Toxiques de combat

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Arme chimique

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Symbole actuel des armes chimique dans les forces armées des États-Unis
Attaque au gaz durant la 1ère guerre mondiale

Une arme chimique est une arme utilisant un (ou plusieurs) produit(s) chimique(s), toxiques pour l'humain (et souvent pour tout ou partie des animaux, voire pour les plantes). La recherche et l'emploi d'armes chimiques s'inspirent de ceux d'armes biologiques, dont l'usage est très ancien.
L'arme peut être létale (mortelle) ou simplement neutralisante.
L'usage intense et la fabrication industrielle de ces armes se sont développés en 1914-1918. La charge toxique (chlore dans un premier temps) a d'abord été diffusée sous forme gazeuse emportée par le vent vers l'ennemi, puis transportée par un vecteur (munition), généralement obus ou bombe, mais des grenades chimiques ont été utilisées au moins dès 1914-1918.

Sommaire

Types

Les agents chimiques sont des armes de destruction massive. Ils peuvent être classé en trois catégories :

  • les incapacitants, comme les gaz lacrymogènes ;
  • les neutralisants psychiques ou physiques ;
  • les agents létaux qui provoquent la mort, eux-mêmes classés en plusieurs groupes :

Historique

Des bonbonnes de gaz chlorés toxiques ont été utilisées avant une production massives d'obus à gaz lors de la Première Guerre mondiale
Soldats de la 55e division de la British Army, aveuglés par les gaz de combats durant la Bataille de la Lys le 10 avril 1918.
  • Des légionnaires romains auraient été victime d'une attaque chimique, approximativement vers l'an 100. Selon l'archéologue britannique Simon James qui a revisité les résultats de fouilles réalisées en Syrie au siècle dernier, la mort de légionnaires basés à Dura-Europos lors d'une attaque ennemie, s'expliquerait par une amphore de bitume et de cristaux de soufre. Les Perses auraient su que, parce que les Romains se trouvaient à ce moment dans un espace confiné, en leur expédiant cette mauvaise surprise et en bloquant leur sortie, ils les condamnaient à l'asphyxie.

Première Guerre Mondiale

  • 22 avril 1915 : La première attaque chimique massive a eu lieu lors de la deuxième bataille d'Ypres durant la Première Guerre mondiale par l'armée allemande. 6 000 cylindres (à 30 000 selon les auteurs) libèrent 180 tonnes de chlore sous forme de nuage dérivant sur les lignes alliées était émise à partir de bouteilles d'acier ouvertes sur place. L'attaque fit environ 10 000 victimes (morts ou hommes hors de combat). Mais il s'avère que la France avait mené des recherches secrètes avant la Grande Guerre sur le sujet et avait employé ponctuellement du gaz lacrymogène non-létal sans succès dans des projectiles nommés engins suffocants.

Il s'en est ensuivi une course aux protections (masques anti-gaz) et aux produits de plus en plus toxiques avec une accumulation de stocks considérables (qui n'ont que peu été utilisé après 1919). La ville d'Ypres a ainsi donné son nom à l'un des plus célèbre gaz de combat, l'ypérite ou gaz moutarde, utilisé pour la première fois sur le front le 11 juillet 1917 lors de la troisième bataille d'Ypres, ou bataille de Passchendaele[2].

