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Rhinocéros de Dürer
Rhinocéros de Dürer
Albrecht Dürer, 1515Gravure sur bois 21,4 × 29,8 cm Le Rhinocéros de Dürer est le nom généralement donné à une gravure sur bois d’Albrecht Dürer datée de 1515[1]. L’image est fondée sur une description écrite et un bref croquis par un artiste inconnu d’un rhinocéros indien, débarqué à Lisbonne plus tôt dans l’année. Dürer n’a jamais vu ce rhinocéros qui était le premier individu vivant vu en Europe depuis l’époque romaine. Vers la fin de 1515, le roi du Portugal, Manuel Ier, envoya l’animal en cadeau au pape Léon X, mais il mourut dans un naufrage au large des côtes italiennes, au début de 1516. Un rhinocéros vivant ne sera pas revu en Europe jusqu’à ce qu’un second spécimen indien arrive à Lisbonne en 1577.
En dépit de ses inexactitudes anatomiques, la gravure sur bois de Dürer devint très populaire en Europe et fut copiée à maintes reprises durant les trois siècles suivants. Elle a été considérée comme une représentation réaliste d’un rhinocéros jusqu’à la fin du XVIIIe siècle. Par la suite, des dessins et peintures plus réalistes la supplantent, en particulier des représentations de Clara le rhinocéros, qui fut exposée dans toute l’Europe au cours des années 1740 et 1750. Il est dit à propos de la gravure de Dürer que « probablement aucune image animale n’a exercé une telle influence sur les arts » (traduction libre de probably no animal picture has exerted such a profound influence on the arts).[2]
Sommaire
Le rhinocéros
Un cadeau royal
En 1514, Afonso de Albuquerque, gouverneur de l’Inde portugaise à Goa, avait envoyé deux ambassadeurs auprès de Muzaffar II, sultan de Cambay (Gujarat moderne), pour lui demander le droit de construire un fort portugais sur l’île de Diu. Le sultan ne donna pas son accord mais renvoya les Portugais avec des cadeaux prestigieux, dont un rhinocéros[3]. Dans la tradition orientale, le rhinocéros est un cadeau royal[4]. Habitué à la présence de l’homme, l’animal fut sans doute fourni avec un ou plusieurs gardiens, car il est peu probable que les Portugais aient su comment s’en occuper. Les ambassadeurs revinrent à Goa tard dans l’année avec leur animal.
Albuquerque fit embarquer au plus vite ce royal cadeau sur la nef Nossa Senhora da Ajuda[5] qui quitta Goa en janvier 1515 avec deux autres vaisseaux à destination de Lisbonne. Après un voyage particulièrement rapide de quatre mois par le Cap de Bonne-Espérance, la flotte des Indes chargée d’épices et autres trésors arriva dans le port de Lisbonne de 20 mai 1515, mais c’est sans conteste le débarquement du rhinocéros, venant enrichir la ménagerie exotique du roi Manuel Ier de Portugal, qui fit la plus forte impression.
Le Rhinocéros à Lisbonne
Un tel animal n’avait pas été vu en Europe depuis douze siècles : on savait par les auteurs anciens qu’il existait, mais il était devenu pour la culture occidentale une bête mythique, parfois confondue dans les bestiaires avec le légendaire "monoceros" (la licorne). Les Indiens l’appelaient ganda (nom de l’espèce en Gujarâtî), mais tous les humanistes identifièrent immédiatement l’animal décrit sous le nom de rhinoceros par Pline l’Ancien, Strabon, Solin, Isidore de Séville (qui le nomme rhinoceron) et d'autres auteurs anciens. Dans le contexte culturel de la Renaissance, c’était un morceau de l’Antiquité qui réapparaissait, comme la découverte d’une inscription ou d’une statue.
Savants et curieux vinrent examiner la bête. On en fit un ou plusieurs dessins, dont au moins celui qui servira de modèle à Hans Burgkmair et Albrecht Dürer, accompagnés de descriptions et de commentaires tirés des Anciens, que les érudits de Lisbonne envoyèrent immédiatement à leurs correspondants en Allemagne et en Italie. Dès le 13 juillet 1515 paraissait à Rome un poemetto de Giovanni Giacomo Penni décrivant l’arrivée sensationnelle de l’animal[6].
