George Perrec

George Perrec

Georges Perec

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Georges Perec
Activité(s) Romancier
Naissance 7 mars 1936
Paris
Décès 3 mars 1982
Ivry-sur-Seine
Langue d'écriture Français
Mouvement(s) Oulipo
Distinctions Prix Renaudot, Prix Médicis

Georges Perec, né le 7 mars 1936 à Paris et décédé le 3 mars 1982 à Ivry-sur-Seine (Val-de-Marne), est un écrivain français. Il fut membre de l'Oulipo à partir de 1967, et ses œuvres furent alors fondées sur l'utilisation de contraintes formelles littéraires ou mathématiques qui marquèrent son style.[1]

Sommaire

Biographie

Son père, Icek Peretz (1909-1940), et sa mère, Cyrla Szulewicz (1913-1943), tous deux juifs d'origine polonaise, se marient en 1934. Georges Perec naît le samedi 7 mars 1936 vers 21 h dans une maternité du 19e arrondissement de Paris. Il passera sa petite enfance rue Vilin dans le quartier de Belleville.

Engagé volontaire contre l'Allemagne dans la guerre franco-allemande de 1939, Icek Peretz est mortellement blessé en juin 1940. En 1941, la mère du petit Georges, pour lui sauver la vie, l'expédie à Villard-de-Lans par un train de la Croix-Rouge. Il y sera baptisé et son nom, francisé, deviendra Pérec. Le petit Georges passera là le reste de la guerre avec une partie de sa famille paternelle. Sa mère disparaît en déportation, à Auschwitz, en 1943. Georges retourne à Paris en 1945 où il est adopté par la sœur de son père, Esther, et son mari David Bienenfeld. Leur fille est l’écrivaine Bianca Lamblin.

De 1946 à 1954, il fait ses études à l'école communale de la rue des Bauches (Paris XVIe) avant d'intégrer le lycée Claude-Bernard puis le collège Geoffroy-Saint-Hilaire d'Étampes où il aura pour professeur Jean Duvignaud[2] (avec qui, entre autres, il fondera en 1972 la revue Cause commune). Il entame une psychothérapie avec Françoise Dolto en 1949. En 1954, après une hypokhâgne au Lycée Henri-IV, il commence des études d'histoire qu'il abandonne vite. En 1956, il commence une psychanalyse avec Michel de M'Uzan[3].

De 1958 à 1959, il fait son service militaire à Pau, dans un régiment de parachutistes. En 1960, il se marie avec Paulette Pétras puis il part pour Sfax en Tunisie d'où il revient l'année suivante. Il devient en 1962 documentaliste en neurophysiologie au CNRS. En 1965, il remporte le Prix Renaudot pour Les choses puis, en 1967 il entre à l'Oulipo[4]. Cela marque un point important dans son œuvre littéraire puisque désormais ses textes suivront en général des contraintes de type oulipienne. De plus, Perec est toujours l'auteur emblématique de l'Oulipo. Il est, avec Raymond Queneau et Italo Calvino, l'un des membres de l'Ouvroir dont les ouvrages ont eu le plus de succès[5].

De 1971 à 1975 il fait une psychanalyse avec Jean-Bertrand Pontalis. En 1976 il publie des Mots croisés à un rythme hebdomadaire dans le journal Le Point. En 1978, il publie La Vie mode d'emploi et, suite au succès de cette œuvre, il quitte son emploi au CNRS pour se consacrer entièrement à l’écriture.

Il passe les six dernières années de sa vie avec la cinéaste Catherine Binet dont il produit le film Les Jeux de la comtesse Dolingen de Gratz. Il meurt d'un cancer des bronches le 3 mars 1982 à l'hôpital d'Ivry et repose désormais au columbarium du cimetière du Père-Lachaise à Paris[6]. Il y aura de nombreuses publications posthumes de romans et regroupements de textes.

Son œuvre

Georges Perec s'est fait connaître dès la parution de son premier roman, Les Choses. Une histoire des années soixante, publié par Maurice Nadeau dans sa collection des Lettres nouvelles, chez Julliard. Cet ouvrage, qui restituait l'air du temps à l'orée de la société de consommation, fut couronné par le Prix Renaudot[7] et rencontra un vif succès.

Ayant signé chez Denoël pour ses cinq prochains livres, il surprit avec son opus suivant, Quel petit vélo à guidon chromé au fond de la cour ?. La critique, qui ne retrouvait pas l'auteur qu'elle connaissait - un fin observateur de la vie quotidienne - dans ce roman faussement drolatique, au ton primesautier, au comique notamment basé sur la récurrence d'une incertitude onomastique, qui plus est doté d'un index savamment incomplet, fut déroutée : elle ne lui réserva pas le meilleur accueil.

