- Famine
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Pour l’article homonyme, voir famine (informatique).
La famine est une situation dans laquelle la population d'une zone géographique donnée, ou seulement une partie de cette population, manque de nourriture. L'état de sous-alimentation est atteint à moins de 1200 calories par jour (la moyenne normale étant de 2400 calories par personne) et peut, s'il se prolonge, provoquer la mort. Sylvie Brunel, dans son ouvrage intitulé Famines et politiques, explique que "la famine désigne les peuples qui, à un moment donné de leur histoire, voient nier leur statut social et politique, leurs droits fondamentaux en tant qu'êtres humains". Ainsi la famine est souvent la conséquence d'une politique de misanthropie.
Sommaire
Étymologie
Le mot famine est attesté en 1170 et est un dérivé de faim.
Le terme disette est employé pour une situation de pénurie moins grave. Ce terme ne doit pas être confondu lorsqu'il est employé pour désigner une personne souffrant d'anorexie qui s'impose une disette alors que les aliments sont disponibles.
Causes
Divers évènements peuvent avoir un impact plus ou moins directs sur l'apparition d'un état de famine.
Des causes naturelles comme un changement climatique, souvent la sécheresse, mais également des catastrophes naturelles ou des maladies végétales (comme le mildiou de la pomme de terre en Irlande au XIXe siècle) peuvent entraîner une famine.[réf. nécessaire] Grâce aux progrès techniques en agriculture, ce type de famine est éliminé dans de nombreuses parties du monde.[réf. nécessaire]
L'Homme est également une des causes des famines, à travers les guerres (comme au cours de la guerre civile russe), l'instabilité sociale ou même la volonté politique.
La déstabilisation du marché de la nourriture, comme par exemple la distribution d'aide humanitaire en dehors d'un contexte d'urgence ou la suppression des barrières douanières, peut également amener à la faillite de l'agriculture locale et favoriser l'émergence d'une famine.
Les variations de ces facteurs humains et météorologiques expliquent les changements spatio-temporels des zones touchées par la faim[1].
Dans la période contemporaine, nombre d'ONG ou de personnalités comme Amartya Sen, "prix nobel" d'économie, ont développé l'idée que la famine est devenue plutôt un problème de distribution alimentaire et de pauvreté, que de manque global de nourriture[2]. La révolution verte avec l'amélioration génétique des plantes pourrait permettre de réduire la crise des pays connaissant la plus grande explosion démographique comme l'Inde et en Afrique au XXe siècle, mais l'accès à la nourriture n'est pas égal pour tous. Et une grande quantité de nourriture non consommée est détruite annuellement. De même les rats, souris et certains insectes détruisent une grande quantité de nourriture mal stockées dans certains pays. Cette approche de l'évolution contemporaine de la production et consommation de biens alimentaires est en partie invalidée par la crise alimentaire mondiale de 2007-2008[réf. nécessaire].
Histoire
La famine est un problème ancien : la Bible y fait référence comme un des Quatre cavaliers de l'Apocalypse.
Dans le passé, l'arme de la famine est souvent utilisée dans le siège des villes pour obtenir la reddition sans combat (comme lors du siège d'Alésia). La politique dite de la terre brûlée utilise de la même manière la famine dans un but défensif.
Grandes famines
Dans l'Antiquité en Égypte les famines sont principalement provoquées par la trop faible ou forte crue du Nil.
