- Deûle
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la Deûle
La Deûle : lagunage linéaire aux Bois Blancs.Caractéristiques Longueur 60 km Bassin 1 071 km2 Bassin collecteur l'Escaut Débit moyen 8 m3⋅s-1 (Wambrechies) Régime pluvial océanique Cours Se jette dans la Lys Géographie Pays traversés France La Deûle (en néerlandais : Deule) est une rivière du nord de la France dont l'essentiel du cours est aujourd'hui canalisé (de Lens à Deûlémont).
Dans sa partie amont, elle est encore en partie à l'état naturel et connue sous le nom de Souchez.Sommaire
Étymologie
Le nom de la rivière est mentionné sous la forme Dupla en 1276, évolution phonétique d'un probable *Dubulā, basé sur le celtique (gaulois) dubu-, noir (cf. breton du, noir, irlandais dub, noir), c'est-à-dire : « la noiraude »[1]. L'accent circonflexe n'a pas d'origine étymologique (pas d'ancien S).
Tracé et embranchements
On considérait[2] au 19e siècle que la Deûle prenait sa source dans le Pas-de-Calais, un peu au-dessus de Carency. Elle était alors navigable à partir de Courrières.
La Souchez, qui constitue le cours amont de la Deûle, est formée de la réunion, dans le village du même nom, de deux ruisseaux, le Carency et le Saint-Nazaire. Elle irrigue et draine les villes de Lens, Liévin et Angres et leurs alentours.
La Deûle entre dans le département du Nord près de Bauvin (cote 23) pour se jeter dans la Lys à Deûlémont (cote 11,25). Entre Bauvin et Lille, son cours a été fortement modifié par d'importants travaux hydrauliques échelonnés sur plusieurs siècles.
Un important port fluvial y a été construit.
La Deûle sépare le plateau crayeux, qui domine sa rive droite, des sables tertiaires déposés sur sa rive gauche.
À Lille, en aval de l'écluse du grand carré, la Deûle canalisée reçoit - via un triple bief à 3 chutes sans écluses - les eaux du Canal de la Moyenne-Deûle. Ce canal était autrefois dit Canal de l'Esplanade. Il a été creusé en 1751 presque à l'emplacement d'une ancienne rigole reliant autrefois le quai du Wault à l'ancien ruisseau du Bucquet (depuis longtemps comblé) et aux fortifications de la porte d'Ypres, détournant une grande partie de la rivière hors de la ville et connectant le quai du Wault (dit Haut Rivage) à la Basse Deûle (dite Bas Rivage)[3]. Ce canal n'est plus utilisé pour la navigation.
À Marquette, la Deûle canalisée reçoit la Marque qui draine la colline de Mons-en-Pévèle.
La Deûle canalisée comporte trois branches:
- le canal de Lens ou canal de La Souchez selon les endroits,
- le tronçon du canal Dunkerque-Escaut dit « canal de la Haute Deûle », ou (improprement) « Haute Deûle », qui assure la liaison entre la Scarpe (Douai) et le canal d'Aire (à Bauvin),
- la Deûle canalisée, ou Basse Deûle, qui assure la liaison depuis Bauvin entre le canal Dunkerque-Escaut et la Lys mitoyenne (confluence à Deûlémont). Le nom Deûlémont, (d'origine néerlandaise Deulemonde) signifie embouchure de la Deûle.
En aval immédiat de Lens, le canal présente la particularité d'être aujourd'hui en surélévation par rapport aux terrains voisins ; c'est en fait la conséquence d'affaissements miniers. Il a dû être rehaussé pour éviter qu'il inonde la zone d'affaissement. Des pompes y rejettent les eaux qui menaceraient d'inonder ces mêmes zones.
Historique de la canalisation
Premiers aménagements
La Deûle, encore capricieuse et pleine de méandres a été naviguée au moins dès l'époque gallo-romaine entre Lille et la Lys.
- En 1244, Marguerite, comtesse de Flandre, concède l'usage des marais de la Haute-Deûle aux riverains et habitants des paroisses locales. Le lacis de chenaux et tourbières est peu à peu drainé par un canal navigable. La jeune ville de Lille achète alors la Haute-Deûle, et le châtelain fait creuser un canal de Lille à Don[4].
- En 1271 Jean III, châtelain de Lille gagne en dot de la comtesse Jeanne de Flandre cette portion de rivière, qu'il achève de faire canaliser de Don à La Bassée, en drainant au passage les marais d'Haubourdin. La Deûle sera ensuite définitivement connectée à la Scarpe, connectant entre eux plusieurs bassins versants et commençant à devenir un nouveau facteur de fragmentation écopaysagère pour la migration de la faune terrestre.