Le roman suivant, Un Homme qui dort, portrait d'une solitude urbaine autant inspiré par Kafka que par le Bartleby de Melville, acheva de classer son auteur parmi les inclassables. Ce que confirma la parution de La Disparition, premier roman oulipien de Perec. Au-delà de l'extravagante prouesse lexicographique de ce roman lipogrammatique, les contorsions qu'y subit la langue sont à la mesure de sa thématique : l'absence, et la douleur qu'elle engendre.

Comme d'autres auteurs français des années soixante, Georges Perec a également, en Allemagne, une activité d'auteur radiophonique. Sa pièce Die Maschine (avec Eugen Helmlé) remporte un grand succès lors de sa diffusion par le Saarländischer Rundfunk. Elle sera suivie de quatre autres pièces, dont certaines seront également jouées au théâtre en France (Wucherungen, devenue L'Augmentation pour la mise en scène de Marcel Cuvelier en février 1970).

Après la parution de La Disparition, Georges Perec publie avec Jacques Roubaud et Pierre Lusson un traité sur le jeu de go, qu'il pratique notamment au Moulin d'Andé. Il mène de front plusieurs travaux d'écriture - dont certains (L'Arbre, Lieux) n'aboutiront pas.

Il pratique l'écriture feuilletonnesque à partir du 81e numéro de la Quinzaine littéraire, le bimensuel de Maurice Nadeau, où il livre ce qui deviendra la partie fictionnelle de W ou le souvenir d'enfance. Mais la noirceur de son invention déroute le lectorat ; éprouvant par ailleurs des difficultés d'écriture, Georges Perec interrompt cette publication périodique.

En 1974, Georges Perec portera Un Homme qui dort à l'écran, en collaboration avec Bernard Queysanne. L'interprétation de l'unique acteur du film, Jacques Spiesser, le travail de la bande son du film Philippe Drogoz (qui fut même diffusée à la radio !) comme de la bande image de Bernard Zitzermann sont remarquables.

Georges Perec oublie la forme romanesque en publiant la relation de 124 de ses rêves (La Boutique obscure, 1973) et un livre examinant son rapport à l'espace, de celui de la page blanche à l'espace du vide sidéral, en passant par l'espace urbain (Espèces d'espaces, 1974).

Puis il achève enfin W ou le souvenir d'enfance, qui paraît en 1975. Très estimé, ce grand roman moderne obtient un succès critique qui place son auteur parmi les meilleurs de son temps. L'alternance binaire (ternaire dans les premiers manuscrits) d'une fiction olympique fascisante et d'une écriture autobiographique fragmentaire adosse une histoire collective fantasmée au destin singulier de l'orphelin qu'est l'auteur.

La consécration attend Georges Perec en 1978, lors de la publication de La Vie mode d'emploi. Cet ouvrage, qui arbore en couverture le mot « romans » — au pluriel — obtient le Prix Médicis et un grand succès public, qui permet à son auteur de se consacrer exclusivement à son art : il abandonne son travail de documentaliste. Mais il ne lui reste que quelques années à vivre.

Il produit le film Les Jeux de la comtesse Dolingen de Gratz écrit et réalisé par sa compagne Catherine Binet, écrit les dialogues d'un autre (Série Noire d'Alain Corneau, 1978), voyage, donne des conférences, verbicrucise avec régularité, filme à Ellis Island avec Robert Bober l'exploration de leurs racines juives, publie une longue nouvelle dans la collection L'Instant romanesque chez Balland (Un Cabinet d'amateur), des poèmes (La Clôture) et un premier tome de pièces de théâtre (resté unique) chez Hachette.

Mais il n'achève pas son roman 53 jours, dont le titre fait référence au temps que la rédaction de La Chartreuse demanda à Stendhal.

Quelques prouesses lexicographiques de Georges Perec

Au nombre de ses exercices de style les plus remarquables figurent notamment :

