- Directives européennes
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Directive de l'Union européenne
Une directive est un acte normatif pris par les institutions de l'Union Européenne. Avec les règlements et les recommandations, les directives communautaires font partie du droit dérivé de l'Union européenne.
À la différence d'un règlement communautaire qui s'applique totalement et directement, une directive donne des objectifs à atteindre par les pays membres, avec un délai. Ce délai permet aux gouvernements nationaux de s'adapter à la nouvelle réglementation.
Sommaire
Présentation
Une directive lie tout État membre destinataire quant au résultat à atteindre, tout en lui laissant la compétence quant à la forme et aux moyens ; en d'autres termes, la directive est un texte adopté au stade de l'Union européenne qui fixe des règles que les États membres doivent inclure dans leur législation interne (on parle de « transposition » en droit national). Les États disposent pour ce faire d'un délai de transposition.
Selon l'article 189 du Traité de Rome, la directive fixe un but à atteindre, mais laisse aux États le choix des moyens pour y arriver. Ainsi contrairement aux règlements, les directives ne sont pas d'application directe dans les droits internes, elles nécessitent donc une intervention des États, mais cette intervention n'est pas assimilable à une mesure de réception, comme en droit international.
En France, on estime que 75% de la législation provient des directives européennes. Le pourcentage n'a pas beaucoup de sens, en fait. Car il s'agit toujours, pour l'Assemblée nationale, de rediscuter le texte européen et de l'adapter aux réalités nationales. Il n'y a pas de transposition "copiée-collée".
Transposition
En général, la directive fixe le délai au terme duquel la législation transposée doit être adoptée. La transposition et l'application (implémentation) ne doivent pas être confondues. L'implémentation ne vise pas seulement la transposition formelle mais toutes les mesures qui concourent à la mise en œuvre effective de la directive (information, formation, incitation, mise en œuvre de sanctions administratives, civiles et pénales...).
Un suivi rapproché de la transposition est assuré par la Commission Européenne. Les mesures nationales doivent être notifiées à la Commission dans les délais requis. Une procédure spéciale de Notification Assistée par Ordinateur a été mise en place à cet effet.
Les retards de notification ont un impact négatif sur l'harmonisation des lois, l'intégrité du marché unique, la protection des citoyens et de l'environnement La législation transposée intéresse l'ordre public. De fait, sa violation fait le plus souvent l'objet de sanctions pénales. Des progrès en matière de délais ont été enregistrés par le dernier Tableau du Marché Intérieur. Toutefois en juillet 2008, le nombre des directives non transposées s'élevait encore à 467.
Le manque d'harmonie de la législation transposée avec la directive est sanctionné par les juridictions européennes comme portant atteinte à l'objectif poursuivi par la directive. Ceci concerne en particulier la libre circulation des produits et services, pour laquelle des différences de législation cachent souvent des « obstacles aux échanges ». Dans son avis 3/2005, la Cour des Comptes de l'Union Européenne note que la transposition d'une directive sera incorrecte si elle n'est pas conforme à la directive d'origine. "Même si cet objectif a été atteint pour la plupart des modifications proposées, la Cour observe que, sur plusieurs points, la transposition de la directive manque de cohérence, notamment du fait :
- de l’utilisation de termes ou de définitions différents de ceux figurant dans la directive, et cela sans aucune justification,
- d’une transposition incomplète de certaines dispositions,
- d’une transposition erronée de la directive,
- de l’introduction de termes ou d’éléments qui ne sont pas
prévus dans la directive,
- d’une transposition effectuée sans que le contexte communautaire
soit pris en considération.
- de contradictions dans la directive même
Si un État Membre n'adopte pas une législation compatible, la Commission Européenne peut initier à son encontre des poursuites. Ces poursuites sont à la fois coûteuses et fréquentes. Au 1 mai 2008, on dénombrait 1 298 procédures d'infraction ouvertes contre les États Membres (voir Tableau d'Affichage du Marché Intérieur).
Mise en oeuvre
Une fois mises en vigueur, on sait que les lois ne sont pas toutes appliquées de manière satisfaisante. Il convient d'avoir à l'esprit l'exemple des limites de vitesse dont l'observation par les automobilistes a pris plus de 100 ans. L'implémentation des directives rencontre des difficultés similaires. C'est la raison pour laquelle, les directives les plus récentes tendent à énoncer des indicateurs mesurables et échelonnés dans le temps afin d'assurer leur mise en œuvre effective. Cette pratique est particulièrement remarquable dans le domaine de l'environnement.
Pour atteindre ces objectifs, les États Membres sont confrontés au problème du coût de la législation pour leur économie. La conformité présente le plus souvent des avantages notoirement supérieurs aux inconvénients mais des différences d'efficience dans l'application des lois existent. Ainsi on observe que le coût d'implémentation des lois varie sensiblement d'un État à l'autre. Selon la Commission, le coût annuel d'implémentation aux Pays-Bas peut être considéré comme représentatif (3,5 % du PIB - Com 2006 - 691).
