Catholique et français

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Nationalismes en France

Le courant originel du nationalisme français est très proche doctrinalement du courant « nationalisme contre-révolutionnaire » faisant référence au christianisme, au monarchisme, à la contre-révolution et au nationalisme traditionnel (qui conçoit la France comme un État-Nation depuis les rois capétiens). Le catholicisme a alors une place privilégiée dans l'identité de la nation française. Ce nationalisme fait souvent référence à la « chrétienté ». Il condamne par ailleurs les principes idéologiques de la Révolution française et du Républicanisme. Cependant, la Révolution française, et notamment Valmy, ou l'épopée napoléonienne sont des événements historiques nationaux clefs que ne renient pas les nationalistes[réf. nécessaire].

Sommaire

Les mouvements nationalistes au XIXe siècle : du « nationalisme ouvert » au « nationalisme fermé » (Winock)

Toile de fond du boulangisme, le nationalisme français et la volonté de revanche sur la Prusse (fête nationale Rue Saint-Denis (Paris), par Claude Monet, 1878).
La France catholique menée par les Juifs et la Francs-maçons (Achille Lemot pour Le Pèlerin, n° du 31 août 1902).

Au XIXe siècle, les mouvements nationalistes sont liés à la gauche et au mouvement républicain[1]. Le nationalisme participe alors de l'idée d'autodétermination des peuples et des émancipations nationales dans toutes les révolutions démocratiques, anticoloniales et anti-impérialistes de l'Europe, qui mettent progressivement fin aux frontières issues du Congrès de Vienne (1815), et des Amériques (succession d'indépendances nationales)[1].

Avec l'instauration de la Troisième République, des lois Jules Ferry sur l'école obligatoire et de la conscription, l'usage du français comme langue commune se répand tandis que les brassages entre populations issues de différentes régions de France se multiplient. Après la défaite de Sedan (1870), le nationalisme devient ainsi, en partie, la politique officielle de l'Etat français, qui réussi à imposer les mêmes lois, les mêmes règlements, la même langue, la même culture à un ensemble de populations différentes. Dans le même temps, la République commence à promouvoir, en particulier au début du XXe siècle, son empire colonial. Erigé en critère essentiel de la citoyenneté par Ernest Renan, le « sentiment d'être français » (ce que l'historien Benedict Anderson appelle la « communauté imaginée ») est la résultante, plus que mitigée en ce qui concerne l'empire colonial, de cette politique de longue haleine. En France, c'est l'État qui a accouché de la Nation.

Encore en 1870-1871, c'est la gauche républicaine et sociale qui défend le patriotisme français et refuse de baisser les armes devant l'envahisseur allemand. Gambetta le républicain, comme la Commune sont animés par cet engouement patriotique. Puis, lors de la crise boulangiste et de l'affaire Dreyfus, les républicains se divisent et le nationalisme passe à droite. Le revanchisme, cependant, demeure commun à la droite et la gauche, animant en particulier ceux qui critiquent alors (à gauche et à droite) le colonialisme, considéré comme une diversion par rapport à la « ligne bleue des Vosges » (Clemenceau).

Le nationalisme, favorisé par le régime républicain, devient alors une revendication d'extrême-droite, liée à l'antisémitisme (Edouard Drumont, La France juive, 1886), à l'antiparlementarisme et à la critique de la « Gueuse » (la République). La droite nationaliste prétend alors dépasser les clivages idéologiques nés de la Révolution, tandis qu'elle dénonce les « quatre Etats confédérés : Juif, Protestant, Maçon, Métèque » (Charles Maurras).

Le terme de « cosmopolitisme », jusqu'ici valorisé et lié aux Lumières et à la notion de « citoyen du monde », change de sens dans les années 1880 [2]. Il devient synonyme de menace pour la cohésion de la nation, étant rattaché en particulier aux juifs : « le Juif cosmopolite est, par nature, ennemi des patries » [3]. Le thème antisémite et xénophobe du « cosmopolite sans racines » rejoint ainsi le traditionnel mythe politique (Raoul Girardet) du « Juif errant ».

