- Les Bijoux de la Castafiore
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Les Bijoux de la Castafiore 21e album de la série Les Aventures de Tintin Auteur Hergé Couleurs Studios Hergé Genre(s) Aventure policière Thèmes Enquête Vol Personnages principaux Tintin et Milou Capitaine Haddock Bianca Castafiore Dupond et Dupont Lieu de l’action Château de Moulinsart Époque de l’action Années 1960 Pays Belgique Langue originale Français Éditeur Casterman Première publication 1963 Nb. de pages 62 pages Prépublication Le Journal de Tintin (de 1961 à 1962) Adaptations Voir plus bas Albums de la série Les Aventures de Tintin Tintin au Tibet Vol 714 pour Sydney Les Bijoux de la Castafiore est le vingt-et-unième album de la série de bande dessinée Les Aventures de Tintin, créée par Hergé, scénariste et dessinateur belge. L’histoire est prépubliée dans Le Journal de Tintin du 20 juillet 1961 au 13 septembre 1962, puis publiée en album par les éditions Casterman en 1963.
Il s’agit d’une œuvre à part dans l’univers des Aventures de Tintin. Trois ans après Tintin au Tibet, Hergé semble être à l’apogée de son œuvre, et cet album est l’un de ses plus grands accomplissements sur le plan narratif. Contrairement aux autres albums de la série, l’intrigue ne correspond pas à une aventure classique, mais à une sorte d’énorme jeu de dupe, une série de tromperies, où il ne se passe pratiquement rien. Cependant, le lecteur est tenu en haleine par les quantités de rebondissements, de fausses pistes et interprétations, ainsi que par l’ambiance de mystère dans lequel sont plongés les personnages. Il s’agit également du seul album de la série, avec Le Secret de La Licorne, dans lequel les personnages ne partent pas à l’aventure dans d’autres parties du monde, ce qui n’empêche pas l’aventure de venir à eux.
Sommaire
Présentation
Résumé
Tout va pour le mieux au château de Moulinsart, sauf l’escalier dont une marche est cassée. Une lettre de la Castafiore annonce son arrivée. Pressé de quitter les lieux au plus vite, le capitaine Haddock glisse sur la marche cassée et se fait une entorse, ce qui le force à rester et à affronter la tempête musicale. Accompagnée de sa camériste Irma et de son pianiste Igor Wagner, Bianca Castafiore s’installe au château. L’arrivée de la cantatrice, qui craint en permanence que ses bijoux ne soient volés, met tout le château sens dessus dessous. Bientôt suit une horde de journalistes parmi lesquels Jean-Loup de la Batellerie et Walter Rizotto[B 1], du magazine Paris-Flash [B 2], qui inventent un projet de mariage entre elle et le capitaine suite à un des habituels quiproquos dus à Tryphon Tournesol. Puis survient le vol d’une émeraude hors de prix appartenant à la cantatrice. Les Dupondt enquêtent et accusent tour à tour : Nestor, Irma, les Tsiganes que le capitaine Haddock a invités dans son pâturage... Finalement, après moult péripéties et fausses pistes, l’émeraude sera retrouvée par Tintin, presque par hasard, dans le nid d’une pie.
Personnages
- Tintin
- Milou
- Capitaine Haddock
- Bianca Castafiore
- Professeur Tournesol
- Dupond et Dupont
- Irma
- Igor Wagner
- Séraphin Lampion
- Isidore Boullu (et sa femme)
- Alfred
- André
- Jean-Loup de la Batellerie
- Walter Rizotto
- Tristan Bior
- Coco
- Gino
Le marbrier Isidore Boullu est inspiré directement de la vie quotidienne d’Hergé. Celui-ci connaissait effectivement un marbrier de ce nom très difficilement joignable[A 1].
Les noms de Jean-Loup de la Batellerie et Walter Rizotto sont inspirés du duo de journalistes et grands reporters de l'époque travaillant pour Paris-Match : Philippe de Baleine et Willy Rizzo.[réf. nécessaire]
Tristan Bior est une parodie de Christian Dior.
