- La Ballade de la mer salée
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La Ballade de la mer salée 2e album de la série Corto Maltese « Ici, entre le méridien 155° et le parallèle 6° sud,
le catamaran du capitaine Raspoutine a recueilli
[…] deux jeunes gens à la dérive. »
(Planche 3, case 4)Auteur Hugo Pratt Dessin noir et blanc Personnages principaux Corto Maltese
Raspoutine
Pandora Groovesnore
Caïn Groovesnore
le MoineÉditeur Casterman Collection Les grands romans de la bande dessinée Première publication France : 1975 ISBN 2-203-33201-8 Nb. de pages 168 Prépublication Italie : Una ballata del mare salato, >mensuel Il Sergente Kirk n° 1, juillet 1967 Albums de la série Corto Maltese La Jeunesse de Corto Maltese Sous le signe du Capricorne La Ballade de la mer salée (italien : Una ballata del mare salato), première histoire de la série Corto Maltese, est une bande dessinée de Hugo Pratt publiée de juillet 1967 à février 1969 dans le mensuel italien Il Sergente Kirk. La première traduction française est parue de juillet 1973 à janvier 1974 dans France-Soir, avant de faire l'objet d'un album chez Casterman en 1975. Cet album a reçu le prix de la meilleure œuvre réaliste étrangère lors du Festival d'Angoulême 1976.
Ouvrage d'une « importance historique [qui] n'est plus à démontrer », c'est pour Erwin Dejasse « le premier véritable roman en bande dessinée[1] ». Au-delà de ses qualités artistiques, son succès a prouvé aux éditeurs la rentabilité économique d'album dépassant le standard de 44 ou 46 planches. C'est à ce titre l'une des bandes dessinées ayant conduit au lancement d’(A SUIVRE), à la fin des années 1970[2].
Le récit se déroule en Mélanésie de novembre 1913 à janvier 1915, ce qui en fait dans la chronologie interne de l'œuvre la deuxième aventure, après La Jeunesse de Corto Maltese. Il met en scène l'errance d'île en île de Raspoutine, Corto Maltese et des cousins Groovesnore, sur fond de piraterie, de déclenchement de la première guerre mondiale et d'étranges mœurs indigènes.
Sommaire
Histoire de l'œuvre
Inspirations
Hugo Pratt a revendiqué quelques films qui l’ont plus particulièrement inspiré[3] : Tabou de Friedrich Wilhelm Murnau (1931), Les Révoltés du Bounty de Frank Lloyd (avec Clark Gable, 1935), Le Réveil de la sorcière rouge d'Edward Ludwig dont les premières images montre un homme livré à l’océan, ligoté les bras en croix, sur un radeau (avec John Wayne, 1948), Le Roi des îles de Byron Haskin (avec Burt Lancaster, 1954), Lord Jim de Richard Brooks (avec Peter O'Toole, 1965).
La Ballade de la mer salée rappelle également par certains moments divers écrivains qui ont situés leurs romans dans des îles du Pacifique, comme Robert Louis Stevenson, Joseph Conrad ou Herman Melville[2].
Naissance d'un héros
Hugo Pratt a quarante ans lorsqu'en juin 1967, il fait la connaissance de Florenzo Ivaldi à Gênes. Celui-ci est sur le point de faire paraître une nouvelle revue de bande dessinée, Il Sergente Kirk. Le premier numéro paraît en juillet avec les neuf premières planches de Una ballata del mare salato, écrites et dessinées par Pratt. Dans la grande tradition du roman d'aventure, la bande dessinée est précédée d'un lettre censée établir son authenticité[4]. Datée du 16 juin 1965 et expédiée du Chili, celle-ci est adressée à son ami l’éditeur Florenzo Ivaldi par Obregan Carrenza, présenté comme le neveu de Caïn Groovesnore, l'un des personnages de l'histoire. Carrenza y écrit qu’il a bien remis les manuscrits de son oncle à monsieur Pratt.
Lorsque le mot fin s'inscrit dans le numéro 20 de février 1969, Hugo Pratt est loin de se douter qu'il vient de donner vie à un personnage qui, de secondaire dans cette aventure, allait devenir l'un des héros les plus remarquables du neuvième art. En 1970, Una ballata del mare salato est republiée dans le Corriere dei Piccoli, principale publication enfantine d'Italie, avant de paraître en album chez l’éditeur Arnoldo Mondadori en janvier 1972, sous le titre : La Ballata del mare salato.
Personnages
- Raspoutine : Pirate sillonnant le Pacifique sud à bord d’un catamaran des îles Fidji, c'est un marin impitoyable à la gâchette facile qui travaille pour le compte du mystérieux « Moine ». Ce jour-là, au large des îles mélanésiennes, il recueille deux jeunes naufragés dans une chaloupe. Ils sont issus d’une riche et importante famille britannique d'Australie.