Les famines au Moyen Âge interviennent lorsque les récoltes sont mauvaises, en particulier pendant la soudure. Le facteur météorologique est aggravé par la guerre et le passage dévastateur des soldats dans les champs (comme durant la guerre de Cent Ans). Les pauvres sont toujours les plus touchés. Les villes organisent le ravitaillement en blé, venu parfois de loin et à fort coût. La famine rend les corps plus faibles face aux épidémies. Le lettré Raoul Glaber a laissé un témoignage écrit de la famine qui a sévi en Bourgogne vers 1033. Dès lors la famine est un problème récurrent. Les Occidentaux vivent dans la « hantise de la faim » selon l'expression de Jacques Le Goff[3]. Pourtant au XIIe et au XIIIe siècles, les grandes famines sont plus rares[4]
La grande famine de 1693-1694 est due à un printemps et un été trop pluvieux en 1692, suivis en 1693 d'une récolte très médiocre, causant une sous-alimentation qui favorise les épidémies comme le typhus. Elle se produit sur fond de guerre de la Ligue d'Augsbourg, de relèvement de la taille et de création, en 1695, d'un nouvel impôt, la capitation. La France, qui avait alors 20 millions d’habitants, eut 1.300.000 morts en plus de la mortalité normale. L'historien François Lebrun, professeur à Rennes II estime même que la population française est passée de 22,25 à 20,75 millions d’habitants en deux ans, entre 1692 et 1694, soit un total d’un million et demi de morts. Dans la même période on peut citer les disettes et famines de 1660 à 1664 durant 5 années de suite, 1698-1699-1700[5], 1709-1710.
La famine irlandaise de la pomme de terre entre 1845 et 1851 fait entre 750 000 et un million de morts, soit le tiers de la population et pousse deux millions d'Irlandais à émigrer en Grande-Bretagne, aux États-Unis, au Canada, en Australie et en Nouvelle-Zélande.La famine russe de 1891-1892 fait 2 millions de morts le long de la Volga, dans l'Oural, et jusqu'à la Mer Noire. Elle fut imputée à un hiver et un été secs mais aussi à la forte natalité et à la stratégie économique de l'Empire russe dont les exportations de blé, qui pouvaient alimenter suffisamment ces régions, n'ont pas été détournées au profit des affamés.
La famine russe de 1921 a fait environ 5 millions de victimes, essentiellement dans la région Volga-Oural.
La famine soviétique de 1932-33 a fait entre 6 et 8 millions de morts à travers toute l'URSS. La partie de cette famine qui a eu lieu en Ukraine est aussi appelée Holodomor (« extermination par la faim ») depuis la fin des années 1980. De manière controversée[6],[7], le Parlement ukrainien a voté la qualification de génocide pour le Holodomor le 28 novembre 2006[8].
Le Régime nazi avait réservé aux territoires d'Ukraine et de Russie Blanche une politique de famine planifiée par le ministre de l'alimentation du Reich, Herbert Backe; la défaite avorta ce plan. lire Generalplan Ost.
Le siège de Leningrad (Union soviétique) par les armées de l'Allemagne nazie, du 8 septembre 1941 au 27 janvier 1944, a fait environ 1 million de victimes (sur les 2.9 millions d'habitants de la ville), l'écrasante majorité (97%) étant mortes de faim[9].
Famine en Éthiopie (1888-1892)[10].
Les famines récentes
- la famine au Bengale de 1943 : selon les estimations, d'un million et demi à trois millions de morts[11]
- au Tibet la mise en place de la réforme agraire et de la collectivisation des terres, à partir de 1954 n'ont pas l'effet positif escompté par les communistes, mais au contraire entraînent une baisse importante de la production, aussi bien pour la culture que pour l'élevage, ce qui conduira à des famines chez les paysans et les nomades tibétains c'est la première famine au Tibet (cf. Pétition en 70 000 caractères)[12].
- de 1959 à 1961, en Chine, le Grand Bond en avant fit selon les estimations entre 20 et 30 millions de victimes.
- en Corée du Nord depuis le milieu des années 1990 : un à deux millions de morts[13]
- de 1967 à 1970 au Biafra (Nigeria), plus 1 million de morts ;
- Sahel
- Lesotho (1983-1985)[10]
- 1984, grande famine en Éthiopie, plus de 1 million de morts
- Somalie
- 2004, Darfour au Soudan
- 2005, Niger. La malnutrition a touché plus de 3, 5 millions de personnes dont 800 000 enfants. Plus de 100 000 personnes sont décédées[14].
- Zimbabwe
- Crise alimentaire mondiale de 2007-2008, ayant eu pour origine une forte hausse du prix des denrées alimentaires de base, plongeant dans un état de crise quelques unes des régions les plus pauvres du monde et causant une instabilité politique et des émeutes dans plusieurs pays.
- Crise alimentaire de 2011 dans la Corne de l'Afrique, en cours, des centaines de morts par jour.
