Collégiale Saint-Aignan d'Orléans

Collégiale Saint-Aignan d'Orléans
Collégiale Saint-Aignan
d’Orléans
Image illustrative de l'article Collégiale Saint-Aignan d'Orléans
Présentation
Culte Catholique romain
Type Église (collégiale)
Rattaché à Diocèse d'Orléans
Protection  Classé MH (1840, 1910)[1]
Géographie
Pays Drapeau de France France
Région Centre
Département Loiret
Ville Orléans
Coordonnées 47° 53′ 57″ N 1° 54′ 56″ E / 47.89915, 1.915422247° 53′ 57″ Nord
       1° 54′ 56″ Est
/ 47.89915, 1.9154222
  

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Collégiale Saint-Aignand’Orléans

La collégiale Saint-Aignan (prononcé traditionnellement « Agnan », encore actuellement[2]) est une église française située dans le centre de la ville d'Orléans (quartier Bourgogne), sur la rive nord de la Loire, dans le département du Loiret et la région Centre.

Elle est dédiée à saint Aignan, évêque d’Orléans dont la légende semi-historique raconte qu'en l'an 451, son action permit, avant l'arrivée des légions romaines d'Aetius, de dissuader Attila, commandant de l'armée des Huns, d'investir la cité et de la ravager.

Sommaire

Histoire

Antiquité

Selon la légende, les Huns sont stoppés sous les murs de l’église Saint-Pierre-aux-Bœufs, bâtie sur les ruines d’un temple romain, grâce aux prières du vieil évêque, Aignan, qui transforme miraculeusement une poignée de sable de Loire en un essaim de guêpes. Ensuite seulement, Aignan est relayé par les troupes du général romain Flavius Aetius (arrivées très tardivement, du fait de la faiblesse et quasi absence du pouvoir impérial, à cette époque de délitement de l'Empire romain). On peut penser qu'à tout le moins, l'action de l'évêque d'Orléans permit d'éviter le massacre généralisé et d'attendre les secours, qu'il avait préalablement fait appeler. L'arrivée de l'armée romaine - alors que tout semblait perdu - put apparaître comme miraculeuse.

Aignan meurt le 17 novembre 453 et est alors inhumé dans cette église. Il est plus tard canonisé et désigné comme saint patron de la ville et du diocèse.

Moyen Âge

La première abbaye et la collégiale

Jusqu’au VIIe siècle, Saint-Aignan, s’agrandit, devient un monastère puis une abbaye régie par les règles de Saint Benoît et de Saint Colomban.

Au IXe siècle, les moines qui la composent prendront le statut de chanoines et ne seront plus soumis à la règle de saint Benoît. La vie autour de la collégiale se développe jusqu'à ce que celle-ci acquière une complète autonomie, en partie grâce à Théodulfe, évêque d’Orléans et conseiller de Charlemagne.

Le chapitre de chanoines disparaît à la Révolution française, en novembre 1790. Pendant des siècles, il avait constitué, en importance, le second chapitre canonial de la ville, après celui de la cathédrale Sainte-Croix.

Comme il était de règle, tous les membres de la communauté étaient tenus de participer aux assemblées plénières et avaient « voix au chapitre », y compris les enfants de chœur (à ne pas confondre avec les simples servants d'autel d'aujourd'hui, leur fonction principale étant de chanter dans le chœur professionnel de l'église).

Après la disparition de l'Empire de Charlemagne, la collégiale subit les pillages des Normands, elle est notamment saccagée en l’an 865, et elle disparaît dans le grand incendie de 999 qui détruisit la ville. Il ne reste de l'édifice que la crypte actuelle qui servit à protéger les reliques de saint Aignan.

La reconstruction

Une basilique romane est reconstruite plus en hauteur par le roi Robert II de France dit Robert le Pieux, en 1029, après douze ans de travaux.

La Guerre de Cent Ans

Durant la Guerre de Cent Ans, en 1359, Orléans est assiégé par les anglais. La population, par crainte que l’armée anglaise ne se serve des églises de la ville comme lieux de retranchement, détruit Saint-Pierre Ensentelée (actuellement Saint-Pierre du Martroi), Saint-Euverte et Saint-Aignan. Ils mettront huit jours à raser la bastide.

L’église est de nouveau reconstruite en 1420. Cependant, huit ans plus tard, la ville étant à nouveau assiégée par les anglais, toutes les églises du faubourg sont détruites sur ordre du bailli Raoul de Gaucourt.

À partir de 1439, l’église est réédifiée par Charles VII, puis Louis XI ordonne que la collégiale soit incluse dans la future enceinte, agrandie, de la ville. En 1509, en partie grâce au financement de Louis XI, la nouvelle collégiale est consacrée par Martin de Dreux, doyen du chapitre.