- Pandora et Caïn Groovesnore : Ils sont cousins. Pandora est la fille de Taddée Groovesnore, lord britannique et grand armateur du port de Sydney. Caïn est le fils d'Elie Groovesnore. Rinald Groovesnore, le vice-amiral qui commande la flotte de la Royal Navy, est leur oncle. Il avaient un autre oncle, Thomas, mais ne l'ont pas connu. Il serait mort dans l'incendie de sa maison le jour du mariage de son frère Taddée. Raspoutine sait qu'ils sont issus d'une riche famille et espère en tirer une belle rançon. Ce même jour, son équipage repère au loin une sorte de radeau auquel un homme est attaché. C’est une vieille connaissance de Raspoutine, Corto Maltese.
- Corto Maltese : Autre pirate membre de l'organisation secrète du « Moine », il connaît parfaitement les mers du Sud. Pour une histoire de femme, l'équipage de sa goélette s'est retourné contre lui et il se retrouve au début de l'histoire à dériver, ligoté sur un radeau de fortune, sous un soleil implacable. Raspoutine le récupère à son bord. Justement les deux pirates attendaient un cargo charbonnier hollandais pour le piller. Bientôt le navire est repéré, arraisonné et saisi. Malgré la réprobation de Corto, Raspoutine fait abattre tous les membres de l'équipage. Seuls les Maoris qui s'occupent des machines sont épargnés. Corto fait ce qu'il peut pour gagner sa part du magot et préserver la vie des enfants Groovesnore. Raspoutine et Corto vont ensuite négocier leur prise avec le commandant de la base allemande de Kaiserine.
- Christian Slütter : Lieutenant de vaisseau de la Kaiserliche Marine, la marine impériale allemande, il reçoit contre son gré l'ordre de ses supérieurs de prendre les commandes d'un sous-marin pour se mettre à la disposition du « Moine ». Pour échapper à la curiosité des Allemands, Corto part avec le catamaran et les deux adolescents vers un lieu de rendez-vous fixé par Raspoutine, afin de conserver toutes les chances d'en tirer une rançon. Mais l'océan se déchaîne et un raz-de-marée les emporte. Échoué sur une plage, Caïn n'est pas le seul rescapé, un jeune Maori se dresse devant lui.
- Tarao : C’est l’un des Maori de Nouvelle-Zélande épargné par Raspoutine lors de la capture du cargo. Marin expérimenté, il sait tirer parti des croyances et des légendes des peuples du Pacifique sud. Tous deux ne tardent pas à être découverts et enlevés par des Papous cannibales. Dissimulé dans la jungle, Corto a tout vu et rejoint Pandora.
- Cranio : Marin des îles Fidji, maître d'équipage de Raspoutine. Il a la confiance du Moine. Il se désole de voir son peuple impliqué dans les guerres des blancs et aspire à ce que les Mélanésiens s'unissent enfin. Rescapé lui aussi du naufrage, il va tout mettre en œuvre pour les tirer de ce guêpier et s'enfuir loin de ces rivages inhospitaliers à bord d'une pirogue. Repérés en mer, ils embarquent dans le sous-marin commandé par le lieutenant Slütter avec Raspoutine à son bord. Slütter se pose des questions sur la présence des jeunes gens. Il les interroge et les assure de sa protection. Le sous-marin se dirige droit vers une île qui ne figure sur aucune carte maritime : l'Escondida (« La cachée »).
- Le Moine : Maître de tous les pirates, son visage est toujours dissimulé, comme pour cacher quelque secret. Il dirige depuis son île, l'Escondida, une organisation qui écume les mers du sud. Il s'est mis au service de l'État allemand. À leur arrivée, il leur apprend que le 4 août 1914 le Royaume Uni a déclaré la guerre à l'Allemagne. Il demande à Slütter de se tenir prêt à partir avec lui. Raspoutine lui apprend la présence des deux jeunes captifs. Le Moine interroge alors Caïn et lui pose des questions sur sa famille. Pendant l’absence du Moine, Tarao prévient Caïn et Pandora qu’il a préparé une pirogue pour fuir. Caïn veut rester sur l'île avec Corto et laisse Pandora et Tarao tenter leur chance pour prévenir l’Amirauté dès la prochaine île atteinte. Quelques jours après, C'est le même Tarao qui indique la route de l'Escondida au vice-amiral Rinald Groovesnore, à la tête d'une flottille de contre-torpilleurs. Bientôt, les Britanniques débarquent. C'est le « sauve-qui-peut ». La justice expéditive des temps de guerre fait son œuvre. Le chantage aussi : pour sauver la vie de Raspoutine, Corto Maltese, Raspoutine et Tarao quittent l'Escondida à bord d'un voilier et font route vers Pitcairn, l'île des mutinés de la Bounty. Nous sommes le 19 janvier 1915.
Publications en italien
Revues
- Una ballata del mare salato, dans Sergente Kirk no 1 (juillet 1967) à 20 (février 1969). L'histoire est absente des no 2 et 3 d'août et septembre 1967.