En 2005 selon la FAO environ 16 000 enfants dans le monde meurent par jour de maladies liées à la faim et à la malnutrition.
Les organisations de lutte contre la famine
- La FAO (Organisation des Nations unies pour l'alimentation et l'agriculture)
- Le Programme alimentaire mondial
- Les ONG
Réchauffement climatique
- 2009. Selon les dernières estimations de David Battisti (Université de Washington, Seattle) et Rosamond Naylor (Université Stanford), la sécurité alimentaire de 3 milliards d'hommes serait menacée d'ici à 2100. En se basant sur 23 modèles climatiques, la grande majorité du globe connaitra des températures estivales caniculaires dépassant les précédents records (1900, 2006). En climat tempéré, les températures connues en 2003 pourraient devenir la norme. Ainsi, en 2003, un excès de température de 3,6 °C par rapport aux températures moyennes de saisons avait fait diminuer les rendements agricoles de 30% pour le maïs, 21% pour le blé et 25% pour les fruits.
Notes et références
- (en) Undernourished population (1970-2003), Organisation des Nations unies pour l'alimentation et l'agriculture. Consulté le 15 janvier 2009
- " La prévention des famines met en jeu des mesures si faciles que la véritable énigme tient à ce qu'elles continuent à sévir. "
- (La civilisation de l'Occident médiéval, pp 205-214)
- p 213
- Encyclopédie méthodique: Agriculture, Volume 3,Partie 1 Par Alexandre Henri Tessier
- Comment les nationalistes ukrainiens réécrivent l’histoire », Le Monde diplomatique, août 2007. «
- L'Holodomor de 1932-1933, une tragédie partagée, RIA Novosti 25 novembre 2008
- lire en ligne] Hélène Despic-Popovic, « Kiev reconnaît la grande famine comme génocide » dans Libération du 29/11/2006, [
- Les 900 terribles jours de la vie de Leningrad, infographie de Ria Novosti.
- ISBN 9782200346768), p.85 Philippe Hugon, Géopolitique de l’Afrique, Armand Colin, Paris, 2007, (
- Paul Greenough. Prosperity and misery in modern Bengal : the famine of 1943-44, Bayly & Harper, 1982.
- ISBN 978-2213595023) pp. 330-331 Histoire du Tibet, Laurent Deshayes, Fayard, 1997 (
- ISBN 2-259-19449-4, page 234 Jean-François Revel, L’obsession anti-américaine, Paris, Plon, 2002,
- Article du Monde du 1er aout 2005 intitulé L'aide internationale arrive lentement)
Annexes
Articles connexes
Bibliographie
- Étienne Thévenin : Ces famines qui ont bouleversé notre monde, Du XIXe siècle à nos jours, CLD Éditions (2008) (ISBN 978-2-85443-530-6)
- François de Ravignan : La faim, pourquoi ?, La Découverte (2003)
- Sylvie Brunel : Famines et politique, Presses de Sciences Po. (2002) (ISBN 2-7246-0873-9)
- Action contre la faim, sous la coord. de Sylvie Brunel : Géopolitique de la faim (2001) (ISBN 2-13-050132-X)
- Erik Millstone, Tim Lang & Axel Drescher : Atlas de l'alimentation dans le monde, Autrement (2003), traduction Catherine Bednarek, (ISBN 2-7467-0292-4)
- Sen Amartya : Poverty and Famines : An Essay on Entitlements and Deprivation, Oxford, Clarendon Press, 1982
- Marcel Lachiver : Les Années de Misère, La Famine au temps du Grand Roi, Fayard 1991
Liens externes
- Programme Alimentaire Mondial
- (en) réseau des systèmes d'alerte précoce contre la famine
- Dossier géographique sur les "famines modernes"
- Lutte contre la famine, en particulier en Afrique - plan d'action du G8
- Le droit à l'alimentation, liste de liens et de textes
- Les objectifs du millénaire pour le développement des 191 pays constituant l'ONU
- Article d'Emmanuel Leroy-Ladurie sur les famines causées par la météo
- (fr) Mike Davis, Les famines coloniales, génocide oublié, Le monde diplomatique, Avril 2003
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