Et pourtant, ainsi que le confia Georges Perec « il y a plein de E dans la Disparition » (Rêve n° 95 au sein de La Boutique obscure). Cette confidence décontenance quelque peu les exégètes. Si sa judaïté ne tint pas la place que certains lui accordent, Perec savait assez d'hébreu - comme de grec - pour savoir que la lettre e est équivalente au hé hébraïque et que cette lettre « représente le principe de l'aspiration vitale », l'esprit et donc la vie. Par l'occultation de cette voyelle, Georges Perec suggéra à ses lecteurs de ne pas prendre la lettre d'un texte - fut-elle absente - pour l'esprit de ce texte. Il s'agissait d'une invitation à lire autrement, de manière infra-textuelle. C'est également ce que pointe la célèbre citation, tirée du Michel Strogoff de Jules Verne : « Regarde de tous tes yeux, regarde. », placée en tête de La Vie mode d'emploi. Il s'agit de ne pas perdre de vue le fil conducteur - le fil télégraphique coupé chez Verne. Mais où peuvent se trouver ces e ? Il suffit de transcrire les chiffres inclus dans la Disparition par la lettre dont ils désignent le rang dans l'alphabet. Certes, il s'agit d'un code enfantin… le même que celui dont use Arsène Lupin, dans Les Jeux du soleil et qui lui livre la solution du puzzle (énigme, en l'occurrence le nom d'un cheval, ETNA, mais aussi celui d'un VOLCAN). Georges Perec possédait bien son Maurice Leblanc, comme son Gaston Leroux. Il éprouvait surtout une admiration réelle pour l'œuvre de Raymond Roussel qui, lui même, admirait Jules Verne. A noter que le mot Volcan apparaît plusieurs fois dans la Disparition - imprimé ou suggéré comme lorsque Perec évoque Malcolm Lowry (Au-dessous du Volcan).

En fait, ce que la Disparition nous invite à découvrir, c'est un nom, jamais cité, et qui contient la lettre E. Roussel eut la même démarche dans un texte de grande jeunesse, intitulé le Haut de la figure, écrivant : « Un beau jour, la manie des sciences m'ayant repris, j'étais allé sonner au petit rez-de-chaussée de Volcan, dont les anciennes leçons m'avaient laissé un souvenir de grande clarté ». (Comment j'ai écrit certains de mes livres). Ce pseudonyme en masque un autre dissimulant l'état civil de celui pour qui Raymond Roussel fit construire - Bd Richard Wallace - un laboratoire destiné, notamment à des travaux portant sur l'utilisation du vide. Et cette énigme se décèle aussi en filigrane dans la Vie mode d'emploi, et de manière plus évidente dans le singulier texte de Perec « Allées et venues rue de l'Assomption », à mettre en relation avec « la Vue » de Roussel.

Inversant cette contrainte, il écrivit à la suite de La Disparition un roman intitulé Les Revenentes, dans lequel il utilise comme seule voyelle le e (c'est donc aussi un lipogramme, puisque les lettres a, i, o, u et y n'y sont pas utilisées ; c'est même un lipogramme d'un genre particulier, à savoir un monovocalisme en e). Toutefois, et comme son titre l'indique, le roman les Revenentes est un pastiche des œuvres de Perec lui-même.

  • des monovocalismes en a (What a man !), en o (Morton's ob).
  • un palindrome de 1247 mots (5566 lettres) qui resta pendant longtemps le plus long existant (cf.[8].
  • l'incroyable enchevêtrement de contraintes que représente La Vie mode d'emploi (1978, Prix Médicis)[9], probablement son livre le plus abouti, dans lequel Georges Perec explore de façon méthodique la vie des différents habitants d'un immeuble, selon une contrainte de circulation : la polygraphie du cavalier . À cette première contrainte s'ajoutent de nombreuses autres, qui sont ordonnées selon un bi-carré latin orthogonal d'ordre 10. Bien que ces contraintes soient invisibles à la lecture de ce livre-puzzle, elles ont été mises à la disposition du lecteur par l'édition du Cahier des charges de La Vie mode d'emploi (CNRS/Zulma, 1993).

Apocryphe

On lui attribue parfois le célèbre pangramme : Portez ce vieux whisky au juge blond qui fume, qu'il aurait été d'ailleurs certainement capable d'inventer (chaque consonne n'y est qu'une seule fois, et l'ensemble forme un alexandrin à la métrique parfaite, genre de contraintes qu'il affectionnait), mais qui a été publié dans un magazine belge pour enfants (Mickey Magazine) en 1957. Il est en revanche de façon certaine l'auteur du pangramme lipogrammatique suivant : « Portons dix bons whiskys à l'avocat goujat qui fumait au zoo », « post-scriptum tout à fait saisissant » du sixième chapitre de La Disparition.

Postérité

Il existe une rue Georges-Perec dans le 20e arrondissement de Paris.

Bibliographie

Livres anthumes

Livres posthumes

L'amateur trouvera une bibliographie un rien plus complète dans l'excellent ouvrage de Bernard Magné Tentative d'inventaire pas trop approximatif des écrits de Georges Perec publié dans « Les cahiers de Littératures » aux Presses Universitaires du Mirail (Toulouse, 1993).

