- Objectif Lune
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Objectif Lune 16e album de la série Les Aventures de Tintin Auteur Hergé Genre(s) Franco-Belge
AventurePersonnages principaux Tintin
Milou
Capitaine Haddock
Professeur Tournesol
Dupond et DupontLieu de l’action Belgique
SyldavieÉditeur Casterman Première publication 1953 Nb. de pages 62 Prépublication Tintin Albums de la série Les Aventures de Tintin Tintin au pays de l'or noir On a marché sur la Lune Objectif Lune est le seizième album de bande dessinée des aventures de Tintin, prépublié du 30 mars 1950 au 30 décembre 1953 dans les pages du journal Tintin, cette prépublication se confondant (titre unique pendant toute la prépublication) avec celle de l’album suivant, On a marché sur la Lune. L’album est paru en 1953.
Sommaire
Synopsis
De retour de voyage, Tintin et le capitaine Haddock apprennent que le professeur Tournesol est parti pour la Syldavie, où il leur demande de le rejoindre.
Ils le retrouvent dans une base secrète de recherches atomiques tapie au cœur des montagnes, et dirigée par monsieur Baxter. Là, le professeur Tournesol les informe qu’il a été engagé pour conduire la réalisation d’une fusée lunaire dont il a conçu le moteur atomique, et qu’il s’apprête à partir pour la Lune. Bien malgré eux, Tintin et le capitaine Haddock acceptent de l’accompagner. Cependant, des évènements anormaux se produisent : deux hommes parviennent à pénétrer en parachute dans la « zone interdite », et puis de mystérieux concurrents tentent de saboter le projet…
Fiche technique
- Type : Bande dessinée
- Scénario : Hergé
- Dessins : Hergé, Bob de Moor
- Éditeur : Casterman
- Lieux : Belgique, Syldavie
- Époque : 1953
Aspects scientifiques
Ces deux volets de l’aventure lunaire furent publiés en 1954, 15 ans avant la mission Apollo 11, et avant même le premier satellite (Spoutnik). Comme le dira Hergé, c’était là l’exotisme absolu[réf. nécessaire]. Dans les albums qui suivront, il utilisera plutôt l’univers qu’il a créé dans une phase « domestique » dont le point culminant sera Les Bijoux de la Castafiore.
Ce n’est pas la première fois qu’Hergé s’intéresse à l’astronautique, puisque les deux tomes de Stratonef H22 (1951) des Aventures de Jo, Zette et Jocko, y font référence[1].
Hergé a consulté un de ses amis, le scientifique Bernard Heuvelmans et consulté le livre l’Astronautique d’Alexandre Ananoff[2]. On peut remarquer aussi que les parties de l’album Objectif Lune traitant de la réalisation du projet s’inspirent très largement du film Destination... Lune ! (Destination Moon) (Robert A. Heinlein/Chestley Bonestell) de 1950.
Les sources techniques de Hergé sont principalement les programmes et recherches de Wernher von Braun et Hermann Oberth, qui projetaient, dès avant-guerre, de provoquer un impact sur la Lune avec une fusée (un écho de ce projet se retrouve dans Z comme Zorglub de Franquin et Greg). Ce même Oberth se trouve être le conseiller technique d’un film de Fritz Lang La Femme sur la Lune (Frau im Mond, 1929), dont le scénario, les décors et les options technologiques (notamment la « manœuvre de retournement », solution envisagée par Oberth pour résoudre l’épineuse question de la gravité artificielle par accélération continue) se retrouvent presque intégralement dans Objectif Lune et On a marché sur la Lune.
Le centre de recherche
L’extérieur du centre de recherche est en tout point semblable au centre de séparation de l’uranium d’Oak Ridges, qui fut un lieu servant à l’exécution du projet Manhattan dans les années 1940 aux États-Unis.
La Pile atomique ressemble beaucoup à celle de Mol en Belgique[3].
