchés italiens se rallient les uns après les autres au mouvement unitaire[19], soutenu par l'opinion publique, et le roi de Sardaigne, Victor-Emmanuel. Ces annexions sont contrebalancées par l'acquisition du comté de Nice et du duché de Savoie sans que le cadre géopolitique soit stabilisé[20].

L'expédition des Mille menée par Garibaldi, qui débute en mai 1860, permet l'annexion du royaume des Deux-Siciles[21]. Le 17 mars 1861, le Royaume d'Italie est proclamé, Victor-Emmanuel II devient roi d'Italie[22].

Raisons de la modération française

Trois raisons à la renonciation de l'Empereur : ni Magenta, ni Solférino n'ont été des batailles décisives. De plus, son idée d'une fédération est menacée par les mouvements insurrectionnels qui débutent dans les différents duchés[18]. Pire, Napoléon III a oublié de tenir compte de la Confédération germanique qui est liée par un accord d'assistance avec l'Autriche. La mobilisation de la Prusse sur le Rhin, combinée aux difficultés militaires et le risque d'une défaite en Vénétie, modèrent son enthousiasme et le décident à mettre fin à cette guerre[18].

En outre, d'un côté les catholiques s'agitent de toute part en Europe pour obtenir l'indépendance des territoires pontificaux; et de l'autre côté les républicains français protestent contre l'abandon des traditions révolutionnaires dont ils ont approuvé le renouveau avec enthousiasme.

L'Italie souhaite compléter son unification avec Rome

Article détaillé : Prise de Rome.

L'intérêt principal de Napoléon III envers l'unité italienne est de garder en place le Pape ainsi que ses États pontificaux dans la future Italie qu'il a imaginée. Le roi Victor-Emmanuel a en effet laissé Garibaldi envahir les États du Pape malgré une promesse que le roi avait faite à l'Empereur. Ce dernier envoie alors des troupes pour protéger le Pape et empêcher les Italiens de rentrer dans Rome. Une convention est signée entre la France et l'Italie le 15 septembre 1864 par laquelle les Français acceptent de se retirer des États du Pape à condition que les troupes italiennes ne franchissent plus les frontières des États pontificaux.

En décembre 1866, les dernières troupes françaises quittent Rome, mais de nouvelles insurrections éclatent dans la ville, en 1867, à l'instigation des volontaires de Garibaldi. Napoléon III ordonne le retour de ses troupes et impose que Rome soit rendue à l'Église catholique romaine.

La guerre franco-prussienne de 1870 va servir les intérêts de l'unité italienne. En effet, l'Italie reste neutre dans ce conflit. La France rappelle alors ses troupes présentes dans Rome pour les envoyer sur le front prussien. La défaite française à Sedan et la proclamation de la Troisième République permettent au roi Victor-Emmanuel de lancer un ultimatum au Pape : celui-ci doit lui donner Rome, en échange de quoi son indépendance spirituelle est reconnue. Le Pape refuse. Les troupes italiennes rentrent dans Rome et prennent possession des États pontificaux. Un plébiscite entérine cette annexion et Rome devient la capitale du Royaume d'Italie, début juillet 1871.

Note

  1. a et b Banti, 2011, p. 72
  2. a, b, c et d Banti, 2011, p. 77
  3. Banti, 2011, p. 76
  4. Banti, 2011, p. 78
  5. Banti, 2011, p. 79
  6. Banti, 2011, p. 79, 80
  7. Statuto Fondamentale del Regno di Sicilia. Consulté le 27 août 2011
  8. Studi Garibaldini : Il 1848 in Italia, Marsala, Centro Stampa Rubino, 2000, p. 19 
  9. a et b Banti, 2011, p. 81
  10. Banti, 2011, p. 81-85
  11. a et b Banti, 2011, p. 89
  12. Banti, 2011, p. 98
  13. Banti, 2011, p. 99
  14. a et b Banti, 2011, p. 101
  15. a, b, c et d Banti, 2011, p. 105
  16. Napoléon III. Consulté le 25 août 2011
  17. a et b Banti, 2011, p. 106
  18. a, b, c, d, e et f Banti, 2011, p. 109
  19. a et b Banti, 2011, p. 110
  20. Banti, 2011, p. 111
  21. Banti, 2011, p. 111-116
  22. Banti, 2011, p. 117

Bibliographie

Ouvrage utilisé pour la rédaction de l'article : Ouvrage utilisé comme source pour la rédaction de cet article

  • Soutou Georges-Henri, L'Europe de 1815 à nos jours, Paris, Presses Universitaires de France, 2007.
  • Olivesi Antoine et Nouschi André, La France de 1848 à 1914, Paris, Armand Colin, 2005.
  • Pécout Gilles, Naissance de l'Italie contemporaine 1770-1922, Paris, Nathan, 2002.
  • Milza Pierre, Histoire de l'Italie, des origines à nos jours, Paris, Fayard, 2005.
  • Miquel Pierre, le second Empire, Paris, Plon, 1992.
  • (it) Alberto Mario Banti, Il Risorgimento italiano, Bari, Laterza, 2011, 231 p. (ISBN 9788842085744) Ouvrage utilisé pour la rédaction de l'article 

Voir aussi

Liens internes

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