Crise irano-sovietique

Crise irano-sovietique

Crise irano-soviétique

La crise irano-soviétique appelée aussi crise iranienne ou crise d'Azerbaïdjan fut la toute première épreuve de forces de ce qui allait devenir la Guerre froide et a pour objet l’Iran. À l’été 1941, l’Union soviétique et le Royaume-Uni, à la recherche d’une voie d’acheminement des armes et du ravitaillement à destination du front de l'Est, s’étaient entendu pour en occuper chacun une moitié et déposer le chah Reza Pahlevi, coupable de trop de sympathie avec l’Axe et envahisse l'Iran avec des pertes légères.

Son fils, Mohammad Reza Pahlavi, qui lui a succédé, a conclu avec ces puissances un traité prévoyant le retrait de leurs troupes six mois après la fin de la guerre. Les cinq ministres des affaires étrangères alliés s’étaient donc convenus lors de leur rencontre à Londres en septembre 1945, que ce retrait interviendrait au plus tard le 2 mars 1946.

Très vite cependant, il devient évident que l’URSS est à l’affût d’un prétexte pour ne pas tenir compte de cet engagement. Trois raisons l’y poussent : l’absence, sur sa frontière sud, d’un glacis comparable à celui qu’elle a réussi à imposer en Europe ; la vulnérabilité des gisements du Caucase, d’où l’URSS tire alors l’essentiel de son approvisionnement en pétrole ; l’effort séculaire pour l'accès aux mers chaudes : n'oublions pas que l'ancienne Russie impériale a toujours convoité l'accès à ces mers dont les ports ne sont jamais prisonniers des glaces.

Révoltes en Iran et revendications soviétiques

Le prétexte est fourni par une révolte survenue à Tabriz, capitale de la partie de l’Azerbaïdjan restée iranienne après l’annexion par l’empire russe, en 1828, du nord de cette province turcophone. Les insurgés proclament en décembre 1945, une république autonome dont les postes clés sont tenus par des communistes, certains d’entre eux ayant déjà participé à une tentative analogue au lendemain de la Première Guerre mondiale.

Dans la foulée, une autre république autonome est proclamée au Kurdistan iranien, qui s’empresse de conclure une alliance avec les insurgés de Tabriz.

L’Armée rouge empêche la gendarmerie de rétablir l’ordre. Dans les derniers jours de février 1946, après des semaines de ce qu’il est convenu d’appeler une « intense activité diplomatique », Staline consent à recevoir le nouveau Premier ministre Ghavam Sultaneh, qui passe pour russophile et a pris des communistes dans son cabinet.

C’est pour lui dire que l’Armée rouge continuera à stationner dans les provinces septentrionales de l’empire iranien et n’évacuera le reste de sa zone d’occupation que s’il reconnaît l’autonomie de l'Azerbaïdjan et accorde à l’URSS une concession sur le pétrole de la province. C’est trop pour Ghavam qui repart sans avoir donné son accord.

Londres annonce le retrait de ses propres forces, comme convenu, pour le 2 mars 1946. Le 6, les É.-U. invitent fermement Moscou à en faire autant. 24 heures plus tôt, la Guerre froide est entrée dans le domaine public avec le retentissant discours par Churchill à l’université de Fulton dénonçant les efforts soviétiques pour étendre leur empire, où l’expression du Rideau de fer est utilisée pour la première fois.

Des unités soviétiques font déjà mouvement vers Téhéran. Les États-Unis menacent de saisir le Conseil de sécurité si l’Iran ne le fait pas lui-même.

Staline modère alors un peu son ton, promettant d’évacuer la totalité de l’Iran avant le 9 mai si Ghavam donne son aval pour la création d’une société pétrolière contrôlée par l’URSS.

Le Premier ministre persan accepte, mais à la condition que l’accord soit ratifié par un parlement à élire dans les sept mois suivant la fin de l’occupation étrangère. A-t-il déjà en tête le scénario qui devait conduire à la totale déconfiture soviétique ?

Échec soviétique

Des grèves ayant éclaté dans les installations de la Anglo-Iranian Oil Company, Londres suscite parmi les tribus du Sud un soulèvement qui oblige Ghavam à se séparer de ses ministres communistes.

Lorsque Moscou réclame la ratification de l’accord pétrolier, ce dernier fait valoir que les obstacles mis par les autorités de Tabriz à l’activité des formations favorables à Téhéran rendent impossible l’élection d’un nouveau parlement. Fortement encouragé par les Anglo-Saxons, il donne l’ordre à ses troupes de reconquérir la province rebelle.

Les Soviétiques ont beau avoir multiplié les avertissements et massé d’importantes forces à la frontière, ils ne bougent pas. Le régime séparatiste de Tabriz, dont le président trouve peu après la mort dans un accident de voiture, s’écroule en quelques jours ainsi que la République prosoviétique du Kurdistan, dont le chef, Moustafa Barzani, se réfugie en URSS avec un millier de ses partisans. On retrouve celui-ci à l’œuvre en Irak, à partir de 1958.

Le Majlis, le parlement iranien, élu en 1948, rejette à une large majorité le traité pétrolier signé par Ghavam, lequel cède bientôt la place à un anglophile déclaré. Les forces soviétiques évacuent peu après le pays.

Sources

  • La guerre froide 1917-1991, André Fontaine, Editions de la Martinière, 2004, ISBN 2-84675-139-0
  • George Lenczowski, "The Communist Movement in Iran", Middle East Journal, no. 1 (January 1947) pp. 29-45
  • Archie Roosevelt, Jr., "The Kurdish Republic of Mahabad", Middle East Journal, no. 1 (July 1947), pp. 247-69
  • William Linn Westermann: "Kurdish Independence and Russian Expansion", Foreign Affairs, Vol. 24, 1945-1946, pp. 675-686
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