Pour améliorer la situation et disséminer les meilleures pratiques, la Commission a lancé le programme « Mieux légiférer » qui se propose de réduire sensiblement les coûts d'implémentation injustifiés : « La plupart des coûts engendrés par la législation portent sur les investissements (par exemple installation d'équipement de sécurité) nécessaires pour se conformer à la loi. Mais il existe d'autres coûts à caractère administratif, tels que ceux engendrés par l'obligation de faire rapport sur telle ou telle activité. Ces coûts doivent être réduits lorsque cela est possible sans compromettre la réalisation des objectifs de la législation. L'expérience des États membres démontre que les autorités publiques peuvent faire beaucoup pour faire diminuer les charges administratives injustifiées dues à la législation – on estime que les bénéfices économiques d'une telle action correspondent à une augmentation du PIB pouvant atteindre 1,5 %, soit jusqu’à 150 milliards d'euros » (Com 2006 -689). La Commission s'est assignée l'objectif ambitieux de réduire d'un quart ces dépenses injustifiées d'ici 2012. Cet objectif avait été énoncé avant la Crise de 2008. Pour la plupart des décideurs européens, il est clair aujourd'hui que ces objectifs doivent être dépassés et que la question de l'amélioration des processus de décision et de mise en œuvre devient une priorité de tout premier ordre (Cf à ce sujet les Journées Européennes de l'Informatique Juridique qui se sont tenues à Paris en décembre 2008).
Droit européen et droit national
L’Union émanant de traités, juridiquement parlant, elle ne fait pas de lois et ses actes n’ont de valeur légale qu’une fois transposés ou mis en œuvre par les institutions nationales. En effet, suivant la lettre des traités, une directive commande à des institutions (de l'Union ou des États membres) et non pas aux individus (rôle de la loi), en fixant des « objectifs » qui lient les Etats membres « quant aux résultats à atteindre ». Nombre de directives établissent cependant désormais des règles en détail, conçues pour être directement transposées dans la loi nationale.
La nature juridique de l’Union européenne a changé progressivement. Plusieurs facteurs ont convergé pour affirmer la primauté du droit communautaire sur les constitutions des États membres.
Aucun juriste ne remettait en question la primauté des constitutions nationales sur les traités… avant que la construction européenne n’accouche d’un droit d’un type nouveau. Ce furent tout d’abord deux arrêts de la Cour de Justice européenne (Van Gend en Loos, 1963 ; Costa c/Enel, 1965) affirmant que les normes européennes créent « un ordre juridique souverain » s’imposant sur « un texte interne quel qu'il soit ». S’en est suivi une absence de réaction des États membres, dans un contexte européen où la question avait encore peu de portée pratique. Puis en 1998 (arrêt Sarran), le Conseil constitutionnel français réaffirma la primauté de la constitution nationale, mais il en place désormais l’essentiel « sous le chapeau de l'article 88-1 » qui dispose que « La République participe aux Communautés européennes et à l'Union européenne, constituées d'Etats qui ont choisi librement, en vertu des traités qui les ont instituées, d'exercer en commun certaines de leurs compétences » ; le Conseil reconnaît que les exceptions sont des « cas rares », tels les articles 1er (la République est laïque) et 3 (définition du corps électoral), qui sont donc les seuls à ne pas être placés sous le chapeau de cet article 88-1[1].
Désormais, le droit européen prime donc sur la plupart des articles de la Constitution française comme des autres constitutions nationales. Ainsi, en janvier 2003, le Parlement français fut-il contraint de modifier un article d’une loi qu’il avait auparavant adoptée à l’unanimité, stipulant qu’« un élément isolé du corps humain ou, autrement produit par un procédé technique, y compris la séquence ou la séquence partielle d’un gène, ne peut constituer une entité brevetable », sur injonction de la Cour européenne de justice. Le Conseil constitutionnel français a ainsi considéré les engagements européens de la France comme une disposition constitutionnelle ayant valeur supérieure à toutes les autres. Il admet ainsi que nombre des clauses de la constitution nationale n’aient plus aucune portée pratique, sans toutefois les supprimer ou les modifier, car l’Union, pour imposer la légalité de ses actes, doit absolument recourir aux moyens institutionnels des États membres qui transforment les décisions européennes en lois nationales.
Le législateur national est d'ailleurs obligé de transposer les directives européennes : ce faisant il n'est plus législateur, mais scribe.
Après le Traité de Rome
Le nouvel article 249 alinéa 3 du Traité CE dispose désormais que « la directive lie tout État membre destinataire quant au résultat à atteindre tout en laissant aux instances nationales le choix quant à la forme et aux moyens ». Il s'agit d'une véritable obligation de résultat, qui n'est pas toujours respectée par les États membres : au 18 mars 2004, le Journal Les Échos dénombrait 108 directives non transposées en France (13/14 févr. 2004). La Cour de Justice CE reconnaît désormais que les directives ont un « effet direct ». Prises par le Conseil ou la Commission, les directives doivent être publiées au Journal officiel de l'UE (JOUE) (art. 251 T CE)..