Analyse générale
Une œuvre à part
Les Bijoux de la Castafiore est certainement un des ouvrages les plus accomplis d’Hergé. Complètement à l’encontre du reste de l’œuvre, Hergé dépeint ici une situation intimiste, centrée sur les banalités de la vie quotidienne, loin des grandes réalisations (le défi va être d’obtenir l’intervention du marbrier) et portant sur l’observation des caractères des protagonistes face aux petits tracas. Ici, les intrigues à résoudre ne comportent plus du tout le caractère de machinations demandant la présence de grandes organisations politiques, militaires ou criminelles[B 3]. On est dans le monde réel où l’on a de vraies blessures (telles des entorses à la cheville).
En outre d’une certaine façon, Hergé y ridiculise son propre univers puisque contrairement à l’usage, les héros ne vont pas au-devant des problèmes ; ce sont les problèmes qui viennent à eux et les submergent. Ils ne suivent pas une piste précise, mais une multitude de pistes qui ne mènent à rien.
Contrairement aux autres albums où Tintin voyage dans différents pays, l’histoire se déroule intégralement dans un même lieu (le château de Moulinsart), un même temps (une courte durée) et une même action (l’intrigue porte sur la seule disparition d’une émeraude) reconstituant ainsi la règle des trois unités du théâtre classique.
Hergé dit de cet album :
« L’histoire a mûri de la même façon que les autres, mais a évolué différemment, parce que j’ai pris un malin plaisir à dérouter le lecteur, à le tenir en haleine tout en me privant de la panoplie habituelle de la bande dessinée : pas de “mauvais”, pas de véritable suspense, pas d’aventure au sens propre… Une vague intrigue policière dont la clé est fournie par une pie. N’importe quoi d’autre, d’ailleurs aurait fait l’affaire : ça n'avait pas d’importance ! Je voulais m’amuser en compagnie du lecteur pendant soixante-deux semaines, l’aiguiller sur de fausses pistes, susciter son intérêt pour des choses qui n’en valaient pas la peine, du moins aux yeux d’un amateur d’aventures palpitantes.[A 2] »
Thèmes abordés
Il s’agit comme souvent de dénoncer des préjugés (les Tziganes sont accusés d’être des voleurs), de montrer comment notre sens de l’observation peut être pris en défaut et conduire à de fausses déductions (le son d’un piano prouve-t-il pour autant la présence d’un(e) pianiste ?), que chacun a un jardin où il cache de petits secrets et que la nature (humaine ou végétale) est en interaction constante. En fait, le thème de l’album porte sur la communication humaine et l’ensemble de ses supports (que l’on utilise pour ce faire une fleur ou un article de presse). On passe ainsi de l’autre côté du miroir, dans les coulisses de la fabrication d’une émission de télévision ou d’un article de journal.
Se défier des apparences, telle est donc la leçon que nous donne l’auteur, qui nous invite également à ne jamais perdre notre esprit critique. Car même les médias, utilisés d’habitude pour « prouver » des faits, sont capables d’invention et donc de manipulation de notre comportement. Peut-on leur faire confiance après avoir vu leur mode de fonctionnement ou ne devons-nous pas à présent tout autant nous méfier d’eux ? Voilà ce que nous dit Hergé.
Style graphique
Hergé s’amuse aussi dans cet album avec ses propres codes textuels et iconographiques, abandonnant même en quelques occasions la ligne claire, style habituel précis et rigoureux caractéristique de son œuvre.
À la page 40, la case 9, montrant un groupe de gitans assemblés autour d’un feu de camp écoutant la guitare jouée par l’un d’eux, se distingue du reste de l’album et de la planche en particulier par son style graphique et sa colorisation. Hergé semble ici s’amuser en nous présentant ce cliché incongru[A 3].
C’est dans cet album que se trouve également une case (la 7e de la p. 50) dans laquelle le lecteur est plongé en vision subjective, se retrouvant avec les yeux larmoyant comme les héros, suite à l’observation d’une image floue (le professeur Tournesol essaie de mettre au point un téléviseur couleur à une époque où ne régnaient encore en Europe que les tubes cathodiques en noir et blanc).
