Numismate

Numismate

Numismatique

Joseph Pellerin, numismate français, (1684-1782)

La numismatique (du latin numisma, « pièce de monnaie »[1],[2]) a pour objet l'étude des monnaies et médailles. Considérée comme une science auxiliaire de l'histoire, elle est particulièrement utile dans les recherches en histoire antique (notamment romaine ou grecque). Elle sert aussi en archéologie, en particulier comme critère de datation.

Hormis sa finalité scientifique, la numismatique est une aide précieuse pour les collectionneurs numismates. La collection de monnaies a en effet été pratiquée depuis l'Antiquité[3]. Pour la majorité des collectionneurs, l'intérêt historique au sens strict est secondaire. Les collections sont entreprises à des fins de thésaurisation ou par intérêts artistique, technique ou culturel, voire au titre de simple loisir, etc. C'est principalement en répondant aux besoins de ce marché d'amateurs - parfois extrêmement spécialisés - que la numismatique a forgé ses principaux concepts.

Dans le cadre de la gestion alternative, investisseurs et grands instituts financiers internationaux se sont aussi intéressés au monde de la numismatique[4].

Sommaire

Terminologie

Comme toute discipline technique ou scientifique, la numismatique a développé des concepts et un vocabulaire spécifiques. Pour les questions en rapport avec la terminologie numismatique, le lecteur se rapportera avantageusement à l'article ci-dessous.

Article détaillé : Glossaire de la numismatique.

Histoire de la monnaie

Article détaillé : Histoire de la monnaie.

Invention très ancienne, l'origine de la monnaie est cependant impossible à situer et dater avec précision. On peut penser que, dès l'apparition d'échanges commerciaux réguliers et la spécialisation des tâches, le troc s'est avéré inefficace et une certaine forme primitive de monnaie a vu le jour. Probablement constituée à l'origine de petits objets précieux naturels (coquillages) ou artisanaux, la monnaie s'est perpétuée sous cette forme dans de nombreuses régions.

Il faut cependant attendre les progrès de la métallurgie et l'avènement de la civilisation grecque pour voir apparaître les premières pièces de monnaie métalliques au VIIe siècle avant J.-C. La monnaie semble apparaître à la même époque en Chine.

Les avantages de la découverte paraissent décisifs et déterminent un usage économique qui se perpétuera jusqu'à nous.

Évolution de la monnaie

L'évolution de la monnaie est évidemment déterminée d'abord par les bouleversements politiques qui ont eu cours depuis son apparition, mais également par l'évolution économique (par exemple, l'inflation) et par un certain nombre de facteurs techniques internes, qu'il est difficile de dissocier, en particulier :

Histoire de la numismatique

Le premier texte consacré à la monnaie envisagée selon une perspective numismatique semble remonter au De Asse et partibus ejus[9](consacré aux monnaies romaines) et au Libellus de moneta graeca de l'humaniste français Guillaume Budé qui parurent en 1514 à Venise. Le De Asse connut un succès tel qu'il fut traduit en français à la demande du roi sous le titre Summaire ou Epitome du livre de Asse, puis en italien.

Le premier périodique consacré aux pièces de monnaies voit le jour en Allemagne avec les Blätter für Munzkunde qui parut à Hanovre de 1834 à 1844. En Grande-Bretagne, John Young Ackerman fonde en 1836 le trimestriel The Numismatic Chronicle qui perdurera jusqu'à nos comme journal de la « Royal Numismatic Society »[10]. Aux États-Unis, l'American Numismatic Association (ANA), sans doute la plus importante société numismatique du monde avec 33 000 membres en 2008, fut fondée à Chicago en octobre 1891. L'un des fondateurs de l'ANA, George F. Heath avait dès 1888 publié un périodique The Numismatist, qui est toujours le journal de l'association.

Les premières études se focalisaient presque exclusivement sur les monnaies antiques (grecque et surtout romaine), avant de s'étendre aux monnaies féodales (occidentales et en usage dans le monde islamique). Ce n'est que vers la fin du XIXe siècle que l'intérêt s'élargit à toutes les monnaies et toutes les époques. La première étude consacrée au dollar américain ne parut qu'en 1899[11]. Quelques scientifiques, comme le Français Gustave Ponton d'Amécourt ou le Polonais Joachim Lelewel, modifièrent durablement le point de vue.