Valeur juridique de la directive non transposée
Les directives devenant très précises, la question s'est posée de leur valeur juridique au-delà du texte des traités. En revanche les particuliers peuvent en bénéficier si ces 4 conditions sont réunies :
- le délai de transposition est dépassé;
- que cela ait été mal transposé, voire absence de transposition dans le délai imparti;
- la directive comporte des dispositions claires, précises et inconditionnelles (selon la CJCE);
- elle est invoquée par un particulier contre l'État (effet direct vertical).
Position de la CJCE
La Cour de justice des Communautés européennes a commencé par accroître leur valeur juridique en admettant leur effet direct avec ses arrêts Frantz Grad c/ Finantzamt et Van Duyn . Elle a ainsi admis que les justiciables puissent s'en prévaloir en l'absence de transposition (ou après une directive mal transposée) sous certaines conditions :
- La directive doit tout d'abord être claire, c'est-à-dire qu'elle pose une obligation de faire ou de ne pas faire (arrêt)
- Ensuite, elle doit être précise, c’est-à-dire qu'elle ne nécessite pas de règlement d'application.
- Enfin, elle doit également être inconditionnelle c'est-à-dire qu'elle ne sera directement invocable qu'au terme du délai de transposition.
Position du Conseil d'État français
La jurisprudence Cohn-Bendit
Le Conseil d'État a refusé cette évolution avec l'arrêt Cohn-Bendit du 22 décembre 1978 en décidant que les directives communautaires « ne peuvent être invoquées à l'appui d'un recours dirigé contre un acte administratif individuel à défaut de toute contestation de sur la légalité des mesures réglementaires prises pour se conformer à cette directive ». [réf. nécessaire]
Il a ensuite considérablement nuancé sa décision en admettant l'effet direct de la directive dans de nombreuses hypothèses.
Les tempéraments
Le Conseil d'État a distingué selon la nature de l'acte attaqué, réglementaire ou individuel.
Pour les actes réglementaires
- On ne peut prendre d'acte contraire aux objectifs de la directive avant l'expiration du délai (CE France nature environnement).
- L'absence de transposition dans les délais est illégale
- Cette absence de transposition engage la responsabilité de l'État (arrêt SA Arizona Tobaco Products du Conseil d'État du 28 février 1992 qui suit l'arrêt Andréa Francovitch c/ Italie de la CJCE)
Pour les actes individuels
- L'État français ne peut se prévaloir d'une directive non transposée (arrêt Lillyfrance du Conseil d'État).
- La jurisprudence Cohn Bendit refuse l'invocabilité d'une directive non transposée contre un acte individuel. Mais en appliquant la théorie de l'exception d'illégalité, le Conseil d'État annule néanmoins en se fondant sur l'acte réglementaire sur le fondement duquel a été pris l'acte individuel. Il a également appliqué cette théorie en l'absence de texte, en sanctionnant un état du droit ou une jurisprudence.
Les entreprises européennes doivent faire une veille régulière sur les directives en cours ou à venir.
Quelques directives
Article détaillé : Liste thématique de directives européennes.- Directive 76/160/CEE, directive concernant la gestion de la qualité des eaux de baignade dite « directive baignade »,
- Directive 79/409/CEE, dite « Directive oiseaux »,
- Directive Nitrates
- Directive 1989/391/CE sur la sécurité des travailleurs et la santé au travail,
- Directive 89/392/CEE,
- Directive 91/414/CEE,
- Directive 92/43/CEE, dite « directive habitats »,
- Directive 93/98/CE, directive européenne sur l'harmonisation de certains aspects du droit d'auteur et des droits voisins dans la société de l'information,
- Directive 96/82/CE, dite « directive Seveso 2 »,
- Directive 98/44/CE sur la brevetabilité des inventions biotechnologiques,
- Directive 1999/31/CE, Directive concernant la mise en décharge des déchets,
- Directive 1999/44 directive du 25 mai 1999 sur certains aspects de la vente et des garanties des biens de consommation
- Directive 2001/18/CE sur la dissémination d’OGM,
- Directive 2001/29/CE sur l’harmonisation des droits d’auteur, dite directive EUCD,
- Directive 2002/95/CE, dite « Directive RoHS »,
- Directive 2003/48/CE du 3 juin 2003, en matière de fiscalité des revenus de l'épargne sous forme de paiements d'intérêts,
- Directive 2003/98/CE,
- Directive 2005/36/CE relative à la reconnaissance des qualifications professionnelles
- Directive 2006/123/CE relative aux libertés d'établissement des prestataires de service et libre circulation des services dans le marché intérieur, dite « Directive Services » (anciennement Projet de directive Bolkestein),
- Directive 2007/2/CE, dite « directive INSPIRE ».
Notes et références
- ↑ Marie-Françoise Bechtel, Supériorité de la norme européenne et protection de la Constitution : état des lieux, colloque « Peut-on se rapprocher d'un régime présidentiel ? », 5 nov. 2007, www.fondation-res-publica.org/Superiorite-de-la-norme-europeenne-et-protection-de-la-Constitution-etat-des-lieux_a254.html
Compléments
Articles connexes
Liens externes
- Directive 92/43/CEE du conseil du 21 mai 1992 concernant la conservation des habitats naturels ainsi que de la faune et de la flore sauvages.
- (fr) EUR-Lex, base de données du droit européen
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