- Cour d'assises (France)
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Les crimes sont les infractions passibles d'une peine de réclusion ou de détention criminelle allant de 10 ans à perpétuité.
Sommaire
Histoire
La justice criminelle moderne se met en place à la Révolution française avec un tribunal criminel dans un cadre départemental, avec des magistrats choisis au sein du tribunal de district et un jury criminel composé de citoyens, ce qui constitue une innovation[1]
Les tribunaux criminels prennent le nom de cour d'assises avec la loi du 28 avril 1810 sur l'organisation des tribunaux. Jusqu'en 1942, les fonctions du jury et des magistrats professionnelles sont séparées : le jury (de 12 membres) décide seul de la culpabilité, les magistrats de la peine. La loi du 25 novembre 1941, en vigueur au 1er janvier 1942, attribue la décision, sur la culpabilité comme sur la peine, à l'ensemble de la cour d'assises, mais réduit à neuf le nombre de jurés[2],[3].
Composition
Alors que dans les pays de common law, notamment les pays anglo-saxons, on utilise largement le système du jury, en France, seules les juridictions criminelles que sont la cour d’assises, le tribunal criminel et le tribunal aux armées comprennent des jurés populaires. La cour d'assises se compose de « la cour proprement dite » (trois magistrats professionnels : un président ayant rang de conseiller à la cour d'appel et deux assesseurs) et d'un jury composé de jurés au nombre de neuf (en première instance) ou de douze (en appel). Mais avec la loi du 10 aout 2011, avec entrée en vigueur au 1er janvier 2012, le nombre de jurés est réduit à 6 en première instance et 9 en appel.
L'accusation est soutenue par un magistrat du parquet, appelé avocat général par référence aux magistrats portant ce titre à la cour d'appel.
Le jury populaire est composé de citoyens de plus de 23 ans, sachant lire et écrire en français (article 255 du code de procédure pénale), jouissant de leurs droits politiques, civils et de famille, et ne se trouvant dans aucun cas d'incapacité ou d'incompatibilité listées à l'article 257 du code de procédure pénale (membres du gouvernement, parlementaires, magistrats, fonctionnaires de police, militaires de la gendarmerie,...). Les jurés sont tirés au sort sur les listes du jury criminel établies tous les ans dans chaque département à partir des listes électorales. Cette liste annuelle sert au tirage au sort des jurés de session, qui peuvent être amenés à siéger au cours d'une session déterminée.
C'est dans cette liste de session que sont tirés au sort, au début de chaque affaire jugée, les jurés qui composeront le jury. Au fur et à mesure que les noms sont tirés au sort, l'accusation peut en récuser cinq et le ministère public quatre (respectivement six et cinq si c'est en appel). Des jurés supplémentaires (art. 296 du code de procédure pénale) sont également tirés au sort afin de remplacer les jurés qui pourraient être victimes d'un empêchement en cours de procès ; ils ne participent pas aux délibérations (leur nombre est décidé par la cour - les 3 magistrats professionnels - , et est souvent fonction de la durée prévue du procès). Les jurés sélectionnés ne peuvent normalement pas en être dispensés sauf à justifier de problème de santé ou être âgés de plus de 70 ans. Si le juré ne se présente pas au tribunal, il peut être condamné à une forte amende.
Le juré reçoit une indemnité de comparution, une indemnité de voyage et de séjour (frais de déplacement, repas) ainsi que, éventuellement, une indemnité de perte de salaire.
Désignation du jury
On dresse une liste de jurés et c'est le préfet qui détermine le nombre de jurés par nombre d'habitants (entre 200 et 1 800). Le maire doit préparer une liste préparatoire annuelle. On tire des personnes inscrites sur les listes électorales. On tire au sort trois fois plus de jurés que nécessaire. En Cour d'assises, une commission va opérer un tri (incompatibilité puis liste par session). A chaque procès d'assises, on tire au sort un nombre de jurés. Ces jurés préssentis vont être appelés dans une audience publique : appel, présentation, possibilité de récuser les jurés.
Controverse
Plusieurs questions ont été au cœur du débat au cours de ces dernières années :
- Le jury populaire est-il important ?
- Faut-il supprimer les jurys d'assises ?
- A l'inverse, faut-il mettre des jurés devant le tribunal correctionnel ?
- Plus généralement, faut-il ouvrir les portes du prétoire à l'opinion publique pour redonner une légitimité au jugement ?
