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Immaculée conception
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L'immaculée conception de Marie est un dogme de l'Église catholique, défini le 8 décembre 1854 par le Pape Pie IX dans sa bulle Ineffabilis Deus.Sommaire
Définition
Le dogme signifie que Marie, mère de Jésus-Christ, fut conçue exempte du péché originel[1]. La bulle déclare :
- « Nous déclarons, prononçons et définissons que la doctrine, qui tient que la bienheureuse Vierge Marie a été, au premier instant de sa conception par une grâce et une faveur singulière du Dieu tout-puissant, en vue des mérites de Jésus-Christ, Sauveur du genre humain, préservée intacte de toute souillure du péché originel, est une doctrine révélée de Dieu, et qu’ainsi elle doit être crue fermement, et constamment par tous les fidèles. »
La constitution dogmatique Lumen gentium (1964) précise qu'elle a été « rachetée de façon éminente en considération des mérites de son Fils » (LG 53) et que « indemne de toute tache de péché, ayant été pétrie par l'Esprit saint, [elle a été] formée comme une nouvelle créature. »
Il n'est pas directement lié à la conception virginale de Jésus, c'est-à-dire la croyance en le fait qu'il soit né d'une mère vierge. Ce dogme, évoquant l'âme de la mère de Dieu est le pendant de celui de la virginité du corps. Saint Bernard de Clairvaux, qui n'y souscrivait cependant pas, indiquait dans une de ses homélies[2] que la sainteté de corps et d'âme de Marie était le préalable à la réception de l'Annonciation faite par l'archange Gabriel. Ce dogme n'est donc pas tout neuf dans la patristique occidentale.
L'Immaculée Conception se fête le 8 décembre, date « supposée » de la conception de Marie, depuis 1477, par décision de Sixte IV. La fête a été confirmée par Clément XI en 1708. Elle est à l'origine de la Fête des lumières, célébrée chaque année à Lyon le 8 décembre.
La définition du terme « immaculée » signifie pure et sans tache.
Historique
Protévangile de Jacques
L'Immaculée conception n'est mentionnée dans aucun texte jugé canonique par les Églises chrétiennes. Une source indirecte de cette croyance se trouve dans le Protévangile de Jacques, texte apocryphe datable du milieu du IIe siècle : Anne et Joachim, les parents de la Vierge, ne peuvent avoir d'enfant. Mais un ange leur apparaît à tous deux, leur annonçant une naissance miraculeuse. Cependant, cet évangile n'affirme nullement que Marie fut exempte du péché originel. Sept mois plus tard, Marie vient au monde. Bien que non canoniques, les apocryphes exercent une très grande influence sur la foi populaire.
Fête byzantine
C'est la fête byzantine de la Conception de la Très Sainte Mère de Dieu par Joachim et Anne (9 décembre) qui est à l'origine du développement d'une dévotion et d'une croyance nouvelle en Occident. La célébration de cette fête n'est pas attestée avant le VIIIe s. et est donc postérieure à la fête de la Nativité de Marie le 8 septembre, qui est attestée à une époque plus ancienne.
Elle est déjà connue et commentée par les bénédictins anglais au xème siècle. Cette fête est surtout introduite en Occident, à l'occasion des croisades, et on la voit apparaître à l'abbaye du Bec puis en Angleterre et à Lyon dès le XIIe siècle.
Mais cette introduction se fait sans les textes ni les commentaires de la tradition byzantine. Et la dévotion prend rapidement en Occident une couleur et une signification bien différentes qui sont à l'origine de la dévotion puis du culte de l'Immaculée Conception dans l'Église d'Occident et d'une divergence supplémentaire entre les deux Églises, puisque l'Église d'Orient rejette ce dogme.
Théologie médiévale
Cette nouvelle fête ne fait toutefois pas l'unanimité en Occident : de même que dans une certaine mesure saint Thomas d'Aquin un siècle plus tard, saint Bernard de Clairvaux pourtant célèbre pour sa dévotion mariale s'oppose en 1146 à cette pratique.
La croyance ne trouve grâce aux yeux des théologiens qu'à partir du XIVe siècle et de Jean Duns Scot : en tant que Mère de Dieu, Marie ne peut selon lui être entachée comme les autres par le péché originel. Pendant sept siècles, l'Occident débat âprement de cette question. Les franciscains sont pour la dévotion nouvelle, les dominicains contre. La Sorbonne est même paralysée un an par cette querelle.
