Djolof

Djolof

Le Djolof (ou Jolof) était un empire situé dans l'actuel Sénégal qui d'après la tradition fut fondé par Ndiadiane Ndiaye, premier bourba (buur-ba = roi) djolof.

Les anciens royaumes de l'empire djolof (carte d'après l'abbé Boilat, 1853)

Celui-ci avait été élu comme chef dans ce qui allait devenir le royaume du Oualo, au nord-ouest de l'actuel Sénégal, dans la région du fleuve. De là, il réunit toutes les populations d'ethnie wolof pour fonder cet empire au XIIIe siècle. C'est le clan des N'diaye qui dirigea l'empire. Ce patronyme wolof existe toujours aujourd'hui. Les habitants du Djolof, sont appelés les Djolof-Djolof.

Sommaire

Histoire

L'empire du Djolof englobait les États du Cayor, Baol, Walo, Sine, Saloum, une partie du Fouta-Toro et également une partie du Bambouk. Toutes ces régions correspondent à l'espace sénégambien et englobaient également une partie de la Mauritanie actuelle. C'est entre la fin du XIIe siècle et début du XIIIe siècle qu'il fut bâti, par le clan Ndiaye. La construction de cet État pourrait être dû l'aboutissement du regroupement, l'élargissement, et de l'organisation du peuple Wolof à cette époque. En effet, à cette époque en cette région du Djolof, vivaient divers peuples, Tekrouri (Toucouleurs), Peuls, Sereres, Soninkés, Maures. Ces diverses peuples, au fil des interactions et des brassages, finirent par créer une culture homogène, ainsi qu'une langue commune. Ensemble ils formeront le peuple Wa-laf, Wa signifiant ceux du pays Laf, les Wolofs d'aujourd'hui. Cet ensemble sous la houlette de Ndiadiane Ndiaye fonderont l'État du Djolof. Le pays Laf comprend toutes les régions du Waalo, Cayor, Djolof, Baol. Le mot Laf signifiant -la Rive-, Walaf signifie également : les riverains.

Après avoir rayonné et englobé la presque totalité du nord et du centre de la Sénégambie, l'empire s'effondra en 1549, avec la mort du dernier empereur du Djolof, Lélé Fouli Fak Ndiaye, qui fut tué lors de la bataille de Danki, qui se déroula près de Diourbel, dans l'ancienne région du Baol. Il fut tué par Amari Ngoné Sobel Fall, le fils du chef de la région du Cayor de l'époque Déthié Fou Ndiogou Fall, qui allait devenir le premier damel (roi) du Cayor après un conflit dû à une offense personnelle que lui avait fait subir Lélé Fouli Fak. Parmi les premières causes de la chute de l'empire, il y a également la conquête du Royaume du Namandirou vassal du Djolof, par le conquérant Denianke Koli Tenguella. Le Djolof est resté vassal de l'empire du Mali pendant un siècle. À partir de là, les autres États allaient, tour à tour, prendre leur indépendance jusqu'à réduire le grand empire du Djolof aux dimensions d'une royauté dans la partie centrale du pays. Dans la seconde moitié du XIXe siècle, les colons français annexèrent progressivement tous les royaumes du Sénégal. Le Djolof fut le dernier royaume annexé avec le dernier bourba djolof, Bouna Alboury Ndiaye, sous l'impulsion de Louis Faidherbe.

En ce qui concerne l'organisation territoriale, le Djolof était divisé en lamanats, tous dirigés par un lamane. Ces lamanats étaient plus ou moins divisés, et le chef de tous les lamanes était le kangame, qui fait partie des notables qui élisent le nouveau roi.

La capitale de l'empire du Djolof était à l'origine la ville de Thieng, puis après l'éclatement de l'empire, la capitale a été transférée à Yang-Yang. Dans chaque lamanat étaient construits des tatas, forteresses, sorte de miradors, à but essentiellement militaire. D'un point de vue économique, l'empire du Djolof vivait du commerce transsaharien. L'une des causes de son éclatement est le fait que les royaumes côtiers et vassaux du Djolof, le Cayor, le Waalo, le Baol, le Sine et le Saloum, en bénéficiant du commerce transatlantique, plus rentable, ont pu devenir plus riches économiquement, et donc se libérer de l'emprise du Djolof avec plus de facilité.