- Au début du XVIe siècle, la navigation est encore étendue au Sud par la canalisation de la Souchez jusqu'à Courrières et la cité drapière de Lens, aux frais des bourgeois de la ville de Lille.
Les projets de Vauban
Après que les armées de Louis XIV se furent emparées de Lille (1667), Vauban médita un vaste projet de canalisation inter-bassins afin, non seulement de disposer d'eau pour inonder les fossés de la nouvelle citadelle de Lille, mais aussi de retarder la marche des troupes ennemies en cas de contre-invasion depuis les Pays-Bas. Ce projet comportait :
- un canal de jonction entre la Scarpe depuis Corbehem et la Sensée à Arleux (terminé en 1690),
- un canal à bief de partage (aujourd'hui canal de la Haute-Deûle), entre la Scarpe (depuis le Fort de Scarpe) jusqu'à Courrières (terminé en 1693). Le bief de partage étant alimenté par l'Escrébieux,
- une déviation des eaux de la Deûle à la traversée de Lille depuis l'île Rihour (où avait été fondée la ville) jusqu'à la nouvelle citadelle, créant le « bras de la Barre ».
La ville de Lille assuma toute la charge de l'entretien de la voie d'eau depuis le Fort de Scarpe jusqu'à Deûlémont, et perçut les péages jusqu'en 1798, date à laquelle le Consulat reprit en charge l'exploitation.
Le temps du charbon
Au XIXe siècle, pour améliorer l'approvisionnement en charbon de la ville de Lille depuis le bassin de l'Escaut, un groupe d'investisseurs obtient l'adjudication du canal de Roubaix entre l'Escaut et la Marque, affluent de la Deûle dont le confluent est à Marquette-lez-Lille. En 1880, le gouvernement décide d'homogénéiser les caractéristiques du réseau français au gabarit Freycinet, correspondant au transit des spits flamands, circulant déjà sur les canaux du Nord de la France.
L'aménagement à grand gabarit
Par suite des deux guerres mondiales, des dommages consécutifs et des moyens consacrés à la reconstruction, la situation du gabarit n'évolue plus sur la Deûle jusqu'en 1954 : cette année-là, la Conférence Européenne de Paris envisage de promouvoir les voies navigables de l'Escaut, la Deûle et la Lys en vue de la navigation des chalands de plus de 1 000 t.
Sur la Deûle, après la reconstruction de l’écluse à grand gabarit de Don (1959), la mise à grand gabarit (3 000 t) de la section Bauvin-Marquette est déclarée d'utilité publique. Les travaux commencent en 1968 par la section les Ansereuilles-Haubourdin, et se terminent avec la construction de la nouvelle écluse du Grand Carré à Lille (1974-1977). Par suite de restrictions budgétaires, les travaux ne se poursuivent de Lille jusqu'à Marquette qu'avec un gabarit réduit de 1 350 t, et ce n'est que par un programme de financement régional (1978-1982) que le gabarit est porté de 350 t à 800 t entre Marquette et Deûlémont.
Les travaux d'élargissement ne reprennent qu'en 1993 avec la démolition de l’écluse de Deûlémont qui entraîne un abaissement de 1,83 m du plan d’eau à l’amont de la confluence avec la Lys. Après une décennie de travaux, la Deûle a été ouverte au gabarit de 1 350 t à l'aval de Lille en juin 2004.
Environnement et qualité de l'eau
Après avoir été - à partir de la révolution industrielle - l'une des rivières les plus polluées de France, notamment par les métaux lourds[5],[6],[7],[8],[9], la Deûle, bien que ses berges et son bassin-versant soient très artificialisée renaît peu à peu : poissons, poules d'eau et oiseaux piscivores sont de retour jusqu'à Lille, mais avec également diverses espèces invasives (Renouée du Japon et surtout moule zébrée).
Le schéma d'aménagement et de gestion des eaux (SAGE) Marque-Deûle est en cours d'émergence. Le comité de bassin Artois-Picardie, dans le cadre de la Directive cadre sur l'eau l'a regroupée avec la marque dans un bassin dit « Deûle-Marque » (de 1 100 km²) drainé et irrigué par 160 km de cours d'eau principaux avec pour exutoire la Lys, puis l'Escaut belge.
Pour l'état des lieux imposé par la Directive DCE (en 2008) :
- le Canal de la Deûle jusqu’à la confluence avec le canal d'Aire (code : AR17) est trop artificialisé et trop pollué pour présenter un bon potentiel écologique. Son état physico-chimique est jugé mauvais, mais son état biologique « bon ».