Autour de l’œuvre
Le titre original choisi par Hergé pour cette histoire était Ciel ! Mes bijoux !, titre rejeté par l’éditeur Casterman pour des raisons commerciales.[réf. nécessaire]
Postérité
Accueil critique
Les Bijoux de la Castafiore a attiré l’attention des universitaires et contribué à lancer la mode de la réflexion sur le genre. Michel Serres lui a consacré un article dans la revue Critique : Les bijoux distraits ou la cantatrice sauve, n°277 juin 1970. Benoît Peeters a pour sa part proposé une lecture minutieuse de l’album sous le titre Lire Tintin, les bijoux ravis. Cette aventure de Tintin à bien des égards exceptionnelle continue d’être citée dans de nombreux travaux sur la communication et sur la bande dessinée.
Succès commercial
Influence
Adaptations
Cet album fut adapté dans la série animée de 1992. Il fut aussi adapté au théâtre par Dominique Catton et Christiane Suter, à Genève pour le théâtre Am Stram Gram en 2001 (reprises en 2002, 2004 et 2011, aussi au Théâtre de Carouge). Jean Liermier a créé le rôle de Tintin. Il s'agit de la première adaptation d'une aventure de Tintin au théâtre.
Publications
Le Journal de Tintin
Éditions en album
Cet album est paru en 1963 et traduit dans de nombreuses langues.
Les Bijoux de la Castafiore existaient en 2009 dans 26 langues différentes, depuis les premières éditions française, néerlandaise et anglaise de 1963, en passant par le bressan (Lé pèguelyon de la Castafiore, 2006), jusqu’à la dernière édition en bourguignon-morvandiau (Lés Ancorpions de lai Castafiore) parue en 2008[A 4].
Voir aussi
Bibliographie
- Pierre Fresnault-Deruelle, Hergé ou le secret de l’image, éditions Moulinsart, 1999.
- Benoît Peeters, Le monde d'Hergé, Tournai, Casterman, décembre 1984, 2e éd., 320 p. (ISBN 2-203-23124-6)
- Benoît Peeters, Les bijoux ravis : Une lecture moderne de Tintin, Bruxelles, Édition Magic Strip, coll. « Le siècle d'Hergé », 1984, 168 p. (ISBN 2-8035-0095-7).
[B 4], et Lire Tintin, les bijoux ravis, Les Impressions Nouvelles, 2007
- Yves Lavandier, La Dramaturgie, chapitre 5, Le Clown & l’Enfant, 2008. Dans une analyse structurelle, l’auteur explique qu’une partie de l’originalité de l’album d’Hergé tient au fait que le protagoniste n’est pas Tintin mais Haddock, en tout cas jusqu’à la page 43.
- Michel Serres, « Une leçon de communication », dans Philosophie Magazine, Paris « Hors-série », no 8H « Tintin au pays des philosophes », septembre 2010, p. 30-31
Notes et références
Notes
- Tintin et les Picaros en 1976 mais également dans la troisième et dernière version de L’Île Noire en 1965. Hergé fera réapparaître ces personnages dans
- Paris Match. Avatar du célèbre hebdomadaire français
- Tintin au Tibet, c’est le seul album dans lequel aucune arme à feu n’intervient. Avec
- Objectif Tintin La permission de reproduire des cases de l'album à l'appui de son analyse lui ayant été refusée, Benoît Peteers fit paraître la première édition de l'ouvrage avec des rectangles gris à leur place. Critique à lire sur le site
Références
- L'essentiel sur Hergé et Tintin sur Tintin.com. Consulté le 6 mars 2009.
- Numa Sadoul, Entretiens avec Hergé, p. 70
- Pierre Fresnault-Deruelle, Hergé ou le secret de l’image, p. 79
- Lés Ancorpions de lai Castafiore sur objectiftintin.com. Consulté le 19 mai 2009
Liens externes
Catégories :- Album de Tintin
- Album de bande dessinée sorti en 1963
- Opéra et littérature
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