Époque moderne

En 1562, durant les guerres de religion la collégiale Saint-Aignan est pillée par les Huguenots, partisans du réformateur Jean Calvin, qui s'emparent d’une châsse en or pour en faire de la monnaie. Cinq ans plus tard, ils démantèlent une grande partie de la collégiale.

En 1563, les reliques de saint Aignan sont jetées sur un bûcher par les huguenots alors maîtres de la ville, plus qu'à moitié acquise à leur cause ; l'édifice est incendié et brûle en partie. Quelques ossements du saint, calcinés, sont sauvés par un choriste du chapitre, Jehan Minereau, de Gien. Sans reliques d'un saint protecteur, une église perdait une grande partie de sa force et de sa crédibilité, et le musicien se serait donc trouvé dans une situation professionnelle précarisée[3].

Une fois la paix rétablie en 1570, les chanoines érigent un mur à l'ouest des transepts, pour isoler la nef, trop endommagée et inutilisable. Puis, en 1619, Louis XIII finance la restauration du retable actuel.

Époque contemporaine

Après la Révolution française, de 1792 à 1802, l’église Saint-Aignan, perd sa destination religieuse et sert successivement d’atelier de fabrication de tentes militaires, de local pour un groupe révolutionnaire puis en 1798, elle devient un « Temple de la Reconnaissance et de la Victoire ».

Ce n’est qu’en 1802, après le Concordat entre Bonaparte et la papauté, qu'elle sera rendue au culte. Elle devient alors une simple paroisse.

Architecture

L'église

Actuellement, il ne reste de la collégiale que le chœur de quatre travées, le pan coupé de l'abside (avec son déambulatoire desservant cinq chapelles absidiales) et les transepts. L'édifice comprenait autrefois une nef de trois travées, dont les ruines, restées à ciel ouvert depuis les Guerres de Religion jusqu'à la Révolution de 1789, furent détruites en 1804, par l'architecte Benoît Lebrun, acquéreur des bâtiments de la collégiale vendue comme bien national. Avant cette destruction, les collatéraux se prolongeaient jusqu'au fond de la nef. À l'ouest, la tour, qui n'avait jamais été ruinée, fut rasée la même année, par Lebrun.

Dans la première chapelle absidiale sud, on remarque la pierre tombale d'un maître de musique du chapitre, Liphard Benoît, mort en 1644.

Récemment, d'importants travaux de rénovation, entrepris dans les dernières années du XXe siècle, ont été effectués sur la partie extérieure de l'édifice.

Conséquence des fuites qui avaient affecté la toiture, avant ces travaux, une belle fresque du XIXe siècle, dans la chapelle du chevet, continue à s'effriter un peu plus chaque jour (février 2011).

L'église est classée au titre des Monuments historiques par arrêté du 26 septembre 1910[1].

La crypte

La crypte

Actuellement, la crypte s'organise comme un chœur d'église, avec abside semi-circulaire. À l'arrière, un déambulatoire desservait cinq chapelles absidiales dont une seule subsiste. À l'Ouest, le martyrium était l’endroit où l'on conservait les reliques de saint Aignan.

La crypte a été ornée de sculptures et peintures mais aussi de nombreuses colonnes, afin de la rendre plus majestueuse, et de la consolider en reprenant le poids de l’église située au-dessus.

Elle est classée au titre des monuments historiques sur la liste des monuments historiques de 1840, classement confirmé par arrêté du 26 septembre 1910[1].

Musique

Jusqu'à la Révolution française, le chapitre collégial entretint un chœur professionnel permanent[4], qu'on peut estimer à une douzaine de chanteurs hommes, approximativement[5]. Sa destination était avant tout de chanter dans les offices, le plain-chant (ou chant grégorien), ainsi que des motets ou d'autres formes de musique polyphonique. La partie aiguë était assurée par six « enfants de chœur » (le mot est à prendre au sens propre : jeunes garçons chantant dans le chœur), formés sur le cloître situé à l'extérieur de l'église, dans la maison de la psallette, par le maître de musique[6]. Leur éducation musicale était complète et durait en principe douze ans. Un orgue avec qui l'on dialoguait (dès 1446 ou avant), et quelques instruments graves de soutien de la voix « soulageaient » ces chanteurs (à partir de la fin du XVIe siècle, un basson, un serpent, et, à partir du XVIIe siècle, dans les deux grandes fêtes de la collégiale, une ou deux basses de viole, remplacées ensuite par le violoncelle). Les interprètes, tous issus de l'école musicale du chapitre ou des autres maîtrises créées partout dans le royaume, ont été à l'origine de la musique savante française et européenne.