Dans les jours qui suivirent, le roi fit défiler la bête sans incident avec d’autres animaux exotiques au cours d’une ou plusieurs parades dans les rues de Lisbonne[7]. Le 3 juin, jour de la Fête de la Sainte Trinité, Manuel organisa en champ clos un combat opposant le rhinocéros à l’un de ses jeunes éléphants, puisque tout ce que l’on savait des mœurs de cet animal, notamment par Pline l’Ancien, était que l’éléphant et le rhinocéros seraient les pires ennemis. Découvrant son adversaire et peut-être effrayé par la foule bruyante venue en nombre, l’éléphant courut se réfugier dans son enclos et le rhinocéros fut déclaré vainqueur par abandon [8],[9]. Le rhinocéros n’avait eu qu’à paraître pour mettre en fuite la plus grosse bête de la création : cet exploit chevaleresque fut proclamé dans toute l’Europe.
Le Rhinocéros est offert au Pape
Le roi Manuel décida ensuite d’offrir le rhinocéros au Pape de la famille Médicis, Léon X : il avait besoin de son appui pour garantir les droits exclusifs du Portugal tant en Extrême-Orient qu’au Brésil. L’année précédente, Léon X avait été très content d’Hanno, un éléphant blanc des Indes que Manuel lui avait déjà offert. Avec d’autres précieux cadeaux tels que de la vaisselle d’argent et des épices, le rhinocéros paré de velours vert décoré de fleurs embarqua en décembre 1515 pour un voyage du Tage à Rome [10]. On prêtait au pape l’intention d’organiser à Rome un combat du rhinocéros contre un éléphant, comme au temps des Césars.
Le vaisseau relâcha à proximité de Marseille au début de l’année 1516. La renommée du rhinocéros était telle que le roi de France François Ier, revenant de Saint-Maximin-la-Sainte-Baume en Provence, voulut voir l’animal. Lui qui s’était couvert de gloire l’année précédente à Marignan et avait été armé chevalier au soir de la bataille tenait sans doute à rencontrer la bête dont l’armure naturelle et la prouesse contre l’éléphant constituaient désormais un symbole de la chevalerie. Cette rencontre eut lieu sur une île au large de Marseille [11] le 24 janvier 1516. [12]
La mort du Rhinocéros
Le navire repartit ensuite pour Rome, mais fit naufrage lors d’une tempête soudaine alors qu’il naviguait près de Portovenere, au nord de La Spezia, sur la côte de Ligurie. Le rhinocéros, enchaîné à bord, fut incapable de nager et se noya.
Les informations dont nous disposons sur ce qui se produisit ensuite sont contradictoires. Jean Barrillon dit que son corps fut récupéré près de "Civitavesche" (Civitavecchia, près de Rome). Jules César Scaliger dit simplement qu’il fut rejeté sur la côte tyrrhénienne. On lit souvent que l’animal fut alors empaillé et que c’est un rhinocéros naturalisé que le pape reçut en fin de compte, mais cette affirmation ne repose sur rien de sérieux, d’autant qu’on ne savait pas au XVIe siècle empailler un rhinocéros. Le récit le plus détaillé est en fait celui de Paolo Giovio, pour qui les Portugais apportèrent au pape "la sua vera effigie e grandezza" (son vrai portrait grandeur nature), avec le récit pathétique de sa fin tragique : après la prouesse de Lisbonne, une telle fin, luttant malgré ses chaînes contre la tempête, achevait de faire du Rhinocéros un authentique héros[13].
Le rhinocéros a été représenté dans les peintures de l’époque à Rome par Raphael et Giovanni da Udine[14][15] Son histoire servit de modèle au roman de Lawrence Norfolk, The Pope’s Rhinoceros, publié en 1996.
La gravure de Dürer
Création de l’œuvre
Entre le 20 mai et le 3 juin 1515 le rhinocéros fut à Lisbonne l’objet de la curiosité générale, artistes et savants en firent des croquis et des descriptions qu’ils envoyèrent à leurs correspondants en Europe. C’est sur la base d’un de ces documents que Penni composa en Italie son poemetto, illustré d’une gravure assez sommaire de la bête. Un humaniste morave, Valentim Fernandes, écrivit à des amis une lettre décrivant l’animal, lettre dont le texte original en allemand est perdu, mais est connu par une copie en italien conservée à la Biblioteca Nazionale Centrale de Florence. [16] Un document comparable illustré par un auteur inconnu parvint à Nuremberg, et inspira les artistes Hans Burgkmair et Albrecht Dürer. Le dessin représentait vraisemblablement le rhinocéros au repos, vu de profil et tourné vers la gauche, les deux pattes antérieures entravées par une corde.