Le Fouta-Toro a pu reprendre ses terres prises par le Djolof grâce au grand personnage Koli Tenguella, ceci pendant que les autres royaumes prenaient leur indépendance tour à tour. Le Djolof a également après son éclatement dû faire face au djihad toucouleur, surtout pendant le XIXe siècle notamment avec le marabout Toucouleur venant du Saloum à Nioro du Rip, Maba Diakhou Bâ, l'un des descendants de Koli Tenguella, et aussi l'un des disciples de Omar Foutihou Tall, avec Ahmadou Cheikhou Déme, un marabout torodoo du Fouta-Toro, qui réussit à imposer sa domination au Djolof pendant quatre ans, sans compter les raids des Maures. Le royaume a aussi été très souvent au cours des siècles en conflit avec le Cayor. En dernier le Djolof dut longtemps lutter contre les colons français qui réussiront à annexer le Djolof pendant les années 1890. Le dernier bourba, Bouna Alboury Ndiaye, a été au même titre que Lat Dior l'un des plus grands rois et résistants contre la colonisation au Sénégal.

Religions

Au Djolof les islamisés et ceux appartenant à la tradition tiédo, religion d'origine des Wolofs, ont toujours cohabité en paix. L'islam pénétra très tôt au Djolof dès le début de sa création, avec les marabouts mandingues, toucouleurs et maures venus s'installer au Djolof. Le Djolof est encore aujourd'hui le haut-lieu de la confrérie musulmane Qadiriyya, où elle est largement majoritaire, qui est en fait la plus ancienne confrérie de l'Afrique de l'Ouest pour ne pas dire de l'Afrique musulmane. Le village de Ndogandou aux alentours de la ville de Dahra, centre économique du Djolof, abrite la plus ancienne communauté de "ahloul bayti" (litt. descendants du prophète Mahomet). Par la suite, El hadj Malick Sy et Cheikh Ahmadou Bamba Mbacké, parachèveront le processus d'islamisation du Djolof, à la fin du XIXe siècle. Leur tâche a été grandement facilitée par le zèle prosélyte de leurs délégués mais aussi par les rumeurs sur les miracles opérés par les saints hommes. En tout état de cause, il en fut comme avec le colonialisme. Les premiers adhérents au nouveau système ou dogme furent toujours les individus ou groupes défavorisés par l'ordre social courant....

Ethnies et langues

Du point de vue ethnique, au Djolof, deux ethnies étaient majoritaires, les wolofs et les peuls. Les Wolofs du Djolof ont pour beaucoup des origines sérère (sarr, ndiaye, ngom...) ou peul / toucouleur (sy, niang, gaye, seck...). Les peuls vivent disséminés autour des gros villages qui abritent les points d'eau. Il y a au Djolof une très ancienne cohabitation entre Peuls et Sereres. Le Djolof était considéré par ces groupes d'éleveurs comme la terre par excellence des pâturages de l'hivernage et le Saloum comme celle des pâturages de la sècheresse. Cette conception prévaut de nos jours et explique le caractère ténu des frontières entre les deux terroirs.

De ce point de vue, l'hypothèse du peuplement du djolof à partir du Sud se trouve accréditée.

On remarquera que les différentes langues ont été phagocytées par le wolof et le poular, les deux langues prédominantes. Tous les patronymes du nord et du centre du Senegal se retrouvent au Djolof auxquels s'ajoutent d'autres qui lui sont propres comme Lekor, Fleur, Thiebane, Thiongane, Mangane, Coundoul, Lakh etc.. En tout état de cause, le Djolof, carrefour multiéthnique et pluriculturel, est bien le noyau de l'actuel Sénégal.

Aujourd'hui, du point de vue linguistique, le wolof du Djolof est influencé par le dialecte pulaar, de la même manière que le wolof du Sine et du Saloum est teinté de sérère et le wolof de la presqu'île du Cap-Vert d'accents lébous.

Des Mandingues, grands commerçants, y vivaient aussi, surtout soce (malinke) et sarakhollé, ainsi que des familles familles maures (babou, sadi, diakhoumpa...) qui pratiquaient, comme au Cayor, l'élevage équin. Ils étaient de grands vendeurs de chevaux et de grands maroquiniers.

Organisation sociale

L'ethnie wolof a toujours régné sur ce royaume. Cette ethnie est très hiérarchisée, elle est divisée en castes, chacune ayant un rôle bien défini.

On trouve au sommet de la hiérarchie, les geer (noble) dans laquelle on trouve les garmi sommet de l'aristocratie et ou sont choisis les rois. Ils détiennent le pouvoir politique et temporel.