La XFLR-6 et la fusée lunaire
La conception des deux fusées elle-même est une variation d’un dessin assez classique de la science-fiction des années 1930 à 1950. Il s’agit d’un engin à étage unique capable de décoller et se poser verticalement sur plusieurs ailerons qui font office de pieds. Il reprend les dessins à carreaux apparus sur la fusée germanique « V2 »[4] utilisés pour conduire l’analyse des mouvements de l’engin à partir des films pris à l’envol. Le support est tripodique contrairement aux quatre ailerons utilisés sur l’ensemble des fusées à décollage vertical de l’époque. Hergé a pu s’inspirer à l’époque des couleurs typiques en quadrillage blanc et rouge de la Fusée Véronique.
La propulsion est classique chimique (acide azotique et aniline précise le Professeur Tournesol) au voisinage de la Terre et nucléaire dans l’espace (la tournesolite à base de silicone résistant à la chaleur de la désintégration nucléaire)[5]. Le fonctionnement plus précis de la propulsion n’est pas détaillé dans l’album. À titre de comparaison, les fusées Saturn V du programme Apollo fonctionnaient avec des propulseurs aux propergols, kérosène ou hydrogène liquide, et oxygène liquide[6].
L'alunissage
La fusée rouge et blanche d'Hergé a aluni au milieu du cirque Hipparque, un des plus grands cratères lunaires. Le paysage est désertique, le ciel noir est rempli d'étoiles et la Terre brille au-dessus de l'horizon. La chaîne de montagnes visible au loin est sans doute la muraille du cirque, qui s'élève à près de 1.200 mètres au-dessus du fond. La fusée s'est posée entre deux petits cratères, au voisinage d'un escarpement rocheux qu'on aperçoit au premier plan. Le lieu choisi par Hergé pour l'alunissage n'était pas particulièrement facile. Pour la mission Apollo 11, la Nasa avait recherché un terrain aussi peu accidenté que possible, cartographié en détail par les sondes Lunar Orbiter lancées entre 1966 et 1967.
L'apesanteur
Le problème de l’apesanteur dans la fusée est réglé en la faisant accélérer ou décélérer tout le temps, créant une pesanteur artificielle, mais l’apesanteur est bien représentée lorsque la fusée cesse d’accélérer. On voit même le whisky du capitaine Haddock flotter hors de son verre et se mettre en boule. Dans la réalité et par le phénomène de capillarité, le whisky aurait eu cependant plus tendance à s’étaler sur toute la surface du verre.
La faible pesanteur lunaire est assez bien représentée lors des sorties extravéhiculaires, ainsi que la vie dans une combinaison spatiale. Le paysage lunaire, avec son ciel noir où les étoiles ne scintillent pas, est, également, assez fidèle.
L’absence de son sur la Lune (due à la non-présence d’air) est aussi bien représentée quand, averti par des projections de pierre, Tintin et Haddock se rendent compte de la chute d’une météorite à quelques mètres derrière eux, sans qu’ils ne l’aient entendue.
La Terre annonce au début de l'ouvrage à la fusée lunaire qu'elle a atteint la vitesse de 11 km/s et qu'elle n'est donc plus soumise à l'attraction terrestre. C'est techniquement faux : la fusée est toujours soumise à l'attraction terrestre, elle a juste atteint la vitesse de libération (même si son moteur était coupé, elle ne retomberait jamais sur terre).
Le voyage
Lors de la « manœuvre de retournement », la fusée devrait continuer sa rotation (il manque un moteur dans le sens opposé)[7].
Adonis
L’astéroïde Adonis existe bien, mais il ne se trouve pas entre la Terre et la Lune. De plus lorsque le moteur de la fusée est arrêté Adonis reste à proximité de celle-ci, ce qui voudrait dire que l’astéroïde se dirige vers la Lune[4]. Enfin compte tenu de la taille d’Adonis, la satellisation du capitaine n’est pas réaliste. Ajoutons aussi que lorsque les moteurs de la fusée sont arrêtés, celle-ci devrait être attirée de la même manière que le capitaine vers Adonis et on ne devrait pas voir le capitaine s'éloigner de la fusée mais les deux tomber en même temps vers l'astéroïde.