- Una ballata del mare salato, dans le Corriere dei piccoli, 1972.
Albums
- La Ballata del mare salato, Arnoldo Mondadori, 1972.
Publications en français
Revues
- La Ballade de la mer salée, en feuilleton dans France-Soir du le 3 juillet 1973 au 16 janvier 1974.
- La Ballade sur la mer salée (sic), dans Phenix. Revue internationale de la bande dessinée no 38 (juin 1974) à 40. Le récit est laissé inachevé par l'arrêt de la revue.
Albums
Noir et blanc broché
- La Ballade de la mer salée, Casterman, coll. « Les grands romans de la bande dessinée », 1975 (ISBN 2-203-33201-8). Album broché, prix de la meilleure œuvre réaliste étrangère au Festival d'Angoulême 1976.
- La Ballade de la mer salée, éd. Casterman, 2001. Nouvelle couverture. (ISBN 978-2-203-02460-1)
- La Ballade de la mer salée, Casterman, 2010. Nouvelle couverture.
Petit format broché noir et blanc
- La Ballade de la mer salée, J’ai lu, coll. « J’ai lu BD », 1986. Contient la lettre du neveu de Caïn Groovesnore[5]. (ISBN 2-277-33011-6)
- La Ballade de la mer salée), Casterman, coll. « BDDT », 2010. Contient la lettre du neveu de Caïn Groovesnore[5]. (ISBN 978-2-2030-3507-2)
Couleur
- La Ballade de la mer salée, Casterman, 1989. Contient la lettre du neveu de Caïn Groovesnore[5] et des documents et aquarelles de Hugo Pratt. Nouvelle jaquette en 1991.
Noir et blanc relié
- La Ballade de la mer salée, Casterman, 2007. Beau livre au format 32x41, à la couverture toilée, contenant un feuillet à part reproduisant la lettre du neveu de Caïn Groovesnore[5], préfacé et postfacé par Gianni Brunoro. Fidèle au format des planches originales et au rendu du dessin à l’encre de Chine, cet ouvrage est paru le 2 juillet 2007 pour commémorer les 40 ans de la toute première apparition de Corto Maltese en Italie, le 10 juillet 1967 dans la revue Sergent Kirk, ainsi que les 120 ans de la naissance fictive du personnage, le 10 juillet 1887, à Malte. (ISBN 978-2-203-00579-2)
Petit format broché couleurs
- La Ballade de la mer salée, Casterman, coll. « Corto » n°2, 2006.
Adaptations
Roman
- Hugo Pratt (trad. Fanchita Gonzalez Batlle), Corto Maltese, Paris : Denoël, coll. « Empreinte », 1996, 279 p. (ISBN 2-207-24172-6)
- Hugo Pratt (trad. Fanchita Gonzalez Batlle), Corto Maltese, format poche, Paris : Gallimard, coll. « Folio » no 3032, 1997, 300 p. (ISBN 2-07-040399-8)
Cinéma
Depuis le milieu des années soixante-dix, il a été envisagé de filmer La Ballade de la mer salée avec des acteurs. Après avoir d’abord pensé à Alain Delon, puis à David Bowie, le projet fut remis régulièrement en question pendant une quinzaine d’années sans se concrétiser[6]. À ce jour, seul un long métrage d'animation a été réalisé :
- La Ballade de la mer salée, scénario de Jean Pêcheux, réalisation de Richard Danto et Liam Saury, avec les voix de Richard Berry (Corto Maltese), Patrick Bouchitey (Raspoutine), Barbara Schulz (Pandora). Diffusé à la télévision sur Canal+ en 2003 et sorti en DVD aux Studio Canal la même année.
Théâtre
- Una ballata del mare salato, scénario de Giancarlo Marinelli, créé dans une mise en scène de Damiano Michieletto avec Titino Carrara dans le rôle de Corto et la Compagnia la Piccionaia i Carrara. Joué au Teatro Stabile di Innovazione de Venise en juillet 2003.
Notes et références
- Dejasse (2003), p.14
- Dejasse (2004), p. 15
- Vincenzo Mollina, Pratt, éd. Jacky Goupil, paris, 1984.
- 1987, dans la collection de poche « J'ai Lu BD ». Cette lettre n’a été portée à la connaissance des lecteurs français qu’à partir de
- 1967. Lettre qui est à l'origine du récit, comme elle le fut dans le n° 1 de la revue italienne, Sergent Kirk en
- Christophe Lambert qui tienne le rôle de Corto si le film devait se faire. Hugo Pratt avait fini par exprimer le souhait que ce soit
Documentation
- Erwin Dejasse, « La Ballade de la mer salée », dans Thierry Groensteen (dir.), Primé à Angoulême. 30 ans de bandes dessinées à travers le palmarès du festival, Angoulême : Éditions de l'an 2, 2003.
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