Concile de Trente et période baroque
La croyance en l'Immaculée conception est réaffirmée par le concile de Trente, et les représentations artistiques se multiplient au XVIIe siècle, notamment en Espagne. La Vierge y apparaît sur un croissant de lune, drapée dans un manteau flottant dans le ciel, entourée d'une multitude d'angelots. Parfois elle foule aux pieds un serpent qui symbolise le démon.
Patronne de la France, du Portugal, de la Corse et des États-Unis
Sainte Marie, sous le vocable Notre Dame de l'Assomption, fêtée le 15 août a été proclamée sainte patronne principale de la France par Pie XI en 1922, à la suite entre autres du Vœu de Louis XIII.
Le Portugal est placé sous le patronage de la Vierge Marie depuis le Moyen-Âge. Le 1er décembre 1640, après 60 ans d'union avec l'Espagne, les Portugais reprennent leur indépendance. Six ans plus tard, le nouveau roi João IV (Jean IV de Portugal) place le pays sous la protection de l'Immaculée Conception : dans l'église de Vila Viçosa où se trouve le palais familial, il dépose la couronne royale sur Notre-Dame de la Conception (Nossa Senhora da Conceição) qui est proclamée Reine et patronne du Portugal. Par la suite, les rois du Portugal ne porteront plus jamais la couronne sur leur tête. Aujourd'hui encore, le 8 décembre est au Portugal le jour férié où les catholiques portugais fêtent celle qui est reine, patronne et protectrice de leur pays.
Les insurgés Corses, en 1735, qui venaient de faire sécession d'avec la république de Gênes, placèrent leur jeune Nation sous la protection de l'Immaculée Conception. L'hymne national de la Corse, Diu vi Salvi Regina est consacré à la Vierge Marie. Le 8 décembre est considéré comme la fête nationale de la Corse[3].
En 1846, le VIe concile provincial de Baltimore proclame la « bienheureuse vierge Marie conçue sans péché » patronne des États-Unis d'Amérique[4].
Rue du Bac
Lors des apparitions de la rue du Bac à Paris à Catherine Labouré en 1830, la Vierge se présenta comme « conçue sans péché ». La popularité de la médaille miraculeuse qui fut frappée suite à ces apparitions popularisa la foi en la conception immaculée de Marie et l'invocation « Ô Marie, conçue sans péché, priez pour nous qui avons recours à vous. »
Lourdes
Bernadette Soubirous affirme que, le 25 mars 1858, soit quatre ans après la promulgation du dogme dont elle n'avait pas connaissance, la dame qui lui est apparue s'est elle-même présentée ainsi, en gascon, dans la grotte de Massabielle (à Lourdes) : Que soy era immaculada councepciou (« Je suis l'immaculée conception »).
Lecture politique
A la suite d'une consultation de l'épiscopat mondial, qui se montra très largement favorable à une telle définition (546 pour et 57 contre) Pie IX définit le dogme de l'Immaculée conception dans la bulle Ineffabilis Deus (8 décembre 1854).
Si l'on suit l'analyse de Claude Langlois dans « Lire le Syllabus » (Problèmes d'histoire des religions sept-1998, ULB, Bruxelles), on est amené à replacer la promulgation de ce dogme dans le contexte des textes pontificaux de la même époque :
À première vue, la proclamation d'un dogme marial au milieu d'une série concernant « les erreurs modernes » et les malheurs du temps, en particulier la montée en puissance du rationalisme (et son cortège en -isme : matérialisme, positivisme, athéisme) ne présente pas une évidente cohérence dans la série, comme dans le contexte de la crise moderniste et de la lutte du Vatican contre le catholicisme libéral. Pourtant, Claude Langlois insiste sur le fait que l'encyclique traite du péché originel dont seule Marie, la mère du Christ, serait exempte dès sa conception. Il s'agit donc de stigmatiser par là tous les courants qui revendiquent l'exercice autonome de la raison, celle-ci étant devenue faillible par une corruption de l'esprit humain conséquente à la faute d'orgueil originel (le 'péché originel'). Dans cette perspective, l'encyclique devient cohérente avec la série.
Point de vue des autres confessions chrétiennes
Les divergences sur la nature de la grâce expliquent en partie les divisions doctrinales. Les protestants adoptent une forme radicale d'augustinisme alors que les Orthodoxes suivent le chemin inverse et enseignent le semi-pélagianisme.
