- Classification Des Psychotropes
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Classification des psychotropes
Les psychotropes ont fait l'objet de nombreuses démarches de classification, principalement selon leurs effets et la nature du danger qu'ils présentent.
Les classifications selon les effets rencontrent leurs limites dans le fait que les catégories sont des catégories d'effets et non de substances, or une même substance peut avoir plusieurs effets différents en fonction de son dosage et les modalités de consommation.
Sommaire
Classifications selon les effets
Classification selon Lewin (1924)
En 1924, Louis Lewin (un pharmacologue allemand) décrivit et classa les psychotropes, qu'il qualifiait de poison de l'esprit, en cinq groupes en leur donnant des noms latins selon leurs effets. Cette classification était la première qui tenait compte des effets de ces produits :
- Euphorica : produits qui calment l'activité psychique en diminuant la perception des sensations : principalement les opiacés, mais aussi la coca et la cocaïne ;
- Phantastica : produits hallucinogènes d'origine végétale : peyotl, mescaline, chanvre indien, solanaceaes (datura, jusquiame) ;
- Inebriantia : produits qui induisent une dépression pouvant aller jusqu'à la perte de conscience suite à une première phase d'excitation : alcool, éther, chloroforme, protoxyde d'azote ;
- Hypnotica : produits calmants et somnifères : barbituriques, bromures, paraldéhyde, sulfonal, kava ;
- Exitantia : produits stimulants d'origine végétale qui induisent un état d'excitation sans altérer l'état de conscience : café, thé, khat, tabac, noix de kola, maté, cacao, guaraná, noix de bétel.
Cette classification, bien que claire et simple, présente ses limites dans le fait qu'elle ne classe pas les produits psychotropes récents et qu'elle ne tient pas compte du fait que l'effet peut varier selon la dose. Ainsi la cocaïne, utilisée à l'époque comme anesthésiant, est présentée comme un calmant alors que c'est un stimulant[1].
Classification selon Delay et Deniker (1957)
En 1957, Jean Delay (un psychiatre français) a élaboré avec son assistant Pierre Deniker une classification des drogues qui sera validée par le congrès mondial de psychiatrie en 1961. Cette classification distingue les substances psychotropes en fonction de leur activité sur le système nerveux central (SNC) :
- Les psycholeptiques ou sédatifs psychiques, ralentissant l'activité du système nerveux, comprennent :
- les nooleptiques tels que les hypnotiques (barbituriques) ;
- les thymoleptiques tels que les neuroleptiques ;
- les régulateurs de l'humeur tels que les sels de lithium ;
- les psycholeptiques divers tels que les tranquillisants (anxiolytiques), les sédatifs classiques (benzodiazépines) et les antiépileptiques ;
- Les psychoanaleptiques ou excitants psychiques, accélèrant l'activité du système nerveux, comprennent :
- les nooanaleptiques tels que les stimulants de la vigilance (amphétamines) ;
- les thymoanaleptiques antidépresseurs tels que les stimulants de l'humeur (antidépresseurs) ;
- les stimulants divers tels que le khat et la caféine ;
- Les psychodysleptiques ou perturbateurs psychiques, perturbant l'activité du système nerveux, comprennent :
- les hallucinogènes (mescaline, peyotl, kétamine, phencyclidine, LSD) ;
- les stupéfiants (morphine, héroïne, opium) ;
- l'alcool et ses dérivés ( Jeu et dependance ... )
Classification selon Pelicier et Thuillier (1991)
En 1991, Yves Pelicier (un médecin français) et Jean Thuillier (un psychiatre et pharmacologue français) reprennent la classification selon Delay et Deniker pour la moderniser :
- Les dépresseurs du système nerveux central : ils ralentissent le fonctionnement du système nerveux, provoquent souvent une dépendance physique et peuvent avoir, à forte dose, des conséquences graves (dépression respiratoire). Cette classe inclut notamment l'alcool, les hypnotiques (barbituriques), les tranquillisants (benzodiazépines), les neuroleptiques et les analgésiques (opiacés, morphine, héroïne...) ;
- les stimulants : ils stimulent le fonctionnement du système nerveux, provoquent souvent une dépendance et peuvent provoquer, à long terme, la paranoïa ou des dépressions graves. Cette classe inclut notamment les stimulants mineurs (café, tabac), les stimulants majeurs (amphétamines, anorexigènes, cocaïne, ecstasy, GHB), les stimulants de l'humeur et les antidépresseurs ;
- les hallucinogènes ou perturbateurs : ils perturbent le fonctionnement du système nerveux et la perception de la réalité et peuvent, à long terme, modifier durablement la personnalité du consommateur (syndrome post hallucinatoire persistant). Cette classe inclut notamment le chanvre indien, les solvants (éther, colles), les anesthésiques volatils, le LSD, la mescaline, la psilocybine, la kétamine, etc.