Viennent ensuite les diambour qui sont des hommes libres propriétaires terriens, commerçants ainsi que les serignes qui sont les marabouts souvent d'origine pulaar ou sarakhollé, les marabouts souvent très aisés détiennent le pouvoir spirituel et sont très écoutés des rois et de l'aristocratie.

Les diambours étaient des vassaux du roi, souvent d'égale dignité avec les nobles. Ils étaient généralement issus de l'ethnie peule ou de maures libres. Les marabouts étaient des conseillers de la famille royale tant qu'il participaient à l'administration du royaume à travers leurs conseils ou oracles autant qu'à la protection mystique de la famille royale. Ces prêtres étaient aussi des propriétaires fonciers en ce sens que le souverain leur donnait un droit d'usage sur des domaines bien déterminés dont les limites étaient respectées par tous. Il faut dire qu'ils devaient ce respect et cette considération, en grande partie, à leur savoir.

Mais en général les diambour qu'ils soient marabouts ou riches propriétaires terriens avaient très peu de pouvoir de décision. Venaient ensuite les badolos, que l'on définissait comme ceux qui ne possèdent personne et que personne ne possède, ils formaient la masse paysanne et le gros du peuple.

Vient ensuite la caste des nyenyo ou gnegno , eux-mêmes divisés par corps de métier. Au sommet des nye nyo on trouve les teugs qui sont les forgerons. Ils maîtrisent l'art du métal, ce sont eux qui fabriquaient les armes pour la guerre. Les teugs sont aussi des bijoutiers et leurs femmes sont potières. Puis les Laobés, artisans du bois aux origines peules, bien qu'un grand nombre de gnegno soient d'origine pulaar, les rabb sont les tisserands, les woudés eux travaillent le cuir.

Les guéweul (les griots) une autre caste occupent une place très importante, ce sont les historiens, les musiciens, chanteurs, généalogistes, compteurs. La plupart des familles gèèr sont liées à des familles guéweuls ou griottes, qui étaient chargés de glorifier leurs nobles et de chanter leur généalogie entre autres; en retour ces familles nobles devaient protection et assistance à leurs griots. Ils sont les libres dépositaires de la tradition orale et sont réputés pour leur connaissance des lignées familiales (relations de parenté) et de l'histoire du terroir.

En bas de l'échelle sociale, on retrouve les captifs et esclaves, les jaam en wolof, chaque famille noble comme castée en possédait si elle en avait les moyens. Il portaient le patronyme de la famille qui les tient en servage à laquelle ils sont très attachés. Il y avait trois catégorie d'esclaves: - Les Jaami Juddu sont ceux nés dans la propriétés familiale, c'étaient les esclaves domestiques. -Les captifs du roi ou Jaami Buur avaient eux, un statut très particulier, car le chef des captifs, le farba kaba, lui-même captif du roi, faisait partie de l'assemblée des notables du royaume qui élisent le nouveau roi. C'est parmi les captifs du roi que l'on recrutait les guerriers du royaume, les tiédos. Très courageux, ils forment la plus grande partie des soldats. Nous noterons aussi qu'il pouvait s'agir de mercenaires. Au demeurant, le terme tiédo d'obédience peule signifie « celui qui est venu passer la sècheresse » et renvoie donc à la notion d' "étranger" dans toutes les contrées habitées par les peuls. - Les Jaami Sayoor étaient les prisonniers de guerres, ou captifs de traite destinés exclusivement à la vente.

Les Jaam, toutes catégories confondues, possédaient tous un terrain propre où ils vivaient et cultivaient, mais ils restaient sous l'autorité de la famille qu'ils servaient et qui avait souvent droit de vie et de mort sur eux.

L'ethnie wolof pratiquait une endogamie très forte, et les mariages avaient lieu exclusivement au sein d'une même caste et catégorie sociale.

La société djolofienne est marquée par plusieurs conflits. Conflits entre sédentaires (wolof agriculteurs) et nomades (pasteurs peuls), conflits confrériques dus à l'expansionnisme agricole mouride... conflits politiques, enfin, qui épousent malheureusement des contours ethniques.