Dans un premier temps Albrecht Dürer (si c’est bien lui) fit une copie à la plume et à l’encre de ce croquis, avec une copie (ou une traduction ?) de la légende qui l’accompagnait. Ce dessin, intitulé RHINOCERON 1515, non signé mais que chacun s’accorde à attribuer à Dürer, est aujourd’hui au British Museum, à Londres. La légende, en allemand, parle de "notre roi de Portugal", ce qui montre que l’auteur de la lettre était portugais, et la date de 1513 est une faute de copie pour 1515. Dürer a interprété son modèle et en a fait une chimère : il n’a pas reproduit les entraves de l’animal, a rajouté sur son dos une petite dent de narval (ce que l’on considérait alors comme une corne de licorne), a dessiné les plis de la peau du rhinocéros comme les plaques de la carapace d’un crustacé, a interprété le rendu de la peau de ses pattes comme des écailles de reptile ou de pattes d’oiseau, et lui dessine une queue d’éléphant.
Un dessin à la plume illustrant le Livre d’Heures de l’Empereur Maximilien, réalisé peu après, s’inspire de l’interprétation de Dürer (carapace, dent de narval) mais reproduit les entraves de la bête, ce qui laisse supposer que Dürer avait réalisé un autre dessin, perdu, sur lequel les entraves étaient présentes.
Albrecht Dürer réalisa peu après une gravure sur bois d’après son dessin à la plume, ce qui fait qu’à l'impression le rhinocéros apparaît tourné dans l’autre sens. Cette gravure est intitulée 1515 RHINOCERVS, et signée de son monogramme habituel AD. La technique de la gravure sur bois ne permettant pas de tracer des lignes aussi fines qu’à la plume, les plaques de la carapace du rhinocéros n’évoquent plus un crustacé mais plutôt les plaques d’une armure métallique[17]. Il reproduit au-dessus de la bête la légende, composée en caractères mobiles, avec de notables différences par rapport à la légende du dessin : on y mentionne cette fois "le grand et puissant roi de Portugal", et on ne reproduit plus le nom de l’animal en langue indienne. L’ensemble mesure 248 x 317 mm.
Traduction française de la légende en allemand de la gravure de Dürer :
« En l’année 1513 (sic) après la naissance du Christ, on apporta de l’Inde à Emmanuel, le grand et puissant roi de Portugal, cet animal vivant. Ils l’appellent rhinocéros. Il est représenté ici dans sa forme complète. Il a la couleur d’une tortue tachetée, et est presque entièrement couvert d’épaisses écailles. Il est de la taille d’un éléphant mais plus bas sur ses jambes et presque invulnérable. Il a une corne forte et pointue sur le nez, qu’il se met à aiguiser chaque fois qu’il se trouve près d’une pierre. Le stupide animal est l’ennemi mortel de l’éléphant. Celui-ci le craint terriblement car lorsqu’ils s’affrontent, le rhinocéros court la tête baissée entre ses pattes avant et éventre fatalement son adversaire incapable de se défendre. Face à un animal si bien armé, l’éléphant ne peut rien faire. Ils disent aussi que le rhinocéros est rapide, vif et intelligent.[18] »Après la mort de l’artiste en 1528, plusieurs rééditions de ce bois gravé furent réalisées jusqu’au début du XVIIe siècle. On peut les classer d’après la progression plus ou moins avancée d’une fente dans le bois (elle part des poils de la queue, et s’étend progressivement aux pattes arrière, puis au museau pour les impressions les plus tardives), ainsi que par les corrections apportées au texte composé en caractères mobiles. Johann David Passavant[19] a ainsi repéré 6 éditions : deux avec 5 lignes de légende, une troisième avec 5 lignes et demi, une quatrième avec 5 lignes complètes, une cinquième édition hollandaise, publiée par Hendrick Hondius, dont la légende commence par « Int jaer ons Heern 1515 ... » (corrigeant ainsi la date erronée de 1513 donnée par les quatre premières éditions allemandes et remontant à une faute de copie de Dürer quand il réalisa son premier dessin à la plume), enfin une sixième édition sur deux planches en clair-obscur.