  • 31 mai 1915 : des attaques plus meurtrières se font avec des mélanges chlore-phosgène (12 000 bouteilles de gaz) sur le front russe, sur la Bsura-Rumka, qui font environ 9 000 victimes, dont 6 000 morts.
  • Juillet 1915 : 100 000 obus "T" (bromure de benzyle) sont tirés au canon de 155 en Argonne.
  • Mars 1916 à Verdun : des obus de 75 au phosgène sont testés, avec un effet mortel et des blessures très difficiles à soigner.
  • Juillet 1916 : la bataille de la Somme inaugure l'usage de nouveaux obus à l'acide cyanhydrique.
  • Mars 1917 : Du phosgène est largué par avion.
  • Juillet 1917: L'ypérite est massivement utilisé dans la région d'Ypres - d'où son nom. Elle induit des brûlures intolérables avec un effet psychologique important (9 500 t de ce gaz sont fabriquées).
  • Septembre 1917 : Les "Clarks" à base d'arsines apparaissent, provoquant des vomissements dans les masques que les soldats sont obligés d'ôter, ce qui les force à respirer le gaz non filtré par les cartouches de ces mêmes masques.
  • 1918 : La dernière année de guerre voit utiliser un nombre croissant de munitions chimiques (25% environ des projectiles utilisés de part et d'autre sont des obus chimiques). Avant l'armistice, un obus sur quatre sortait des chaînes de fabrication muni d'une charge chimique. À la fin de ce conflit, 130 000 tonnes d’agents de guerre chimiques avaient été utilisées, causant 1,2 million de victimes et 100 000 morts [3][4].

Grâce au masques anti-gaz et à un assez mauvais pouvoir de dispersion, seuls 5 % des tués furent victimes de ces armes, mais elles ont fait de nombreux blessés, et on s'est rendu compte plusieurs décennies après que l'ypérite était également cancérigène, comme probablement les arsines et d'autres toxiques, qui pourraient par ailleurs être un facteur supplémentaire de risque pour la Maladie d'Alzheimer ou de Parkinson, ou responsables de troubles de la fertilité et de la reproduction. L'horreur inspirée par ces armes s'est traduite par des dispositions visant leur interdiction dans les traités internationaux, dont notamment l'article 171 du Traité de Versailles et l'article V du Traité relatif à l'emploi des sous-marins et des gaz asphyxiants en temps de guerre qui prohibent l'usage des gaz toxiques, sans paradoxalement en interdire la fabrication et le stockage en masse, qui fut une réalité jusqu'à la fin de la guerre froide dans nombre de nations.

Deuxième Guerre Mondiale

Selon les historiens Seiya Matsuno et Yoshiaki Yoshimi [5] l'empereur Showa autorisa en dépit de ces traités et dès 1937, durant la guerre sino-japonaise, l'usage d'armes chimiques contre les troupes ennemies et les populations civiles. À titre d'exemple, des gaz toxiques furent autorisées à 375 reprises par le prince Kotohito Kan'in lors de la bataille de Wuhan, d'août à octobre 1938, et ce, en dépit de la résolution du 14 mai de la Société des nations condamnant l'usage de gaz toxiques par l'armée impériale japonaise. Ces armes ne furent toutefois jamais autorisées sur le champ de bataille contre des nations occidentales mais seulement contre les populations locales jugées "inférieures" et des prisonniers de guerre.

Dès 1937, l’Allemagne exploite les propriétés neurotoxiques d'un insecticide organophosphoré, le tabun ; puis en 1939, le sarin ; et en 1944, le soman. Après guerre, les amitons furent développés, les trois derniers produits agissant même à travers l’épiderme. L’ypérite a continué à être utilisé dans des conflits «périphériques» malgré les dénégations de leurs utilisateurs.

Les infrastructures de production d'engrais et de pesticides ont respectivement pu fournir de grandes quantités d'explosif (nitrates) et de neurotoxiques et autres produits chimiques pour la guerre. Le non-emploi des produits stockés, pendant la Seconde Guerre mondiale, est heureux, bien que mal expliqué. Il a en tous cas laissé des stocks importants qui attendent qu'on les traite ou qui n'ont pas jusqu'à un passé récent été correctement éliminés (c'est-à-dire éliminés sans impacts écologiques ou sanitaires ni définitivement pour les toxiques non dégradables).

Depuis 1945

Depuis, de nombreux pays ont fait des recherches sur les possibilités d'utiliser des produits chimiques dans le cadre militaire. Ils ont donc développé, étudié et stocké des quantités, parfois très importantes, de ces substances toxiques qui sont souvent très délicates à détruire.