Parmi les arguments pour les jurys populaires, il y a le fait que des jurés sont garants de l'indépendance et ne peuvent subir aucune pression. Les jurés sont également plus attentifs car pénétrés par la gravité de leur fonction. Les jurés sont moins attachés aux questions techniques et plus au fond. Cela améliore l'image de la justice : elle est rendue par et pour les citoyens.
Le principal argument contre réside dans le fait que les jurés sont facilement manipulables par les magistrats professionnels.
Formations spéciales de la cour d'assises
Certaines affaires sont jugées par une cour d'assises spéciale :
- ceux commis par les mineurs de plus de 16 ans sont jugés par la cour d'assises des mineurs dont les magistrats assesseurs sont, sauf impossibilité, des juges des enfants ;
- la cour d'assises sans jury (composée de sept magistrats professionnels en première instance et de neuf magistrats en appel) peut statuer en matière de terrorisme, de trafic de stupéfiants, d'infractions militaires, ainsi que sur les poursuites pour des crimes commis par des militaires dans l'exercice de leurs fonctions.
Disposition
La disposition d'une cour d'assises est la suivante : le président est face à la barre, entouré de chaque côté par ses deux assesseurs et les jurés. D'un côté de la barre se trouvent les avocats de la défense et de l'autre l'avocat général, avec juste devant lui l'avocat de la partie civile[4].
Le procès
Toute décision défavorable à l'accusé nécessite au moins 8 voix sur 12 (la majorité des jurés est donc obligatoire). Il ne faut donc que 5 voix sur 12 pour acquitter l'accusé ou exclure une aggravation, comme la préméditation. Depuis 1994, les circonstances atténuantes ne sont plus une question de l'arrêt délibéré en commun. La majorité simple est requise lors du vote sur la peine, sauf pour la peine maximale qui exige également 8 voix.
En appel, la majorité de 8 voix sur 12 est remplacée par celle de 10 voix sur 15.
En cour d'assises spéciale, toute décision est prise à la majorité simple.
Les débats
C'est le président qui mène les débats. Il procède aux différents interrogatoires (partie civile, accusé(s), témoin(s), experts) et invite les différentes parties à s'exprimer. En effet, lors d'un procès, aucune prise de parole ne se fait de manière intempestive : si un accusé, un avocat, l'avocat général, un juré ou même un assesseur souhaite intervenir, il le fait savoir au président qui, alors, lui donne la parole.
Afin que le témoignage d'un témoin soit recevable, le président de la cour d'assises doit lui faire prêter serment de la façon suivante : « Vous jurez de parler sans haine et sans crainte, de dire toute la vérité, rien que la vérité». Toutefois, les membres de la famille proche de l'accusé et les personnes privées de leurs droits civiques n'ont pas à prêter serment.
Un juré a le droit de poser des questions à l'une des parties, à un témoin ou à un expert - ce qui est logique puisqu'il lui appartiendra de trancher sur la culpabilité et sur la peine. Il peut le faire en s'adressant directement à la personne (après en avoir demandé l'autorisation au président, ou après sollicitation de ce dernier). Ces questions se doivent d'être neutres (y compris dans leur formulation) et ne suggérer aucun parti pris. En cas de doute, un juré peut transmettre sa question par écrit au président, qui se chargera de la poser au moment qui lui semblera adéquat, éventuellement en la reformulant.
Le président assure également la police du procès. Il veille à ce que les débats se déroulent dans le cadre fixé par le législateur. Il veille aussi à ce que les débats restent intelligibles.
Les plaidoiries de la partie civile
C'est l'avocat de la partie civile qui plaide en premier, avant le réquisitoire de l'avocat général.
Le réquisitoire
L'avocat général revient sur les faits et propose une sanction.
La plaidoirie
Dernier à plaider, le ou les avocat(s) de la défense argumente(nt) en faveur de l'accusé ou des accusés. Selon les cas : innocence ou circonstances atténuantes.
Les délibérations
Au terme des audiences, le président de la cour d'assises, ses deux assesseurs et les jurés se retirent pour délibérer. Au cours de ces délibérations, ledit jury devra se prononcer :
- sur la culpabilité : l'accusé est-il coupable du ou des chefs d'accusation qui ont été retenus contre lui ? A-t-il agi avec préméditation ? etc…
- sur la peine : il s'agit de déterminer quelle peine sanctionnera le ou les faits dont le ou les accusés ont été reconnus coupables.