Les souverains du Djolof (Buur-ba Jolof)

  • Ndiadiane Ndiaye (1350-1370)
  • Sare Ndiaye (1370-1390)
  • NDiklam Sare Ndiaye (1390-1420)
  • Tioukouli NDiklam Ndiaye (1420-1440)
  • Leeyti Tioukouli Ndiaye (1440-1450)
  • Ndièlene Mbey Leeyti Ndiaye (1450-1465)
  • Birahim Ndieme Eter Ndiaye (1465-1481)
  • Tase Daagulen Ndiaye (1481-1488)
  • Birahim Kuran Kan Ndiaye (1488-1492)
  • Boukaar Biye Sungoule Ndiaye (1492-1527)
  • Birayma Ndieme Kumba Ndiaye (1527-1543)
  • Leelé Fouli Fak Ndiaye (1543-1549)
  • Al Bouri Penda Ndiaye (1549-1566)
  • Laat-Samba Ndiaye (1566-1597)
  • Gireun Bouri Dyelen Ndiaye (1597-1605)
  • Birahim Penda Ndiaye (1605-1649)
  • Birahim Mba Ndiaye (1649-1670)
  • Bakar Penda Ndiaye (1670-1711)
  • Baakane Tam Gane Ndiaye (1711-1721)
  • Al Bouri Diakher Ndiaye (1721-1740)
  • Birayamb Ndiaye (1740-1748)
  • Birawa Keme Ndiaye (1748-1750)
  • Laat Kodou Ndiaye (1750-1755)
  • Baka Tam Bouri Niabou Ndiaye (1755-1763)
  • Mba Kompass Ndiaye (1763-1800)
  • Mba Bouri Niabou Ndiaye(1800-1818)
  • Birayamb Koumba Gueye Ndiaye (1818-1838)
  • Al Bouri Tam Ndiaye (1838-1845)
  • Baka Kodou Ndiaye (1845-1847)
  • Birayamb Arame Ndiaye (1847-1849)
  • Birahima Penda Ndiaye (1849)
  • Mbanyi Paate Ndiaye (1849)
  • Lat-Kodou Ndiaye (1849)

(vacance temporaire du pouvoir)

  • Birayamb Madjiguène Ndiaye (1850-1855)
  • Al Bouri Peya Ndiaye (1855-1856)
  • Baakane Tam Yaago Ndiaye (1856-1858)
  • Taanor Dieng(1858-1863)
  • Baakane Tam Khaari Ndiaye (1863-1871)
  • Amadou Cheikhou Bâ(1871-1875)
  • Alboury Ndiaye (1875-1890)
  • Bouna Alboury Ndiaye (il a été capturé par les colons au moment de l'exil de son père pour être mis d'office à l'école des fils de chefs à Saint-Louis avant d'être intronisé Bourba, par la bénédiction des colons, pour succéder à son oncle Ali Bouri Penda, demi-frère de Alboury Ndiaye, qui a, en vérité, succédé à ce dernier dans des circonstances encore troubles et à la suite d'évènements inter-familiaux controversés)

Voir aussi

Articles connexes

Bibliographie

  • (en) Eunice A. Charles, A History of the Kingdom of Jolof (Senegal), 1800-1890, Boston, 1973, 280 p. (Thèse)
  • (en) Eunice A. Charles, Precolonial Senegal: the Jolof Kingdom 1800 to 1890, Boston, African Studies Center : XII-163 p. African Research Studies, n° 12. (Thèse éditée en 1977)
  • (en) Victoria Coifman-Bomba, History of the Wolof State of Jolof until 1860 including comparative data from the Wolof State of Walo, Madison, University of Wisconsin, 1969, 395 p. (Thèse)
  • (fr) Jean Boulègue, Le Grand Jolof (XIIIe-XVIe siècle), Paris, Façades, 1987, 207 p. tome 1 : Les anciens royaumes wolof (Sénégal) (Thèse d’État publiée en partie)
  • (fr) Patrice Mingou, Le Jolof de 1870 à 1895, Dakar, Université de Dakar, 1977, 111 p. (Mémoire de Maîtrise)
  • (fr) Bara Ndiaye, Le Jolof : de la scission de Keur Lat Samba à l’occupation française (1759-1890) ; mutations sociales, économiques et politiques, Dakar, Université Cheikh Anta Diop, 1996, 394 p. (Thèse)
  • (fr) Samba Lampsar Sall, Njajaan Njaay. Les mythes de fondation de l’Empire du Djolof, Dakar, Université de Dakar, 1982, 157 p. (Mémoire de Maîtrise)
  • (fr) Mbaye Thiam, Le Djolof et Bouna Ndiaye, Dakar, Université de Dakar, 1976, 110 p. (Mémoire de Maîtrise)
  • (fr) Mbaye Thiam, La chefferie traditionnelle wolof face à la colonisation : les exemples du Jolof et du Kajoor, 1900-1945, Dakar, Université de Dakar, 1986, 387 p. (Thèse de 3e cycle)

Liens externes


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