- Le point de vue des orthodoxes peut être résumé par cette phrase de Vladimir Lossky : « si la Sainte Vierge avait été isolée du reste de l’humanité par un privilège de Dieu lui conférant d’avance l’état de l’homme avant le péché, alors son consentement libre à la volonté divine, sa réponse à l’archange Gabriel, perdraient le lien de solidarité historique avec les autres actes qui contribuèrent à préparer, au long des siècles, l’avènement du Messie ».
Les catholiques répliquent à cette objection qu'être libéré du péché originel n'enlève pas notre libre-arbitre. En effet, le libre arbitre n'est pas la conséquence du péché originel, mais c'est le péché originel qui est la conséquence du libre arbitre. Cependant, on peut s'interroger pour savoir s'il est possible de dire que Marie était nécessairement pure de tout péché pour concevoir Dieu en son sein et en même temps, qu'elle aurait pu tomber dans le péché comme tout homme.
- L'Église vieille-catholique n'accepte pas ce dogme.
- les protestants rappellent que Marie n'est citée que 8 fois dans le Nouveau Testament et que, de ce fait, la mariologie est peut-être excessive.
Églises portant le nom de l'Immaculée Conception
- A Sées (Orne), première église au monde mise sous le vocable de l'Immaculée Conception.
- Lyon III Eglise de l'Immaculée Conception construite entre 1856 et 1862, première église construite sous les auspices du dogme.
- Paris XIIe, église néo-gothique de la rue du Rendez-vous (magnifiques orgues et un tableau du Christ en croix de Louis Vuillermoz). Elle a été construite en six mois et fut inaugurée le 29 septembre 1875, en la fête de Saint Michel.Voir le site de cette église
- Lourdes, basilique de l'Immaculée Conception : Elle a été construite de 1866 à 1871 et fut bénie et inaugurée le 15 août 1871. Lien vers le site des Sanctuaires de Lourdes
- Wervicq-Sud, Nord, Nord-Pas-de-Calais, France.
- Toulouse, faubourg Bonnefoy, Haute-Garonne, France. En construction lors de la proclamation du dogme, et rebaptisée immédiatement en conséquence.
- Melun, église de forme hexagonale surmontée d'un frèle clocher édifiée en 1959 par l'architecte Pierre Prunet dans le quartiers des Capucins.
- A Caluire, Rhône-Alpes, France.
- A Montfort-le-Gesnois (Sarthe), construite de 1856 à 1858, de style néogothique avec dans le tympan de sa porte centrale une sculpture représentant la proclamation de l'immaculée conception par Pie IX.
Immaculée conception dans l'art
par Francisco de Zurbarán (1598-1664)
par Carlo Maratta en 1689
Autel d'église à Toruń
par Bartolomé Esteban Murillo en 1660-1665
L'Immaculée conception et le drapeau de l'Europe
Arsène Heitz, le dessinateur du drapeau de l'Europe, revendiqua plus tard le drapeau comme étant effectivement une allusion à la Vierge Marie, telle qu'elle était apparue à Catherine Labouré, même si ce sens n'avait pas été évoqué ouvertement avant l'adoption du projet[5]. Par coïncidence, l'adoption eut lieu un 8 décembre, jour de la Fête de l'Immaculée conception. Cette information est reprise par Danièle Sallenave dans son ouvrage dieu.com (Gallimard, 2004), y associant le résistant Paul G. Lévy, converti au catholicisme après la seconde guerre mondiale.
Bibliographie
- Dom Prosper Guéranger, Mémoire sur l’Immaculée Conception, 1850 & 2004 ; interview.
- Vladimir Lossky, « En la fête de la Conception de la très Sainte Vierge Marie », Le Messager de l’Exarchat du Patriarcat russe en Europe occidentale n° 20, 1954.
- Karl Rahner, Marie Mère du Seigneur, Éditions de l’Orante, 1964.
- J. Galot, « L'Immaculée conception », Maria, t. VII, Beauchesne, Paris, 1964.
- Bertrand de Margerie, s.j., Le Cœur de Marie, cœur de l'Église : Essai de synthèse théologique, Téqui, 2000
Notes
- ↑ [1], [2], [3]
- ↑ la seconde homélie sur les gloires de la Vierge mère
- ↑ Consulta de Corte 1735
- ↑ Catholic Encyclopedia, 1913, Provincial councils of Baltimore
- ↑ Dossier 'Histoire du drapeau européen', revue 'Bousculade', témoignage de Pierre Caillon en 2005]
Articles connexes
Liens externes
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