Compositeurs

Les maîtres composaient (de même que certains choristes ou les grands enfants de chœur). On a conservé très peu de partitions de ces compositeurs qui passèrent par la collégiale. C'est tout de même le cas pour Eloy d'Amerval, également poète, maître de Saint-Aignan au commencement du troisième tiers du XVe siècle[7]. Il subsiste de lui une Messe à cinq voix[8]. Il est aussi l'auteur d'un long poème en français, Le livre de la diablerie, écrit et imprimé vers la fin de sa vie (commencé vers 1497, il sera publié en 1508).

On a également conservé de la musique des quatre compositeurs qui suivent :

- Jean-Baptiste Morin, né à Orléans en 1677 et mort à Paris en 1745, qui fut formé dans cette église[9].

- (Auguste) Vignot, jeune musicien parisien formé à cathédrale Notre-Dame de Paris, qui exerça quelque temps à Saint-Aignan, jusqu'en août 1743[10].

- En 1784 et 1785, pendant dix mois, Philippe Lejay, compositeur orléanais né en février 1765, dirigea le chœur de la collégiale tout en formant lui aussi les enfants de la maîtrise. À partir de 1787 puis au XIXe siècle, il exerça à la cathédrale Saint-Gatien de Tours, qu'il désigna ensuite comme légataire de ses partitions (1851)[11].

- De 1785 à 1788, Jacques-Marin Dauvilliers, né en 1755, formé à la maîtrise de Notre-Dame de Chartres, devint maître à Saint-Aignan[12].

En 1587, Abraham Fourdy, qui fut maître de Saint-Aignan de 1588 à 1633, avait remporté un prix au « Puy de musique » d'Évreux, concours de composition créé par l'organiste du roi Guillaume Costeley. Le motet primé, Dum Aurora, à cinq voix, est malheureusement perdu. Son successeur, Liphard Benoît, est enterré dans l'église (1644)[13].

Les orgues

Le premier orgue fut peut-être construit dans les années 1440, à l'époque de la reconstruction commencée sous Charles VII, vers la fin de la Guerre de Cent ans. Le plus connu des organistes de Saint-Aignan est Christophe Moyreau (1700-1774), en poste de 1719 à 1737. Il publia six livres de Pièces de clavecin (1753). Trois d'entre elles peuvent se jouer sur l'orgue.

Les deux Proses de Saint-Aignan

La plus ancienne des deux proses (incipit : Magni laudes Aniani) reprend la musique de la séquence médiévale Lauda Sion salvatorem. Le texte est de Michel-Gabriel Perdoulx de la Perrière (1728). La seconde (Hac die praeclara) reprend la musique de la Prose pour l'Invention de la sainte Croix (Ad aras nos vocat, in : « Graduale aurelianense... », 1773), composée par Jean-François Foucard, choriste et maître de la cathédrale d'Orléans à la fin du règne de Louis XV.

Bibliographie

  • Marlène Britta, François Turellier, Philippe Vendrix, La vie musicale à Orléans de la fin de la Guerre de Cent ans à la Saint-Barthélemy, in : Orléans, une ville de la Renaissance, Ville d'Orléans, Centre d'études supérieures de la Renaissance (CESR) de Tours, Université François Rabelais de Tours, 2009, pp. 120-131.
  • Jules Brosset, Église royale et collégiale de Saint-Aignan d’Orléans. Les orgues et les organistes, Blois, dactylographié, 1910, 11 p. (Archives départementales du Loiret).
  • Jules Brosset, Jacques Dauvilliers Maître de Musique de la Cathédrale Sainte-Croix d’Orléans (1755-1739), Blois, C. Migault, 1908, 32 p.
  • Centre d’histoire « Espaces et cultures » (CHEC), Les musiciens d’église en 1790. Premier état d’une enquête sur un groupe professionnel, in : « Annales historiques de la Révolution française », n°2, Université Blaise-Pascal, Clermont-Ferrand, 2005, pp. 57-82.
  • Orléans. Bibliothèque du CERC. Recueil de proses notées, au nombre de 85, par Mr Malon ancien frère des Écoles chrétiennes, Manuscrit, début du XIXe siècle (avant 1822), 307 p. Pages 59-63 (prose n° 17), 64-68 (prose n° 18), 235-239 (prose n° 65).
  • Gérard Héau, Christophe Moyreau musicien d’Orléans (1700-1774) et sa famille, Dactylographié, [Donnery], 1984, 12 p.
  • Michel Le Moël, La situation des musiciens d’église en France à la veille de la Révolution, in : « Recherches », XV, 1975, pp. 191-243.
  • Jean Mongrédien (dir.), Catalogue thématique des sources du grand motet français (1663-1792), Université de Paris-Sorbonne-Bibliothèque nationale de France, Munich, New York, K.G. Saur, 1984, 234 p., pp. 208-209 (réf. 1777-1783) : « Vignot ».
  • François Turellier, Le compositeur orléanais Jean-Baptiste Morin (1677-1745), ordinaire de la musique du régent, créateur de la cantate française, et surintendant de la musique à l’abbaye royale de Chelles , BSAHO, Nouvelle série, N° 115, juin 1997, Le XVIIIe siècle à Orléans , pp. 3-16. Nouvelle version, inédite (2007).
  • Id., Morin, Jean-Baptiste, in : www.oxfordmusiconline.com, 2009.
  • Id., Les orgues et les organistes de la cathédrale Sainte-Croix d’Orléans. Leur place à l’église et dans la ville, des origines jusqu’aux travaux d’Aristide Cavaillé-Coll, in : "L’Orgue", Revue trimestrielle publiée par l’Association des amis de l’orgue en coédition avec Symétrie, N° 291, Versailles, Lyon, 2010-III, pp. 3-33.
  • Id., Christophe Moyreau (1700-1774) : organiste, claveciniste et compositeur orléanais, Bulletin de la Société archéologique et historique de l'Orléanais (BSAHO), nouvelle série, T. XIX, n° 161, décembre 2009, pp. 5-39 (Errata dans : BSAHO, Nouvelle série, T. XX, N° 163, 1er semestre 2010, p. 134).