Collections et collectionneurs célèbres

Depuis l'époque de la Renaissance, il était de bon ton pour celui qui en avait les moyens de disposer d'un cabinet des monnaies. Parmi ces amateurs, on peut citer Pétrarque, les Médicis, le pape Paul III, la reine Christine de Suède, Charles VI du Saint-Empire ou Bartolomeo Borghesi. Le roi d'Angleterre, George III, mérite une place particulière, puisque sa passion était partagé par son chirurgien, William Hunter dont les collections formèrent les base du fond numismatique du musée de Glasgow. Celles de son frère, John Hunter et celles de Hans Sloane formèrent quant à elles le fond numismatique de base du British Museum.

Plus récemment, les rois Carol de Roumanie, Victor-Emmanuel III d'Italie, Farouk d'Égypte, ou le prince Rainier de Monaco étaient connus également pour leurs collections numismatiques.

Guides et catalogues

Aujourd'hui, la numismatique est un loisir relativement populaire, ce qui a provoqué l'apparition de nombreux intermédaires sur le marché, qui proposent non seulement l'acquisition de pièces, mais aussi divers services comme l'évaluation des pièces, des ventes aux enchères, etc. De même de nombreux guides et catalogue numismatiques ont vu le jour. Parmi les plus connus, pour les États-Unis, The Official Red Book, dont la naissance remonte à 1947 et qui en est à sa 62e édition, pour le Royaume-Uni, Coins of England & The United Kingdom publié par la célèbre firme Spink (43e édition), etc[12].

L'instauration de l'Euro a vu l'éclosion de nouvelles publications systématiques en France, Allemagne, etc.

Le marché de la commémoration

Article détaillé : Pièce commémorative.

L'augmentation du nombre de collectionneurs et le développement du marché n'ont pas échappé non plus aux instituts monétaires nationaux (Monnaie de Paris, United States Mint, Royal Mint, Swissmint, etc). Ces instituts émettent ainsi chaque année un nombre plus ou moins important de pièces destinées aux collectionneurs : pièces de circulation soignée, ou en impression spéciale (BU et BE), monnaies commémoratives dans différents métaux, voire médailles, tokens ou produits dérivés (petites cuillères ou albums, par exemple[13]). Le développements d'Internet a facilité le développement de ces activités commerciales, souvent fort lucratives[14].

Toutefois, cette surabondance de biens, résultat d'une offre bien décidée à s'adapter à une demande croissante, a conduit à un clivage dans le monde des numismates : certains puristes refusent par exemple de collectionner toute production qui n'aurait pas fait partie de la monnaie de circulation standard et, malgré le fait que la plupart d'entre elles aient cours légal, assimilent les pièces de monnaie commémoratives à de simples médailles.

Il n'en demeure pas moins que les pièces commémoratives sont souvent émises en quantité plus faible et mieux contrôlée[15], dans des métaux plus précieux (souvent en or ou en argent, voire en platine) et avec une qualité de frappe et de traitement et d'emballage bien supérieurs. Leur attrait est donc bien réel pour de nombreux collectionneurs et investisseurs[16].

Types de collections

Les numismates peuvent choisir d'organiser leur collection suivant des critères arbitraires et très variés. Par exemple :

Souvent, le numismate s'intéresse aussi aux billets de banque, objet de la billetophilie.

Évaluation des pièces de monnaies de collection

Les collections s'échangeant sur un marché secondaire parfois peu liquide et souvent volatile, les prix des pièces collectionnées subissent des variations importantes en fonction de cours des métaux précieux, de la rareté, de l'aspect, ou simplement des fluctuations de la demande. Parmi les critères objectifs qui constituent le prix, l'état de conservation numismatique (sauf pour les pièces uniques ou très anciennes) joue un rôle absolument déterminant. Les associations numismatiques ont adopté différentes échelles de graduation plus ou moins détaillées selon les monnaies. Toute une littérature technique (en particulier en anglais[18]) a vu le jour pour détailler les aspects à prendre en compte pour évaluer correctement une certaine monnaie.