Sur la Lune
Les reliefs lunaires sont très découpés contrairement à la réalité.
Le clair de Terre manque nettement de nuages et ressemble davantage à une mappemonde. De plus, depuis l’endroit où s’est posée la fusée (le Cirque Hipparque), elle devrait apparaître au zénith[8].
La présence de grottes et de cavernes est attestée sur la Lune[9], mais la présence de glace pure est encore incertaine. À l’abri complet du Soleil, à des températures toujours inférieures à 200 K (–73 °C), la glace d’eau doit pouvoir perdurer des milliards d’années[10].
L’informatique de contrôle de vol
L’informatique de contrôle de vol[11] de la fusée lunaire présente de très fortes similitudes[12] avec l’IBM 604 de 1948[13]
Divers
L’ingénieur Wolff parle d’une livraison provenant « de l’usine d’Iéna » ; il s’agit manifestement de matériel optique de précision fabriqué par Carl Zeiss. Or, à l’époque, Iéna se trouvait en République démocratique allemande communiste, ce qui semble indiquer que le pays qui construit la fusée (la Syldavie, située dans les Balkans) est une puissance indépendante capable de mener un projet spatial ainsi que des relations à la fois avec les pays de l’Est et l’Occident.
Autour de l’œuvre
Adaptation
Quelques modifications furent apportées entre la publication en planches dans le Journal de Tintin et la version en deux albums. Elles portent tant sur le découpage (vignettes déplacées, scènes coupées ou la refonte de certains gags – Haddock bute contre un rail et non une bonbonne, il n’est plus aspergé à travers une grille, etc.) pour une plus grande efficacité.
Remarques supplémentaires
- C’est la première apparition du nom « Docteur Rotule », nom de médecin dans les aventures de Tintin que l’on retrouvera dans Les Bijoux de la Castafiore.
- Edgar Pierre Jacobs prête ses traits à un ingénieur.
- Neuf autres titres avaient été envisagés pour cet album : Le Grand Départ, Le Mammouth travaille, Opération Mammouth, Fusée lunaire ne répond plus, Sbrodj Zone interdite, Monsieur Tournesol fait le zouave, Destination Lune, Rien n’arrêtera Tintin, Tintin et la Fusée atomique.
Adaptations
Séries animées
Cet album fut adapté dans la série animée de 1962 (couplé avec sa suite) et dans la série animée de 1992.
Expérimentations contemporaines
En 2003, Jochen Gerner réalise Objectif Secret : une réinterprétation graphique oubapienne de l’ouvrage. Les 15 planches réalisées à la mine de plomb sur papier millimétré fixé sur carton feront partie intégrante de l’exposition collective OuBaPo exposée en mai 2003 à la galerie Anne Barrault à Paris. L’œuvre fera l’objet d’une acquisition par le FNAC du Ministère de la culture et de la communication en 2003 lors du FIAC, dans laquelle la galerie est inscrite. L’œuvre est en dépôt depuis le 26 juillet 2004 au Centre national de la bande dessinée et de l’image (Angoulême).
Lien externe
- Les planches originales parues dans le Journal de Tintin à partir de 1950
- Dossier Futura-Sciences sur la part de fiction et de réalité dans la BD d'Hergé
Notes et références
- Hergé ne s’est pas trompé », Le Monde, supplément Tintin et la Lune, 21 juillet 2009 «
- Tintin chez les savants, Excelsior Publications, 2003, 160 p. (ISBN 287424015X) p 18
- Tintin chez les savants, p 35
- Tintin chez les savants, p 20
- Objectif Lune, p 16
- Tintin chez les savants, p 37
- Tintin chez les savants, p 46
- Tintin chez les savants, p 47
- Images de "tunnels de lave" prises par la sonde LROC
- Voir le diagramme de phase de l'eau
- Objectif Lune, p. 54, Casterman 1953
- Cette page où l'IBM 604 et le dessin d'Hergé sont rapprochés montre bien les similitudes (v. vers le milieu de la page).
- La fiche de l'IBM 604 sur le site du Computer History musueum
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