Lors de ces délibérations, l'affaire jugée est mise à plat et les membres du jury (qu'ils soient magistrats ou jurés populaires) confrontent leurs points de vue. À l'issue de ce débat, les décisions se font par un vote à bulletin secret.
Les jurés doivent garder le secret de leurs délibérations même une fois leur fonction terminée.
Les auditeurs de justice et les élèves-avocats peuvent assister au délibéré.
Le président et ses deux assesseurs participent aux votes : les voix de ces magistrats comptent autant que celles des jurés (3 voix sur 12 en première instance).
Sessions
Il y a une cour d’assises par département. Elle ne siège pas de façon permanente mais par sessions, lesquelles se tiennent en principe tous les trois mois (une session par trimestre avec parfois une session supplémentaire). Les cours d'assises des départements les plus peuplés siègent en fait de manière continue (Paris, Seine-Saint-Denis, etc).
Appel
Article détaillé : Cour d'assises d'appel (France).Depuis la loi du 15 juin 2000, la cour d’assises peut aussi connaître des appels formés contre les arrêts d’une autre cour d’assises ayant statué en premier ressort. On parle d'appel circulaire.
Il n’existait pas de possibilité d’appel contre les décisions des cours d’assises jusque-là mais la Cour européenne des droits de l'homme n'avait jamais réprimandé la France à ce propos, estimant que les exigences du procès équitable étaient remplies par la seule possibilité d'un pourvoi en cassation[5]. Traditionnellement, on justifiait le fait que les cours d'assises statuent en premier et dernier ressort par leur composition : censées représenter le peuple jugeant souverainement, les décisions des cours d'assises ne pouvaient être susceptibles de remise en cause. C'est pourquoi il fut décidé que la cour d'assises d'appel comprendrait elle aussi des jurés, et même plus.
Une autre raison invoquée est le fait que l'instruction préparatoire est obligatoire en matière de crime et rare en cas de délit. La cour d'assises est saisie par une autre juridiction qui a déjà considéré qu'il a suffisamment d'éléments à charge (le juge d'instruction, ses décisions étant d'ailleurs susceptibles d'appel à la chambre de l'instruction). En correctionnel, le tribunal est presque toujours la première juridiction à connaitre de l'affaire.
Enfin le troisième argument contre le droit de faire appel, c'est qu'il arrive que la chambre des appels correctionnels ne ré-entende pas certains témoins afin de rendre le processus moins lourd pour les témoins et les victimes ; chose impossible aux assises, étant composée de jurés la procédure ne peut y être qu'orale.
En pratique, le taux d'appel est assez faible (23%). L'instauration de l'appel étant encore très récente, les causes exactes du faible nombre d'appels sont mal déterminées. Sans doute les risques d'aggravation de la peine en appel constituent-ils l'une des raisons de cette désaffection.
Références
- Consulat, la chambre d'accusation prend les décisions de renvoi. Jean Tulard, Jean-François Fayard, Alfred Fierro, Histoire et dictionnaire de la d'un double jury : le jury d'accusation qui décide (ou non) du renvoi devant le tribunal criminel, et le jury de jugement qui se prononce. Sous le
- ISBN 978-2-7076-1593-0), no 202. Roger Perrot, Institutions judiciaires, 13e éd., Paris, Montchestien, 2008 (
- « Quelques commentaires sur les propos de Michel Mercier » sur le blog de Maître Eolas.
- (fr) Cour d'assise, sur le site du Ministère de la Justice française
- 23 juin 1999, pourvois n° 98-80561, 98-80573, 98-80571: « si l'article 2-1 du protocole n° 7 à la Convention européenne des droits de l'homme reconnaît à toute personne déclarée coupable d'une infraction pénale le droit de faire examiner par une juridiction supérieure la déclaration de culpabilité ou la condamnation, les réserves formulées par la France, lors de la ratification dudit protocole, prévoient que l'examen de la décision de condamnation par une juridiction supérieure peut se limiter à un contrôle de l'application de la loi, tel que le recours en cassation »; Jean Pradel, « Une cour d'assises statuant en dernier ressort contrevient-elle au principe de double degré de juridiction posé par la Convention européenne des droits de l'homme ? », Recueil Dalloz 1999 p. 327 Crim.
Voir aussi
Bibliographie
- Henri Angevin, La pratique de la Cour d'assises, Litec
- Fabrice Defferrard, Les mystères de la cour d'assises in Liber amicorum Vincent Durtette - Regards sur la défense pénale, Editions Mare & Martin, Paris, 2009, p. 171.
Articles connexes
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