Le politologue Pierre-André Taguieff écrit ainsi :

« C’est donc seulement à la toute fin du 19e siècle qu’une nouvelle doctrine politique s’installe dans le paysage idéologique, certes sous le nom de "nationalisme", mais dissimulant derrière cette désignation vague une étrange tentative de synthèse entre une vision traditionaliste de l’ordre social, une version scientiste de la "théorie des races" et une conception conspirationniste de l’ennemi (Juifs, francs-maçons, etc.), dont dérive l’appel xénophobe à défendre par tous les moyens la nation française menacée, la « vieille France » (Drumont), la « France des Français » (Soury)[4]. »

Ainsi, la formation de la Ligue des patriotes de Paul Déroulède et de la Ligue de la patrie française, antisémites et xénophobes, incarnent bien le passage du « nationalisme ouvert » au « nationalisme fermé » (selon une typologie de Michel Winock[1]) qui s'opère en France à la fin du XIXe siècle. Maurice Barrès invoque alors La Terre et les morts. Parallèlement, les thèses racialiste qui tentent d'accréditer par la science le racisme se diffusent, en particulier, mais pas seulement, dans les mouvements nationalistes d'extrême droite. Ainsi, Barrès suit les cours de Jules Soury[5]), tandis que les thèses d'Arthur de Gobineau ou de Georges Vacher de Lapouge, qui défend un « socialisme sélectionniste et aryaniste », sont popularisées.

En outre, une partie du mouvement anarcho-syndicaliste soutient alors les thèses nationalistes, et certains de ses représentants basculeront à l'extrême-droite. Ce mouvement est à l'origine du débat sur l'existence d'un « fascisme français » voire, pour l'historien Zeev Sternhell, de sa création, en tant que mouvance intellectuelle (et non en tant que mouvement de masse) en France. Il rassemble des individus tels que l'anarchiste antirépublicain, antimaçonnique, antisémite et antimarxiste Émile Janvion, autour de la revue Terre libre, qui rejoint l'Action française en 1910 ; le projet de revue La Cité française (1910), avec Georges Sorel (leader historique du syndicalisme révolutionnaire), Georges Valois (anarchiste passé à l'Action française), Pierre Gilbert, Edouard Berth (héritier idéologique de Georges Sorel); le Cercle Proudhon (1911), créé dans l'orbite de l'Action française par Georges Valois, Edouard Berth, Henri Lagrange; ou encore le journaliste anarchiste Georges Paul, passé au monarchisme.

Hétérogénéité des mouvements nationalistes

Les mouvements nationalistes sont hétérogènes et se divisent selon leurs références religieuses ou philosophiques, ou historiques. Si à l'origine le nationalisme en France était propre à la gauche républicaine, il est passé à l'extrême-droite lors de l'affaire Dreyfus. Plusieurs partis à droite ou à l'extrême droite de l'échiquier politique sont considérés comme nationalistes :

Un parti politique se réclame souverainiste et patriotique mais pas nationaliste :

Ces mouvements sont divisés sur la question de la nation française :

L’Action française, le « nationalisme intégral » et le monarchisme

L’ Action française (AF), mouvement royaliste, se présente comme un dépassement du « nationalisme républicain » (de Barrès) vers le « nationalisme intégral » (de Maurras) ou monarchisme rejetant tout l'héritage révolutionnaire. L'Action française ne retient de la révolution que le concept même de nation comme corps politique fondamental. Pour l'AF ce qui change aussi c'est que l'on est « monarchiste de raison », c'est à dire que c'est le nationalisme qui mène au monarchisme.

Tous les intérêts individuels et corporatifs doivent être entièrement subordonnés à la nation, mais non pas niés (ce qui le distingue du futur fascisme), y compris :

  • la monarchie (ce qui le distingue de l'ancien légitimisme qui ne reconnait pas le concept de nation),
  • l'Église (ce qui explique sa condamnation sur le plan doctrinal indépendamment des raisons politiques).

Le nationalisme intégral de l'Action française sera donc paradoxalement un néo-orléanisme anti-libéral et autoritaire, positiviste, corporatiste et nationaliste avec en son sein des tendances conservatrices ou progressistes.

Beaucoup de royalistes légitimistes reprocheront à Maurras d'avoir choisi un Orléans comme prétendant, voyant dans sa famille un opportuniste acquis à de nombreux idéaux révolutionnaires.

