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Laki
Vue d'une partie de la fissure volcanique du Laki ouverte en 1783.Géographie Altitude 812 m Massif Hautes Terres d'Islande Coordonnées Administration Pays Islande Région Suðurland Municipalité Skaftárhreppur Géologie Âge 228 ans Roches Basalte Type Volcan rouge Activité Actif Dernière éruption 8 juin 1783 à début 1784 Code [1] 1703-01= Observatoire Nordic Volcanological Institute Géolocalisation sur la carte : Islande
modifier Le Laki (en islandais Lakagígar signifie littéralement « les cratères de Laki », au sens strict Laki est le cratère principal situé environ à mi-longueur de la fissure) est un volcan du sud de l'Islande constitué d'une fissure volcanique de 25 kilomètres de longueur égrenée de plus d'une centaine de cratères. Il s'est formé au cours d'une éruption débutée en 1783 et considérée comme la plus importante éruption lavique des temps historiques. Cette éruption eu d'importantes conséquences en Islande et dans le reste de l'Europe. Il s'agit du même système volcanique que le Grímsvötn situé plus au nord-est sous le Vatnajökull.
Sommaire
Géographie
Entre les glaciers Mýrdalsjökull et Vatnajökull, il y a une zone de fissures en direction sud-ouest à nord-est. Sur une distance de 25 km, on trouve 130 cratères qui émirent 14 milliards de m3 de lave basaltique, d'acide fluorhydrique et de dioxyde de soufre, entre 1783 et 1784, causant l'éruption volcanique la plus importante du dernier millénaire, avec des conséquences catastrophiques pour l'Islande et des très importantes perturbations météorologiques en Europe. Elle est aussi la deuxième éruption la plus importantes des temps historiques juste après celle d'Eldgjá (au Xe siècle) qui fait partie du même système volcanique.
Histoire
Déroulement de l'éruption de 1783
En mai 1783[1], une fissure de 25 kilomètres de longueur soulignée par 115 cratères[2] s'ouvrit de manière explosive d'abord à cause de l'interaction entre le plancher sous-marin et la poussée de magma basaltique. Ensuite l'éruption devint moins explosive, passant d'un mode plinien à un mode strombolien puis plus tard à un mode hawaïen avec des niveaux élevés d'effusion de lave. Cet évènement est classé de niveau 4 sur l'échelle d'explosivité volcanique mais les 8 mois d'émission de gaz sulfurique provoquèrent une des plus importantes perturbations climatiques et sociales du dernier millénaire[3].
L'éruption, aussi connue sous le nom de Skaftáreldar (« feux de la rivière Skaftá ») ou Síðueldur, produisit environ 15 km3 de lave basaltique sous la forme de coulées de soixante kilomètres de longueur qui recouvrirent une surface de 565 km2[2], et un volume total d'ejecta de 0,91 km3[1] qui recouvrirent une surface de 8 000 km2. Son indice d'explosivité volcanique est de 4[1]. On estime que des fontaines de lave ont atteint des hauteurs de 800 à 1 400 mètres. Au Royaume-Uni, l'été de 1783 est connu comme l'« été de sable » à cause des pluies de cendres[4]. Les gaz furent emportés par la convection de la colonne d'éruption à des altitudes de 15 km. Les aérosols créés provoquèrent alors un refroidissement dans tout l'hémisphère nord.
L'éruption se poursuivit jusqu'au 7 février 1784, mais la majorité de la lave fut éjectée dans les cinq premiers mois. Le volcan Grímsvötn, duquel part la fissure du Laki, était aussi en éruption de 1783 au 26 mai 1785[1]. L'épanchement de gaz, dont 8 millions de tonnes de fluor et 120 millions de tonnes de dioxyde de soufre, donna naissance à travers l'Europe à ce qui est connu sous le nom de « brouillard de Laki ». L'autre plus importante éruption des temps historiques, celle d'Eldgjá, s'était produite dans cette région (entre le Vatnajökull et le Mýrdalsjökull) au Xe siècle. La seule autre éruption répertoriée dans le Botnahraun à l'emplacement de la fissure du Laki s'était produite au Ve millénaire av. J.‑C.[1].
Conséquences en Islande
En Islande, l'éruption provoque la plus grande catastrophe naturelle de ce pays. Outre l'importante superficie noyée sous les laves, les cendres volcaniques contaminent les pâturages avec le fluor qu'elles contiennent[2]. Une importante partie du cheptel du pays meurt d'intoxication, représentant la moitié des bovins ainsi que les trois-quarts des ovins et des chevaux[2]. Cette intoxication est provoquée par fluorose dentaire ou osseuse dues aux huit millions de tonnes de fluor contenues dans les cendres[5],[4] Il s'ensuit une famine chez la population qui entraîne la mort de 9 336 personnes, soit entre 21[6] et 25 % de la population islandaise de l'époque, ainsi qu'un important exode[2].
Le prêtre Jón Steingrímsson devint célèbre avec son eldmessa (« sermon de feu »). L'ensemble des habitants de Kirkjubæjarklaustur était réuni à l'église. Au même moment, la petite ville était menacée par une coulée de lave. Mais alors qu'ils étaient à l'église, la lave s'arrêta avant d'atteindre la ville.