Classification selon Peters (1991)
En 1991, G. Peters (un professeur des universités suisse) établit une classification des psychotropes :
- Les psychostimulants, qui accélèrent le fonctionnement du système nerveux ;
- les psychédéliques, qui perturbent le fonctionnement du système nerveux ;
- les psychosédatifs, qui ralentissent le fonctionnement du système nerveux ;
- les antidépressifs, qui ralentissent le fonctionnement du système nerveux après une phase d'excitation.
Classifications selon le danger
Ces classifications ont surtout une portée juridique.
Classification de l'OMS (1971)
En 1971, l'OMS établit une classification des substances psychotropes en évaluant leur danger selon trois critères : dépendance psychique, dépendance physique et tolérance. Cette classification est cependant imprécise dans ses évaluations et la liste des psychotropes pris en compte est incomplète, le tabac ou les tranquillisants n'y sont pas pris en compte :
Dangerosité des drogues selon l'OMS (1971) Drogue Dépendance physique Dépendance psychique Tolérance Alcool moyenne à marquée moyenne à marquée certaine Opiacés marquée modérée à moyenne marquée Cocaïne aucune modérée à marquée aucune Barbituriques moyenne à marquée moyenne à marquée substantielle Amphétamines minime moyenne à marquée aucune Khat minime moyenne à modérée minime Solvants, inhalants minime moyenne à modérée possible avec certains produits Hallucinogènes (LSD) aucune moyenne à modérée peut-être marquée avec certains produits cannabis minime moyenne à modérée possible à fortes doses Classification du rapport Pelletier (1978)
En 1978, Monique Pelletier (une avocate française) reprend la classification de l'OMS et l'applique à l'ensemble des psychotropes juridiquement réglementés dans son rapport de la mission d'études sur l'ensemble des problèmes de la drogue. Les évaluations sont plus claires et s'échelonnent de 0 à 4. La tolérance de la cocaïne et des amphétamines passent de « aucune » à « très forte ».
rapport Pelletier (1978) Substance Dépendance psychique Dépendance physique Tolérance Stupéfiants Opiacés Opium 4 4 4 Morphine 4 4 4 Héroïne 4 4 4 Morphino-mimétiques Péthidine (dolosal) 4 4 4 Dextromaramide (palfium) 4 4 4 Dextrométhorphane (romilar) 4 4 4 Stimulants Coca 3 0 2 Cocaïne 4 0 4 Hallucinogènes LSD 1 0 0 Mescaline 1 0 0 Psilocybine 1 0 0 Haschisch 2 0 0 Cannabis 1 0 0 Médicaments détournés Stimulants Amphétamines 4 1 4 Méthamphétamines 4 1 4 STP 4 1 4 Hypnotiques et tranquillisants Barbituriques 3 4 3 Non barbituriques 2 2 3 Tranquillisants 4 1 3 Analgésiques non opiacés Pethacétine 4 0 2 Amydopyrine 4 0 2 Autres substances Alcool 3 3 3 Tabac 2 0 2 Solvants volatils 3 1 4 - Légende :
0 = nulle ; 1 = faible ; 2 = moyenne ; 3 = forte ; 4 = très forte
Code de la santé publique français (1990)
Article détaillé : Code de la santé publique.Largement inspiré des conventions internationales de 1961, 1971 et 1988 sur le contrôle des stupéfiants, le code de la santé publique français classe les psychotropes en quatre catégories (dont les deux premières, stupéfiant et psychotrope, furent établies par l'arrêté du 22 février 1990) en fonction de leur toxicité et de leur dangerosité :
- Les substances stupéfiantes. Cette catégorie inclut les produits considérés comme les plus toxiques. Leur production, leur distribution et leur usage sont étroitement réglementés, voire interdits pour certains (héroïne). Cette catégorie liste plus de 170 plantes et substances parmi lesquelles :
- Les stupéfiants de la convention de 1961 : coca, opium, cannabis et leurs dérivés (morphine, héroïne, méthadone, cocaïne, haschisch...)