L'utilisation d'armes chimiques après la Seconde Guerre mondiale fut relativement limitée mais la guerre Iran-Irak vit l'utilisation massive de ces armes par l'Irak, on estime que ces attaques chimiques ont causé 60 000 victimes iraniennes, dont 10 000 morts [6]. Le 16 mars 1988, l'armée irakienne à bombardé avec l'arme chimique la ville kurde d' Halabja, il y eu plus de cinq mille morts et environ sept mille blessés et handicapés à vie. [7].

On a vu la crainte d'un terrorisme chimique se concrétiser avec les attentats au sarin commis au Japon par la secte Aum Shinrikyo en 1994 et 1995. Depuis janvier 2007, on assiste durant la guerre d'Irak à des attentats à l'explosif combiné avec du chlore contre la population[8].

Convention sur l'interdiction des armes chimiques

Quand ce type d'armes est destiné à être utilisé sur un périmètre important pour tuer de nombreuses personnes, elle est désignée comme arme de destruction massive, au même titre qu'une arme nucléaire.

Actuellement, ce type d'armes fait l'objet d'une interdiction par une convention entrée en vigueur en 1997, par laquelle les pays signataires s'interdisent leur utilisation et promeuvent leur destruction.

Au 20 novembre 2008, seuls les pays suivants n'avaient pas encore ratifié cette convention: [9]

Principaux produits toxiques utilisables comme armes chimiques

Écorché d'une ogive de missile sol-sol Honest John. Les sous-munitions M139 devant contenir du sarin sont bien visibles.

Il existe de nombreux produits toxiques pouvant être employés comme armes. Ils sont classés dans divers types, en fonction de leur mode d'action. On distingue ainsi les vésicants, les suffocants, les plus dangereux étant les neurotoxiques. Ces produits se présentent généralement sous forme de gaz ou d'aérosols largués dans des bombes ou pulvérisés par des avions spécialement équipés.

Remarque:

  • S'il n'était pas utilisé comme gaz de combat, l'insecticide Zyklon B, à base d'acide cyanhydrique, peut être considéré comme arme chimique dans le sens où il était détourné de sa fonction première pour gazer en masse des populations déportées.
  • L'agent orange, est un défoliant qui peut également être considéré comme une arme chimique en raison de sa toxicité à long terme.

Les effets des armes chimiques

Les chiffres du tableau sont exprimés en hectares couverts par tonne de produit toxique répandue à densité uniforme sur des objectifs matériels ou des personnels sans protection.

Par exemple, par une journée chaude et un temps couvert, 5 kg de Sarin par hectare, mettraient hors de combat 50 % des personnels supposés sans masque (attaque surprise).

Type de gaz Effets de contamination sur les matériel et le terrain Effets directs de mise hors de combat des personnel
Gaz moutarde (Ypérite-Lewisite) 5 ha/t 30 ha/t
Tabun (GA américain) 7 ha/t 50 ha/t
Sarin (GB américain) et Soman (GD américain) fugace 200 ha/t
gaz VX, VR 65 (soviétique), SOMAN épaissi 25 ha/t 25 ha/t

Parades

Équipement NBC (Nucléaire Biologique Chimique) - Armée française - 1997
Personnels de l'USAF en tenue NBC durant un exercice sur un aéroport en 1985

Pour se protéger des agents chimiques, il n'existe que trois types de parades :

  • la combinaison étanche de protection comprenant un masque à gaz adapté aux risques NBC (Nucléaire, Biologique, Chimique), c’est-à-dire conçue pour empêcher l'inhalation ou le contact avec les agents de l'un ou de l'autre type (hormis le rayonnement radioactif). Il faut porter l'équipement de protection préventivement. Or plusieurs types de gaz de combats n'ont ni goût ni odeur, ou n'induisent des symptômes évidents qu'après un certain temps (plusieurs heures pour l'ypérite).
  • Curativement : Ingérer ou injecter un antidote (s'il en existe un) dans les minutes qui suivent l'exposition.
  • Décontaminer le corps, les objets et lieux avec des produits adaptés (ce qui demande de connaitre l'agent en question)

Armes chimiques non-conventionnelles

On évoque depuis les années 1990 des recherches sur une arme chimique capable de dissoudre les caoutchoucs, naturel et synthétique. La destruction des pneus, des joints et des durits entraînerait la paralysie d’une armée. En 1914-1918, l'ypérite était déjà capable de passer au travers du caoutchouc naturel (latex).