Un succès moindre pour une œuvre similaire
Une autre gravure à partir du même modèle a été réalisée par Hans Burgkmair à Augsbourg, à peu près au moment où Dürer réalisait la sienne à Nuremberg. Comme dans le cas de Dürer, on n’est pas certain de la source de Burgkmair [20], mais comme les grandes lignes (silhouette, plis de la peau) de l’animal sont quasi identiques pour les deux œuvres, le plus probable est que les deux graveurs aient travaillé à partir du même original. La gravure de Burgkmair, intitulée RHINOCEROS MDXV, paraît plus proche de la réalité, ou du moins plus fidèle au document original, car elle est dépourvue de la dent de narval ajoutée par Dürer et représente les entraves employées pour maintenir l’animal[20]. Cela dit, Burgkmair interprète sa peau comme une sorte de fourrure tachetée, ce qui n’est pas plus réaliste que la carapace ou l’armure de son concurrent Dürer.
Un unique exemplaire de la gravure de Burgkmair a survécu jusqu’à nos jours, conservé au Graphische Sammlung Albertina de Vienne.
L’influence du rhinocéros de Dürer
La gravure de Dürer a rencontré tout de suite un grand succès dans toute l’Europe. Outre ses rééditions, qui n’ont jamais suffi à satisfaire la demande, elle a été copiée avec beaucoup de précision par plusieurs artistes pour illustrer des livres publiés du XVIe au XVIIIe siècle.
C’est ainsi qu’une copie par David Kandel (signée du monogramme DK) illustre la Cosmographia (1544) de Sebastian Münster, une autre les Historiae Animalium (1551) de Conrad Gessner, une autre copie, sur cuivre cette fois, illustre l’ Histoire of Foure-footed Beastes (1607) d’Edward Topsell, et bien d’autres. Un rhinocéros clairement basé sur la gravure de Dürer fut choisi par Paolo Giovio pour créer en juin 1536 l’emblème d’Alexandre de Médicis dit Alexandre le Maure, duc de Toscane, avec la devise « Non buelvo sin vencer » (espagnol ancien voulant dire « je ne reviens pas sans être victorieux »).[21] La gravure de Dürer n’existant qu’en noir, plusieurs artistes y ajoutèrent des couleurs. La plupart, s’appuyant sur Pline l’Ancien qui donne à l’animal « la couleur du bois de buis », peignirent le rhinocéros en jaune. D’autres, coloriant à l’aquarelle les planches du livre de Conrad Gessner, donnent aux plaques de l’animal les reflets d’une armure en acier, ou d’une armure dorée.
Une sculpture reproduisant le rhinocéros de Dürer portant sur son dos un obélisque de 21 mètres de hauteur fut conçue à Paris par Jean Goujon face à l’église du Saint-Sépulcre dans la rue Saint-Denis, à l’occasion de la venue du nouveau roi de France Henri II.[22] Un rhinocéros semblable, en bas-relief, décore un panneau d’une des portes en bronze de la cathédrale de Pise. On peut citer bien d’autres exemples : à quelques rarissimes exceptions près, toutes les représentations du rhinocéros à la Renaissance et à l’âge baroque dérivent de la gravure de Dürer.
La popularité du rhinocéros chimérique de Dürer n’a pas diminué malgré la présence d’un nouveau rhinocéros indien pendant huit années à Madrid de 1579 à 1587, bien qu’une gravure de cet animal ait été réalisée par Philippe Galle en 1586 à Anvers, et que certains artistes au XVIIe siècle s’en soient inspirés. Malgré l’exposition d’un rhinocéros vivant à Londres en 1684-1686 et d’un deuxième en 1739, le rhinocéros de Dürer restait pour la plupart des gens l’image vraie d’un rhinocéros[23]. Ce n’est qu’à partir de 1741, avec l’arrivée en Hollande de Clara le rhinocéros qui sera exhibée dans toute l’Europe par son propriétaire Douwe Mout van der Meer jusqu’en 1758, que l’image réaliste de Clara se substituera à celle du rhinocéros de Dürer dans l’iconographie européenne.