Notes et références

  1. a, b et c Notice no PA00098843, sur la base Mérimée, ministère de la Culture
  2. C'est toujours la prononciation orléanaise, même si les choses sont en train d'évoluer, une autre prononciation étant également présente aujourd'hui.
  3. Denis Lottin, Recherches historiques sur la ville d’Orléans, Orléans, 1836-1845, T. II, pp. 278-279 (procès-verbal du 16 novembre 1730).
  4. Une collégiale servait souvent de tremplin à de jeunes musiciens (appelés chantres ou plus simplement choristes) effectuant leur « tour de France »
  5. Les chanteurs étaient apparemment moitié moins nombreux, au moment de la dispersion du chapitre, en 1790.
  6. On dirait aujourd'hui le maître de chapelle
  7. Peut-être arrivé dès 1465, il est attesté à Saint-Aignan en 1468 et 1471.
  8. Manuscrit de la Bibliothèque vaticane publié par le Centre d'études supérieures de la Renaissance de Tours (UMR 6576 du Centre national de la recherche scientifique), 1998.
  9. À Paris, Jean-Baptiste Morin entra au service du duc Philippe d'Orléans, futur régent du royaume, et créa, au début du XVIIIe siècle, la « cantate française » (forme musicale essentiellement profane en Italie et en France).
  10. Quatre grands motets de Vignot sont conservés à la Bibliothèque nationale de France, ainsi qu'une chanson publiée dans le Mercure de France en juillet 1745, pour célébrer la victoire de Fontenoy. Ses quatre grands motets ont été chantés à la Chapelle royale du Château de Versailles, de 1757 au moins, jusqu'en 1792. L'auteur, qui n'exerça jamais à la cour, mourut prématurément.
  11. Archives nationales. D XIX 90, dossier 756. Tours. Cathédrale Saint-Gatien. 4 novembre 1790. Document « Quatorzième » (20 mars 1785) ; Michel Le Moël, "La situation des musiciens d’église en France à la veille de la Révolution", in : Recherches sur la musique française classique, XV, 1975, pp. 191-243 (p. 211) ; Journal d’Indre et Loire du 30 octobre 1851 : "M. LEJAY" ; Centre d'Histoire « Espaces et Cultures » (CHEC), "Les musiciens d’église en 1790. Premier état d’une enquête sur un groupe professionnel", in : Annales historiques de la Révolution française, N°2, Université Blaise-Pascal, Clermont-Ferrand, 2005, pp. 57-82.
  12. On a conservé de Jacques-Marin Dauvilliers un Recueil de Romances Mises en Musique et Arrangés [sic] pour la Harpe, qui fut publié à Paris, en pleine Terreur révolutionnaire (janvier 1794), alors qu'il avait été dans l'obligation de se « laïciser » pour pouvoir continuer à vivre de son art (cotes BnF : Vm7 47078 ; Vm7 7685). Son traité d'harmonie (Traité de composition élémentaire des accords) parut cinq ans avant sa mort, en 1834 (cotes BnF : Vm8 228 ; Vm8 229). Son Nouveau Solfège élémentaire, ou Méthode d’enseignement (vers 1795, 1807) est actuellement perdu
  13. Marlène Britta, François Turellier, Philippe Vendrix, La vie musicale à Orléans de la fin de la Guerre de Cent ans à la Saint-Barthélemy, p. 131.

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