Conséquences en Europe
On estime que 122 millions de tonnes de dioxyde de soufre furent émis dans l'atmosphère, l'équivalent de trois fois les émissions industrielles annuelles en Europe et l'équivalent d'une éruption comme celle du Mont Pinatubo en 1991 tous les 3 jours[4]. L'émission de dioxyde de soufre coïncidant avec des conditions climatiques inhabituelles provoqua un épais brouillard sulfuré qui se répandit à travers l'Europe occidentale, provoquant des milliers de morts durant 1783 et l'hiver 1784.
L'été de 1783 était le plus chaud enregistré et une zone inhabituelle de haute pression au-dessus de l'Islande firent que les vents soufflaient vers le sud-est. Le nuage empoisonné dériva vers Bergen en Norvège puis descendit sur Prague le 17 juin, Berlin le 18 juin, Paris le 20 juin, Le Havre le 22 juin et le Royaume-Uni le 23 juin. Le brouillard était si épais que les bateaux restèrent au port et que le soleil fut décrit comme « couleur sang »[4].
L'inhalation de ces gaz sulfurés provoqua une augmentation de la mortalité. En Grande-Bretagne, les archives indiquent que probablement le taux de mortalité doubla ou tripla au Bedfordshire, Lincolnshire et sur la côte orientale. Il a été estimé que 23 000 Britanniques moururent à cause du nuage en août et septembre 1783.
Le brouillard, chauffé par le soleil d'été, causa de violents orages avec d'importantes chutes de grêlons, tuant du bétail et ce, jusqu'à l'automne. Des températures anormalement basses sont constatées, notamment par l'Américain Benjamin Franklin alors en séjour en Europe, et des couchers de soleil particulièrement rougeoyants sont observés[2]. Ces deux phénomènes sont provoqués par les cendres et les gaz volcaniques diffusés dans l'atmosphère et qui perturbent le trajet des rayons solaires dans celle-ci[2]. Cet hiver a là aussi un impact sur les récoltes qui entraîne à partir de 1784 des années de disette et de misère pour la population essentiellement paysanne de l'Europe[2]. L'hiver qui suivit fut particulièrement rude, Gilbert White de Selborne dans l'Hampshire rapporta 28 jours de gel continu. On estime que l'hiver extrême causa 8 000 décès supplémentaires au Royaume-Uni. Au printemps, l'Allemagne et l'Europe centrale connurent d'importantes inondations[4].
L'impact météorologique des éruptions de Laki se fit sentir les années suivantes avec plusieurs hivers très rigoureux en Europe. La France connut une suite de situations météorologiques extrêmes avec une moisson exceptionnelle en 1785 provoquant une chute des prix des produits agricoles et une pauvreté dans les campagnes, suivies d'épisodes de sécheresse, de mauvais hivers ou étés, dont de très violents orages de grêle en 1788 qui détruisirent les récoltes. Cela contribua de manière significative à la pauvreté et à la famine, un des facteurs importants qui provoquèrent la Révolution française en 1789. Laki fut seulement l'un des facteurs de la décennie de perturbations climatiques, comme Grímsvötn qui était en éruption de 1783 à 1785 et une étude récente des modèles d'El Niño suggère un effet inhabituellement fort d'El-Niño entre 1789 et 1793[7]. En 1815, l'énorme éruption du Tambora en Indonésie eut des conséquences climatiques similaires.
Conséquences en Amérique du Nord
En Amérique du Nord, l'hiver de 1784 fut l'un des plus longs et des plus froids enregistrés. Ce fut la plus longue période de température négative en Nouvelle-Angleterre, la plus grande accumulation de neige dans le New Jersey et la plus longue période où Chesapeake Bay fut pris dans les glaces. On put faire du patin à glace au port de Charleston, une violente tempête de neige eut lieu dans le sud du pays et le Mississippi gela à la Nouvelle-Orléans et il y eut de la glace dans le golfe du Mexique[8],[9].
Conséquences dans le reste du monde
Il existe aussi des preuves que l'éruption du Laki eut des conséquences au-delà de l'Europe. On constata une circulation affaiblie des moussons africaines et indiennes, conduisant à des anomalies de précipitations de 1 à 3 mm de moins que la normale par jour sur le Sahel avec parmi d'autres effets une baisse du débit du Nil[10].
Références
- (en) Histoire éruptive, Global Volcanism Program. Consulté le 29 mai 2011
- (fr) Jacques-Marie Bardintzeff, Connaître et découvrir les volcans, Genève, Suisse, Liber, octobre 1997, 209 p. (ISBN 2-88143-117-8), p. 153-154
- Brayshay and Grattan, 1999 ; Demarée and Ogilvie, 2001
- BBC Timewatch: "Killer Cloud", broadcast 19 January 2007
- VOLCANOLOGY: Iceland's Doomsday Scenario? -- Stone 306 (5700): 1278 -- Science
- Gunnar Karlsson (2000), Iceland's 1100 Years, p. 181
- Richard H. Grove, “Global Impact of the 1789–93 El Niño,” Nature 393 (1998), 318-319.
- Wood, C.A., 1992. "The climatic effects of the 1783 Laki eruption" in C. R. Harrington (Ed.), The Year Without a Summer? Canadian Museum of Nature, Ottawa, pp. 58– 77.
- volcanoes from Iceland : Laki
- Luke Oman, Alan Robock, Georgiy L. Stenchikov, and Thorvaldur Thordarson, "High-latitude eruptions cast shadow over the African monsoon and the flow of the Nile" in Geophysical Research Letters, Vol. 33, L18711, 2006, doi:10.1029/2006GL027665.
Liens externes
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