(sur ces exhibitions, voir Rhinocéros célèbres en Europe)
Du XVIIIe siècle à nos jours
La place prééminente de l’image de Dürer n’a donc décliné qu’à partir du XVIIIe siècle. Jean-Baptiste Oudry a peint un portrait grandeur nature de Clara le rhinocéros en 1749, et George Stubbs un portrait de grande taille d’un rhinocéros à Londres vers 1790. Ces deux peintures étaient beaucoup plus réalistes que la gravure de Dürer, et ces images ont progressivement commencé à remplacer le rhinocéros de Dürer dans l’ imaginaire collectif. En particulier, la peinture d’Oudry a influencé la planche de l’ Histoire naturelle de Buffon, qui elle-même a été largement copiée.[24] En 1790, le récit de voyage de James Bruce Travels to discover the source of the Nile critique le travail de Dürer comme étant " merveilleusement mal fait de toutes pièces" [25] et rajoutant qu’il s’agissait de "l’origine de toutes les formes monstrueuses sous lesquelles cet animal a été peint depuis" [26]. Pourtant, la propre illustration par Bruce du rhinocéros blanc africain, qui est sensiblement différent du rhinocéros indien, partage toujours des inexactitudes manifestes avec Dürer.[27] Le sémiologue Umberto Eco explique que les "écailles et plaques imbriquées", de Dürer sont devenues un élément nécessaire pour représenter l’animal, même pour ceux qui croient mieux savoir, car "ils savent que seul ce signe graphique conventionnel signifie «rhinoceros» pour la personne qui interprète le signe iconique". Il note également que la peau d’un rhinocéros est plus rugueuse qu’elle n’apparaît visuellement et que de telles plaques et écailles traduisent plutôt bien cette information non-visuelle. [28] Vers la fin des années 1930, le dessin de Dürer apparaît encore dans les manuels scolaires allemands comme la représentation fidèle d’un rhinocéros;[2] d’ailleurs en allemand le rhinocéros indien est toujours appelé le Panzernashorn ou le "rhinocéros blindé".
Si les naturalistes ont abandonné la chimère de Dürer depuis le Siècle des Lumières, ce n’est pas le cas des artistes qui continuent d’éprouver pour cette gravure, devenue une véritable icône, une indéniable fascination. Beaucoup de sculpteurs, de peintres et de graphistes contemporains reproduisent la gravure de 1515 en l’interprétant de toutes les manières. Parmi les plus connus du grand public, Salvador Dali qui a peint et sculpté le rhinocéros de Dürer accompagné de tests d’oursins (c’est pour lui le "Rhinocéros Cosmique" ou le "Rhinocéros habillé de dentelles"), ou encore Niki de Saint-Phalle qui a repris la silhouette du rhinocéros de Dürer en la remplissant de vives couleurs, sous la forme de lithographies ou de bouées gonflables.[29]
Références
- ↑ Et non 1513, comme il est écrit à tort dans le commentaire accompagnant la gravure. (Bedini, p.121.)
- ↑ a et b Clarke, p.20.
- ↑ Bedini, p.112.
- ↑ Tous les rhinocéros en captivité connus depuis l’Antiquité étaient propriété royale (ou impériale pour les Romains), sauf peut-être en Chine. Le premier rhinocéros appartenant à un particulier est celui qui fut vendu à Londres en 1684.
- ↑ Clarke, p.16.
- ↑ Giovanni Giacomo Penni, Forma e natura e costumi de lo rinocerote (...). Cf. la réédition par Ugo Serani, Etiopicas 2 (2006) ISSN 1698-689X [1]
- ↑ Damiao de Gois évoque cette parade dans sa Chronica do Felicissimo Rei Dom Emanuel
- ↑ Bedini, p. 118. Ce combat est relaté dans une lettre de l’imprimeur-humaniste morave Valentin Ferdinand (ou Valentim Fernandes) qui est conservée dans une traduction italienne ; texte reproduit par Ugo Serani, Etiopicas 2 (2006) p. 6-7.
- ↑ Albrecht Dürer, The Rhinoceros, a drawing and woodcut, from the British Museum.
- ↑ Bedini, p.127.
- ↑ L’Archipel du Frioul est un ensemble de quatre îles. Bedini, p.128, il s’agit soit de Pomègues, Ratonneau ou l’autre possibilité est la petite île d’If, maintenant occupé par le Château d’If, ou Tiboulain.