Article détaillé : État de conservation numismatique.

Aux États-Unis toujours, probablement le marché numismatique le plus actif, le coin grading semble être devenu un sport national. Les pièces de monnaie des États-Unis sont cotées sur une échelle (basée sur l'échelle de Sheldon) qui ne compte pas moins de 70 niveaux et deux échelles distinctes selon qu'il s'agisse de monnaie de circulation ou de pièces pour collectionneurs. La sévérité de la notation et la complexité de l'évaluation ont conduit à des controverses et l'apparition de sociétés de grading qui fournissent les acheteurs en pièces de monnaie au grade certifié. En Europe, on se limite plus classiquement de 5 à 8 niveaux[19], mais des tendances existent (en particulier au Royaume-Uni) pour développer une échelle à 100 niveaux.

Notes

  1. Alain Rey (dir.), Dictionnaire historique de la langue française, t. 2, éd. Le Robert, Paris, 2006, p. 2410.
  2. Le mot latin vient lui-même du grec ancien νόμισμα / nómisma, « coutume, règle », puis « monnaie ayant cours » dérivé de nómos, la « loi » — Aristote, dans son Éthique à Nicomaque, précise en effet que, à la différence des autres biens, la monnaie n'est pas crée par un effet de nature mais par la loi.
  3. Cependant, les plus anciennes collections parvenues jusqu'à nous ne datent que du XVIIe siècle
  4. C'est le cas, par exemple, de la banque helvétique UBS qui propose divers services dans le domaine numismatique, y compris la vente de pièces : UBS Numismatics
  5. Un système trimétallique à existé sous l'empereur romain Auguste
  6. Le Royaume-Uni n'a passé du système £sd au système décimal qu'en 1971 (Decimal-Day), mais a conservé la Livre sterling.
  7. La contrefaçon est un risque permanent. En Suisse, les pièces de 5 francs des années 1986, 87, 89, et 91 ont dû être détruites en raison de la quantité de fausses pièces qu'on y a décelées, ce qui a logiquement fait monter leur valeur numismatique : ces pièces s'échange à une cote 5 à 6 fois supérieure à celle des années voisines. L'importance des fausses pièces de ces millésimes repose sur une modification technique de la frappe des pièces : pour des raisons économiques, il avait été procédé à une impression en creux de la tranche au lien d'une impression en relief. Si la frappe s'est révélée plus économique pour Swissmint, elle s'est également révélée beaucoup plus facile à contrefaire.
  8. Pour l'heure, ces métaux sont utilisés essentiellement dans les pièces commémoratives et les émissions pour collectionneurs.
  9. Présentation de l'Épitome du De Asse sur le site des Les Belles Lettres
  10. Coins and Coin Collecting, p. 58. Voir aussi lien externe vers la « Royal Numismatic Society ».
  11. Coins and Coin Collecting, p. 58.
  12. Le guide canadien A Charlton Standard Catalogue Canadian Coins en est quant à lui à sa 63e édition.
  13. Voir le site de United States Mint par exemple
  14. Même The Royal Mint, la Monnaie britannique après avoir longtemps subi des pertes comptables affiche des résultats positifs depuis quelques années. (Source : Rapport d'exercice de The Royal Mint, consultable sur le site web de l'institution)
  15. Les pièces de prestiges sont souvent livrées avec des certificats d'authenticité délivrés par les ateliers monétaires qui les ont fabriquées
  16. Un attrait accompagné, il est vrai, d'une forte augmentation de prix par rapport à leur valeur faciale ou à leur version de base.
  17. Les thématiques des collectionneurs sont souvent beaucoup plus spécialisées : les pièces de monnaie commémoratives de 10 euros en argent, par exemple.
  18. Aux États-Unis, le succès de The Official Red Book, le guide numismatique de référence du Dollar américains a entraîné la diffusion de nombreux guides spécialisés sous le même label.
  19. En Suisse par exemple, la notation courante des pièces en franc suisse se fait en principe sur 5 niveaux.

Bibliographie

  • (en) James Mackay, The World Encyclopedia of Coins & Coin Collecting, Lorenz Book, 2007, ISBN 0-7548-1614-1

Articles connexes

Liens externes

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