- certains psychotropes de la convention de 1971 : des hallucinogènes, les amphétamines, le MDMA...
- des nouvelles drogues de synthèse comme la kétamine ;
- le khat, l'acide lysergique.
- les substances psychotropes. Cette catégorie correspond aux substances listées par la convention de 1971 mais qui ne sont pas listées comme stupéfiant. Cette catégorie liste notamment des médicaments comme des antidépresseurs, des benzodiazépines , des barbituriques, des tranquillisants, des hypnotiques, etc.
- les médicaments inscrits sur les listes I et II, définis par l'article L.5132-6 du Code de la santé publique français. Ils ne sont délivrables que sur ordonnance "non renouvelable" (Liste I) ou renouvelable (liste II) ;
- les substances dangereuses. Cette catégorie concerne les substances destinées à l'industrie, l'agriculture et au commerce et classées par les ministères concernés en huit sous-catégories (très toxique, toxique, corrosif, irritant, cancérogène, tératogène, mutagène). Cette catégorie liste notamment l'éther, ou les acides, etc.
Les substances dopantes relèvent d'une liste spécifique établie par les ministères des sports et de la santé et fixée par arrêté ministériel le 2 février 2000. Cette liste s'inspire grandement de la liste officielle du Comité international olympique (CIO).
Rapport Roques (1998)
En 1998, Bernard Roques, un professeur français membre de l'Académie des Sciences, présente une approche globale considérant à la fois les propriétés pharmacologiques des produits psychotropes et les problèmes et risques sanitaires et sociaux liés à la consommation de ces produits.
Ce tableau est un extrait du tableau publié à la page 182 du rapport sur la dangerosité des produits par le professeur Bernard Roques et adressé au Secrétaire d'État à la Santé de l'époque, M. Kouchner, à l'issue des Rencontres Nationales sur l'Abus de drogues et la toxicomanie (France, juin 1998)[2].
Facteurs de dangerosité des drogues Héroïne
(opioïdes)Alcool Tabac Cocaïne Psychostimulants Benzodiazépines Cannabinoïdes
(dérivés du Chanvre)Dépendance physique très forte très forte forte faible faible moyenne faible Dépendance psychique très forte très forte très forte forte mais intermittente moyenne forte faible(exceptions possible) Neurotoxicité faible forte 0 forte forte 0 0 Toxicité générale forte
(nulle pour méthadone et morphine en usage thérapeutique)forte très forte forte forte très faible très faible Dangerosité sociale très forte forte (cancer) très forte faible
(exceptions possibles)faible faible Le rapport Roques propose une nouvelle classification des psychotropes en ne considérant donc que les effets neuropharmacologiques qu'ils provoquent[1] :
- les analgésiques-narcotiques ;
- les stimulants psychomoteurs ;
- les psychomimétiques ou hallucinogènes ;
- les dépresseurs centraux ;
- les anxiolytiques.
Classifications juridiques
Des classifications s'inspirent des conventions internationales ; celles-ci sans définir les termes classent ces produits en deux groupes :
- les stupéfiants via la convention unique sur les stupéfiants de 1961 qui sont hiérarchisés selon leur dangerosité et leur potentiel médical ;
- les psychotropes via la convention sur les substances psychotropes de 1971.
Elles sont critiquées par le milieu médical qui préfère considérer une consommation problématique plutôt que des types de produit[1].
Note
- ↑ a , b et c Denis Richard, Jean-Louis Senon, Marc Valleur, Dictionnaire des drogues et des dépendances, Larousse, 2004 (ISBN 2-03-505431-1)
- ↑ Tableau sur la dangerosité des produits par le Pr. Bernard Roques
Voir aussi
Articles connexes
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