- ↑ "Et sejourna ledict seigneur (François Ier) quatre jours audict Marseille et durant iceulx alla deux lieues en mer veoir une merveilleuse beste appelee Reynoceros, laquelle beste le Roy de Portugal envoyoit au Pape avec plusieurs aultres presens." Journal de Jean Barrillon, secrétaire du chancelier Duprat, éd. P. de Vaissière, Paris (Renouard) 1897
- ↑ Paolo Giovio, Dialogo dell’Imprese Militari e Amorose, Lyon (Guillaume Rouille) 1574, p. 56 : " (...) quel fiero animale, che si chiama rinocerote, nemico capitale dell’elefante, il quale essendo mandato a Roma, acciò che combattesse seco, da Emanuello Re di Portogallo, essendo già stato veduto in Provenza, dove scese in terra, s’affogò in mare per un’aspra fortuna negli scogli poco sopra Porto Venere, né fu possibile mai che quella bestia si salvasse, per essere incatenata, ancor che nuotasse mirabilmente, per l’asprezza degli altissimi scogli che fa tutta quella costa. Però ne venne a Roma la sua vera effigie e grandezza e ciò fu del mese di Febraio l’anno 1515, con informazioni della natura sua, la quale, secondo Plinio e sì come narrano i Portughesi, è d’andare a trovare l’elefante (...)"
- ↑ Bedini, p.132.
- ↑ Gessner’s Hyena and the Telephone Game, Manda Clair Jost, 2002.
- ↑ Bedini, p.120 and fn.10.
- ↑ Certains auteurs comme Clarke estiment que Dürer a consciemment voulu représenter une armure, car il vivait près d’un quartier d’armuriers à Nuremberg, la Schmeidegasse, et dessinait des armures quasiment en même temps (Clarke, p.20.). Glynis Ridley, dans Clara’s Grand Tour, pense qu’une armure avait été créée spécialement pour son combat contre l’éléphant au Portugal, et que les éléments dessinés par Dürer faisaient partie de cet équipement (hypothèse fragile puisque la légende ne fait pas allusion à ce combat). Il n’y a pas de mention de cela chez Bedini.
- ↑ thèse de doctorat de Bruno Faidutti à l’université Paris XII: La licorne et le rhinocéros, chapitre 3.2, illustration 10, Novembre 1996.
- ↑ Johann David Passavant, Le peintre-graveur, t. III, Leipzig, Rudolph Weigel,1864 p. 168.
- ↑ a et b Bedini, p.121.
- ↑ Bedini, p.192.
- ↑ Bedini, p.193.
- ↑ Clarke, chapitre 2 et 3.
- ↑ Clarke, p.64.
- ↑ "wonderfully ill-executed in all its parts"
- ↑ "the origin of all the monstrous forms under which that animal has been painted, ever since"
- ↑ Alperson, Philip A (1992). The Philosophy of the Visual Arts. Oxford University Press US, p. 80. (ISBN 0195059751).
- ↑ Eco, Umberto (1978). A Theory of Semiotics. Indiana University Press, p. 205. (ISBN 0-253-35955-4).
- ↑ Voir l’article Rhinocéros dans l’art
Bibliographie
- (en) Bedini, Silvano, The Pope’s Elephant, Carcanet Press, 1997, (ISBN 1857542770) (en particulier le chapitre 5, "The Ill-Fated Rhinoceros")
- (en) Clarke, T. H., The Rhinoceros from Dürer to Stubbs - 1515-1799, Sotheby’s Publications, 1986, (ISBN 0856673226) (en particulier le chapitre 1, "The first Lisbon or ’Dürer Rhinoceros’ of 1515")
- (en) Dodgson, Campbell, "The story of Dürer’s Ganda", dans FOWLER Alfred éd., The Romance of Fine Prints, Kansas City (The Print Society) 1938.
- (fr) Fontoura da Costa, Abel, Les déambulations du Rhinocéros de Modofar, Roi de Cambaye, de 1514 à 1516, Lisbonne (Agencia Geral das Colónias) 1937.
- (en) Lach, Donald F., Asia in the Making of Europe, vol. II, Chicago-Londres (University of Chicago Press) 1970, p. 161-168.
- (en) Quammen, David, The Boilerplate Rhino: Nature in the Eye of the Beholder, Scribner, 2000 (en particulier pp. 201-209, The Boilerplate Rhino, article d’abord paru dans la revue Outside en juin 1993).
- (de) Salzgeber, Dieter, Albrecht Dürer: Das Rhinozeros, Rowohlt, Reinbek, 1999, (ISBN 978-3-499-20843-1).
Voir aussi
Liens externes
- (en) Cet article est partiellement ou en totalité issu d’une traduction de l’article de Wikipédia en anglais intitulé « Dürer's Rhinoceros ».
- Albert Durer, by T. Sturge Moore, from Project Gutenberg
- La licorne et le rhinocéros, extrait de la thèse de doctorat de Bruno Faidutti
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