Dans la même logique, des agents aptes à dégrader le cuivre ou le silicium auraient des effets similaires en détruisant les systèmes de communications.

On a aussi évoqué les armes phéromoniques ; un laboratoire de l'US Air Force avait demandé un financement en 1994 pour une arme capable de plonger les troupes visées dans un véritable état de transe sexuelle, celui-ci a été refusé par le Département de la Défense[10].

Problèmes environnementaux

Certains de ces produits ne se dégradent pas, ou ne se dégradent que très lentement et les amorces des munitions anciennes contiennent par ailleurs du mercure toxique (sous forme de 2 grammes de fulminate de mercure) et un explosif souvent également toxique. Les stocks de munitions chimiques ou de toxiques de guerre sont un danger permanent exposant à un risque croissant de fuites et de contacts dans le cas des munitions anciennes qui se dégradent inéluctablement. De nombreuses munitions non-explosées ont été détruites dans de mauvaises conditions après guerre sur terre, ou en mer, ou persistent dans les sols, notamment en Belgique et en France, dans la zone rouge la plus touchée par la Première Guerre mondiale. Les stocks de munitions non explosées ou non-utilisées ou immergées, avec plusieurs dépôts de dizaines de milliers de tonnes, contribuent aux séquelles durables des guerres mondiales et de la guerre froide (eau, air et sols pollués, écosystèmes dégradés, menace permanente pour les ressources en eau potable et en produits de la mer, problèmes de santé).

Une convention internationale engage ses pays signataires à éliminer leurs stocks d'armes chimiques avant 2007. Peu de pays ont pris les moyens d'y arriver, et la résolution du problème des nombreux dépôts immergés en mer - et dont on ne connaît pas toujours l'emplacement exact ni l'état de dégradation - n'est pas inclus dans la convention. La Commission OSPAR et la Commission HELCOM y travaillent également dans le cadre de deux conventions régionales, mais sans que ce sujet semble prioritaire pour leurs états membres, bien que les pays de la Baltique s'en inquiètent sérieusement depuis la découverte par les pêcheurs d'un nombre important d'obus ou de contenants fuyant dans leurs filets (au Danemark notamment, où 400 pêcheurs au moins auraient été brûlés par de l'Ypérite).

Notes et références

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  1. Histoire de la guerre terrestre, Encyclopédie Elsevier, Bruxelles, 1977, ISBN 2800302275
  2. Daniel Riche, La Guerre chimique et biologique, Belfond, Paris, 1982, ISBN 2-7144-1518-0, p. 104
  3. Les armes chimiques dans l'Histoire Page sur la Non prolifération, IRSN (consulté 2009 01 25)
  4. Dossier de présentation du groupe Australie
  5. Yoshimi and Seiya Matsuno, Dokugasusen Kankei Shiryō II, Kaisetsu, Hōkan 2, Jūgonen sensō gokuhi shiryōshū, Funi Shuppankan, 1997
  6. Chiffres du groupe Australie
  7. BRIÉ Françoise : L’utilisation des armes chimiques contres les Kurdes, in Le livre noir de Saddame Hussein, KUTSCHERA Chris (Sous la dir.) On Edition, 2005, p. 408. L’Irak gaze les Kurdes in Libération du 21 mars 1988
  8. Irak : nouveaux attentats à Bagdad, 25 février 2007, RTBF
  9. [OPCW. Technical Secretariat.Office of the Legal Adviser S/721/2008.5 December 2008. NOTE BY THE TECHNICAL SECRETARIAT. STATUS OF PARTICIPATION IN THE CHEMICAL WEAPONS CONVENTION AS AT 20 NOVEMBER 2008]
  10. (fr)Quand l'armée américaine planchait sur une bombe gay, Le Figaro

Voir aussi

Bibliographie

  • Olivier Lepick, La grande guerre chimique 1914-1918, PUF, coll. « Histoires », 1998.

Articles connexes

Liens externes

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