Le souverainisme

Depuis l'affaire Dreyfus, le nationalisme est souvent considéré comme une caractéristique propre à l'extrême-droite. Néanmoins, certains y intègrent le souverainisme, qui rassemble plusieurs groupes de droite comme de gauche, de Jean-Pierre Chevènement à Philippe de Villiers. Celui-ci est essentiellement caractérisé par l'antieuropéanisme et l'antiaméricanisme.

Le républicanisme ou « national-républicanisme »

Un certain discours « national-républicain » se rattache également à ce courant de pensée [réf. nécessaire] : ainsi celui de Mélenchon qui voit dans la guerre d'Algérie "une guerre civile" (voir son ouvrage Causes républicaines), ou celui du Parti des travailleurs, farouchement anti-européen.

Pour certains sociologues, comme Michel Wieviorka, le républicanisme est une forme moderne de nationalisme, en Turquie comme en France: « L'expérience turque nous montre d'abord que l'idéal républicain risque d'être perverti pour devenir un républicanisme. Cette dénaturation, à droite comme à gauche, s'articule bien avec le nationalisme. »[6]

Identité religieuse

La question de l'identité religieuse crée des clivages au sein de ces mouvements. On peut notamment distinguer deux principaux courants

Citations

  • Cette France, dont nous sommes les héritiers, s’est historiquement constituée en nation. Il aurait pu en être autrement. C’est un fait, cependant, contre lequel il n’est pas permis d’aller sans manquer à la piété envers les ancêtres. Si, demain, la France cessait d’être une nation, elle cesserait d’être. Aucun d’entre nous n’a le droit de décider que la nation ne sera plus. Le nationalisme français se veut donc uniquement de conservation. Il refuse toute volonté d’impérialisme, tout dessein agressif. Il s’agit pour lui de maintenir l’œuvre des pères. C’est que, effet, dans un pays comme la France, la nation préexiste au nationalisme. Il a fallu, pour la forger, plus d’un millénaire. Pas davantage, il n’est fait de mépris ou d’hostilité envers les autres peuples. Se reconnaître héritier d’une certaine Histoire, c’est admettre qu’il y a d’autres héritages et des Histoires différentes. Pas plus que nous n’admettons d’être dépossédés, nous ne concevons de déposséder. Le respect d’autrui nous conduit à admettre que les nations n’obéissent pas à la même règle de constitution. Une raison unique ne gouverne pas les empires. Louis Daménie
  • Le nationalisme, c'est de résoudre chaque question par rapport à la France. Maurice Barrès
  • Un nationaliste, c'est un Français qui a pris conscience de sa formation. Nationalisme est acceptation d'un déterminisme. Maurice Barrès, Scènes et doctrines du nationalisme.

Voir aussi

Références

  1. a , b  et c Winock, Michel (1990), Nationalisme, antisémitisme et fascisme en France, Le Seuil.
  2. Dornel, Laurent (2003), Cosmopolitisme et xénophobie : les luttes entre français et italiens dans les ports et docks marseillais, 1870-1914, Cahiers de la Méditerranée, vol. 67–2003, « Du cosmopolitisme en Méditerranée ».
  3. Yves Lequin (dir), Histoire des étrangers et de l’immigration en France, Larousse, 1992, p. 365. Cité par Dornel, Laurent (2003), Cosmopolitisme et xénophobie : les luttes entre français et italiens dans les ports et docks marseillais, 1870-1914, Cahiers de la Méditerranée, vol. 67–2003, « Du cosmopolitisme en Méditerranée ».
  4. Taguieff, Pierre-André (2002), « L'invention racialiste du juif », article tiré de La couleur et le sang. Doctrines racistes à la française, nouvelle éd. 2002, Mille et une nuits.
  5. Sternhell, Zeev, Maurice Barrès et le nationalisme français : la France entre nationalisme et fascisme, préface de Raoul Girardet, Paris, Armand Colin, 1972 ; rééd. Presses de Sciences Po, 2000, p. 254.
  6. Point de vue dans Ouest-France du 1er aout 2008:[1]

Liens internes

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