Quelques études consacrées à Georges Perec

  • Georges Perec par Claude Burgelin (Éditions du Seuil, collection Les Contemporains, 1990)
  • La Mémoire et l'Oblique. Georges Perec autobiographe de Philippe Lejeune (P.O.L., 1991)
  • La Lettre fantôme de Ali Magoudi (Éditions de Minuit, collection Critique, 1996)
  • Partie de dominos chez Monsieur Lefèvre. Perec avec Freud, Perec contre Freud de Claude Burgelin (Circé, 1996)
  • Georges Perec de Bernard Magné (Fernand Nathan, collection 128, 1999)
  • Georges Perec. La Contrainte du réel de Manet van Montfrans (Rodopi, Amsterdam, 1999)
  • " PERECgrinations ludiques, étude de quelques mécanismes du jeu dans l'oeuvre romanesque de Georges Perec" - Sylvie Rosienski-Pellerin ( ed. du Gref -Toronto 1995)
  • La grande catena. Studi su "La Vie mode d'emploi" di Georges Perec de Rinaldo Rinaldi, Genova – Milano, Marietti 1820, 2004, pp. 195.
  • L'Arc N 76, Georges Perec, Aix-en-Provence, (L'Arc, 1979)
  • Anne Roche, commente « W ou le souvenir d'enfance de Georges Perec » , Foliothèque, Gallimard, 1995.

Une biographie a été consacrée à Georges Perec :

  • Georges Perec, A Life in the words de David Bellos (Harvill/HarperCollins, 1993)
  • Georges Perec, Une Vie dans les mots (traduite par Françoise Cartano et l'auteur, Éditions du Seuil, 1994)

Cette biographie a suscité de vives réactions, tant de la part de la famille de l'écrivain (Bianca Lamblin, La Biographie de Georges Perec par David Bellos - Lecture critique, Le Jardin d'essai, 2000) que de la part de ses amis et exégètes francophones. Fait assez rare dans l'édition biographique française, la parution de l'ouvrage de David Bellos a même provoqué la parution d'un volume correctif :

  • Antibiotiques (Septième livraison des Cahiers Georges Perec, Le Castor astral, 2003).

Une revue, Le Cabinet d'amateur est consacrée à Georges Perec. Originellement publiée en volume, elle existe sur internet depuis 2000.

L' Association Georges Perec

Créée fin 1982 par Éric Beaumatin, l'Association Georges Perec a pour but de promouvoir la lecture, l'étude et le rayonnement de l'œuvre de Georges Perec et de développer, de conserver et exploiter un fonds documentaire qui est sa propriété et dont la vocation est publique.

Ce fonds documentaire comprend la quasi-totalité des éditions françaises et étrangères des œuvres de Georges Perec, ainsi que des études consacrées à cet auteur. Elle accueille également les travaux universitaires, francophones ou non, se rapportant à Georges Perec.

Sise à Paris, à la bibliothèque de l'Arsenal, l'Association Georges Perec accueille les chercheurs lors de sa permanence hebdomadaire. Elle organise un séminaire à l'université Paris-VII-Jussieu, où, chaque mois de l'année universitaire, depuis 1986, un chercheur vient présenter ses travaux.

Elle publie un bulletin bisannuel interne - qui en est à sa quarante-sixième livraison - ainsi que les Cahiers Georges Perec.

Les Cahiers Georges Perec

Les Cahiers Georges Perec sont une publication de l'Association Georges Perec, dédiée aux études consacrées à Georges Perec. À ce jour sont parus :

  • la première livraison des Cahiers Georges Perec : Colloque de Cerisy, juillet 1984 (P.O.L. éditeur, 1985)
  • la deuxième : W ou le souvenir d'enfance : une fiction (Séminaire 1986/1987) (Textuel 34/44 n° 21, 1988)
  • la troisième : Presbytère et prolétaires : le dossier PALF. Avec Marcel Bénabou (Éditions du Limon, 1989)
  • la quatrième : Les poèmes hétérogrammatiques (Éditions du Limon, 1990)
  • la cinquième : Mélanges (Éditions du Limon, 1993)
  • la sixième : L'Œil, d'abord... Georges Perec et la peinture (Éditions du Seuil, 1996), contenant des études de Jean-Yves Pouilloux, Bernard Magné, Ian Monk, Dominique Quélen, etc.
  • la septième : Antibiotiques (Le Castor astral, 2003)
  • la huitième : Colloque de Montréal (Le Castor astral, 2005)
  • et la neuvième : Le Cinématographe (Le Castor astral, 2006)

Les prochaines livraisons des Cahiers Georges Perec sont à l'étude ; Hans Hartje projette de traiter des pièces radiophoniques, il est aussi question d'un cahier au sujet des traductions, d'un autre au sujet de la réception de l'œuvre de Georges Perec ; un bilan du Onze, thème perecquien s'il en est, reste possible.

Notes et références

Voir aussi

Liens internes

Liens externes


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