L'état chimique reste cependant très préoccupant (classé "mauvais" en raison notamment des Nonylphénols et HAP (Hydrocarbure aromatique polycyclique). en 2010, un arrêté préfectoral a recommandé aux pêcheurs de ne pas manger les poissons pêchés dans la Deûle[10]. - la Deûle canalisée de la confluence avec le canal d’Aire à la confluence avec la Lys (code AR32) est de même considéré comme ayant un mauvais potentiel écologique et un « mauvais » été physico-chimique et un état biologique « pas bon ». Son état chimique est classé « mauvais » en raison notamment du Plomb, nonylphénols et HAP (Hydrocarbure aromatique polycyclique) qui polluent l'eau, les sédiments et leurs organismes vivant. Le comité de bassin propose à l'Europe de repousser le bon état écologique à 2027 au lieu de 2015 en raison de l'ampleur et de la durée des travaux de restauration à entreprendre[11].
- En 2008, l'Agence de l'eau classait la Deûle canalisée comme de mauvaise qualité après la confluence avec le canal de Lens et passe en très mauvaise qualité au sortir de l'agglomération lilloise. Une légère amélioration n'était constatée en amont qu'à Courrières (gain d’une classe de qualité)[12].
Un des paramètres pénalisants est la teneurs très élevée en nitrites (ex. : 1,1 mg/l dle 23 mai à Haubourdin, alors que le seuil du « très mauvais » est 1 mg/L)[13]. - Le parc de la Deûle, créé au sud de Lille pour protéger les champs captant irremplaçables a entrepris de nombreux travaux de dépollution et de renaturation. Il contribue à inscrire la Deûle dans la Trame verte régionale, ce cours d'eau étant l'une des dernières connexions biologiques (ou en tenant lieu) possibles avec le bassin minier et sa trame verte.
- En outre, la partie urbaine de la rivière canalisée est localement fortement affectée par la pollution lumineuse, en particulier à l'entrée de Lille où deux grands mâts équipés de dizaines de grosses lampes sont disposés de part et d'autre de la Deûle pour éclairer, toute la nuit, avec une forte intensité, des bretelles routières.
Galerie de photographies
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Comme l'indiquent de fréquents poissons morts, malgré une nette amélioration de la qualité de l'eau depuis les années 1970, le bon état écologique est loin d'être atteint sur cette section de la Deûle
Voir aussi
Articles connexes
Bibliographie
- Mémoires de la Société royale des sciences, de l'agriculture et des arts de Lille (voir chapitre : Système général des canaux de Lille)
Liens externes
- SAGE Marque-Deûle sur le site Gest'eau
- Dictionnaire des rivières et canaux de France dans le projet Babel : la Deûle
Notes et références
- Xavier Delamarre, Dictionnaire de la langue gauloise, éditions errance.
- Mémoires de la Société des sciences de l'agriculture et des arts de Lille, 1851 (page 186) , Arbres et arbrisseaux d'Europe et leurs insectes, par J. Macquart, Membre résident dans les
- Histoire de Lille - L'ère des révolutions (1715-1851) - Tome 3 - Privat - page 33
- PLU de Lille Métropole (version 2004)
- A. Boughriet, N. Proix, G. Billon, P. Recourt, B. Ouddane ; Environmental impacts of heavy metal discharges from a smelter in Deûle-canal sediments (Northern France): concentration levels and chemical distribution. ; Water, Air & Soil Pollution, 180 (2007) 83-95.
- A. Boughriet, G. Billon, N. Proix, M. Leermakers, J.C. Fischer and B. Ouddane ; Fractionation of anthropogenic lead and zinc in Deûle river sediments. , Environmental Chemistry, 4 (2007) 114-122.
- L. Lesven, B. Lourino-Cabana, G. Billon, N. Proix, P. Recourt, B. Ouddane, J.C. Fischer and A. Boughriet ; Water-quality diagnosis and metal distribution in a strongly polluted zone of Deûle river (northern France). , Water, Air & Soil Pollution, 198 (2009) 31-44.
- B. Lourino-Cabana, L. Lesven, G. Billon, N. Proix, P. Recourt, B. Ouddane, J.C. Fischer and A. Boughriet, Water, Air & Soil Pollution, 198 (2009) 31-44. ; Impacts of metal contamination in Deûle river (France): water quality and thermodynamic studies on metallic mobility.
- L. Lesven, B. Lourino-Cabana, G. Billon, P. Recourt, B. Ouddane, O. Mikkelsen and A. Boughriet. ; On metal diagenesis in contaminated sediments of Deûle river (northern France). Applied Geochemistry
- PCB- Poissons poisons dans les canaux du Nord FLUVIALNET 21/09/10,
- Télécharger (version consultée le 2009 02 21 22:57) Fiche territoire Deûle-Marque, établie par l'Agence de bassin
- (station 77000, avant la confluence avec le canal de Lens)
- Annuaire de la qualité de l'eau - 2008 (Agence de l'eau Artois-Picardie, consulté 2010/05/08)
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